Transcription

Barbeyrac, Jean, Lettre à Jean Alphonse Turrettini, Lausanne, 09 février 1716

A Lausanne ce 9 fevrier 1716.

J’ai reçû, Monsieur, le Covarruvias, que le garçon de Fabri & Barrillot
m’a apporté. J’aurai soin de le bien conserver, & de vous le renvoyer en
son tems sain & sauf. Apparemment vous n’avez pas trouvé le
Vasquez, Contra. Illustres &c. que vous me faisiez aussi esperer.

Je n’ai aucune nouvelle literaire depuis bien long tems. On m’a
seulement écrit de Berlin, que le N.T. de Mrs Lenfant & Beausobre,
que je croyois sous la presse, n’y étoit pas encore, & qu’on attendoit le
retour de Humbert, qui doit l’imprimer. Je ne sai où il demeure tant.

Il y a quelque tems que l’on écrivit de Berne à nôtre
Baillif, pour s’informer amiablement des faits que la Classe de Morges
avoit avancez au sujet de la signature du Consensus, & des progrez de
l’Arminianisme. Je répondis, au nom de l’Académie; & en montrant
la fausseté de ce qu’on avoit avancé, que quelques Impositionnaires, recus
sous mon Rectorat, n’avoient point signé le
Consensus; je justifiai la
signature que j’avois reçüe,
Quatenus Script. Sacrae consentit: 1.ò. Parce
qu’il y en avoit des exemples dans le Livre des Souscriptions, dès l’an 1682. 2.ò.
Parce que cette restriction se trouve formellement à la fin de la Préface de la
Confession Helvétique
: Meliora ex verbo Dei docentibus, non sine gratiarum
actione & cedere
, & obsequi parati sumus. 3.ò. Parce que cette restriction
doit être renfermé dans toute signature de quelque Ecrit Humain que ce soit,
à moins qu’on ne veuille renoncer aux principes des Protestans. 4.ò. Parce que,
dans le
Consensus il y a un article, qui certainement n’est pas de foi, mais
d’Histoire & de Grammaire, savoir, celui de l’antiquité des Points. J’ajoûtai, que
dans toutes les Classes du Païs de Vaud il n’y avoit peut être pas dix per=
sonnes qui eussent jamais lû, ni qui fussent capables d’examiner comme il faut,
les Ouvrages des Savans sur cette matiére. À l’égard des progrez de l’Ar=
minianisme, j’envoyai des extraits des mesures qu’on avoit prises pour empêcher,
autant qu’il se pouvoit raisonnablement, que les Jeunes Etudians ne se jettassent
d’abord dans la lecture de ces sortes de Livres, avant que de savoir les sentimens
reçûs; & entr’autres je marquai ce qu l’on avoit fait écrire à Mr Pictet,
<1v> sur les avis qu’il avoit donnez, mais dont il n’avoit pû alleguer aucune
preuve. Je finis pourtant, en disant, que nous n’étions pas dans la pensée qu’on
dût imiter les Catholiques Romains, dans le soin qu’ils prennent d’empêcher qu’on
ne lise jamais les Livres des Adversaires; & je prouvai même par la Théologie
de Berman
, qu’un Théologien & un Prédicateur sont indispensablement obligez
de lire ces sortes de Livres, pour pouvoir les refuser &c. Nous n’avons point
entendu parler de rien depuis cela.

Je vous souhaitte, Monsieur, une bonne santé, & suis à mon
ordinaire avec les sentimens les plus respectueux Vôtre très-humble
& très-obeïssant serviteur

Barbeyrac


Enveloppe

A Monsieur

Monsieur Turretin, Pasteur & Professeur
en Théologie & en Hist: Ecclésiastique

Genéve


Etendue
intégrale
Citer comme
Barbeyrac, Jean, Lettre à Jean Alphonse Turrettini, Lausanne, 09 février 1716, cote BGE Ms. fr. 484, ff. 196-197. Selon la transcription établie par Lumières.Lausanne (Université de Lausanne), url: http://lumieres.unil.ch/fiches/trans/969/, version du 10.02.2024.
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