Transcription

Mirabeau, Victor de Riqueti, marquis de, Lettre à Frédéric de Sacconay, Engelsberg, 09 août 1742

du camp d'hengelsperg ce 9e aoust 1742

je sens comme je le dois mon cher frillon, car le nom de fréderic, est
trop deshonorè pour que je m'en serve te le donne, les témoignages de ton amitié
dont je n'ay jamais douté, jay pensé mille fois a toy toujours tenté
de t'écrire, et toujours repoussant cette tentation, que luy mander
me disois je, établir un commerce d'inquiétudes, je connois celles
que l'on a psur notre conte par les lettres de touts les gens qui nous aiment
et jay bien reconnu depuis 4 mois mes vèritables amis, mais ce n'est
pas la peine, il est en sureté je le retrouveray toujours, ce que
je pourrois mander m'ennuye a force de le répéter, et je ne veux
pas m'ennuyer en ècrivant a mon amy, ècrire de l'armee sans parler
nouvelles, position &c ce seroit un monstre, voila mon cher amy
ce que je pensois, stapandant le temps s'écoule comme dit l'autre
et je te suis obligé d'autant de ton attention a me reveiller

nous avons passé par toutes les étamines depuis que je ne t'ay ècrit
marche sans fin, peste, allarmes continuelles, pour les dangers, il
ny en a eu icy qu'en une occasion ou je me trouvay commandè pcar
jusques a ce que le roy m'oblige a prendre plus de part a ses affaires
en me mettant a ma place chose pour laquelle il ne s'empresse pas
je ne m'empresseray non plus qu'a faire mon devoir et rien au dela
tu as seu par les gazettes et nouvelles les succès de cette guerre
nous sommes icy en panne de puis près de trois mois entre les
mains des plus incapables gens du monde; il nous est enfin arrivé hyer
un nouveau gènèral, tout autrement fait pour ce métier cy cest le
<1v> comte de saxe a ce qui a qui cette guerre a fait une tout autre
rèputation, il nous a annoncé qu'il alloit agguerrir ses troupes
que la conduitte timide des autres avoit toujours tenue dans un camp
retranché et retranché dieu scait comment. nous verrons, quand a
l'armèe de bohème elle est toujours soux prague comme investie
ayant le marèschal de broglie a sa tète, je contois servir soux luy
et par consèquent ètre dispensé de faire un mètier qui me va si peu
depuis le temps ou jy rampe, point du tout cest que contant toujours
pouvoir joindre cette armèe, il my a fait arrèter demeurer, jusques
a ce que les passages ayant etè fermès, je demeure icy capitaine
d'infanterie, et puis cest tout

syl etoit permis de faire des projets dans la situation ou nous sommes
il ny en auroit pas un plus flatteur pour moy, que celuy daller
a bursinel, mon cher amy, y faire ma cour a Me et Melles de saconay
et puis t'emmener achever de voir la plus belle partie de la france
que tu as laissé sur ta droite en descendant le rhone, voyage que
je te ferois faire agréablement et a peu de frais, mais ne nous
remplissons point le cerveau de chateaux en espagne, dont la chute
nous facheroit ensuitte, si je reviens en liberté je t'en avertiray a
l'avance, je t'en donne parole, adieu le dèdale est bien embrouillé
voyons venir le temps aime moy toujours assure de mes respects
tout ce qui t'apartient remercie les de leur amitié pour moy
et conte sur un amy qui le sera le tien tant qu'il respirera

Etendue
intégrale
Citer comme
Mirabeau, Victor de Riqueti, marquis de, Lettre à Frédéric de Sacconay, Engelsberg, 09 août 1742, Collection privée. Selon la transcription établie par Lumières.Lausanne (Université de Lausanne), url: https://lumieres.unil.ch/fiches/trans/92/, version du 29.05.2013.
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