Projet Correspondance du Père Girard (1789-1850)

Description du projet

La correspondance du Père Girard

Publiée lors du centenaire de sa disparition (1948-1953), la première édition des œuvres du Père Girard s’est focalisée sur ses souvenirs autobiographiques, ses projets et méthodes d’éducation, ses sermons ainsi que ses discours de clôture prononcés en fin d’année scolaire. Estimée à quelque 800 documents, sa correspondance constitue un corpus non moins riche qui n'a pas encore été exhumé; elle s’avère particulièrement précieuse pour explorer ses réseaux intellectuels et mieux appréhender les échanges culturels qui s'opèrent dans son sillage. Les vastes correspondances du Père Girard avec un nombre important de Sociétés d’éducation, d’administrations publiques, de pédagogues, d’instituteurs et de particuliers, permettent de mieux dessiner la circulation des savoirs scolaires durant le « siècle pédagogique » que fut le XIXe siècle. En dehors des objets éducatifs, le corpus offre un nouvel éclairage sur l’état du catholicisme en Suisse à la fin du siècle des Lumières. Les échanges épistolaires du Père Girard le relient aux principales autorités ecclésiastiques influentes dans le pays – les évêques de Lausanne, l’évêché de Constance, les nonces de Lucerne et la curie romaine. En outre, de par ses fonctions de gardien du couvent fribourgeois et de commissaire des cordeliers de la Suisse, sa correspondance constitue une porte d’entrée privilégiée pour étudier le milieu conventuel durant cette même période.

Le Père Grégoire Girard (1765-1850)

Fils d’une famille de marchands, Grégoire Girard – de son nom de baptême Jean-Baptiste-Melchior-Gaspard-Balthasar – naît le 17 décembre 1765 en ville de Fribourg. Après l’accomplissement de ses humanités au Collège Saint-Michel, il entre en 1781 dans l’ordre des frères mineurs conventuels, dit des cordeliers, et réalise l’essentiel de ses études de théologie à Wurtzbourg, où il est fasciné par l’action sociale du prince-évêque éclairé Ludwig von Erthal.

De retour à Fribourg en 1789, Girard exerce dans son couvent comme prédicateur et professeur de philosophie. L’avènement de la République helvétique donne une nouvelle impulsion à sa carrière : en août 1798, il transmet au ministre de l’éducation Philipp-Albert Stapfer un Projet d’éducation publique pour la République Helvétique, qui lui permet de se faire avantageusement connaître des milieux pédagogiques de Suisse. Après avoir été appelé à travailler au ministère de Stapfer, il est nommé en juin 1799 curé de Berne et occupe cette fonction jusqu’en été 1804. Sa présence à la tête de l’Eglise bernoise est marquée par une intense activité de prédication ainsi que par l’introduction d’une liturgie éclairée inspirée des livres salzbourgeois.

Le 20 septembre 1804, le Conseil communal de Fribourg confie la direction des écoles françaises aux cordeliers, puis spécifiquement au Père Girard qui est nommé en 1805 préfet des écoles. Tout en donnant les leçons aux plus jeunes enfants, il élabore plusieurs livres de lecture et de calcul ainsi qu’une Grammaire des campagnes à l’usage des écoles rurales du canton de Fribourg (1821), par laquelle il cherche à conduire les enfants du patois à la langue française à travers une série d’exercices de traduction et de contre-traduction. En 1809, il fait partie de la commission chargée d’examiner l’Institut de Johann Heinrich Pestalozzi à Yverdon et participe de manière déterminante à la rédaction du rapport qui met en doute la transposition du modèle pestalozzien aux réalités d’une école populaire.

Au commencement de l’année 1816, l’école du Père Girard connaît un revirement important avec l’expérimentation d’une méthode inspirée du monitorial system de Bell et Lancaster. L’enseignement mutuel que le cordelier introduit en ville puis progressivement aussi dans les campagnes se caractérise par le partage des activités d’enseignement entre l’instituteur et les « moniteurs », nom donné aux élèves plus avancés qui instruisent leurs camarades dans une discipline particulière au sein de laquelle ils peuvent avancer à leur rythme, degré par degré et non en fonction d’un calendrier annuel. L’efficacité de la méthode ne fait pourtant pas l’unanimité : soutenu par les libéraux, l’enseignement mutuel est combattu par les conservateurs et la faction ultramontaine du clergé, qui s’unissent pour en obtenir l’interdiction du Grand Conseil en 1823.

Quittant Fribourg alors que sa méthode qualifiée de « protestante » par ses détracteurs essaime en Suisse et à l’étranger, le Père Girard rejoint en 1824 le couvent de Lucerne et enseigne la philosophie au Collège de la ville. Rentré à Fribourg en 1834, il se consacre à la rédaction de l’ouvrage De l’enseignement régulier de la langue maternelle (1844), qui sera récompensé par le prix Montyon de l’Académie française.

État de la recherche et étapes du projet

Un premier travail d’inventorisation a permis d’identifier près de 600 documents issus de la correspondance du Père Girard, soit environ 25% de lettres envoyées et 75% de lettres reçues. Ces textes sont déposés dans des archives et bibliothèques à Fribourg (Bibliothèque cantonale et universitaire, Couvent des Cordeliers, Archives de la Ville, de l’État et du diocèse), mais aussi ailleurs en Suisse, en Allemagne et au Vatican. Une prospection plus large dans les archives devrait nous permettre de découvrir des dizaines de lettres inédites, voire davantage encore.

La correspondance couvre un intervalle de 61 années (1789-1850), avec une période de production plus importante depuis la République helvétique (1798-1803). Plus de la moitié des lettres (55%) sont rédigées en français, contre 24% en allemand, 19% en latin et 2% en italien. Un inventaire des lettres éditées et à éditer sera mis prochainement à disposition du lecteur.

Le premier jalon du projet consiste à éditer les lettres rédigées entre 1789 et 1804, soit depuis sa jeunesse jusqu’à la fin de sa période bernoise. Ces quelque 60 documents seront mis en ligne dans le courant de l’année 2020. Le projet se poursuivra de façon chronologique, en s’intéressant successivement à sa période à la tête de l’école fribourgeoise (1804-1823), au couvent de Lucerne (1824-1834), ainsi qu’à ses dernières années passées à Fribourg (1834-1850). La correspondance conventuelle, rédigée essentiellement en latin, fera l’objet d’un projet ultérieur.

Ligne éditoriale

L’édition proposée ici est une transcription diplomatique, complétée par quelques adaptations éditoriales comme la séparation des mots agglutinés, le rétablissement des abréviations non courantes et la modernisation des noms de personnes et de lieux. Les mots ou les passages écrits dans une langue étrangère au document ainsi que les titres d’ouvrages ont été mis en italique. La ponctuation, l’accentuation et l’emploi des majuscules ont été respectés et, en cas de doute, nous avons opté pour la graphie actuelle.

Les apostilles ont été mentionnées systématiquement dans la note principale. Nous retrouvons dans la fiche biographie la numérisation du document (lorsque nous en possédons les droits), ses dimensions ainsi que diverses autres informations relatives à la transcription.

L’édition se focalise pour l’heure exclusivement sur les lettres françaises. La ligne éditoriale pour les textes en allemand et en latin sera précisée ultérieurement.

Remerciements

Le projet est né en automne 2019 sous l’impulsion du Cercle d’études Grégoire Girard (CE2G). Il est dirigé dans sa phase de lancement par Damien Savoy.

Le CE2G tient à remercier l’ensemble des acteurs qui ont permis la construction du projet et en particulier: la Fondation du Père Girard pour son soutien financier, la Bibliothèque cantonale et universitaire de Fribourg et M. Romain Jurot pour la numérisation de plus de 350 documents, le Couvent des Cordeliers de Fribourg et Mme Petra Zimmer pour la facilitation de la numérisation de quelque 190 documents, l’Évêché de Fribourg et Mme Nathalie Dupré pour la numérisation de 8 lettres, enfin Mme Béatrice Lovis et M. Bela Kapossy pour l’accueil du projet sur la plateforme Lumières.Lausanne.

Citer comme

Lumières.Lausanne, projet "Correspondance du Père Girard (1789-1850)", dirigé par Damien Savoy, Université de Lausanne, url: https://lumieres.unil.ch/projets/girard, version du 9 avril 2021.

Références bibliographiques

Transcriptions

Littérature primaire

Littérature secondaire