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Lettre à Frédéric de Sacconay, Besançon, juin 1736
de besançon ce juin 1736
je reçois ta lettre du 31 du mois passé mon cher
saconay, ou pour mieux dire jy réponds aprésent
car tu est trop de mes amis pour que je veuille
paroitre auprés de toy autrement que je ne suis,
je suis arrivé icy avec valet de chambre deux laquais
un coureur, chaise de poste le tout magnifique, charge
d'habits dont un de 4500 lb (je texpliqueray un jour
cet énigme) tout cela m'a si fort fait courir dans une
garnison, joignés y l'air de paris, que je ne scavois ou
me tourner, le fond est toujours le méme mon cher
mais hors de cela qui ne souvre qua toy je suis un autre
nons montagnes ne sont pas plus escarpées et la saison
est moins rude que quand nous nous joignimes, ainsi
je ny vois pas d'impossibilité au contraire mais pour
rendre les choses égales cest a toy a marcher il est
vray que tu as de ton coté les dames, eh quelles dames
je me précipiterois du haut du ciel pour avoir lhonneur
de les voir, mais jay du mien le devoir tu en conois
si bien létendue que je ne doute pas que ctette
<1v> objection ne te ferme la bouche ainsi marchés, ta
soeur se marie selon son mérite, personne comme
tu peus croire apres celuy qui laura, nen est plus
aise que moy, mais parbleu pour un compliment,
tu me connois je suis le plus mauvais complimenteur
de france
parle moy de ta conquete et je te parleray dune 1 caractère biffure
vingtaine des deshonneurs complets dont jauray eté
ouvrier dans ce paÿs cy, mais quand nous nous verrons
nous parlerons raison adieu mon adorable je taime
comme tu le mérite
mirabeau
mes tres humbles respects a vos dames
