Transcription

Mirabeau, Victor de Riqueti, marquis de, Lettre à Frédéric de Sacconay, Mirabeau, 01 novembre 1737

de mirabeau ce 1er 9bre 1737

je serois bien faché mon cher frédéric que
linaction des genevois occasionnat de la lenteur
dans notre commerce, lindifférence pour les nouvelles
va chex moy jusques au défaut, celles la seules
mintéressent par la part que vous pouves y avoir,
peu de gens sans affaires ont autant de commerces
de lètres que moy, et de toutes celles que je reçois
pas une ne me dit des nouvelles, du temps de mon
père qui les aimoit, jetois obligé den user autrement
et cest peut etre la ce qui m'en a dègouté, pour vous
saconay vous etes de mes amis le plus cher, il ny
a pas méme de comparaison a faire, mes sentimens
pour vous seul meritent le nom d'amitié, tout le
reste nest que liayson, plus je vais et plus je
trouve des raisons de m'aplaudir et de me confirmer
dans cette amitié, quelle diffèrence de lintercadence
perpétuelle de mes lettres, avec la sagesse continuelle
qui regne dans les votres, quand je dis sagesse cest
a dire raison, dailleurs je vous dois tout et a
<1v> votre aimable et respectable famille, quelle
diffèrence toutes ces raisons ne doivent elles
pas mettre dans notre amitie, je nay de titre
pour obtenir la votre que mes sentiments pour
vous

du temps de mr de louvois, genéve seroit france
le ministère présent ne se conduit pas par les mèmes
principes, dites moy seroit il plus difficile d'avoir cela
qu'il l'etoit de se saisir en pleine paix de casal
de luxembourg et de strasbourg, et de batir uningue.

je ne vous ay point dit que je voulusse mériter les
graces sans les demander, jay avancé seulement que
dans la concurrence de ces deux choses je préférerois
le premier au dernier, je demanderay quand il ne
sera question que de cela,

je ne crois pas que l'affaire de corse ait lieu, je fis méme un
gros pary sur cela, desque je vis la lettre du ministre
adressée au colonel du premier des régiments qui
doivent passer, ou il luy détailloit les desseins du roy
en donnant des ordres, cette façon est peu usitée
avec des officiers particuliers, et marque un dessein
débruiter, l'on ny prit pas garde et lon fut fort
<2r> surpris de me voir faire un pary avec un maréschal
de camp, cepandant tout se dispose a me faire gagner
je ne crois pas méme que dans cette saison cela soit
possible enfin nous verrons

vous etes bien heureux d'etre dans un voisinage
qui donnera le temps et les occasions de connoitre
ce que vous valés, cest pour le coup que l'on peut
vous apliquer le proverbe de (vous vous plaignès
de ce que la mariée est trop belle) allés mon cher
vous étes fait pour jouir d'un bonheur parfait croyés
en ma prediction. pour moy je suis de touts les cotés
persecuté sur ce chapitre, mais neant, jay mille projets
qui ne vont pas avec une femme, dailleurs le fond
de jalousie que vous m'aves connu a augmenté a
un point si inconcevable, que ce seroit entrer en enfer
dés ce monde, cest quelque chose de miraculeux que
le fond de soupscons que je porte dans la téte et
la façon dont ils sy arrangent

de pile est chex luy un original, jay eté depuis
peu a marseille, ville ou ma famille est sans contredit
plus respecteé que la sienne et avec raison dea, ou il
a une charge que mon pére n'a pas voulu, ne voulant
pas aller sur les brisées du sien qui etoit neveu
de mr de fourville grand amy de mon père et qui
laissoit la charge vacante a laquelle mr de vandome
fit nommer mon père, la ville payant pour luy les
cinquante mille ècus qu'il falloit rembourser a jusqu'à la fin de la ligne dommage
de pile, toutes ces choses et notre ancienne conjusqu'à la fin de la ligne dommage
devoit je pense nous lier, il ma a la vérité ejusqu'à la fin de la ligne dommage
mais ne m'a pas offert un verre d'eau, dans unjusqu'à la fin de la ligne dommage
<2v> ou tout le monde etant en bastide, il devoit me penser
assès isolé. a la vérité, je le luy rendis, car la ville
mayant logé convenablement, javois amené des gens
pour faire bonne chère, et javois d'autant plus de monde
qu'outre la bourgeoisie javois nombre d'officiers avec
lesquels il nest jamais bien, et que je menois souvent
souper a sa barbe luy disant pour vous de pile vous
tenés table aparammant ainsy je ne vous prie pas

adieu mon cher saconay aimés moy bien assurés de mes
respects Madame votre mére et mesdemoiselles vos
soeurs et soyès persuadé de mon amitié sincère

mirabeau

Etendue
intégrale
Citer comme
Mirabeau, Victor de Riqueti, marquis de, Lettre à Frédéric de Sacconay, Mirabeau, 01 novembre 1737, Collection privée. Selon la transcription établie par Lumières.Lausanne (Université de Lausanne), url: http://lumieres.unil.ch/fiches/trans/39/, version du 27.05.2013.
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