Transcription

Chavannes, Alexandre César, Anthropologie ou Science générale de l'homme: Mythologie, Tome I, [Lausanne], [1767]-[1800]

Partie

De l’origine de la Mytologie et du
Paganisme, et de l’explication
des fables.

Chapitre 1.
Que Le Theisme a été la premiere reli=
gion des de tous les anciens peuples; comme l’idée d’une
Divinite Supreme a été et est encor repandue
ches toutes les nations policées et sauvages.

20 lignes biffure

Les anciens peuples
orientaux qui echap=
perent aux influen=
ces de la barbarie
reunirent sans doute
les diverses branches
dindustrie liees a
la vie pastorale et
l’agriculture.

L’art d'ob=
server le cours des astres pour 1 mot biffure
3 mots biffure
 regler la succession des
travaux, les elemens de l’Arithmetique
et de la Geometrie, dont l’usage est indis=
pensable dans l’Astronomie et le partage
des terres.

<1v> Sans doute quils joignirent a cela 2 mots biffure
3 lignes biffure
saison,
une sorte sorte d’histoire naturelle des
objets et des metamorphoses que la nature des objets qu'elle etaloit successivement
aux leurs yeux, des observateurs, et ce qu’on appel=
le l’art du prognostic, inseparable de
l’observation du Ciel, des temps, du cours
des vents, des meteores, de l'arrivée et du
depart des oiseaux de passage qui changent
de climat suivant les saison.
&c. en general
de tous ces phenomenes dont les effets suscep=
tibles de prediction peuvent servir au La=
boureur de guide pour la succession de
ses travaux: genre de divination de la
plus grande utilité, et dont les premiers sages
firent l’objet de leur curiosité et deleurs
instructions. les plus importantes.

Il etoit impossible que encorque ces pre=
miers peuples frappés du spectacle de cet
Univers, de la structure admirable de tant
d’Etres divers, de l’organisation merveilleu
=
se des plantes et des animaux, de tant
de traits eclatans de Sagesse, de puissance
et de bonté 2 mots biffure quil offroit de toutes parts
a leurs yeux, instruits d’ailleurs par une
traddition toute encor recente de la creation
de cette terre, et de l’histoire memorable
du Deluge, dont Noë fut miraculeuse=
ment preservé, il est impossible, disje que'ils
ces peuples n’aient été intimement 1 mot biffurepenetres
4 lignes biffure
d’une idée qui a
fait impression sur
tous les peuples sur
 
les peuples barbares comme les nations
<2> policées, 5 mots biffure
cette grande verité
qu’il y a un Etre
Superieur cad d’une nature superieu=
re a celle des hommes, plus puissant
queux habitant au dessus d'eux dans
le Ciel, et 4 mots biffure auquel on a donne dans
3 mots biffure chaque 1 mot biffure Langue
un nom repondant a cette idée, 1 mot biffure
5 lignes biffure
16 lignes biffure

15 lignes biffure; on peut voir ce
1 ligne biffure
qu’on dit la dessus les
anciens Philosophes, Platon
Plutarque  Epictete dans
Arrien  Maxime de Tyr  Dio Chrysoss.  et surtout
Ciceron. 
Je vais plus loin et je dis qu’Il est même
impossible tres apparent que les anciens premiers peu=
ples, avant que les prejugés, les abus du
langage, les licences des Poëtes et autres

<2v> causes qui ont 1 mot biffure le Paganisme eus=
sent deploié leur efficace, ne se se sont for=
mé des idées assés justes et asses saines de cette
Intelligence supreme qui a formé et qui
gouverne cet Univers, qu’ils n’en ont recon=
nu et celebré la puissance, la sagesse et la
bonté
qu’ils ont compris que cet Etre,
arbitre absolu de leur sort, devoit etre le
vrai et unique objet de leurs adorations et
de leurs prieres, et qu’enfin la Religion, en
liant les hommes a la Divinite, etoit tout
ce qu'il y avoit de plus propre a contenir
leurs affections dans de justes bornes, a
calmer leurs inquietudes, a les consoler dans
leurs maux,
a resserrer les liens de la
Societé pour y faire regner l’ordre, la
justice, et le respect du 1 mot biffure Loix pour la proprieté des
particuliers, et engager chacun d'eux
a remplir ses obligations Devoirs respectives
.

Il y eut donc un temps primitif ou
la Religion des nations ne fut qu’un
Theisme simple et pur, le culte d’un
Dieu unique sans Polytheisme ni
Idolatrie, et ce fut vraisemblablement
pendant ce temps la que le devellop=
pement de l'Esprit humain fut le plus
rapide chès les peuples d’Orient.

Selon le rapport de San=
chonciaton, 1 mot biffure les
Egyptiens et 2 mots biffure
peignoient la Divinité
sous lembleme d'un
cercle bleu d'ou sechap
=
perent des flammes
de tous côtés, et au
centre duquel etoit
placé, comme pour
le soutenir et l'animer,
un serpent a tête
d'epervier 1 mot biffure
2 mots biffure de
celui qui sans organes
exterieurs, comme le
serpent, a la vue per
=
cante comme l'epervier,
penetrant tout l'uni
=
vers dont il est le
centre, source de toute
lumiere. 2 mots biffure
2 lignes biffure
Sanchoniaton l'ap
=
pelle le vieux 1 mot biffure
qui traca de ses pro
=
pres mains l'harmo=
nie de cet Univers et
3 lignes biffure

Ce Dieu 3 mots biffure fut connu des patriarches Hebreux
sous les noms de Jehovah El. Eloim.

1 ligne biffure Il etoit connu et adoré
le vrai Dieu en Egypte lorsque Abra=
ham y alla  et meme lorsque
Joseph y fut conduit par les Ismaelites. 
Selon le temoignage de Lucien de 1 mot biffure
1 mot biffure, les Egyptiens n’eurent anciennement
ni statues ni idoles dans leur Temples.

<3>  Plutarque atteste de Isid. et osirid.
que les Thebains ne reconnoissoient
aucun Dieu mortel, et n'admettoient
aucun premier principe que le Dieu
Cnaph  ou Ptha  le Dieu feu et lumiere qui est sans commancement
et n’est point sujet a la mort. Selon
les Egyptiens, dit Jamblique, le
le premier des Dieux a existé seul avant
tous les Etres. Il est la source de toute in=
telligence, et de tout intelligible. Il est
le premier principe, se suffisant a lui
meme, incomprehensible, le dieu de toutes
les essences. Les Pretres Egyptiens in=
terogés par Cesar sur le culte qu’ils ren=
doient aux animaux, repondirent qu’ils
adoroient en eux la Divinité dont ils
etoient les Symboles. 
Voies Synesrus, eloge de la calvitie.
V. ce qu’on dira des cabires. Jophion

Voies ce qui est dit
d'Ophion dans le
fragment de San
=
choniaton.
Sanchoniaton l'appelle
1 mot biffure

19 lignes biffure

Les Cananeens et par consequent
les Pheniciens adoroient le vrai Dieu
lorsque Abraham vint en leur Pays,
on ne sauroit en douter après ce que
Moyse raconte  de
Melchisedech Roi de Salem, Sacrifica=
teur du Dieu Souverain et de Abime=
lec Roi de Guerar 

Lorsqu’ils tomberent dans le Polytheisme
Philon de Biblos atteste qu’ils avoient
un Dieu nommé Elioun terme
qu'il rend par celui de Très haut.

Ils Les Syriens l’appelloient aussi Adoni, et leurs
voisins Baal, Bel
. Les noms de Moloch qui
signifient Seigneur, Maitre
 Baal, Bel et Beet=
samen &c 4 mots biffure
2 mots biffure
qui devinrent dans la suite des
noms d’idoles, ne furent d’origine que
des noms donnes au soleil
comme embleme
du Dieu Supreme
qui domine sur la
nature, et qui est tout
feu et lumiere
 
9 lignes biffure

<3v> La connoissance et le culte du vrai Dieu
createur et Maitre de l’Univers  s’etoient
maintenus parmi les Arabes au temps
de Jacob, comme cela paroit par le Livre
de Job que l’on pense sur le fortes raisons,
avoir été contemporain de ce Patriarche
et avoir vecu en Arabïe; il est certain
en effet que les discours de ce Saint hom=
me et ceux des Rois ses amis ne respirent
que le Theisme le plus epuré et semblent
annoncer que c’etoit la Religion domi=
nante en Arabie de leur temps. Il en
etoit encor de même sans doute du
temps de Moyse qui epousa dans le
pays de Madian 1 mot biffure en Arabie une
des filles de Jethro, lequel etoit Sacri=
ficateur et ne rendoit hommage qu’au
Dieu supreme, l’Eternel . 2 mots biffure
1 ligne biffure
les Dieux.
Ce Dieu supreme
createur et Maitre de l’Univers etoit encor
connu et adoré comme tel par les Ara=
bes, lorsque Mahomet serigea en
Prophete. 4 mots biffure
1734 2 mots biffure.
 
La predication de
Jonas ches les Nini=
vites semble bien
prouver que le vrai
Dieu fut connu
pendant longtemps
ches les Assyriens
 

Sans doute que Les chaldeens, le plus
ancien des peuples fixés et policés, et
renommé pour ses lumieres, conserve=
rent la même croiance. Ils
faisoient
profession aussi de croire qu’il n’y avoit qu'un
seul premier principe de toutes choses
existant par lui même, plein de bonté
et de lumieres. Voies Stanley Hist
de la philos. orient.

Ce principe dans
presque tout lorient
fut appelle our
cad. le feu princi=
pe, par qui toute la
nature est vivifiée,
et on l'honoroit moins
par des ceremonies
que par des vertus.
 

<4> La commission que seul le Prophete
Jonas de precher aux Ninivites et
la repentance de ceux-ci, semblent
supposer que le vrai Dieu etoit encor
connu de ce temps la des Assyriens

Ces chaldeens donne=
rent dans la suite au
Dieu supreme le nom
de Bel ou Baal,
Dominateur Seigneur.

Le Theisme et le ouris=
me se conserverent dans
leur integrité chès les
Medes qui le transmi=
rent au premier zoroastre
Legislateur de la Bac=
triane, et c’est de lui que
se tiennent les Parsis
isolés dans un coïn de
l’Asie, et que toutes les
persecutions n’ont pu
arracher a leur coiance.
 

La Religion des Perses dit Clement
d’Alexandrie  etoit une religïon de Philosophes;
il falloit donc que ce fut un Theisme
fort epuré. Hyde de la relig. des anc.
Perses a prouvé qu’ils ont adoré le vrai
Dieu, de même que les Guebres qui
sont leurs descendans, l'adorent encor
aujourdhui. Voici comment  Eusebe
fait parler Zoroaphe un
de leurs premiers Instructeurs
; Dieu
est le premier des Etres incorruptibles, il
est eternel, non engendré, exempt de
parties; il n’a rien de semblable ou d’egal,
il est l’auteur de tout bien, le plus excel=
lent des Etres excellens, la plus sage de
toutes les Intelligences. Il est le Pere de
la justice et des bonnes Loix, savant
par lui seul, se suffisant a lui meme,
premier auteur de la nature.

Si Herodote a dit que les
Perses n’adoroient que
le Ciel et des nuées, 
ca ete uniquement parce quils n’ado=
roient qu’un Seul Dieu
dans le Ciel. Juvenal
dit la même chose des
Juifs et des chretiens;
nil preter nicebes et
caeli numen adorant. 
 

Strabo Strabon ecrit  que les Carama=
niens peuple belliqueux sacrifient a
Mars qui est le seul de tous les Dieux que
les Perses reverent. Sans doute que Strabon
qui etoit Grec, appelle ce Dieu Mars, parce
que c’etoit chès les Grecs le nom du Dieu
<4v> de la guerre: mais il est evident qu’il sagit
du Dieu tel que l’adoroient les Perses dont
les Caramaniens faisoient partie.

Il est très faux que la plus ancienne Reli=
gion des Grecs ait été le Polytheisme. Le
contraire se prouve par les temoignages
des plus anciens Philosophes et même
parce que les Poëtes Grecs nous ont conservé
dela traddition primitive.

On lit dans Theophraste, que la religion
des Grecs dans ses commancemens ne consistoit qu'en
des prattiques très pures, qu’on n’adoroit au=
cune figure sensible, qu’on n'offroit aucun
sacrifice sanglant, qu’on n’avoit pas encor
inventé les noms et les genealogies de cette
foule de Dieux 1 mot biffure connus de son temps;
qu’on rendoit au premier principe de tou=
tes choses des hommages innocens en lui
presentant des herbes et des fruits pour
reconnoitre son souverain domaine.

Cecrops, disent les His=
toriens, fut le premier
qui etablit parmi les
Grecs un culte public
rendu solemnellement
a la Divinite Supreme

appellee υπατυς.
cela suppose qu’ils avoient
deja une idée du culte
et d'un objet supreme
d’adoration, mais
que leurs idées la des=
sus etoient aupara=
vant imparfaites.
Il fit, dit on, dresser
le premier un autel
a Athenes, et deffendit
qu’on
y sacrifia aux Dieux
rien qui fut animé.
 

Pausanias in Corinthiac observe
qu’il n’y avoit aucune image dans quel=
ques temples tres anciens qu’il avoit vus a
Haliarté ville de Beotie.

Homere n’a parlé nulle part dans son
Iliade et dans l’odyssée ni de simula=
cre ni de temples; on peut conclure de
son silence qu’il a cet egard qu’il n'y
avoit encor de son temps aucune Ido=
latrie

<5> Hesiode a supposé dans sa Theogo=
nie une premiere epoque ou sous
le nom d’ouranos ou Cælus on ado=
roit un Etre superieur, habitant dans le ciel qui seul en
possession de l’empïre, recevoit en exclusi=
vement les hommages des mortels.

Appollodore au comman=
cement de l’hist. des Dieux
dit, Cælus est le premïer
qui ait regné sur tout
l’univers. On adoroit donc
un seul Dieu habitant
dans le ciel; tout ce que
les Poëtes et
surtout Hesiode,
dirent du regne de
Cælus, en est une confir=
mation.
 

9 lignes biffure

Sous le regne de Chronos, on imagina
des Dieux subalternes, mais on ne les
adora point encor; Chronos seul encor
recut les honneurs divins.
Le Polytheisme et l'Idolatrie ne com=
mançaerent que sous celui de Jupiter-
auquel les Grecs continuerent cepen=
dant d’attribuer toujours la supreme
puissance; car ils l’appelloient ζευς,
l'Etre vivant, titre par lequel les Prophe=
tes ont designé le vrai Dieu createur
de l’Univers, et
υπατοξ/ς υψισος le Très Haut.
Le 1 mot biffure supreme.

Herodote ecrit que les anciens Pelasges
ne donnoient ni nom ni surnoms aux
Dieux qu’ils adoroient: en parlant
selon l’usage reçu de son temps, cet
auteur se cont parle contre la verite;
car si les Pelasges avoient adoré plusieurs
Dieux, il n’auroient pu se dispenser de
les distinguer par des noms propres, supposer
qu’ils n’ont eu aucun nom pour desi=
gner l’objet de leur culte, c’est donc supposer
qu’ils n’ont adoré qu’un Dieu unique,
qui n’avoit pas besoin d’un nom pro=
pre pour le designer. Mais la premiere
supposition est fausse, puisque cet
objet de culte a été designé successive=
ment ches les Grecs sous les noms de ουρανος, χρονος
ζευς, 2 lignes biffure
V. ce qui est dit des Dieux cabires Myt

Trois noms que les na=
tions ont emploié pour
exprimer l’Etre supreme
1 mot biffure et que l’usage
a fait confondre dans
toutes les Langues,
com=
me quand nous disons
le Ciel vous benisse; il
fait beau temps.

<5v> Suivant Cluvier, les Illyriens, les Ger=
mains, les Gaulois, les Iberiens, les Bre=
tons, tout ce qu’on a appellé anciens
Celtes
n’etoient que diverses branches de
la même nation appelle Celte; ils n’avoient originaire=
ment qu’une même Langue, les memes
mœurs et la meme Religion. 
Or selon le temoignage
de Pline, la religion des Gaulois
avoit le plus grand rapport a celle des
Perses;  C’etoit donc un vrai
Theisme. Celse  dit
encor que les Druides des Gaulois, qu’il
appelle une nation très sage,
avoient les me=
mes sentimens sur la Divinité que les Juifs
Les Germains au temps de Tacite
conservoient encor les premiers
restes de cette religion primitive, Caete=
nim nec cobibene panetibus Deos, naque=
ci ullam humani onis speciem assimila=
re, ex magnidudine le Celestium arbitiam
her, lueos ac memora consecrant, Deo
nemque nominibus
appellant 1 mot biffure
secehem illed quod sola reverential
vident.

Les celtes etant passé en lEspagne for=
merent avec les Iberes une nation com=
mune sous le nom de Celtiberes, et
ceux ci, dit Strabon  adoroient
un Dieu qui n’avoit point de nom;
<6> preuve certaïne qu’il etoit unique. Selon
ce qui a été dit plus haut.

L’Italie aiant été peuplée par les anciens
Celtes ou Gaulois, et les plus anciens des
Grecs, leurs descendans auront surement
conservé, pendant quelques siecles, la
religion primitive qu’ils leur avoient
transmise, et c’est ce que atteste Plutar=
que dans la vie de Numa. Ce Roi deffen=
dit aux Romains de s’imaginer que
Dieu eut la forme d’homme ou de bête,
et il n’y avoit parmi eux ni statue, ni
image de Dieu
pendant les 1 mot biffure 170 premiers
1 mot biffure annees, ils 1 mot biffure des temples et autres
lieux Saints:
mais ils n’y mirent jamais
dans leurs temples aucune figure de Dieu ni moulée ni
peinte, estimant que cetoit un sacrilege
de representer par des choses perissables
et terrestres ce qui est eternel et divin
et qu’on ne pouvoit s’elever a la Divini=
té que par la pensée. De

Depuïs même que les Romains firent
livrés a l’Idolatrie, ils adorerent toujours
un Dieu supreme, elevé au dessus des
autres, qu’ils appellerent Pater homi=
num et Divium, Jupiter ophmus
maximus, Deus præsens ac præpotens
dominator rerum, omnia ruche regens
. 

<6v> Dans l’Edda poëme Islandois qui nous
a transmis l’ancienne croiance des peuples
du Nord, on lit, qu’il y a un Dieu supreme,
maitre de l’Univers, auquel tout est soumis
et obeissant, qu’il est l’auteur de tout ce qui exis=
te, l’Eternel, l’Etre vivant et terrible, le scruta=
teur des choses cachées, l’immuable, qui a
une puissance infinie, une science sans
bornes, une justice incorruptible. Il y est
deffendu de representer la Divinité sous une
forme corporelle: on n’y permet pas qu’on
la renferme dans une enceinte de murailles,
on y enseigne que ce n’est que dans des bois
consacrés qu’on peut la servir dignement.

L’Islande, les anciens Goths et les autres
peuples septentrïonaux ont tous recon=
nu un Etre Supreme. 3 mots biffure
4 mots biffure.

Les anciens Scriffines, a present Lapons, Danoïs,
les
Finlandois et les Lappons &c proprement
dits
, adoroient comme leur Dieu Sou=
verain Jumala et 3 mots biffure
2 lignes biffure

les Payens qui sont dans l’Empire
de Russie, Lapons, Finlandois, Samoie=
des, Tartares reconnoissent encor un Etre Eter=
nel qui a tout créé et qu’ils adorent
sous differentes idées et representations
2 lignes biffure
.

Les Samoeides lap=
pellent Heiha c. d
Deité
 

Les habitans de la nouvelle Zemble le
nomment leur Dieu Tuira, cad
Createur. Voies Martin Diel au mot
Deus.

<7> Des Les peuples de la Samogitie dis=
tinguoient le plus grand de leurs Dieux
par le nom d’Auxtheias Vissagistis,
c.a.d Dieu tout puissant Voiages de
Cologne par le Laboureur
.

Le premier des Dieux des Polonois se
nommoit Jassem que Cromer,
historien de Pologne, a rendu par
Jupiter; ce mot vient de Jassa qui
en Tartare, signifie ordonnance, com=
mandement; chacun sait que les Polo=
nois sont issus des Sarmates, essain
de Scythes connus aujourdhui sous
le nom de Tartares.

Les Sclaves ou Esclavons n’adoroient
encor au VI siecle qu’un seul Dieu,
Seigneur de toutes choses, qui lance le
tonnere, auquel ils immoloient des
boeufs et d’autres victimes . Or c’est un fait
constant que jamais peuple par lui
même et sans quelque secours etranger,
ne passa du polytheisme et de l’Idola=
trie au Theisme, qui ne peut etre que le
fruit d’une raison cultivée, lorsqu’il n’a
pas ete transmis par une traddition pri=
mitive. J’en conclus avec fondement
que cette nation n’a jamais été Idolatre
non plus que que celle des anciens Scythes
dont les Esclavons n’etoient qu’un essain,
n’etant pas croiable que des peuples de
la même nation aient eu dans les premiers
temps des Religions differentes. Les Scythes
appelloient Etre Supreme Papée qui
signifie Seigneur et Maitre

<7v> Strabon  assure que les Indiens croioient
un Dieu qui a créé le monde, qui le gouverne
et qui est present par tout. Ce grand peuple
a conservé cette creance jusques a nos jours,
puisqu’ils ne reconnoissent qu’un seul Dieu
souverain, Seigneur des Dieux inferieurs et
des hommes, lequel a donné a Brama
la puissance de creer le monde. C’est ce que
attestent Abraham Roger Theatre de l’Idola
=
trie, le Pere Bouchet recueil de Lettres edifiantes
2 lettres biffure l’auteur de lhistoire de la mission Da
=
noise T. 1 p. 217. Dans le Vedam Livre
sacré des Indiens, et un des plus anciens Li=
vres du monde, il n’est parlé que d’un seul
Etre Supreme: preuve certaine que ce peuple
n’adoroit originairement que le Createur de
l’Univers.
Le peuple du Gusarate et
du Malabar ont aussi comme les autres
Indiens l’idée d’un Etre supreme et même
d’un jugement avenir. Voiages de Mandes
5 mots biffure.
Il en est de même
des habitans de Calicut voiages des Hollan=
dois, des Canarins et des Decanins, 1 mot biffure
5 mots biffure
.

Ceux de l’Isle de Ceylan reconnoissent
aussi un Dieu supreme qu’ils appellent Ossa,
Polla, Maups Dio cad. Createur et gou=
verneur du Ciel et de la Terre .
Il en est de même des peuples de Goleoades 
de Narsingue
Maduse, Bisnaga, 1 mot biffure de Bengale 
des Langiens ou peuples des Laos
qui anciennement n’adoroient qu’un Dieu
qu’ils appelloient Mandarin.

<8> Les Siamois adorent un Etre Souverain
quils nomment Pra; 
ils se representent ce Dieu comme
composé dEsprit et de corps, dont le
propre est de secourir les hommes en leur
prescrivant une Loi, et leur enseignant
la vraie religion et les choses necessaires
a leurs besoins; ils lui attribuent toutes
les vertus morales au degré le plus eminent
et une puissance et une connoissance
universelle, qui consiste dans une sim=
ple vue qui penetre toutes choses et toutes
a la fois. La croiance des peuples de Cam=
boie est a peu près la même. 

Les Tonquinois reconnoissent aussi un
pouvoir supreme infini, qui voit tout
qui doit punir et recompenser dans
un autre monde; 

Ceux de la Cochinchine croient aussi
un Dieu Createur, mais d’une essence in=
visible qui ne 1 mot biffure 1 mot biffure representé par aucune
image dont la nature est incomprehensible
.

Selon le P. du Halde descrip. de la Chine
les Chinois ont reconnu et adoré pendant
plus de 2000 ans l’Etre souverain sans
aucun melange d’Idolatrie. Ils reconnois=
sent un Dieu au Ciel createur de tout
et principe de tout bien.
  Ils adorent sous les deux
noms de Chang-ti qui signifie Souve=
rain Empereur, ou de Tyen qui 1 mot biffure
a la même signification dans leur Langue

<8v> le mot et de Tyen qui se prend aussi ches eux pour le ciel
materiel, et dès la même il signifie aussi pour
lEsprit qui preside au Ciel, parce que le
Ciel est le plus excellent des 1 mot biffure ses ouvrages

au meme sens que
ουρανος le ciel
designoit ches les
Grecs l'Etre supreme
et que nous disons
encor, le Ciel vous
assiste
 .
de la cause premiere. Rien de plus sain
et de plus juste que
Les idées que les Livres
chinois et entr'autres le Chu-Kïng don=
nent du premier Etre, sont des plus belles
et des plus justes. On ne trouve dans leurs
Livres canoniques aucune trace d'Idola=
trie jusques au temps ou ce que la Statue de Fo fut
apportée a la chine, plusieurs siecles après
Confucius.

Les Coreens sont fort attachés a la Doctrine
de Confucius. 
Le Dieu Createur est connu aussi des peuples
payens de Java , de Sumatra, de
Borneo , des Manilles .
Dans les Moluques
il est appellé Taulay, dans les Phillipines
Barhala-May-Capal cad. Dieu fabri=
cateur; Batala Dieu Createur, dans
quelques isles Abba. 

L'an 1196 avant J. Christ. les Isles du
Japon furent peuplées par des Tartares
qui n'adoroient qu'un Dieu Createur au=
quel au On lui a consacré un temple
a Meaco. 

La croiance dun Dieu, Esprit, sans au=
cune forme, createur de toutes choses visi=
bles et invisibles s'est conservée chès tous les Tar=
tares d'Asie.  Ils 1 mot biffures l'appellent le
grand Dieu du Ciel. 4 mots biffures

Ceux du Tibet lap=
pellent Konchok
et Konchoik-chik
c.ad le seul Dieu

<9> Il en est de même des Tartares en particulier ceux de l'Empire
Russe, des Tartares appelles 1 mot biffure
6 lignes biffure.
12 lignes biffure

L'Idée d'un Dieu Supreme et tout puis=
sant se trouve aussi repandue dans toute
L'Afrique, dans la Nigritie , chès les habitans de la Gam=
bra ou Gambie, qui n'ont point dimages
et adorent un seul Dieu sous le nom de
Allah ,
chès ceux de la Guinée qui croient un
Dieu souverain invisible et tout puissant
createur et maitre du monde, qu'ils appel=
lent Orissa 
chès les Negres qui invoquent un seul
Dieu createur , et en particulier ceux de
Sierra Leona, qui lappellent ce Dieu
Khanu et croient un etat futur  de
peines et de recompenses. 

<9v> Les Quogas appellent lEtre supreme Kanu
et lui attribuent une Science et une puis=
sance infinies. 
Les Negres de la cote d'or ont la meme
croiance
.  savent en gros qu'il y a un
createur, tout bon, qui comble de biens
ceux qui l'adorent et ils croient que les ames
ne meurent pas; ils appellent ce Dieu, le
Dieu des Blancs.

Les Negres de Juida ont aussi quelques idees
du vrai Dieu, auquel ils attribuent la tou=
te puissance et l'ubiquité , qui recompense les bons
et punit les mechans. 

On trouve quelque idée d'un Etre supreme
Createur chès les Negres d'Ardra 
ches les Dahomays  ceux de Benin , ceux
du Congo  et Lovange ,
les Cassres. 

Les Hottentots appellent l'Etre Supreme
Createur et arbitre de l'Univers. Gounja
ou Gounia Ticquodo c.ad. Dieu des
Dieux quils placent au dessus dela
Lune.  Ceux de Monomotapa
l'appellent Mesimo, Maziri et
Atuno.  Il en est de même
de ceux de Soffalas.  Les
Ethiopiens ont reconnu un Dieu
immortel  Ceux de
Madagascar croient aussi un Etre
Supreme et en parlent avec respect. 

<11>  Suivant la Hontan 1 mot biffure tous les
sauvages d'Amerique croient que rien ne subsis=
tant par sa nature, 1 mot biffure il faut remonter a
un Etre superieur, qu'ils appellent le
Grand Esprit, le maitre de la vie, et selon
Ramnusio navig. du nouv. monde, ils
croient tous l'existence d'un premier mo=
teur. On a trouvé cette idée chès ceux du
Canada , les Virgi=
nians, les Floridiens; les habitans des
Antilles  Il paroit par
le discours du cacique de l'Isle de Cuba
a Christ. Colomb, que dans cette isle
on croioit un Dieu et une vie a venir.

1 ligne biffure
Le premier Etre est connu chès les Sauva=
ges de l'Amerique Septentrionale.  Ceux
de la Baye de Huron l'appellent
VKcouma, le grand Chef et chan=
tent ses louanges aleur maniere. 

Ces Indiens Ils reconnoissent
un Etre Supreme quils
appellent Manitou
lEsprit, Kitchi-Mani=
tou, le grand Esprit
ou aicon, ils le regardent
comme la source de
tout bien et sont persua=
dés qu'il ne peut etre
l'auteur d'aucun mal.
 

Les Canadiens et les Hurons semblent
navoir aucune prattique de culte, ils
reconnoissent cependant un premier
Esprit et ont quelques tradditions sur
l'origine des hommes. 

On connoit ches les Indiens du Mary=
land, les Virginiens un Dieu premier
et principal qui a fait les autres.  Ceux de la Louisiane
l'appellent Minguo chitou le grand
Esprit. 

<11v> Les habitans de la Floride adoirentoient un
Dieu Createur qu'ils appellentoient Okée Etat
present du territoire Anglois en Amerique
l'an 1689
. Il en est de meme de ceux de la
nouvelle Angleterre  de la Caroline. 

Dans toutes les parties de l'empire du Mexi=
que on reconnoissoit une premiere cause
mais sans aucun nom propre, les peu=
ples faisoient seulement comprendre qu'ils
le connoissoient en regardant le ciel
avec veneration.  Suivant Herrera 
ils lui donnoient les noms de Createur
et d'admirable. Les californiens pen=
soient de meme. 

Ceux qui habitent autour du fleuve Ore=
noque nont ni temples ni rites
religieux, mais ils ont
des noms pour exprimer
l'Etre Supreme, et ils le
reconnoissent intellec=
tuellement suivant
Gumila. Gilli.  Selon Gumila ont aussi des
noms peu intelligibles pour exprimer Dieu, mais on
n'a point recconnu chès eux de culte ex
=
terieur.

Les Caribes appellent
Dieu Quiyumocon
cd. notre grand
Pere. Amalivaca
Les habitants de la
Guiane, les Nouragues,
les Acoquas, les Gali=
bis reconnoissent un
Dieu sans l'adorer;
ils le croient au ciel;
les Galibis l'appellent
d'un nom qui signifie
l'ancien du Ciel.

Les Peruviens, du moins leurs Incas
selon Garcillasio de la Vega 
ont eu quelques idees connoissance du Dieu Createur
qu'ils ont appellé Pacha camac, ca.
d. ame du monde, et ce nom n'etoit
prononcé chès eux qu'avec la plus gran=
de veneration, mais ils ne l'adoroient
qu'au fond de leur coeur, ils ne lui offroient
aucun sacrifice, ils ne lui batissoient point de Temples.

Ches les Bresiliens le premier et Sou=
verain Dieu etoit appellé Tupa et
Typana, sans avoir de temples ni de
mouvemens religieux, ils lui rendent quel=
ques hommages religieux en levant souvent
les mains vers le Soleil et la Lune avec
des mouvemens d'admiration.

<12v>  Strabon parle d'un peuple d'Espagne
qu'on disoit, et d'un autre en Afrique qu'on
croient disoit n'avoir point de Dieu. Mais
on voit par l'exemple des chretiens qu'il
suffisoit de n'avoir point d'Idoles pour
etre taxés d'Atheisme.

on cite plusieurs nations comme n'aiant
pas de Dieu, telles que les habitans des
Antilles, des Marianes, les Bresiliens
&. mais ce n'est que sur la foi des premiers
navigateurs qui avoient pris ces nations
pour atthées, parce qu'ils ne leur avoient
vu prattiquer aucun culte, ou qu'ils
n'y avoient avoient rien compris, ou
que ces peuples peut etre n'adressoient
aucune priere au Dieu Supreme, dans
la persuasion qu'il etoit trop disposé a
leur faire du bien pour qu'il fut besoin
de lui demander quelques grace. Mais
de nouveaux voiageurs, plus exacts
observateurs, mieux instruits de leurs
langues, de leurs moeurs, et de leurs
prattiques les ont suffisamment
lavés de cette imputation odieuse.

on peut donc conclure avec certitude
que le Theisme a ete la premiere religion
de tous les anciens peuples, et que
lidée d'une Divinite Supreme a
ete generalement repandue par
toute la terre, ches toutes les nations
policees et sauvages, et dans tous
les siecles.

<13> Nous avons deja indique divers
Idees que des peuples qui se sont formé sur
des idees d'une vie a venir.

Les Indiens de l'Amer. Sept. ne doutent
point qu'après leur mort ils ne doivent
exister, et ils imaginent que leurs occupa=
tions seront alors les mêmes que celles de cette
vie, mais qu'ils seront affranchis des peines
et des miseres qu'ils endurent. Ils doivent
selon eux, etre transporté dans une con=
trée delicieuse ou les forets abonderont en
gibier et les lacs en poissons, lesquels se
laisseront prendre sans beaucoup de peine
ou d'industrie; enfin qu'ils vivront eter=
nellement dans ces regions pour y jouir
dans 1 mot biffure un degré superieur de toutes les
douceurs de la vie; mais ces douceurs
seront proportionées et distribuées suivant
leur merite; la meilleure part sera pour
les habiles chasseurs et les intrepides
guerriers. C'est par une suite de cette idée
quils enterrent les morts avec leur arc, fleches
et autres armes tant de chasse que de
guerre, en y aioutant d'autres utensilles
dont ils croient qu'ils pourront avoir besoin
pour les necessites de la vie.

Ches les anciens peuples Europeens, on
ne manquoit pas de celebrer le festin des
morts. Ce festin se placoit sur les tombes,
et on ensevelissoit avec les deffunts des ali=
mens et des boissons, pour qu'ils neprouvassent
aucun besoin dans le cas ou le trajet fut
long de ce monde dans l'autre. Ce repas
se celebroit chès les Romains, et les Grecs;
temoin le repas donné sur la tombe de
Patrocle. Les Egyptiens avant eux avoient
eu le même usage: la coutume avoit
passé aux Hebreux, et les chretiens
l'ont retenue très longtemps, elle subsiste
encor en plusieurs lieux de nos campa=
gnes, ou l'on fait un grand repas le
jour des funerailles.

<13v> Ches les Germains, Celtes, Allobroges &.
on etoit aussi en usage de coucher les morts du
midy au nord, sur le côté droit, le visage
tourné au Soleil levant: cela tenoit a une
opinion recue sur l'espoir de revoir après
la mort l'astre du jour. on supposoit près
de l'orbite du Soleil une contrée de delicieuse ou
les heros guerriers mort pour la patrie jouissent
de tous les plaisirs qui les avoient flattés du=
rant leur vie; l'idée de cette demeure fortunée
leur faisoit eprouver les mêmes transports
que celle des champs Elisées aux Grecs et aux
Romains. c'est cette opinion qui repandue
depuis l'Islande jusques aux rivages de
Cadix et de Marseille animoit les chants des
Bardes, des Samothées, des poëtes Ecossois
et que l'on retrouve dans le sublime
Poeme de l'Edda.

on peut trouver des temoignages surtout
ce qui vient d'etre dit dans divers ouvra=
ges, Dictionnaire dela Martiniere, cere=
monies relig. de tous les peuples, hist.
universelle. histoire moderne des chinois description de l'Empire
Russe, Du Royaume de Siam, de la cochin=
chine. Voiage de Guinee, hist. des Isles
antilles, dela Louisiane
hist. generale des voiages, Purchas
extrait de voiages, recueil de voiages
voiages de Mandeslo, de Schouten, des Hol=
landois, de Ribeyro, de Dampier, Mindes Pinto
Thevenot Iolcarius, de le Bruyn de Loyer
voiage de Pologne par le Laboureur
hist. de la mission Danoise, recueil de
Lettres edifiantes
Dapper Kolb, Herrera
Koreal

<14> Chapitre II
Comment les peuples ont passé pu tomber du
Theisme au dans le Polytheisme et a l'idolatrie

En vain l'Etre Supreme avoit pris soin
de graver en quelque sorte sur tous les objets
lidée de son existence et de ses perfections,
pour forcer en quelque sorte l'homme a
rapporter toujours a lui seul tous les sentimens
de son coeur et tous ses hommages; en vain
s'etoit il revelé frequemment aux habi
=
tans de l'ancien monde, et ses revelations
avoient elles été fidelement transmises
par Noë a ses descendans pour etre con
=
servées dans leur integrité a la suite des
ages; envain le Deluge universel, dont
la memoire etoit encor recente, avoit il
retracé de la maniere la plus eclatante son
autorité supreme, sa justice, sa providence
et tout ce qui etoit le plus propre a con
=
server maintenir la religion primitive dans sa
pureté, les hommes, par un prodige
d'aveuglement inconcevable, et vinrent
après quelques siecles, jusques a imagi
=
ner une foule de Dieux subalternes,
commis par le Dieu Supreme au gou
=
vernement du monde, et a les adorer
enfin par toutes sortes de prattiques su
=
perstisieuses, au prejudice du culte religieux
qu'ils devoient exclusivement au premier
Etre.

Ritache
Rien n'est plus impor=
tant pour qui veut
penetrer dans les
regions tenebreuses
de l'antiquite et en
particulier de la My=
tologie que de connoi=
tre par quelle progres=
sion derreurs, l'Esprit
humain a pu passer

substituer a une religion primi=
tive pure simple
et pure a une
religion qui n'offre
qu
un assemblage
monstrueux d'opinion
et de prattiques aussi
pueriles que
et supers=
titieuses que le
Paganisme a offert
presque partout
pendant tant de
siecles.
 

Rien n'est plus important pour l'intelli=
gence des abus du paganisme et de la
mytologie dont la connoissance est
indispensable a qui veut demeler quelques

<14v> lumieres dans le cahos tenebreux de penetrer dans les region de l'anti=
quité obscures de l'antiquite, rien, 1 mot biffure, n'est plus important que
de connoitre par quelle progression d'erreurs
l'Esprit humain a pu passer d'une Religion
pure et simple a un cahos aussi tenebreux a un etat d'aveuglement aussi deplo
=
rable que celui qui a envelloppé l'espece humai=
ne pendant tant de siecles. Car il est bon
d'observer qu'il y a entre les erreurs de l'Esprit
humain, aussi bien qu'entre les verités, un
enchaïnement naturel et dont on peut
suivre le fil, et que le Paganisme, n'est
au fond qu'un tissu d'erreurs nées les unes
des autres, comme dans les sciences, a la
suite des prejugés qui se sont repandus
parmi des hommes 1 mot biffure et grossiers, degradés du coté
de l'Intelligence des choses divines,
sans etre pour cela extravagans et 1 mot biffure
en delire. Il est donc possible de les suivre
dans la route qu'ils ont tenue pour s'egarer
et il est très a propos aussi de demeler les
fausses lueurs qui leur ont fait illusion.

chès les anciens peuples
civilisés d'orient, il se
peut que le Polytheisme
ait dabord commancé
par le fanatisme; sil
ya eu de bonne heure
des Monarques despo
=
tes, les peuples ont 1 mot biffure
denaturer lidée de Dieu,
et se le representer comme
un homme, un Etre
tyran ou farouche,
ou ridicule
et c'est ce que sembent
indiquer ces anciennes
Divinités, des 1 mot biffure,

2 lignes biffure
auxquelles on offrit
des sacrifices 2 mots biffure,
ou que l'on representoit
sous les figures les
plus grotesques. Mais
il paroit par l'histoire
que le despotisme
des monarques d'o
=
rient est dune origine
posterieure a l'Ido
=
latrie et que celle
ci doit sa naissance
a quelque cause
plus ancienne et
plus 1 mot biffure des temps
primitifs.

L'Idée de certaines Intelligences interme=
diaires entre la Divinité et les hommes, dont
la premiere se sont comme de Messagers
ou de Ministres aurpès de ceux ci pour
executer ses ordres, cette idée transmise
a Noë et aux descendans de Sem, qui
conserverent la traddition primitive avec
le plus d'integrité: 1 mot biffure sans contredis se
repandre parmi les peuples orientaux et
dès les temps les plus anciens, et nous
en voions des indices dans la conduite de
Abraham envers les Anges Celestes aux
=
quels il donna des marques de son res=
pect profond comme a des envoiés extra=
ordinaires du très Haut, sans2 mots biffure
leur adresser aucun hommage reli
=
gieux.

<15> Quelques personnes ont pensé que chès
les anciens peuples d'orient le polytheis=
me a d'abord commancé par le fanatis=
me né du despotisme. Des qu'on eut des
Monarques despotes, tyrans, farouches,
et 1 mot biffure on la terreur qu'ils inspiroient
se mêla au culte, lidée de Dieu fut
denaturée, et on vit naitre ces divinités
1 mot biffure bisarres sous les noms de Nisroch,
Adramelec, Anamelec &c. auxquelles
on offroit des sacrifices humains, ou
que l'on representoit sous les figures les
plus monstrueuses. Mais on ne sauroit
presque douter que l'Idolatrie n'ait été d'une ori=
gine anterieure a celle du despotisme,
et quelle ne doive sa naissance a quel=
que cause plus ancienne et plus voisines
des temps primitifs.

D'autres personnes ont imaginé que
le polytheisme 1 mot biffure ne fut que l'effet na=
turel du Style allegorique introduit
dans la Religïon par lequel on se permit
de personifier les attributs de Dieu, la
creation et la providence, d'en parler
comme autant d'Etre distincts, dont
chacun avoit ses caracteres et son
rang assigné; ces figures exagerées
devinrent dans peu inintelligibles,
et faute d'un ordre de personnes prepo=
sées pour les expliquer et pour conserver
la Doctrine primitive dans sa pureté,
l'on perdit de vue le sens allegorique pour
ne sattacher qu'au litteral qui ou
tout etoit rapporté a des Etres separés
dont on fit autant de Dieux. Ainsi
la Providence personifiée entant que
veillant a la generation des Etres put
devenir l'Astarté des Pheniciens, adoré
<15v> a Babylone sous le nom de Mylida cad
Mere des Etres, Succoth Beneth, taber=
nacle des vierges. Ma

Mais sans nier linfluence que peut avoir
eu le Style allegorique sur les idées reli=
gieuses, nous ne croions pas que cela cette cause seule
ait suffi pour donner naissance a cette
foule de Dieux subalternes que le Paga=
nisme a enfanté et qui ont si peu de
connexion avec l'idée d'un Dieu supre=
me, et n'aboutissent au contraire qua
la detruire entierement.

D'autres personnes n'ont vu dans ce
Tableau des Dieux qu'une alteration de
la Doctrine des Anges repandue par
les Patriarches dans tout l'orient. Mais
cette derniere qui ne presentoit les Anges
que comme des creatures envoiées du
Dieu Supreme auprès des hommes pour
executer ses ordres, et auxquelles les He=
breux ne rendirent jamais aucun culte
religieux, cette Doctrine disje ne sauroit
gueres avoir enfanté l'opinion de cette
foule de Dieux subalternes chargés
chacun pour sa part d'une administra=
tion en quelque sorte souveraine, et aux=
quels les hommes etoient tenus de
rendre les hommages de l'adoration.

<16> Je ne voudrois pas nier que cette 1 mot biffure l'idée des Anges
alterée et defigurée par la traddition
même et par d'autres préjugés superstitieux
n'ait pu contribuer a faire naitre ou du
moins accrediter en Orient l'opinion
de cette foule de Dieux subalternes sou
=
mis aux ordres l'empire du Très haut, et qui de=
vinrent dans la suite 1 mot biffure l'objet même de
culte.

On ne peut nier aussi
que lintroduction des
allegories dans le culte
religieux n'ait pu con
=
tribuer beaucoup aussi
a la naissance du
polytheisme: on se
permit de personifier
les attributs de l'Etre
Supreme, la creation
la providence, et
bientot ce fut autant
d'Etres distincts auxquels
on assigna un rang
entreux, 1 mot biffure le
2 mots biffure a des allego
=
ries fut bientot oublié
faute d'un ordre de
personnes etablies
pour conserver la
Doctrine primitive et
toute sa purete, et
l'on ne s'attacha plus
quau sens litteral.
c'est ainsi que l'Astar
=
te des Pheniciens a
penetre dans sa premiere
origine que la Provi
=
dence personifiée en
1 mot biffure que 1 mot biffure a
la generation des
Etres. Elle fut ado
=
rée a Babylone sous
le nom de Mylida,
c.a.d. mere des Etres
succoth Beneth
c a d. tabernacle des
vierges; cest peutetre
de la que les Grecs ont
fait leur Venus.

Mais je crois que cette opinion a pu
naitre beaucoup plus naturellement chès les hommes
par une suite
de celles qui se sont re=
pandues generalement chès les peuples
dès la plus haute antiquité, et qui
subsistent encor par tout ou la reve=
lation n'a pu 1 mot biffure penetrer.

Et d'abord les peuples les plus grossiers et
les plus
barbares paroissent avoir compris
aussi bien que les nations policées, cette
verité incontestable, c'est que la matiere
ne peut point se mouvoir d'elle même,
et que tout ce qui se meut est mu par
quelque Esprit. 3 mots biffure
3 lignes biffure
 

Si les hommes avoient pu conserver
toujours l'idée d'une Divinité supreme
infinie en etendue, en sagesse essence et en puis=
sance, ils auroient sans doute toujours
compris que cette même idée Divinité
après avoir tout créé, peut tout conser=
ver <16v> et gouverner par elle même et sans
le secours d'Intelligences subalternes, et
qu'elle ne s'est dechargée sur aucune
du soin de veiller sur cet Univers et en
particulier sur les hommes. Ainsi ils
n'auroient jamais attribué les mouvemens
et les Phenomenes de la nature qu'au
premier moteur, celui qui en etabli
les Loix et qui les maintient.

Mais les hommes des premiers ages per=
dirent bientot de vue les idées primitives
qu'ils avoient pu avoir se former des perfections de
l'Etre supreme, de sa puissance eternelle
et de son Intelligence sans bornes;
2 lignes biffure

et qu'a mesure qu'ils furent plus frappés du
mechanisme admirable spectacle de cet Univers,
de la multitude inombrable et de la
composition merveilleuse variete infinie des objets qu'il
renferme, a mesure aussi ils purent
moins concevoir qu'un seul Etre put
suffire pour en gouverner toutes les par=
ties a la fois, ou qu'il voulut se char=
ger 2 mots biffure tout seul d'un soin aussi
penible, 1 mot biffure et qu'un tel gouvernement
put etre executé par lui seul sans
que ce fut
au prejudice du repos et
du bonheur qu'ils concevoient comme
essentiel a un tel Etre.

Ainsi les hommes ne jugerent de la
Divinité par eux mêmes,
Substituant
ainsi aux lumieres d'une raison pure les
prejugés de l'imagination et des sens, les hommes ne
virent rien de mieux pour epargner plus 1 mot biffure vraisemblable
<17> en quelque sorte a la Divinité la fati=
gue du gouvernement de ce monde, que
de se figurer et de supposer la supposition d'une foule
de Dieux subalternes, quoique superieur
aux hommes,
qui sous les ordres et la
dependance
du Dieu supreme etoient
chargées de mouvoir et de diriger les
divers 3 mots biffure objets que la nature; les astres
les elemens, les differens 1 mot biffure objets

qu'elle presente a nos yeux; ce qui fit
bïentot regarder ceux ci comme autant
d'Etres animés, et meme doués d'Intelli=
gence et d'action.
Joignes a cela le penchant
naturel de l'homme a se
concevoir
figurer tous les Etres
comme semblables a lui même,
a supposer de la bonté
ou dela malice aux choses

meme inanimées, selon quelles
lui plaisent ou deplaïsent

en general a personïfïer tous les Etres
physiques ou ideaux;
  Telles sont les opi=
nïons 2 mots biffure 6 mots biffure
2 lignes biffure

et vous aures la clef de cette foule honteusex
egarement de l'espece humaine qui la plonge
dans l'Idolatrie le Paganisme

4 mots biffure Une autre qui opinion a pu
etre aussi de la plus grande influence
pour alterer la religïon primitive, c'est
celle qui a pour objet l'origine des
maux auxquels les hommes sont expo=
sés. Frappés de tous les traits de bonté
qui brillent dans l'Univers, la Divinité
leur a paru trop bienfaisante et trop juste pour
leur distribuer elle même des maux;
ils ne trouverent d'autre solu=
tion de cette difficulté que
la supposition d'un Esprit
de tenebres opposé a
l'Esprit de lumiere, 1 mot biffure un
1 ligne biffure
le Dieu du mal dont
le departement consistoit
a deffaire tout ce que
faisoit le Dieu du bien.
Mais ce Dieu dut
avoir
aussi ses emissaires,
ses satellites, cad
 
2 lignes biffure
2 mots biffure
des Genies malfaisans
disposés et occuppés a leur nuire aux
hommes.

C'est aussi un prejugé que l'on retrou=
ve chès tous les peuples et dans tous les
temps. Voila ce qui a fait croire par tout
aux Genies, aux fées, aux Lutins, aux
Satyres, aux Spectres; voila ce qui a peuple
l'univers de Divinités de toute espece.

<17v> ces Dieux subalternes, fruit de l'imagi=
nation humaine, ne partagerent pas d'abord
les honneurs divins. Le grand Dieu supreme
quoique placé dans le Ciel, fut toujours regar=
dé comme createur et moderateur de la na=
ture, l'auteur des fruits productions de la terre,
l'arbitre des temps et des saisons, qui
seconde les travaux de la culture et dequi
les hommes tiennent tous les biens. Seule=
ment croioit on que tant d'objets essentiels
au gouvernement du monde, demandoient
l'emploi et le concours d'Intelligences ou
Genies
subalternes pour executer les or=
dres du Très haut, et distribuer ses bien=
faits aux nations et aux particuliers,
pourvoir aux besoins des hommes, et leur
1 ligne biffure
3 mots biffure
envoier meme des maux et des
calamités, lorsqu'il le jugeoit a pro=
pos.

Dans la suite, A mesure que les Societés se
formerent, que l'agriculture se perfectionna,
que les talens se devellopperent par l'exer=
cice de lindustrie et des arts, persuadés dans l'opini=
on ou l'on etoit
que le pouvoir de la Divinité supreme
et de ses premiers subdelegués,
ne s'exercoit immediatement que sur les
objets de la nature, on imagina encor
une foule d'autres Dieux subalternes,
d'un rang  encor meme inferieur aux precedens
pour presider aux talens, aux arts
aux divers objets particuliers d'industrie, dans tous ses
divers departemens.

<18> Tous ces Genies occupés a animer et diriger
les divers objets de la nature ou des arts
selon le prejugé generalement repandu
qu'ils etoient chargés d'exercer leur auto=
rité et leur pouvoir specialement surles
hommes, furent aussi appellés des Dieux,
pour exprimer leur elevation et la supe=
riorité de leur pouvoir sur celui de
l'espece humaine.

Ce pouvoir tantot bienfaisant et tantot
malfaisant qu'on leur attribue inspira
a leur egard des sentimens d'esperance
et de crainte, qui porterent enfin les hom=
mes a leur rendre des hommages religieux,
et un culte a peu près semblable a celui
qui auparavant etoit reservé au Dieu
supreme. On institua a leur honneur
des fêtes, des ceremonies avec un ap=
pareil pompeux. Telle fut la premiere
origïne du Polytheisme. ou du culte que
les Payens rendirent a une foule de Divi=
nités subalternes.

Alors sintroduisit ces Divinités subalter=
nes aiant ete multipliées l'idée et distribuées
en diverses classes, on en vint a l'idée vint asses natu=
rellement supposer qu'il 1 mot biffure y avoit entr'elles quelque
une subordination, et on imagina une
espece de hierarchiser, ou plutot de cour
celeste, analogue a 2 mots biffure semblable et
des rangs parmi les Dieux analogues
aux distinctions qu'il y a entre les hom=
mes. on plaça a la tete le très Haut,
qui habite dans le ciel, comme plus parfait
et plus puissant que les Genies et les hom=
mes mais il ne fut plus parmi les Dieux
que le premier, ce qu'est sur la terre un
<18v> Roi superieur aux autres en dignité et
en autorité. Ainsi furent crées dans
l'imagination des peuples Jupiter et la
foule des Dieux.

Lidée de la Divinité aiant été ainsi par la entierement defi=
gurée, il n'y eut plus qu'un pas a faire
pour lui attribuer toutes les imperfections
humaines, et en quelque sorte l'humani=
ser, ou la rendre les Dieux tout a fait
semblables aux hommes.

Dès lors s'introduisit ce langage etrange
ou les Dieux et leur operations pour
gouverner le monde
sont peints sous
des expressions qui les confondent absolu=
ment avec les hommes et les operations
humaines; langage qui fit le fond et
l'ornement de l'ancienne mytologie, mais inin=
telligible pour tous ceux qui n'ont pas
saisi le fil des erreurs populaires aux=
quelles qui enfanterent le Polytheisme et  l'Idolatrie a du son origine.
Il importe neanmoins d'expliquer comment ce Lan=
gage put successivement prendre faveur, et devenir enfin
s'accrediter partout.

Il est indubitable que les hommes des
premiers ages donnerent dès les comman=
cemens des noms au divers Etre Phy=
siques et aux phenomenes de la nature
les plus sensibles et les plus interessans
pour eux. Ce furent les premiers mots
dans toutes les Langues.

<19> Des qu'on vient a supposer que ces divers
objets ou phenomenes etoient soumis a l'action
et les soins de certaines divinités subalternes,
on donna a celles ci et a leurs operations les noms même des
Etres physiques auxquels elles etoient cen=
sées presider et chaque peuple 1 mot biffure les 1 mot biffure
4 mots biffure 3 lignes biffure
et des phenomenes
ou operations qui
etoient rapportees
a ceuxci.
  Ainsi
le ciel devint le Dieu Uranus, la Terre
devint la Deesse Rhea, le Soleil Apollon, la
Lune Diane, l'eau Neptune, le feu
Vulcain &c.

Pendant qu'on com=
prit bien le sens des mots ces noms
5 lignes biffure
l'on ne courut point
le danger de confon=
dre ces Divinites avec
les Etres de la nature,
et tous ni de se meprendre
sur les vrais objets du
culte.

Mais Ce Langage ancien primitif, aiant reçu eprouvé divers
changemens successifs, les anciens mots
destiné a exprimer les objets et les pheno=
menes Physiques, etant devenus suran=
nés et aiant ete remplacés par d'autres 1 mot biffure qui en
1 ligne biffure firent oublier entierement la
3 mots biffure ces anciens la signification primitive de ces anciens
1 ligne biffure originaire
2 mots biffure oubliee on vint aisement a se figu=
rer qu'ils que ces premiers ne designoient autre chose que
dans l'origine que certaines Divinités personages
fort semblables aux hommes, 1 ligne biffure
2 mots biffure qui
avoient autrefois vecu
sur la terre, et que
les operations que
ces mots exprimoient
etoient des
  et certaines
operations très analogues aux actions
humaines, et qui pouvoient et qui devoient
etre entendues a la Lettre; l'on 1 mot biffure a la fin l'on
en vint a rellement par les croire des hommes, et a leur associer
Les 1 mot biffure d'autres hommes, telles 1 mot biffure
les progres de l'Idolatrie
comme dignes
de faire rang avec eux, et de recevoir
les memes hommages publics dado=
ration et de culte.

<19v> Les Poetes qui survinrent pour instruire
les Peuples par leurs chants,
de tout temps
amis du merveilleux et de tout ce que peut
flatter l'imagination des hommes,
ne man=
querent pas de nourrir ce prejugé, en chas
tant les actions des Dieux comme s'ils eus
=
sent été des hommes, et en metamorphosant
la nature et ses phenomenes en Tableau
Theogoniques ou ils celebroient les Dieux leurs genealo=
gies, leur naissance, leurs exploits, leurs
aventures et toutes les bisarreries de la et changoient leur actions
Mytologie comme sils n'eussent ete que des hommes dis=
tingués.

Dans ce style Poetique En Poësïe, on cessa de dire
le tonnere gronde, le soleil est ardent,
la mer est agitée, une fontaine s'ecoule
dans une riviere, le crepuscule precede
le jour, le vin croit sur les collïnes &c;
on y substitua ce style pompeux,
Jupiter fait gronder sa foudre, Apollon
lance des rayons, Neptune ebranle la
terre de ses flots, une nymphe epouse
un fleuve, l'aurore est la mere du jour
Bacchus est fils de Semelé.

Dès lors il y eut parmi les Dieux les
mêmes relations que parmi les hommes,
il y eut des maris et des femmes, des
freres et des soeurs, des paiens et des
enfans, des Maitres et des serviteurs,
un Roi et des sujets &c.

Tant d'expressions figurés et d'allusions
Poetiques aux actions ou passions hu=
maines persuadent enfin aux peuples
que les Dieux etoient en tout semblables aux
hommes. et avec cette idée, il n'est plus
surprenant qu'ils aient imaginé que des
hommes pouvoient devenir Dieux après
les mots.

<20>  Des qu'on avoit pu humaniser ainsi
les Dieux rien nesembloit plus naturel
que de diviniser, ou mettre au rang des
Dieux des hommes celebres par leurs
vertus, leurs exploits, des services impor=
tans rendus a l'humanité. Cela etoit
d'autant plus aisé qu'on pouvoit sans
un merite si eclatant etre aggregé a
la foule de ces Dïeux 1 mot biffure supposés imparfaïts et
même vicieux, et que l'interet ou la
crainte avoient plus de part que le
respect dans le culte qu'on leure les Payens
rendoit.ent a leurs Divinites.

Alors prit naissance nacquit le culte des
Heros ou Demi Dieux, Culte qui s'est
introduit chès tous les peuples beaucoup
plus tard que celui des Dieux, et n'a com=
mancé que lorsqu'ils avoient fait deja
bien des progrès considerables vers la civili=
sation: car nulle part il ne fut la
source du Polytheisme, mais par
tout il en fut la consequence; ce fut
comme une nouvelle Religion ajoutée
a l'ancienne, qui fournit aux Poëtes
une nouvelle moisson de fictions et
de fables composées dans le même gout
que celles qui regardoient les Dieux an=
ciens.

Pour se rendre presens les objets de
leur culte, les hommes s'aviserent
de très bonne heure de se les representer
d'abord par certains caracteres symbo=
liques, ensuite par des figures infor=
mes, enfin par des simulachres, ou
des images peintes
placés dans des
<20v> lieux sacrés, en se persuadant que
leurs Dieux avides d'hommages, de
respects,
ou d'offrandes, venoïent habiter
dans ces simulacres et ces lieux qui leur
etoient consacrés. Telle fut la premiere
origine de ce culte qu'on a appellé Idola=
trie ou culte des Idoles, et de tout le cere=
monial superstitieux du Paganisme.
Cette origine remonte a des temps fort
reculés, puisqu'on en trouve des vestiges
au temps même des Patriarches. 

Il etoit deja fort repandu du temps de
Moyse, surtout parmi les Egyptiens et les
cananeens.  Il le fut encor plus du temps des Prophetes. 

Sur quoi On peut s'en rapporter aussi ici au
temoignage des auteurs prophanes. 

De la les miracles attribués aux Statues
comme aiant fait des signes, parlé, pre=
dit; l'usage de les enchainer pour ne pas
les laisser s'échapper, celui de leur rendre les me=
mes honneurs qu'aux Dieux meme qui dont on
les les supposoit animoientés après leur consecration.
Selon Opinïon des Payens qui subsis=
toit encor même après la publication de
l'Evangile, et lors même que les Philosophes
Payens faisoient leurs efforts pour depouil=
ler l'idolatrie du ridicule dont les auteurs
chretiens la chargeoient. 

<21> Les astres n'etant pas toujours visibles pour
contenter le vulgaire grossier, et mettre sans
cesse sous ses yeux les objets de son culte, on 1 mot biffure
s'avisa d'en 1 mot biffure figurer des images; ou plutot des genies
qu'on supposoit le gouverner, on les renferma
dans des temples. Les simulacres recurent
la figure de l'homme, et des foiblesses les 1 mot biffure
de ceux ci furent dès la attribués a ces genies.

mais ces images fu=
rent destinées a
retracer non pas tant
les astres eux mêmes,
que les genies subal=
ternes quon suppo=
soit les gouverner
et presider a leurs
divers mouvemens.
Ces simulactures
furent aussi placés
dans les Temples
 

De tous les astres, le Soleïl est celui qui a le
plus frappé les hommes, et il a été divinisé dans
toutes ses revolutions. Ceux Les 1 mot biffure adorateurs du
soleil qui ne jugoient de son disque que par
sa grandeur apparente, 1 mot biffure ne surent se le representerent
que sous le symbole grossier d'une pierre
circulaire. Voila l'origine de ce caillou coni=
que que la Syrie reveroit sous le nom
d'Elagabal, et dela 1 mot biffure meule informe dont
on avoit fait en Afrique le Type de
Jupiter Ammon. Peu a peu on donna
a la pierre une forme et on la fit raionnante;
ensuite on prit pour Symbole du soleil
la nature animée et dela p ex. la tor=
tue de l'Inde qui porte le monde Solaire
sur son ecaille, le boeuf Apis qui a le
firmament empreint sur le poil qui
le couvre. Maïs on trouva qu'il y avoit
plus de dignité dans le Symbole de la
figure humaine, et du Soleil on fait fit un
homme, un jeune homme dont la beauté
est etoit inaccessible aux orages injures du
temps, on le peint peignit conduisant un cha=
riot de feu roulant dans les plaines
de l'espace. Voila l'origine d'Apollon
et de sa fable embellie par les Poëtes.

La Lune n'a pas moins frappé les hommes
que le Soleil soit par les influences qu'on
lui a attribuées de toute ancienneté sur
le divers changement d'aïr, la pluie, le
beau temps, et tout ce qui sort de la terre,
soit parce que les revolutions lunaires ont
eu beaucoup de part a l'ordre politique
des Societes; c'etoit un usage très ancien
1 ligne biffure
a chaque nouvelle Lune
que les peuples s'assem=
bloient pour rendre
en 1 mot biffure leurs hom=
mages publics a la Divinité,
lui offrir des fruits
de la terre et prendre
ensuite un repas en
commun en signe
de fraternité. C'en
etoit assès pour les con=
duire a rendre a cet
astre des honneurs
religieux, et aucun
astre n'en a recu au=
tant qu'elle. Les
Symboles de cet
Astre furent extre=
mement diversifies
<21v> parmi les peuples
Idolatres comme
nous le verrons
dans la suite
 

Des que le peuple a pu créer ses Dieux il
les a formés semblables a lui. Partout les
moeurs des nations, ont en designent annoncerent les
moeurs de leurs Dieux. L'histoire de la
terre retrace celle du ciel.

C'est en Orient ou Des que les peuples d'orient furent accoutumés
a etre gouvernés comme des esclaves, par
des Despotes invisibles auxquels on ne peut
sadresser que par 1 mot biffure l'entremise des visirs, on
2 mots biffure vit alors se multiplier cette foule de genies ou
demi Dieux 2 mots biffure appelles a decharger l'Etre supreme
du fardeau de sa puissance son gouvernement. C'est de
l'Asie qu'est venue que se repandit l'idée des Dieux supe=
rieurs vegetans obscurement dans les
intermondes. La theogonie Grecque ressem=
ble meme a celle des orientaux, parce que ces peuples
auroient encor des Roïs lorsqu'ils se firent
un culte.

Parcontre les anciens Germains porterent
leur Esprit republicain jusques dans leur
commerce avec leur Divinité appellée
Thor a laquelle ils ne rendoient un culte
que sous certaines conditions, comme de
detourner les orages.

Au Japon 1 mot biffure Dairi veut etre obei
par les Dieux et on y exerce des chati=
mens sur les idoles.

Les peuples fanatiques se sont fait des
Dieux cruels et barbares tels que
Saturne, Teutates, Vitzliputzili.

<22> Chapitre III.
Confirmation dece quon a
Confirmation de Ce qui a été dit dans
le chapitre precedent sur la progression
des erreurs qui ont amené le Polytheisme
et l'Idolatrie, confirme confirme par tout ce que
nous connoissons de la Religion des
anciens peuples, par sur les temoignages
des auteurs sacrés et prophanes.

Tout ce que nous avons dit sur la progres=
sion des erreurs qui ont amené le Polytheis=
me et l'Idolatrie, se trouve d'abord pleine=
ment confirmé par le temoignage de
l'Auteur de la Sapience.
Il nous apprend que les Payens
aiant meconnu le vrai Dieu dans ses ou=
vrages, ont pris pour Dieux les elemens et
les diverses parties de la nature, qu'ils ont
consideré comme les seuls gouverneurs
du monde; qu'ils ont même representé ces
divinités pretendues par des Symboles ou
des statues qu'ils ont appellées Dieux,
et auxquels ils ont adressé leurs voeux
et leurs sacrifices; qu'ils ont de même
honoré l'image des personnes qui leur
etoient chères, et que ces nouvelles idoles
ont recu un culte comme les premieres;
qu'a ce culte impie ils ont encor melé
des crimes abominables, des sacrifices
de sang humain, des mysteres nocturnes,
et qu'ainsi l'Idolatrie est devenue la source
et le comble de tous les maux.

Dans cet exposé, il suppose clairement
que l'honneur rendu a des hommes et a
leurs images est posterieur au culte des
des diverses parties de la nature et de leurs
symboles, et qu'ainsi les idoles humaines
<22v> n'ont point été la cause originaire de l'Ido=
latrie, puisque le culte des Etres physiques
et de leurs Symboles a été anterieur et
le plus ancien.
Nous voions meme
cette Idolatrie ancien=
ne qui adoroit les
Etres physiques sous
des Symboles, ce qu'on
appelle le fetichisme
regner encor aujour=
dhui ches des peuples
qui nont jamais eu
ladresse de tailler
une statue.
  Il distingue nettement
les Dieux anciens et principaux comme l'ont fait les Poetes, cad
les diverses parties de la nature qu'on consi=
deroit comme animées par des Intelligences
superieures, et les Dieux posterieurs, cad
les Heros divinisés, ou les demi Dieux
dont le culte fut ajouté a celui des
premiers.

Ce que nous avons dit Cela se trouve confirmé
par l'autorité plus respectable encor des Livres
canoniques qui ne parlent font nulle part
6 lignes biffure mention
en effet que des Divinités prises dans les
objets physiques diverses parties de la nature qu'on suppos=
soit animés, et des simulacres sous les=
quels elles etoient representées.

Ainsi Suivant l'Ecriture Ste, d'accorden
cela avec tous les anciens ecrivains, les
premieres Divinités subalternes dont le
culte s'introduisit chès les orientaux
furent le Soleil et la Lune et les etoiles
des Cieux
. Sans doute que l'agreable splen=
deur de ces Astres, leur course reguliere, leurs
influences bienfaisantes, reveillant l'admi=
ration des hommes, les leur firent envisager
d'abord comme les Symboles images les plus frappans
de la Divinite supreme 2 lignes biffure
ils y retrouvoient 1 mot biffure
les majestueux Sym=
boles 1 mot biffure
des 4 grands
attributs qui caracterisent
l'Etre principal, la lu=
miere, la force, l'ordre
et limmensité

<23> 1 ligne biffure Mais cette justesse même
dans l'allegorie condui
=
sit a la degradation
du culte. Le peuple

peu a peu ces astres
revetant aux
leurs yeux
du peuple toutes les
apparences d'etres vivans
et animés, et d'un au=
tre côté comprenant
cependant qu'ils n'etoient
que de la matiere par
elle même inerte,
  ils en vinrent naturellement a les
1 ligne biffure supposerent
habités, mus et dirigés par certaines Intelli=
gences ou Divinités subalternes, qui fu=
rent envisagées comme les mobiles de cet
univers, et les 2 mots biffure de la nature
a qui tout doit sa naissance et sa vie. Il
n'en fallut pas d'avantage pour engager
les hommes a flechir les genouils devant
eux et leur leur adresser des hommages reli=
gieux 5 mots biffure  Peut etre que
A Babylone il fut
le plus grand des Dieux.

Peut etre que l'idée vint aussi que
ces Intelligences syde=
rales servoient de Me=
diateurs entre l'Etre
supreme et les hom=
mes, et qu'il falloit
emploier leur inter=
cession pour etre
exaucé du Ciel. 

Tel fut le plus anciens Polytheisme
introduit dans l'orient deja du temps
de Job, ainsi qu'il le suppose  et même vraisemblable=
ment deja du temps d'Abraham, parmi
les chaldéens adonnés a l'Astronomie,
et adorateurs du feu consideré comme
emanation du Soleil. Celui ci fut meme
regarde a Babylone comme Dieu
et honoré sous le nom
de Bel ou Baal,
qui sign. le Roi par
excellence.
 

Les Pheniciens ado=
roient aussi le Soleil
sous le nom de Beelse=
men, et la Lune sous
le nom d'Astarté [qui
etoit representés avec
des cornes, qui Symbole
de l'acervissement et
du decours de cet
Astre.] 

Ce genre de Relïgion appellé le Sabeisme
repandu chès les orientaux remplit
le monde entier, il fut commun a tous
les anciens peuples Idolatres, comme
il l'est encor a tous les peuples sauvages.
2 lignes biffure

Sans doute que ce culte faisoit grand
bruit chès les Egyptiens et les cananeens
du temps de Moyse, puisqu'il le deffendit
si expressement aux Hebreux. 

Ces Egyptiens et des la même les autres peu=
ples anciens avoient aussi erigés en Divinités
<23v> non seulement les astres, mais encor les
1 mot biffure autres parties de la nature considérées
comme animées par des Divinités subal=
ternes; deja du temps de Moyse les Egyptiens
avoient prostitué leurs hommages aux
animaux, aux oiseaux et aux poissons; ils
s'en etoient même fait des representations
et des images taillees pour se prosterner de=
vant elles: d'ou vient que ce Legislateur
deffendit aux Hebreux de se faire des images
des choses qui sont au Ciel, sur la terre,
et dans les eaux, pour les adorer. 

Le culte des Genies qu'on supposoit re=
pandus dans les diverses parties de la na=
ture pour les animer, se trouve encor clai=
rement exprime aux Psaumes.  ou le Psalmiste reproche aux
Hebreux d'avoir servi les faux Dieux
des nations, et sacrifie leurs enfans aux
Demons
, a limitation des cananeens.

<24> Au temoignage des auteurs sacres nous
joignons celui des auteurs prophanes qui
ont tous 1 mot biffure enseigné que les Dieux
principaux et les plus anciens du Paganisme
n'ont été autre chose que des Demons ou
Genies moteurs des diverses parties de
la nature, et auteurs des evenemens
heureux ou malheureux pour les hommes.

On voit par la maniere dont les Poëtes font
parler leurs personages, et qui etoit sans
doute conforme a l'opinion commune,

que'ils ne connoi les anciens peuples ne con=
noissoient d'autres Dieux que ceux qu'ils
appelloient θεοι, δαιμονες. Genii. 

De la l'usage familier aux Heros dans
Homere et les autres Poëtes, de raconter leurs
infortunes au Ciel, au Soleil, a la Lune, &c
d'invoquer la terre et les autres parties de la nature, la
terre, la nuit &c. comme autant d'Etres
animés et Intelligens
de les invoquer, de les prendre a
temoins dans les sermens et de jurer par
eux  sermons dont l'usa=
ge devint si familier dans la suite, et que
Jesus Christ a deffendu comme etant
rellement un acte d'Idolatrie Math. V. 94
Homere lui même adresse ses hommages
au Soleil, a la Lune, a la terre Odyss. L.
XII 323, et dans les Hymnes a la suite
de l'Odyssee.

Les Poetes eux
mêmes leur ont
adressé leurs hom=
mages. 

Le Debut de la Theogonie d'Hesiode
ne presente qu'une espece de Cosmogo=
nie, <24v> ou genealogie des differentes parties
de la nature considerés comme autant de
Divinités,
selon les opinions des anciens
Grecs, comme autant d'Etres personifiés
et supposés ïntelligens.

Plutarque atteste que Isis, Osiris, Ty=
phon, les Titans, les Geans, etoient des
Demons plutot que des hommes. Ainsi,
dit il, en ont jugé Pytagore, Platon,
Xenocrate, Chrysippe qui ont suivi en
cela les vieux Theologiens ,
Diodore de Sicile dit la meme
chose.

Platon dans son Timée, selon Velleius  admet=
toit un premier Etre spirituel Pere du monde, et des
Intelligences subalternes qui gouvernoit
les differentes parties de cet Univers et
qui faisoitient, disoit il, l'objet de la religion
populaire. Dans son Cratyle, il fait
dire a Socrate que les anciens Grecs ont
eu les mêmes Dieux que les Barbares,
le Soleil, la Lune &c.

De la
les astres furent ap=
pelles θεοι cad. des
Etres parfaits
les lumineux, comme
la Divinité, et cela
seul pouvoit les faire
confondre avec elle,
cela suppose du moins
qu'on les crut animés
par des Dieux in=
ferieurs
 

Suivant Velleius  Chrysippe, chef des Stoïciens,
soutenoit que les Dieux des Payens n'etoient
autre chose que les differentes parties de la
nature animées; et dans le Livr. II. Bal=
bus Philosophe de la même secte enseignoit
que le monde etant animé est Dieu, qu'il
y a du sentiment et de l'Intelligence
dans toutes les parties de la nature, que les
astres sont par consequent autant de
Divinités; qu'on a donné le nom de Dieux
aux bienfaits de la nature et a tout
<25> ce qui paroit excellent, que des raisons
physiques ont fait imaginer la plupart
des Dieux, que ces Dieux nés de la physi=
que, ont été ensuite transformés en hom=
mes; qu'on a même deifié les passions
qui agitent violemment la nature, et les
hommes qui ont fait du bien a leurs sem=
bables; ce qui a donné lieu aux fables
et aux supersititions.

Ciceron lui même, au milieu des doutes
qu'il temoigne sur la nature des Dieux
a la fin du Livr. III, semble persuadé que
les uns etoient des Etres purement phy=
siques, les autres des passions violentes,
quelques uns des hommes celebres.

Les auteurs Grecs et Latins s'accordent
a distinguer comme Ciceron, des Dieux
anciens et premiers
pris dans la nature
eternels, et immortels, et des Dieux nou=
veaux, nés mortels, mais elevés au
rang, aux titres, aux honneurs des im=
mortels par les biens qu'ils ont fait aux
hommes. 

Les auteurs Orientaux entr'autres
le Traducteur Grec du fragment de
Sanchoniaton font la meme dis=
tinction.

<25v> L'opinion que les Dieux du Paganisme
n'etoient que des Demons ou Genies 1 mot biffure,
subsistoit chès les Atheniens, lors=
que St Paul leur precha la Divinité de
J-Christ et sa resurection.
Car les Epicuriens et les Stoiciens qui l'entedi=
rent crurent quil leur annoncoit de nouveaux
Demons ou Genies.

De la vient que Celse soutenoit encor
qu'on pouvoit adorer les Genies qui ad=
ministroient toutes choses, selon la volon=
té du Dieu souverain. 

Julien soutenoit disoit que le Dieu Souveraïn
avoit ordonné aux Dieux inferieurs de
creer les hommes et les animaux, et que
ces Dieux devoient etre adorés comme
ses preposés aux diverses portions de la
terre. 

Les Peres de l'Eglise ont bien seu que la
religion des anciens peuples avoit éte
le culte des Genies, et quelques uns même
ont cru lexistence de ces Genies adminis=
trateurs qu'ils confondoient avec les Anges.
Justin, Philosophe Platonicien, depuis
sa conversion, croioit encor que Dieu
leur avoit conferé le gouvernement
des diverses parties de la nature, que
ces Esprits etant devenus amoureux
des femmes, les avoient rendu meres
des Genies que les Payens adoroient
Prim.
Apolog.

Cette croiance des Intelligences preposées
a divers emplois dans l'Univers, a été
<26> selon le fameux Bayle ,
aussi repandue chès les anciens peuples
que la croiance d'un Dïeu supreme,
et il l'attribue a une sorte de penchant
naturel et universel, plus sensible chès
le commun peuple que chès les Philoso=
phes, quoique, selon lui, on en demele
les traces dans leurs divers Systhemes
ou ils semblent avoir supposé toutes
les parties de la nature animées.

Tels sont les temoignages tant sacrés
que prophanes qui prouvent que le
polytheisme des anciens peuples n'a
ete autre chose que le culte des Intelli
=
gences subalternes qu'on supposoit
presider aux diverses parties et aux
Phenomenes de la nature
, quoïque tou=
jours sous la dependance et les ordres
d'une Divinité supreme. Car la
creance des Dieux, et principalement
de celui qui preside a toutes choses est
commune a tout le genre humain
tant que aux Grecs qu'aux barbares. ,
dit Dans
ce grand nombre d'opinions parmi
les hommes, vous verrès les Loix et les
sentimens convenir qu'il y a un Dieu
Rois et Pere de toutes choses, et plusieurs
autres Dieux qui sont ses enfans et ses
collegues a la Royauté. 

Nous allons confirmer encor tout
ce qui a été dit par certains details
sur la religion des divers peuples
anciens.

<26v> Chapitre IV
Nouvelle confirmation de ce qui a ete dit
par certains details sur la religion des
divers peuples anciens.

Au culte du Dieu supreme, les Egyptiens
associoient, selon le rapport de Plutarque
citées 1 mot biffure, le culte des Demons Divinités
ou Genies subalternes sous les nom d'Isis, Osiris
&c. et le prejuge universel que toutes
les parties de la nature etoient animées
par elles, leur fit croire sans doute que
l'ïndustrie et les operations admirables
des animaux ne pouvoient point etre
attribués a eux mêmes ou a la matiere
seule, mais uniquement a certains Genies
qui les animoient.

Presque tous les peuples barbares ont attri=
bué aux betes une ame sensible et même
Intelligente, assès ressemblante a celle de
l'homme, d'ou leur est venu une sorte
d'affection pour 1 mot biffure certains animaux, les
uns pour les chiens, d'autres pour les
chevaux &c. # c'est de la sans doute que
De la sont venues
ces belles harangues
que les Poetes mettent
dans la bouche des
Heros s'adressant
a leur chevaux.
 

Il est même des peuples Sauvages qui
croient que les animaux sont mus et
dirigés par quelques Espris; ou Genie;
de la vient que les Lappons, après avoir
tué une bete feroce, lui en demandent
pardon.

Sans doute que les Egyptiens auront pensé
a peu près de même et cela n'est point
surprenant, puisque les Philosophes eux
memes semblent avoir rencheri sur
ce prejugé populaire, dans les eloges
<27> pompeux qu'ils font de l'industrie des
animaux. 

Penetrés de cette idée, les Egyptiens auront
imaginé que des Genies bïenfaisans se
1 mot biffure logeoient de preference dans certains
animaux utiles pour le service des hom=
mes, et leur auront rendu sous la forme
de ces animaux un culte inspiré par la
reconnoissance. C'etoit, selon eux, un Genie
bienfaisant qui animoit le boeuf au labou=
rage, l'Ibis ou la Cigogne pour detruire
les serpens. L'Ichneumon a casser les
oeufs du crocodile &c. Dès lors il n'est
pas plus etrange que les Egyptiens aient
rendu un culte a ces animaux, qu'il
ne l'est que d'autres peuples aient sacrifié
a des simulachres qu'ils supposoient habi=
tés par des Dieux, ou a des fontaines qu'ils
croioient occupées par des Deesses; ils ne
faisoient après tout, comme ceux ci, que
rendre hommage a des Genies bienfai=
sans, pour les bienfaits quils croioient
en recevoir. Nous ne rejettons
Il ne faut pas cepen=
dant rejetter absolument
le sentiment de ceux qui
croient que les Egyptiens
ont adoré le Boeuf et
le Belier comme hiero=
glyphes du Soleil dont
ils representoient les
raions par leurs cornes
.
1 mot biffure Sous ce point de vue
ce culte auroit
ete lié a celui du
sabeisme; Voies
Plutarque sur Isis
et Osiris; Maïs rien
n'empeche de suppo=
ser qu'ils ont aussi
adoré en même
temps des Genies
1 mot biffure dont ils croioient
que ces animaux
recevoient des influ=
ences directrices.
 

Les Egyptiens auront supposé de la
même maniere que certains Genies mal=
faisans se plaisoient a animer et mou=
voir certains animaux nuisibles tels
que le crocodile, le loup &c., et devoient aussi
y etre honorés par certains hommages
que la crainte pouvoit leur suggerer pour
pour prevenir leurs attaques.

<27v> De tout cela on peut comprendre pour=
quoi les differentes villes d'Egypte ne ren=
doient pas des honneurs religieux aux mê=
mes animaux, et pourquoi les unes avoient
coutume de tuer et de manger ceux qu'on
respectoit dans les autres villes. ce qui etoit
une source continuelle de rivalités, de
disensions et meme de guerres entr'elles.

L'opinion des genies bons et mauvais
avoit sans doute persuadé aux Egyptiens,
comme elle persuda aux Grecs et aux Romains, que
chaque ville avoit son Genie tutelaire
particulier, lequel ne manquoit pas de se
loger dans l'animal que cette ville lui
avoit consacré; animal qui etoit en mê=
me temps le symbole distinctif qu'elle
avoit choisi, et dont souvent même elle
prenoit le nom. De tels Dieux locaux
etoient supposés rivaux et s'entrehair
par jalousie; de la même maniere qu'on par ex: on
supposa qu'ils y avoit guerre entre ceux
de Troies et d'Argos, ceux de Rome et
de Carthage; ce fut la raison pour avec cela il etoit impossi=
ble que laquelle les villes d'Egypte ne 1 mot biffure cesserent
continuellement d'etre entrelles en guerre ouverte pour
les objets de leur culte
et acharnée.

Cette croiance des Divinités locales fit
naitre aussi chès les Egyptiens le culte
des Dieux Fetiches qui s'est conservé
chès les Negres, comme nous le dirons
plus bas.

Du même Ce meme prejugé 1 mot biffure enfanta chès eux
Egyptiens l'opinïon de la metempsyco=
se; parce qu'ils crurent que les animaux
pouvoient etre occupés par les ames des
morts, tout comme par les Genies.

<28> Il ne faut pas non plus chercher d'autre origi=
ne au culte qu'ils rendirent aux oignons et
aux plantes, toujours relatif a quelque Ge=
nie bienfaisant auquel ils se crurent rede=
vable de ces alimens; culte tout semblable
a celui que les Grecs rendirent a Ceres et
a Bacchus pour leur avoir procuré le
blé et le vin.

Sans avoir perdu de vue lidee d'une
Divinité supreme,

les Cananeens ou Pheniciens etoient deja
livrés au Polytheisme et a l'Idolatrie, lors=
que les Hebreux entrerent dans la terre
promise; c'est ce qui est supposé dans
tous ces ordres que ceux ci recurent dex=
terminer a la façon de l'interdit tous
les peuples des pays qu'ils auroient a
traverser, peuples d'autant plus cou=
pables qu'ils avoient eu plus de moiens
qu'aucun autre, de conserver la
religion primitive dans sa pureté.

Au culte du Dieu Supreme, les Arabes
associerent aussi et associoient encor du temps
de Mahomet, le culte des astres, des etoiles
et des planetes, des anges et de leurs ima=
ges, comme des Divinites inferieures dont
ils imploroient l'intercession, les regar=
dant comme des mediateurs auprès de
Dieu;
c'est de ce culte que Mahomet cher=
cha a detourner ses compatriotes pour
retablir ches eux le culte pur du seul et
vrai Dieu. Sur cette nation et les suivan=
tes, je renvoie iuci aux meme auteurs
que j'ai deja cités Chap. 1.

<28v> On sait que les Chaldeens furent adora=
teur du Soleil et des astres, quils supposoient
sans doute animes par des Genies bienfai=
sans.

Il paroit par tous les temoignages cités dans
le chap. preced. que
Les Grecs crurent aussi le
monde peuplé de toutes sortes de Divinités
subalternes appellees θεοι, δαιμονες, Gen
ou Genies, les uns bons les autres mau=
vais, auteurs des evenemens heureux ou
malheureux; et que sous le regne de Jupiter
il commancerent a les adorer
; qu'après
avoir honoré les Dieux anciens immor=
tels, ils en imaginerent et honorerent
encor des nouveaux elevés successivement au rang des premiers,
par leurs vertus; a quoi ils en ajouterent
encor
plusieurs que produisit ches eux meme de leurs Dieux ne furent
que le produit d'une imagination effraiée, tels que les
Dieux Taraxippus et Acratus dont
parle Pausanias .

2 lignes biffure
ou qui ne furent
que
des passions
personifiées en
Divinités, tels que
Venus Nemesis
Erinnus &.
 

<29> que Venus Maris Nemesis &c. les
Muses les 1 mot biffure

D'ou vient qu'on sup=
posa que les Dieux
subalternes ïnspiroient
aux hommes les pas=
sions, les folies, les for=
faits: tout ce qui se
faisoit en general par les hommes
etoit ou en bien ou en
mal etoit rapporté
a un pouvoir supe=
rieur, a un Genie bon
ou mauvais; mais
cela n'effacat jamais
ches les Grecs

lidée d'un Souverain
Maitre dont la volon=
té fut appellée le
destin: c'etoit ce quils
qu'on entendoit
ent sou=
vent par μιον;
ils ne lui rendoient au=
cun culte particulïer,

et direct;
mais ils croioient que
les Dieux même etoient
soumis a son influen=
ce puissante et
irresistible.
 

Les Romains adopterent une foule de
Divinités des peuples voisins mais sur=
tout des Grecs. Ils y en ajouterent Tels
furent tout ceux dont le nom est
d'origine Grecque, et qui sont en très
grand nombre.

Mais ils en ajouterent eux mêmes, un
très grand nombre
et la maniere dont ces
nouveaux personages furent imaginés
parmi eux, peut nous faire concevoir la
source d'ou les Grecs avoient puisé les leurs
sans doute qu'un même Esprit dirigea des peu=
ples dont les religions avoient tant d'affinité,
lors qu'il s'agissoit d'introduire dans leur
culte quelque Divinité nouvelle.

Dans les evenemens singuliers peu ordi=
naires, l'interet ou la crainte, l'admiration
ou la reconoisssance, faisoient imaginer
aux Romains quelques nouvelles Divini=
s protectrices qu'ils croioient devoir
invoquer. Pour s'en former une idee, on
peut voir ce que disent Ciceron ,
Plutarque  du
Dieu Aius Locutius; ce que disent
Tite Live  Aulugelle 
Testus du Dieu Rediculus, ce que dit Testus
au mot Rediculus du Dieu Fortuna muliebris, au mot
Rediculus
, et Tite Live  des temples
batis a la crainte et a l'effroi.

<29v> On imagina même des Divinités de toute
espece pour diriger tous les evenemens or
=
dinaires, pour presider a toutes les fonctions
de la vie, a tous les travaux, a toutes les ac
=
tions a tous les sentimens de l'humanité;
enfin pour etre presentes a tous les lieux
ou l'on attachoit quelque importance.

Ils multiplierent surtout sans fin les
Divinités appellees a diriger les evenemens
ordinaires, les fonctions de la vie humai=
ne,

Ils multiplierent surtout sans fin les Dieux
relatifs a la fortune a la naissance, a
l'education, le menage, les funerailles,
a veiller sur a la multitude des accidens auxquels sont
exposés les fruits de la terre, et des obstacles
qui empechent les travaux du Laboureur.
Ce n'etoit partout, et plus encor chès les
Romains que chès les Grecs, que des
Divinités occupées sans cesse a les garan=
tir de maux, ou a les combler de biens
Dii datores bonorum.

<30> Ils diviniserent aussi meme les actions, les
passions, les sentimens de l'humanite,
parce, dit Ciceron  qu'ils exercent sur l'homme un pouvoir
auquel il est difficile de resister; comme
leur empire est tel qu'on ne peut le
regler sans un secours divin, on les a
regardé eux memes comme autant
de puissances superieures a l'homme ou
de Dieux. Les Grecs leur en avoient
montre l'exemple dans plusieurs de leurs
Divinités qui eurent les meme caracteres
et les memes fonctions a Rome. 1 mot biffure
3 lignes biffure

Les Dieux locaux furent aussi extreme=
ment multipliés a Rome, tant ceux
qui etoient attachés aux diverses parties
de la nature, aux champs, aux rivieres
&c aux maisons, que ceux qui furent
affectés a certaines villes; ou quon
supposoit presens dans des lieux
distingués par leur importance.

Imbus des mêmes prejugés que les Grecs, les
Romains donnerent a leurs Divinités pinci=
pales une foule de substituts a leurs ordres
pour les decharger du detail minutieux
qu'ils supposoient trop fatiguant ou rebu=
tant pour elles.
 

Quoiqu'on connoisse assès sur l'espece
de Polytheisme qui regnoit chès les an=
ciens peuples occidentaux et septentrionaux
on sait que les anciens Goths adoroient
3 Divinites principales Thor qui repon=
doit au Jupiter des Romains, Othin,
Oden, ou Whoden, qui etoit leur Mars
et Friga qui etoit leur Venus.

<30v> Suivant l'Edda, les peuples Septentrionaux
outre le Dieu supreme, eternel et indivisible
qu'ils n'osoient nommer par respect, admet=
toient et honoroient des Divinités inferieures
qu'il avoit etablies pour gouverner ce
monde, et qui avoient beaucoup d'analogies
avec les Grecques sous des noms differens.
Ces peuples appelloient Nornes cad. fees
ou parques certains genies qui presidoient
a la naissance des enfans et regloient a leurs destinees
par des Dons heureux ou malheureux quelles leur faisoient
on supposoit ces fees
foeminines et vieille,
parce que ce sont ordi=
nairement les vieilles
femmes qui assistent
aux accouchemens
 
ils avoient etabli sur cette idée une sorte
de theorie de contes de fées, renfermée
dans l'Edda; dont ils ces entités se sont repandues
dans toute l'Europe lors de l'emigration
de ces barbares et de la chute de l'empi=
re Romain.

Ces hommes grossiers croioient l'Univers
peuple de Genies aeriens, d'Esprits follets,
de Lutins malfaisans, de fees et d'enchan=
temens, auxquels ils attribuoient tout ce
qui arrive de sinistre dans ce monde. Ils
etoient assiegés de terreurs paniques et
adonnés a la magie.

De la vient que les anciennes Loix de
Norvege deffendent d'adorer les Genies
des Lieux, des tombeaux et des fleuves.
Aujourdhui encor les barbares du Nord
Lappons &c. se croient sans cesse infestés
par de mauvais Genies, qui aiment a
troubler leur repos et ils cherchent a les
appaiser par des prieres et des sacrifices,
de la leur confiance en la magie et
aux sortileges: ils ont aussi pour idoles
des pierres brutes.

Lidee de puissances
invisibles qui influent
sur le sort des hommes
subsistent encor ches
le peuple grossier,
dans les pays meme
ou la lumiere a
penetre, et ou l'Evan=
gile est
preché
dans toute sa
pureté.

<31> Très Humble Exposition
du Ministre Moennoz
de Lausanne, 

<32>  Chapitre V
Autres considerations tirées de la
Religion des peuples modernes livrés
a l'Idolatrie.

On peut juger de l'ancien Polytheisme
par celui des peuples modernes. Les sour=
ces de l'erreur etant aussi ressemblantes
entr'elles que le sont les impressions que
les hommes recoivent des objets exterieurs,
les erreurs ont du etre a peu près les
mêmes partout pour le fond, et ne
differer entrelles que par certaines modifications
accessoires ou accidentelles.

Chès les peuples Sauvages ou barbares,
comme chès les anciens peuples, tout
est animé dans l'Univers, tout est mu
par des Esprits occupés des besoins de
l'homme, qui, selon qu'ils lui sont favo=
rables ou contraires, le comblent de
biens ou l'accablent de maux. Partout
l'interet ou la reconoissance, la dou=
leur ou la crainte, le portent a adorer
des Etres puissans et invisibles qu'il
envisage comme les arbitres de sa des=
tinée.

Chès les peuples septentrionaux, les Lapons,
FinlandoisSamoeidesTartares de
Russie, on rend des hommages religieux
a tout ce qu'on suppose animé, les astres
les animaux, les oiseaux;

<32v> Dans l'Indostan,
Dans l'Indostan, les Banians, ou leurs
Pretres appellés Bramines, donnent a
la cause premiere 3 substituts, et admet=
tent plusieurs Dieux inferieurs nés de lui
et subordonnés, qu'ils adorent avec lui. Ils
croient la metempsycose et ont horreur
de tuer aucune espece d'animal.

Les Parsis chès qui le feu est le Symbole
sacré du Dieu Createur, qu'ils supposent
cependant agir immediatement par sa
puissance, donnent a ce Dieu 7 Ministres
qui ont encor a leurs ordres 26 autres char=
gés de diverses fonctions dans le gouverne=
ment de l'Univers et auprès des hommes;
ils invoquent ces Genies dans leurs necessités
et les adorent.

Ceux du Malabar croient que comme
le gouvernement du monde oteroit au
Dieu supreme tout repos et tout plaisir,
il en donne la direction a d'autres Dieux
qui ont un partagent avec lui l'empire souverain. avec lui. Ceux
ci qui sont comme ses plenipotentiaires
pour administrer les chatimens et les recom=
penses, peuvent punir et affliger ici bas;
de même que benir et conserver qui
il leur plait.

<33> Sous ces Dieux Souverains, ils en etablissent
un grand nombre d'autres qui leur sont infe=
rieurs, a qui ils donnent des titres, ils attribuent
des qualités, ils rendent des honneurs, selon
que l'imagination les leur suggere et qu'ils en
un mot biffure
 proportionellement a leur merite.
Ces Dieux Superieurs et inferieurs sont
representés par les Idolatres Malabares
sous de terribles et monstrueuses figures
qui sont des composés bizarres demembres
de toutes sortes d'animaux.

Ils ont une idée generalement repandue
ches les sauvages, c'est que le Dieu souve=
rain etant tout bon, il ne faut ni l'adorer
ni l'invoquer, parce qu'il ne fait point de
mal.

Ceux de l'Isle de Ceylan adorent plusieurs
Dieux et Demons qu'ils distinguent par des
noms. Le souverain Dieu les envoie sur
la terre, suivant eux, pour y faire executer
ses ordres, d'autres petits Dieux inferieurs, qui
sont les ames des hommes de Bien qui vivoient
autrefois sur la terre. Il assigne a chacun
d'eux son emploi. Cette idée est très repandue
sur les côtes d'Asie. Ceux de Goleonde
croient qu'il n'y avoit au commancement
qu'un seul Dieu, qui s'en est depuïs associé
d'autres, les choisissant entre les hommes
qui ont vecu sur la Terre. Ils batissent
des Temples ou Pagodes en leur memoire,
et leur adressent leurs prieres dans leurs
necessités. Ceux de Narsingue attribuent
aux Demons la cause de tous les maux. 

<33v> Ceux de Bisnaga font de grandes depen=
ses a batir des Temples qui sont pleins dIdo=
les monstrueuses. 

La Religion du Bengaled'Ava, du Pegu
est presque la même. On y croit que com=
me Dieu est l'auteur de tous les biens, les
Demons sont les auteurs de tous les maux.
Les peuples Ils ne rendent au premier aucun culte,
parce quils croient qu'il ne leur fera aucun
mal, mais ils honorent le Diable afin quil
ne leur en fasse point.

Les Siamois honorent certains Genies
ou Anges occuppés a la conservation des
hommes; ils prennent a temoin de leurs
bonnes oeuvres les Anges Genies qui president
aux 4 nations du monde; ils versent de
l'eau en implorant le secours deu l'Ange Genie gar=
dienne de la terre: car ils supposent
entre
ces Anges Genies une distinction de sexe. Selon
eux chaque les diverses partie du monde, les astres,
les montagnes, les forets, les vents, les villes
&c ont chacune une de ces puissances tutelaires,
c'est a ces Genies elles que les Siamois s'adres=
sent dans leurs besoins et qu'ils rendent
graces des biens quils recoivent.

Les peuples de la cochïnchine ornent
leurs Pagodes d'idoles qui representent
les ames des hommes qu'ils ont tenu pour
saints pendant qu'ils vivoient sur la terre;
ces idoles même sont d'une taille et
rangés dans un ordre qui en
marquent
le degre de merite, et la distïnction, et selon ce degre
on leur accorde plus ou moins d'honneurs
aux ces idoles, qu'on envisage ailleurs comme des

intercesseurs aupres du Dieu supreme.

<34> Les Chinois croient que le Dïeu qui
habite au ciel est un Etre trop sublïme
pour se mêler de ce qui se passe sur la terre
et parmi les hommes, qu'il y en a un autre
au dessous de lui, qui est chargé du gou=
vernement du monde, et c'est celui la qu'ils
adorent et qu'ils servent, parce qu'il est
inutile d'invoquer l'autre.

Ils honorent aussi, mais d'un culte subor=
donné, les Esprits inferieurs, dependant
du premier principe,
qui, selon eux, presi=
dent aux montagnes, aux rivieres, aux
villes, aux villages, aux champs, a la
santé &c. Les Sectateurs de Fo croient
que ces Esprits se presentent souvent en
Ange
sous la forme humaine, et operent
toutes sortes de prodiges: les effets de la
nature, même les plus simples, sont
atribués parmi eux a des Demons,
ou a des Etres physiques qu'ils supposent
animés par eux: ce sera une montagne
un arbre, un dragon, un animal
ïmagïnaire, une statue, qu'ils croient
occupée par quelque'un Esprit de ces
Esprits
. Si la fievre fait rever un mala=
de, on attribue aussitot cela a un Demon
qui le tourmente

Les Sectateurs de Confucius parmi les
Tonquinois honorent aussi des Esprtis
presque jusques a l'adoration. Ils
croient l'air rempli dEsprits malins
sans cesse occupés a nuire aux vivans

<34v> Dans l'Isle de Java le peuple Idolatre
admet une sorte de Diable si porté a nuire
qu'ils se croient obligés de lui rendre autant
d'adoration pour calmer son humeur ma=
ligne, qu'a Dieu la Divinite meme pour obtenir ses bienfaits. 

Dans les Molucques les Idolatres adorent
l'air ou le Demon de l'air, sous le nom de
Lanitho. Les mauvais Esprits appellés
Nitos, sont soumis a un Etre Superieur
appellé Lanthila, lequel n'est que le Lieu=
tenant de Taulay. Chaque ville a son
Nito.

Dans les Phillippines la traddition a
transmis a leurs habitans des chansons
qui celebrent la genealogie et les faits his=
toriques de leurs Dieux. On adoroit dans
ces isles, les anïmaux, les oïseaux, le
Soleil, et la Lune, et on honoroit par
des sacrifices de vieux rochers ou pro=
montoires et de vieux arbres.

Chès les Japonnois on dit que les Dia=
bles ont fait autrefois de grands efforts pour
empecher le Createur de creer ce qui est
au monde, qu'ils sont même fort puis=
sans; c'est pourquoi tous les ans au
printemps on y fait des processions a leur
honneur, on leur offre des premices, afin
5 mots biffure quils ne fassent point de mal.

Les Tartares Chinois n'invoquent pas le
grand Dieu du ciel, mais un autre Dieu
nommé Notigay auquel ils attribuent l'empire sur les cho=
ses terrestres, sur leurs familles, leurs troupeaux,
leurs graïns, et auquel ils s'adressent pour
<35> demander des bïens, du beau temps,
des fruits, des enfans &c.

Ils ont des idoles de feutre et de forme
humaïne, placées a l'entrée de leurs ha=
bitations, qui sont comme les Dieux tutelai=
res d'eux et de leurs troupeaux. Ils les hono=
rent en leur offrant le premier lait de
leurs brebis et de leurs jumens, et en repan=
dant hors de leur porte un peu de bouillion
ou le premier morceau de ce qu'ils man=
gent. 3 mots biffure.

Les Kitaiens, peuple Tartare, ont des
couvents, des hermites, des Saints auxquels
ils rendent un culte. Les Jugurs ont
dans leurs Temples des statues pour
honorer la memoire de personnes 1 mot biffure
distinguées. Les Mongols Thuins ou
Idolatres admettent plusieurs Divinités
inferieures. 

Les Tartares Cheremisses croient a des Demons
qui affligent et tourmentent les hommes
pendant cette vïe; aussi leur sacrifient
ils pour les appaiser. 

Les Tartares de Siberie honorent le Soleil
la Lune et les Astres.

les ostiaques ne rendent aucun hommage
au Dieu du Ciel, mais ils adorent les Idoles.

Les Samoyeides adorent encor le Soleil et
la Lune et leur associent quelques idoles si
grossieres qu'il faut deviner qu'ils ont vou=
lu leur donner la figure d'hommes. Ces
idoles, ils les tiennent dans leurs huttes,
ou aux environs, ou les pendant a des
arbres. Ceux du Tibet adorent un Etre
nommé Urghien, né depuis environ
700 ans, et ils honorent des Saints.

<35v> En Afrique tous les peuples de Nigritie
sont Idolatres. Ceux de la Gambie sont
livrés a toutes les superstitions de la sorcel=
lerie. Ceux des isles du Cap vert adorent
les uns la Lune, d'autres le Diable, qu'ils nomment
Cammate. Ils l'adorent, dïsent ils, afin qu'il
ne leur fasse point de mal.

Les Negres des côtes de la Guinée Meridio=
nale et Septentrionale attribuent a un seul
Dieu la creation de tout, mais non pas les
productions ni les bienfaits de la nature, si
ce n'est la pluie et la formation de l'or; 1 mot biffure
et comme il est ïncapable de faire du mal
et que nos hommages ne peuvent n'en a=
jouter a sa grandeur, ils ne lui font presentent ni
offrande, ni prieres; les hommages sont
reservés pour le Diable et leurs 1 mot biffure.
1 mot biffure Certaïnes divinités subalternes auxquelles
Dieu a remis son pouvoir sur les hommes
5 lignes biffure
pour leur faire
du bien ou du mal

Ils attribuent ainsi toutes leurs infortunes
a certaines puissances malignes, et ils
croient aux apparitions des Esprits ma=
lïns, qu'ils supposent prendre plaisir a
les venir effraïer, ce qui les a conduit
a l'opïnïon de la transmigration des ames.

Pour se mettre a couvert de leurs me=
chancetés, ils ont recours a certaïns ob=
jets comme capables de les preserver, et
ces objets ont été appellés en Langue
portugaise Feitisso, d'ou Fetiche, com=
me qui diroit charmes, 1 mot biffure amulettes
talismans
, preservatifs. 4 mots biffure.

<36> Ce nom s'est etendu ensuite a tout ce
qui appartient a leur culte, en sorte qu'il
n'est pas aisé de distinguer, sous ce nom
commun, les idoles qui en sont l'objet,
d'avec ce qui n'est que instrument de ce
culte; ce qu'il y a de seur, c'est qu'ils n'a=
dorent point comme des Divinités tous
les Fetiches.

Ils ont des Fetiches personels pour chaque
particulier, et des communs a une famille
ou une bourgade. Les Peres de famille
ont dans leur maison un Fetiche au=
quel ils croient les yeux sans cesse ou=
verts pour recompenser leurs actions ou
punir leurs crimes.

Il y a des Fetiches publics qui passent
pour protecteurs des pays et
prennent
un caractere de Divinité tutelaire pour
toute la nation; ce sera une montagne,
un rocher, une pierre, un arbre, quel=
quefois un poisson, un oiseau.

4 lignes biffure

Tous les objets materiels
ne sont pas pour les Ne=
gres des fetiches, mais
seulement ceux qu'il
leur a plu de choisir,
et de faire consacrer
par leurs Pretres. Car
 
3 lignes biffure
Les Pretres sont aussi supposés converser fami=
lierement avec eux les Esprits ou Genies et apprendre d'eux
par le moien des Fetiches ce qui se passe dans les lieux les plus secrets,
et a toutes sortes de distance. On les
regarde comme revetus du pouvoir
de ces Divinités, et de la le credit prodigieux
de ces Pretres ou Fetisseros, parmi les
Negres.

<36v> Il n'est pas surprenant
des la qu'ils croient que
leur ces Pretres ont le pouvoir
d'attacher la vertu et la
protection des Genies a
certains 1 mot biffure ces
Fetiches; qu'ensuite
de la consecration faite
par ces Pretres, un cail=
lou peut servir de gage
de la presence et du secours
des Genies dont on re=
doute la colere, ou am=
bitione les faveurs; que
dans cette opinion, ils
reverent a l'excès ces
objets inanimés comme
autant de marques
de la protection de leurs
Dieux, qu'ils les croient
meme animés, tout
comme les Grecs ont cru
qu'en vertu de la conse=
cration des Statues, des
Idoles ou des Betyles,
les Dieux y habitoient
reellement et y recevoient
les hommages de leurs
adorateurs.
Voila pourquoi les
Negres attribuent aleurs
Fetiches la faculte de
voir, de parler, le pou=
voir de punir les crimes
pourquoi ils jurent
par eux, ils les interro=
gent dans les affaires
domestiques.
 

D'ailleurs tout ce qui arrive aux Negres
d'un peu extraordinaire, ils le rapportent a
quelque cause surnaturelle; ils ont cela de
commun avec presque toutes les nations du
monde.

Une Idolatrie melée d'une infinité de supers=
titions que l'avarice des Marabous entretient,
est la religion domïnante des Negres de
la côte d'Or
. Ils appellent le Dieu Crea=
teur tout bon le Dieu des Blancs, et leur
culte est 1 mot biffure reservé tout entier pour les
Fetiches, qu'ils craignent sans les aimer,
et qu'ils n'invoquent que pour eviter d'en
etre maltraités. Ces Fetiches sont des corps
de toute espece, ridicules même par le choix,
qui leur sont vendus par les Marabous
qui leur 1 mot biffure et en l'honneur desquels ceux
ci les obligent a certaines observances, sou=
vent très onereuses, et auxquelles cependant
ils n'oseroient manquer, dans la crainte de
mourir sur le champ. Ces Fetiches ne sont
que pour les particuliers; les Pays et les Rois
en ont d'autres, qu'ils appellent les grands
Fetiches
, qui 2 mots biffure en sont les Divinités
tutelaires.

Les Negres du Juida n'offrent non plus ni
prieres ni sacrifices au Dieu Createur, qu'ils
supposent trop elevé au dessus d'eux pour
s'occuper de leur situation. Ils s'adressent
aussi aux seuls Fetiches auxquels Dieu
a confié le gouvernement du monde;
cependant ils semblent ne les regarder que
comme des substances materielles revetues
par l'Etre supreme de certaines vertus pour
l'avantage du genre humain.

<37> Une Idolatrie grossiere regne chès les
Negres d'Ardra et chès les Dahomays.
Ceux de Benin adorent le Demon et lui
sacrifient des hommes et des betes, 1 mot biffure
du mal qu'il leur fait et qu'il peut leur
faire
; Ils ont chacun leurs Fetiches et
leur Fetissero, ou Pretre 2 mots biffure pour le
2 mots biffure Fetiche
. Tout ce qu'ils voient
d'un peu extraordinaire leur fournit
autant de Divinités, mais subalternes
qui leur servent de mediateur entr'eux
et le Dieu principal, qu'ils regardent
comme tout puissant et immateriel
.

Ceux du Congo adorent nombre de Dieux
inferieurs au grand Dieu tout puissant;
mais il y a chès eux une secte particu=
liere qui 1 mot biffure ne connoit qu'un seul
Dieu.

Ceux de Lovango ont ne s'embarassent
gueres du Dieu souverain parce qu'ils
croient qu'il gouverne le monde par
des vicaires, auxquels il faut s'adres=
ser pour obtenir des graces.

Les Hottentots disent que le Dieu Cre=
ateur est un excellent homme qui
ne fait mal a personne; mais ils en
consequence de quoi ne lui rendent
aucun culte. Mais ils rendent des
hommages religieux a la Lune, et lors=
qu'elle est pleine, ils lui offrent des
sacrifices, ils lui demandent des sai=
sons favorables, des paturages pour
leurs troupeaux et beaucoup de lait.

Ils temoignent de leur une venera=
tion religieuse pour leurs saints, ou
certains hommes celebres parmis eux

<37v> par leurs bonnes oeuvres, ils honorent les
ames des morts, ils craignent les revenans
ils croient aux evocations, cad. que les
sorciers peuvent faire revenir les esprits
des morts
. Ils reconnoissent aussi une
Divinité maligne quils appellent
Touquoa. source de tout le mal qui
arrive dans le monde.

Outre le Dieu immortel les Ethiopiens
admettent un autre Dieu mortel

L'Idée des Divinités subalternes, vicaïres
ou Lieutenans d'un Dieu Supreme, a passe
ches tous les peuples sauvages de l'Ame=
rique.

Ceux de lAmerique Septentrionale admet=
tent outre le createur, qui est le premier
et le maitre de tous les Esprits, plusieurs
autres Divinités, telles que le Soleil, la
Lune ou la terre. Il est Vrai que ces Indiens Du moins ils
temoignent beaucoup de
veneration pour ces
grands corps et qu'ils
leur presentent des offran=
des. Mais il est incer=
tain
Peutetre ces ceremonies
ne sont
elles simplement
qu'une suite de l'impression
extraordinaire que ces
objets font sur eux
peut etre aussi les ou
ils les regardent com

ils comme la residence habi=
tuelle des Esprits invi=
sibles dont ils envient
l'existence.
  4 mots biffure
3 mots biffure
 Ils ont en
singuliere veneration Michipisis, le
Dieu des eaux qui excite ou appaise les
tempetes. Meteomeck le Dieu des glaces.
Ils distinguent les Dieux inferieurs bons et les
mauvais; 2 lignes biffure

10 lignes biffure

<38> 1 ligne biffure
et Quant aux bons, ils supposent quils sont
commis a la garde des hommes, et que
chacun a le sien. Ces Dieux domestiques
ils les appellent Manitous
et ils mettent en eux la plus
grande confiance. 1 mot biffure
3 lignes biffure
  C'est a leur puissance
bienfaisante qu'ils ont recours dans les
perils, les entreprises, ou pour obtenir
quelque faveur extraordinaire. Ils dis=
tinguent particulierement les Dieux du
songe qui leur sont propices ou funestes
dans la guerre, la chasse et la pêche.

Ces Esprits sont honorés par diverses sortes
d'offrandes ou sacrifices puerils, et la
crainte du moindre danger leur fait ren=
dre les mêmes honneurs aux Esprits
malfaisans qu'ils invoquent avec la
plus grande ferveur
auxquels ils attribuent
les orages, les pertes et
tous les maux, et qu'ils in=
voquent pour flechir
leur courroux.

6 lignes biffure

Il n'est rien dans la nature pour les peu=
ples qui nait son Esprit, ils en distinguent
de plusieurs ordres et ne leur attribuent
pas a tous la même vertu; Ils 3 mots biffure
qu'ils
s'en font aussi des represen=
tations corporelles
1 ligne biffure, et
qu'ils leur attribuent
une forme humaine;
2 lignes biffure
  ainsi leur
religion est pour le fond la meme que
celle de tous les anciens peuples.

Dans tout ce qu'ils ne comprennent point
ils supposent un Esprit Superieur, et
leur solution ordinaire est de dire
c'est un Esprit. Ils emploient cette
même expression pour tous ceux qui se
distinguent par quelque talent ou action
peu ordinaire, ce sont des Esprits cad.
ils ont un Esprit protecteur d'un ordre
eminent.

Ils regardent les ames comme les ombres
ou images animées des corps, et par
une suite de ce principe, ils supposent
que tout dans l'univers a son ame.
Ils croient que les ames des bêtes ont
aussi leur place dans le pays des ames
humaines; chaque animal a son
<38v> Genie comme eux. Ils admettent une
espece de metempsycose, des champs Eli=
sees et une mytologie qui a un rapport
sensible avec la religion des premiers
barbares qui occupent la Grece et l'Asie.

Les canadiens en particulier reconnoissent
des Esprits jusques dans les choses inanimées,
chacun suivant eux a son genie tutelai=
re: ils font aux Esprits des oblations et mê=
me des sacrifices; ils craignent surtout
et invoquent les Esprits malfaisans:

ceux de la Baye d'Hudson adorent
un Dieu appellé Ouitikka qu'ils repre=
sentent comme la source et l'instrument
de toutes sortes de maux.

Les Indiens de Maryland croient qu'il
y a plusieurs Dieux qu'ils nomment
Mantaac.

Ceux de la Virginie placent au Ciel le
Dieu tout bon, mais ils croient qu'il est
inutile de l'adorer, parce que quoiqu'ils soit
le premier auteur de tous les biens, il ne
se mele point de les distribuer aux hom=
mes, les abandonnant a eux mêmes, pour
s'en procurer le plus qu'ils peuvent; ils
n'adressent leurs hommages qu'au mau=
vais Esprit, parce que s'ils ne l'appaisoient
pas, il leur enleveroit tous leurs biens et
leur enverroit la guerre, la famine, la
peste; ils croient que pendant que Dieu
jouit de son bonheur dans le Ciel, ce
mechant Esprit est sans cesse occupé
de leurs affaires, qu'il les visite souvent
qu'il est dans l'air, dans le tonnere, dans
les tempetes.

<39> Ces peuples erigent des colonnes de pierre
et leur rendent quelques 1 mot biffure hommages
comme a des emblemes de l'eternité et de
l'immortalite de Dieu; ils en font de même
a l'egard des rivieres comme emblemes de
cette eternité, ils elevent des autels a la
moïndre occasion et souvent pour des
raisons mysterieuses.

Quelques peuples de la Virginie croient que
Dieu aiant resolu de créer le monde,
crea d'abord une classe de Dieux subal=
ternes pour lui aider a la dans cet ouvrage
et qu'il etablit ensuite pour gouverner
lUnivers. Après cela il crea le Soleil
la Lune, et le etoiles, qui furent des Dieux
inferieurs aux premiers. Toutes les
autres creatures furent tirées de l'eau.

Ceux de la Louisiane pensent que Dieu
a fait tout par sa volonté, mais que de
petits Esprtis ont fait par ses ordres les
beaux ouvrages que nous admirons.
Ils croient qu'il ne faut prier que le
petit Esprit Minguo-Pouscoulou
qui est mechant, qui peut affliger de
maladie, de mort &c.

Les Floridiens adorent sous le nom de
Toia, le mauvais principe (opposé a
Okée) qui suivant eux ne cesse de les
tourmenter et qu'il faut appaiser.
2 lignes biffure

Ceux de la nouvelle Angleterre recon=
noissent plusieurs Dieux inferieurs.

Ceux de la caroline disent que les affai=
res des hommes ne meritent pas les soins
du grand Dieu, qu'il 3 mots biffure
4 mots biffure laisse ce
bas monde cad qu'il le laisse a la disposition
des bons et des mauvais Esprits. 1 mot biffure
2 mots biffure

<39v> Les habitans des Isles Antilles disoient
que la puissance superieure et bienfaisan=
te reside aux Cieux, ou elle jouit des dou=
ceurs de sa propre felicité sans s'offenser
des mauvaises actions des hommes; d'ou
vient quils ne l'adoroient point; leurs hom=
mages s'adressentoient sans doute a d'autres
Divinités inferieures.

Les habitans de l'Isle Espagnole avoient
plusieurs Divinités subalternes qu'ils nommoient
Chemis ou Zemes: ils les faisoient de
craie, de pierre, ou de terre cuite. cetoit 2 mots biffure
5 lignes biffure leurs Divinités tutelaires.

Les Mexicains regardoïent aussi leur
grand Dieu sans nom comme etant oisif
dans le ciel, ou incapable de tout gou=
verner sans secours. Ils lui rendoient
cependant des actions de graces;
mais
ils invoquoient un autre grand Dieu
appellé Vitzili puztli.  Ils adoroient
encor une multitude de Dieux qu'on
faisoit monter jusques a 2000.  Leur opïnion etoit
que les hommes ne connurent ces Dieux
qu'a mesure qu'ils devïnrent plus mise=
rables et que leurs besoins se 1 mot biffure
c'etoient, suivant eux, les necessités des hommes
qui donnoient l'Etre aux necessités des diffe
=
rens objets de leur culte. Ils les regardoient
comme des Genies bienfaisans qui se
montroient lors que les hommes avoient
<40> besoin de leur assistance. Outre leurs
idoles, ils adoroient encor le Soleil, la
Lune, l'etoile du jour, la mer et la
terre.

Les Peruviens adoroient le Soleil com=
me un Dieu visible, en lui offrant des
sacrifices et en celebrant de grandes fêtes
a sa gloire. Mais ils avoient dans leur
ame plus de veneration encor pour Pa=
chacamac, puisqu'ils n'osoient pas pro=
ferer son nom, tandis qu'ils nommoient
le Soleil a tous momens.

Les Brasiliens croient que certains
mauvais Esprits qu'ils appellent Aymans
dont ils se plaignent d'etre souvent mal=
tratités dans cette vie sont les boureaux
destinés a tourmenter les mechans dans
l'autre vie. Ils ont des fêtes religieuses
et croient que leurs Devins sont en com=
merce avec des puissances invisibles,
dont ils recoivent le pouvoir d'inspirer
de la force et du courage aux guerriers
et de faire croitre les plantes et les
fruits.

<40v> Conclusion. Il y a donc eu un fond
commun de Polytheisme et d'Idolatrie
repandu universellement chès tous les
peuples anciens et modernes que la reve=
lation divine n'a point eclairé; sans il n'en faut pas excep=
ter 1 mot biffure les plus policés qui semblent
méme avoir porté a cet egard l'illusion
beaucoup et laveuglement plus loin que les autres, par la
multitude de leurs objets de culte.

La source commune et le fondement
de ce Polytheisme  a été la croiance
universelle de certaines Intelligences
ou divinités subalternesgenies mo=
teurs qui 1 mot biffure commis par la Divinité
supreme pour animer les diverses par=
ties dela nature, et exercer leur pouvoir
sur les hommes:

a la verité
c'est surtout les mon=
tagnes, les forets, les
rochers et les caver=
nes, qu'on sest plus
a peupler d'Intelli=
gences, de genies, de
nymphes. Cela
a pu venir d'une es=
pece d'etonnement
et d'effroi dont les
hommes ne peuvent
se deffendre lorsqu'ils
se trouvent seuls et
isolés dans ces lieux,
et surtout vers la
nuit. Le peuple
croit encor y voir
des choses ou en=
tendre des choses
extraordinaires.
 

Ces prejugés a ont été si fort enracinés chès
tous les hommes, qu'il n'a'ont pu même etre
detruits entierement chès les nations qui
professent le christianisme, puisque
le peuple, partout superstitieux et
craintif,  y parle encor de Genies ïnvi=
sibles qu'il nomme Esprits, Esprits
folletsLutins, 1 mot biffure servans, auxquels
il attribue une foule d'effets naturels
lors qu'il n'en connoit pas la cause. et
2 lignes biffure

C'est ainsi encor que les nos paysans, disent
que ces feux nocturnes qu'on appercoit
dans les lieux humides sont des Esprits
follets qui se plaisent a egarer les voia=
geurs, ou les ames de ceux qui ont
transporté les bornes, d'ou vient qu'ils
les appellent porta bornas; que la
<41> maladie appellée cochemar est pro=
curée par un Lutin qui vïent peser sur
le patient, que certains bruits nocturnes
sont causés par des revenans qui se plai=
sent a troubler le repos des vivans; que
1 ligne biffure
enfans
les Esprits malfaisans, ou les sor=
ciers qui sont en commerce avec eux, qui
envoient des charmes, des malefices, des
maladies sur les personnes et sur le betail,
qui tirent le lait des vaches, empoison=
nent les paturages, qui font du bruit
dans les airs, qui y produisent des orages,
y tiennent leur Saba &c.

C'est ainsi que On croit encor que dans les vieux
chateaux, les vieilles masures, il y a
des Esprits occupés a garder les thresors
qui y ont été enfouis, et qu'on voit aux
environs des phantomes.

Chès tous les peuples grossiers, Ainsi la
crainte des Esprits, et les terreurs pani=
ques ont été une maladie generale
dans tous les temps, et nous voions encor
au milieu de nous dans le sein du Chris=
tianisme, des monumens toujours subsis=
tans du Polytheisme et de sa premiere
et commune origïne.

ches les peuples même les plus polices
Tout nous rappelle encor les Dieux
que nos Peres avoient ïmaginés ou tirés
de Rome et d'Athenes, et sils sont ban=
nis de nos temples, ils revivent encor
sur nos theatres ou ils jouent encor
leur rolle; la peinture, la Sculpture
la poesie nous les reproduisent sans
<41v> cesse; leur regne s'etend encor sur les
beaux arts, et tout nous crie que les
hommes aiment encor ces chimeres,
quil y a chès tous un penchant naturel
qui les attire vers le polytheisme, 2 mots biffure
qui les invite a multiplier leurs objets
de culte, et qui produisoit infailliblement
encor son effet, de la meme maniere qu'il
la produit chès les anciens peuples, sans
le secours que le Christianisme a fourni
aux hommes pour les preserver
de ce mal
contagieux.
Rien n'est

<42> Rien n'est donc plus faux que ce que
Bayle a soutenu qu'avant la publi=
cation de l'Evangile, lEtre Supreme n'etoit

connu que des Juifs et que les autres
nations adoroient plusieurs Dieux
souverains chacun dans le departement
qu'il avoit plu aux hommes de leur
assigner. Jamais il n'y a eu sur la
terre de polytheisme d'egalité, par=
tout les hommes ont admis un poly=
theisme de subordination. Tous les
monumens que nous avons rapportés
nous representent les nations divisées
sur le nombre et la qualité des divinités
subalternes, mais toutes d'accord a
les envisager comme subordonées a
un Etre supreme. L'Imaginatïon
les a partagés sur le dernier point,
mais la raison qui est la même chès
tous les hommes les peuples les a reunies sur le
dernier.

D'ailleurs Nous sommes aussi fort eloignés de
chercher a disculper les nations de
Polytheisme et d'Idolatrie, puisqu'elles
ont adoré comme Dieux des Etres qui
n'etoient point Dieu, et honoré leurs
simulacres qu'ils qu'on supposoitent des
Etres divins, parce qu'ils qu'on les croioitent
remplis d'une substance divine.
on ne doit point etre surpris qu'ils aient
pu associer ces cultes bizarres avec
l'idée d'un Etre supreme, puisque
Platon lui même a pu faire cette
association.

<43>  Chapitre VI.
Systheme des Mytologues historiens ceux
qui expliquent toute la mytologie par
lhistoire, et ou qui veulent que les plus anciens
Dieux n'aient été que des hommes divini=
ses: refutation de ce Systheme.

Ce que nous avons dit en general parrapport a l'origine
du Polytheisme semble 1 mot biffure n'offrir 1 mot biffure aucune
des difficultés; mais on en voit bientot nai=
tre de considerables lorsqu'on jette un coup
d'oeuil sur la mytologie qui semble n'etre
qu'un tableau historique des Divinites
anciennes, ou leur sont attribués tous les
caracteres qui conviennent a des hommes,
origine, genealogie, naissance, mariage,
alliances, descendans, relations de parenté, de rangs et de subor=
dination, voiages, aventures, exploits
querelles, guerres combats, actions même des honetes et
injustes, licence, malfaisance &c. sans
parler encor des faits absurdes, impossi=
bles, monstrueux, dont on s'est plu a
charger tous ces recits, principalement
chès les Grecs.

Frappés de tous ces traits historiques
sous lesquels la mytologie a peint les
premiers Dieux, la plupart des savans
anciens et modernes ont supposé que
ces Dieux ches les diverses nations et, particulierement chès les Grecs,
n'avoient été originairement que certains
hommes illustres parmi leurs premiers ayeux,
des chefs de nations, fondateurs des plus
anciens etats, des Legislateurs, des inven=
teurs des arts les plus necessaires, des con=
querans fameux, placés au rang des
<43v> Dieux après leur mort; et que les recits
mytologiques n'ont été autre chose que
l'histoire reelle des ces fameux personages
deguisée sous certaines expressions equivoque
et embellie par l'ïmagination feconde des
Poëtes de circonstances merveilleuses et
souvent incroiables.

Ainsi selon ces savans Uranus, Chronos,
Jupiter furent trois monarques Grecs qui
se succcederent, et la troupe des Dieux qui leur
furent associés, ne presente qu'une Liste
des principaux personages qui vecurent
sous leur regne ou peu après. Tout ce
qui est dit de leur genealogie, naissance
&c tout cela offre un fond vrai, mais
chargé d'additions inventées et imaginées
a plaisir.

Les Egyptiens et les Phoeniciens ajoutent ils,
qui vinrent avec des colonies dans la suite en Grece,
firent aussi part aux Grecs de divers evene=
mens arrivés ches eux, et ceux ci n'entendant
leurs recits qu'a demi et tout de travers,
voiant que du merveilleux, enfirent de
nouvelles Episodes a leur ancienne histoire
qu'ils chargerent de faits etrangers.

De ce melange bisarre de personages
qui avoient vecu en differens temps, et de
faits arrivés en differens lieux, de noms
de diverses Langues alterés ou malenten=
dus, naquit enfin un assemblage aussi
bisarre qu'incomprehensible, que les Poëtes
habillerent encor chacun a sa maniere
et a son gout.

Cette confusion augmente encor etran=
gement lors qu'on en vint a associer aux
personages reels divers personages ideaux
et allegoriques que les Poëtes des temps pos=
terieurs introduisirent encor sur le Thea=
tre Mytologique.

<44> D'ou il resulte que sil'on veut comprendre
quelque chose dans le cahos de Mytologie
que nous ont laissé Homere et Hesiode, il
faut travailler a y demeler le vrai histo=
rique qui en fait le fond ou le cannevas
pour le distinguer des fables qui lui ont
servi d'ornement.

Or c'est ce qu'on ne peut faire, selon eux,
qu'en cherchant l'origine de la plupart des
noms Grecs dans les Langues d'orient,
qu'en rapprochant, autant qu'on le peut,
l'histoire de la Grece de celle d'Egypte et
de Phoenicie, et expliquant le tout con=
formement a ce que nous connoissons des
idées et des moeurs des anciens peuples.

Tel est le Systeme de MM. Bochart, le
clerc, Banier, que Fourmont, qui ont pretendu par
la porter de la lumiere sur les premiers
temps, ces temps que les Latins, qui devoient cepen=
dant etre mieux que nous sur l'histoire 1 mot biffure
Grecque,
ont appellé temps inconnus,
renfermés dans l'espace qui s'est ecoulé
depuis la dispersion jusques au Deluge
d'Ogyges, et les temps fabuleux ou he=
roiques qui s'etendent dela jusques aux
Olympiades, epoque a laquelle comman=
cent les premiers temps historiques, qui peu=
vent etre rapportes a un ordre
suivi de chronologie.

<44v> Mais au sentiment de ces savans qu'on
appelle Mythologues historiens on oppose
une foule de raisons qui en demontrent
l'erreur.
les raisons suivantes

1° Il est prouvé par ce qui a été dit Chap.
II
que le Polytheisme n'a jamais eu d'au=
tre origine que l'opinion generalement re=
pendue par toute la terre, de l'existence de
certaines Intelligences, 3 mots biffure
subalternes commises au gouverne=
ment de cet Univers.

II° Cela est confirmé par les temoignages
des auteurs sacres et prophanes 2 mots biffure qui se
reunissent a affirmer supposer 3 mots biffure
1 ligne biffure
1 mot biffure
que les premiers peuples n'ont jamais
pensé a elever des hommes, vivans ou morts, au rang
des Dieux 1 mot biffure et adorer des mortels, vivans
ni morts
, ni a rendre aucun hommage
a leurs simulacres; que le culte des Heros
ne s'est introduit que fort tard et long=
temps après celui des anciens et principaux Dieux, des
Dieux principaux du Paganisme,
dont
lidée avoit été prise dans l'opinion des
Genies administrateurs.

III. Nous trouvons une nouvelle confir=
mation dans tout ce On doit insister parti=
culierement ici sur le temoignage des
Poëtes, et surtout d'Hesiode, qui dans
ses ecrits ne laisse echapper aucune occa=
sion de distinguer nettement les Dieux
anciens d'avec les hommes, des temps les plus an=
ciens, et qui, lors même qu'il vient en est venu a
parler des Heros des temps posterieurs
ne s'est jamais avisé de les transformer
en Dieux. proprement dits, ni même de
transporter dans le Ciel ou l'Olympe
pour les placer 2 mots biffure.

<45> Ceux meme auxquels Jupiter donna un rang parmi
les immortels, ne partagerent jamais avec les
Dieux leur nature, leur pouvoir, leurs privile=
ges, et ce qu'on disoit des Champs Elisées ou ils
etoient relegués après leur mort, prouve
evidemment qu'on ne les confondoit point
avec les grands Dieux immortels qui ont dont le Ciel
ou l'Olympe pour etoit la demeure.

IV. Rien de plus positif encor que tous
ces details sur la religion des peuples anciens
et modernes, adonnés a l'Idolatrie
rappor=
tés dans les chap. IV et V. par lesquels il
conste que le polytheisme des anciens Egyptiens
Pheniciens &c. n'a jamais consisté que
dans le culte des Genies ou Divinités
subalternes, preposées aux diverses par=
ties de la nature, et que le polytheisme
des peuples modernes non civilisés se
trouve exactement d'accord en cela avec celui
des peuples anciens; les uns et les autres aiant
été conduits aux par les mêmes causes
aux memes erreurs et aux mêmes supers=
titions. Puisque la mythologie des
idolatries modernes ne renferme rien
d'historique, pourquoi chercher de
l'histoire dans celle des Grecs et des
Romains?

<45v> V Le Systheme des Mytologues historiens
qui suppose que les hommes ont comman=
ce par adorer des hommes, est directement
en opposition avec la progress marche
progressive que l'erreur a du suivre na=
turellement dans l'Esprit des peuples igno=
rans et grossiers.

Mais, dit on, Hesiode
suppose 
que des hommes mortels,
Semelé et son fils Bachus
sont parvenus a la divi=
nité; quelle impossibilité
y a til que Jupiter et
tous les autres, quoique
de purs hommes, y soient
parvenus de même?
A cela nous repondons
que Hesiode met une
grande difference entre
ces mortels devenus
Dieux, et ceux qui avoient
été Dieux de tout temps;
mais dans le Systheme
que nous refutons, il n'y
en a aucune.
Quand est ce que les
Grecs ont cru que les
Dieux avoient eu com=
merce avec des mortelles,
et les avoient associées
aussi bïen que leurs enfans
aux honneurs de la Divi=
nité? C'est longtemps après
l'origine des fables, dans
le temps qu'on avoit deja
pris l'opinion qu'elles de=
voient etre entendues a
la Lettre, et que les an=
ciens Dieux avoient deja
vecu sur la terre; reveties
qui sont venues dans
les temps posterieurs; car
jamaïs les Grecs n'ont
pu passer tout d'un
coup du Theisme a
l'adoration des hommes.

En vain oppose ton
qu'il falloit bien qu'on
envisageat les anciens
Dieux comme des hom=
mes, puisqu'on leur
attribuoit une multi=
tude d'enfans? Mais
qui ne scait qu'on leur
 
attribuoit des enfans
dans le même sens qu'on
leur attribuoit les pas=
sions de l'humanité, c.a.d.
par allegorie, par une
equivoque du Langa=
ge; et c'est parce qu'on
leur avoit ainsi attri=
bué des enfans qu'on
vint a se figurer qu'ils
avoient été des hommes.
Preuve de cela c'est qu'on
a attribué des enfans
a ses pretendus hommes
après leur mort 1 mot biffure nous
3 lignes biffure verrons dans la
suite en quel sens.

Ainsi on nous donne
pour origine des fables
un prejugé qui ne
vint que longtemps
après que les fables
furent introduites.
1 mot biffure fut la maniere
de penser des premiers
Colons de la Grece; 1 mot biffure
celle des Grecs du temps
d'Homere; la religion
ches eux 2 mots biffure les
mêmes revolutions que
leur etat de societé, et
fut analogue en tout
temps a leurs moeurs.

On n'a qu'a voir plus
bas les raisons qui
ont fait emploier cette
denomination d'enfans
pour comprendre que
elle n'a jamais pu
fonder l'opinion que
les anciens Dieux
furent des hommes
divinisés.

Mais, dit on les hommes doivent avoir été na=
turellement portés a honorer les premiers fon=
dateur des Etats, des Legislateurs, des Rois
bienfaisans, des Heros destructeurs des mons=
tres, les inventeurs des arts les plus necessai=
res &c. ils ont du même naturellement les
placer après leur mort au rang des immor=
tels heureux et puissans, en recompense
de leur merite et de leurs services, comme
les Romains firent a l'egard de Romulus.

On a vu aussi des personages puissans
qui ont exigé qu'on leur rendit les hommages
divins deja pendant leur vie, comme Na=
buchodonosor,  et sans doute plusieurs
autres souverains de l'Asie auprès desquels
la basse adulation fut portée a son comble
ce qui a fait dire a l'auteur de la Sapience
que les images ont été adorées par
le commandement des Tyrans. Ne serait
ce point ici, dit on, l'origine premiere du Poly=
theisme? Mais a cela on repond

1° que le Polytheisme et l'Idolatrie sont
nées dans les ages les plus grossiers, et 1 mot biffure
que leur naissance a precede presque partout la fondation
des empires, les Legislations et en general
les temps ou les nations ont commance
a se policer, ou les hommes ont pu se dis=
tinguer par des exploits eclatans ou par
<46> des decouvertes importantes dans les arts.
Les nations avoient donc des Dieux anciens
avant que l'idée put leur venir de divini=
ser des hommes.

2° Les plus anciens peuples Idolatres n'ont
jamais placé leurs Divinités dans la liste
de leurs premiers souverains, ils ont tou=
jours distingué le regne des Dieux de
celui des Rois et ont constamment sup=
posé le premier anterieur au dernier.
Jamais les Egyptiens n'ont regardé Osiris
ni les Grecs 1 mot biffure1 mot biffure et Chronos, ni les
Grecs Zeus ou Jupiter, comme des fon=
dateur 1 mot biffure la tige de leurs dynas=
ties, les Titans furent adorés avant
la fondations des Royaumes.

3° Le Polytheisme et l'Idolatrie ont regné,
et même regnent encor chès des peuples
absolument grossiers et barbares, qui
n'ont eu ni Rois, ni Legislateurs, ni
Heros, ni Artistes celébres, ni personne
qui put jamais etre envisagé parmi
eux comme
paroitre digne de l'Apotheose. Les
Sauvages ont tous leurs Divinités,
mais ou sont ceux qui ont pensé a
meta transformer des hommes en Dieux.
Les anciens peuples auroient ils pu avoir
cette idée?

<46v> 4° On ne voit pas que les hommes aient
jamais eté fort enclins a rendre des hon=
neurs divins a leurs semblables, et cela
sans doute precisement parce qu'ils etoient
visibles pour eux et ne gagnoient gueres
a etre vus;
tandis qu'ils ont toujours été
portés a la croiance 1 mot biffure de se former
de grandes idées des Esprits invisibles, des
genies
auxquels ils attribuoient des ope=
rations merveilleuses. Si dans la suite
des ages les hommes en vinrent jusques
a rendre des hommages a d'autres hom=
mes après leur mort, cela il fallut bien
du temps et une longue suite d'erreurs
pour pervertir leurs idées religieuses
jusques a ce point, et amener ce nou=
veau genre d'Idolatrie enté en quelque
sorte sur l'ancienne.

5 On ne trouve en effet 3 mots biffure
dans l'histoire des anciens peuples au=
cun fait qui prouve que leur premier
et principal objet de culte ait été des
hommes divinisés, ni qu'on ait Deifie
aucun Roi, aucuni Legislateur,
1 mot biffure ni destructeur de monstres (qui
n'existerent jamais) ni aucun chasseur
de betes feroces, qui etoient cependant
les hommes des plus utiles dans un
temps ou la terre en etoit couverte,

ni aucun inventeur des arts les plus
necessaires, a l'espece humaine; car 1 mot biffure
1 ligne biffure
que de tels
arts dailleurs qui n'ont jamais été inventé
par un seul effort de genie, ni par conse
=
quent par un seul homme, 1 mot biffure qu'ils ne peu=
vent avoir été introduits et formés que
<47> par des progrès successifs et même
très lents, en debutant par des essais
d'abord très grossiers, qui 1 mot biffure a force d'etre
reputé ont été peu a peu perfectionés, et
auxquels le hazard a souvent eu plus de
1 mot biffure que le genie et l'industrie; ce qui fait
que ce que chaque homme individuel
a pu y contribuer n'a jamais été assès im
=
portant et brillant pour meriter des au=
tels. Les arts d'ailleurs n'ont pu etre aussi
poussés a un certain point de perfection
par des hommes celebres, que longtemps
après la fondation des Societés, et alors
depuis longtemps on adoroit des Dieux
anciens. qui pouvoient etre des hom
=
mes.
ni perfectiones
que longtemps
apres la forma=
tion des Societes
et lors que les
Dieux anciens
etoient deja depuis
longtemp adores.

6° On pourroit concoit 1 mot biffure encor comment les
hommes ont pu venir a bout de se figurer
6. On peut concevoir que des Dieux immor=
tels aient voulu honorer de l'immortalité
des hommes mortels en recompense de leurs
merites. Mais si l'on suppose que les pre=
miers et anciens Dieux ont été des hommes
deifiés, parquelle progression d'idées les
hommes peuples auront ils pu venir a se figurer s'imaginer
que ces Dieux eussent communiqué leur
Divinité a des Etres physiques ou allego=
riques.

Il seroit impossible de concevoir comprendre en particu=
lier par rapport aux Egyptiens, par quel
enchainement d'idées d'opinions ils auroient pu pas=
ser de l'adoration des hommes a celle des
astres, dela au culte des animaux et des
plantes, et qu'elle a pu etre dans leur Esprit la
connexion de ces erreurs. On comprendroit
encor moins comment ils auroient pu des
<47v> les temps les plus anciens, adorer des
hommes sous la figure des animaux
plutot que sous des formes humaines qui
en auroient été des images bien plus exactes.

On sait d'ailleurs que les Egyptiens n'ont
pensé que fort tard a mettre leurs Rois au
rang des Dieux comme ils le faisoient du
temps de Diodore de Sicile.  Herodote pose même en fait
que de son temps les Egyptiens ne connois=
soient point de Heros ou demi Dieux. 

On ne peut donc pas dire que ce soit
eux qui aient imaginé les premiers le culte
des Heros, et 1 mot biffure qui 1 mot biffure l'aient communiqué
aux autres peuples.

C'est pourcela que Pytagore, Platon &.
qui avoient voiagé en Egypte, declarent
que les Dieux des Egyptiens etoient plutot
des Demons que des hommes, et que leur
fables etoient a peu prés les mêmes que
celles des Titans de la Grece.

Or relativement aux Grecs, il seroit
plus inconcevable encor que les Titans, et
leurs premiers Dieux, eussent été des hom=
mes, des Rois illustres, dans un temps
ou les peuplades de la Grece etoient encor
sauvages et barbares, ou la population
de l'Asie etoit encor très foible et ou il
ne pouvoit y avoir de Royaumes.

Car quelle population pouvoit il y avoir
quel royaume considerable eut pu se
former au dela des mers, en Grece et
en Thessalie, dans le temps quil comman=
coit a peine a se former un Empire
en Asie aux environs de Senhar, le
premier berceau du genre humain

et qu'il n'y en avoit encor aucun dans
l'Asie mineure
.

<48> Comment se figurer
Comment se figurer encor que Uranus,
Chronus, Jupiter, Pluton, Neptune, Hercule
aient été des Rois, des heros, des Guerriers
entreprenans, occupés sans cesse a voiager
d'un pays a l'autre pour
faire de grandes
conquetes, dans un temps ou il n'y avoit
encor ni navigation, ni routes de commu=
nication, ni etats, ni Societés regulieres?
Comment concevoir que ces pretendus per=
sonages qu'on suppose avoir regné en
differentes contrées
ont pu fonder un
empire florissant chès des peuples a peu près
barbares, et ensuite ont fini par etre
mis au rang des Dieux, sans transmettre
2 lignes biffure
sans
laisser sur la terre aucun monument 2 mots biffure
certain de leur existence et de leur regne
brillant. Car on ne sait pas même ou
ces fameux Princes sont nés, ou ils ont
vecu, ou a été le siege principal de leur
empire, et ce que sont devenus leurs
etats après leur mort. Jupiter, Neptune,
Pluton, laissent a la verité quelques en=
fans, mais on n'en parle plus, et après
eux disparoissent en Grece 2 mots biffure
4 mots biffure
les Grecs 1 mot biffure retombans
4 mots biffure dans leur barbarie; il faut que des
2 mots biffure emigrans d'Egypte et
de Phoenicie viennent quelques siecles
apres les en retirer de nouveau.

<48v> apres les tirer de la barbarie
1 ligne biffure
 Et ici il faut
encor concevoir que ces etrangers aient
pu venir a bout de leur persuader que
certains hommes fameux en Egypte et
en Phoenicie fussent soient devenus des Dieux, et
les engager a les honorer comme tels, et
meme a substituer leur culte a celui de
leurs anciennes Divinités. 3 mots biffure
7 lignes biffure

Enfin quant on supposeroit qu'il y a eu
de tels personages fameux mis au rang
des Dieux après leur mort dans les temps
anciens, comment comprendre quils aient
pu devenir le fond d'une histoire detaillée
telle que celle qu'on trouve dans la myto=
logie? qui nous presente le Tableau de
leur genealogie, leur naissance &c.
Ches
les anciens Grecs, même après le siecle des
Titans, on ne trouve ni traddition, ni
ecriture, ni monumens; ou auroit on
pu dans la suite recueillir les materiaux
d'e cetteune histoire? Qui ne sait que partout
il y a eu bien des evenemens et des revolu=
tions <49> avant qu'on ait eu meme l'idée
d'en transmettre le souvenir a la poste=
rité. Comment etablir une histoire sur
des personages sur lesquels dont on n'a jamais
rien dit de precis, et 1 mot biffure par rapport auxquels les narrations se
trouvent melées de physique, de morale,
3 mots biffure et d'allegories? bizarres.

Chès les Mytologues
Venus est tantot une
Deesse, tantot une fem=
me debauchée, tantot
une planete, tantot
une passion.

Jupiter est pris ici pour
le maitre des Dieux,
la pour le ciel materiel,
ailleurs pour la pluie,
il est aussi un Roi de
Crete, d'Egypte, et de
Thessalie

Junon en tout a la fois
la Reine des Cieux, l'air
la lune, la pluie, une
Reine d'Argon.

Comment accorder
tout cela sil faut l'ap=
pliquer historique=
ment?

Des hommes, dit on, ont voulu etre adorés
deja de leur vivant; mais ce n'a jamais
été que depuis que les grands Empires se
sont formés que et que les Rois se sont elevés
a un haut degré de puissance. D'ailleurs
ces honneurs extorqués 3 mots biffure
n'ont jamais été des hommages volontaires
et n'ont pas empeché ces hommes puis=
sans de devenir un objet d'execration
apres leur mort. Cette basse flatterie
du moïns n'a duré qu'aussi longtemps
qu'ils ont été en etat de se faïre craindre,
et si elle a eu lieu dans l'Asie, ou en
Egypte, on ne peut rien en conclure a
l'egard de la Grece et de Rome.

On nous parle de la consecration de
Romulus après sa mort, mais elle n'a
eu lieu que dans des temps bien posterieurs
au regne des anciennes Divinités; qui
peut douter d'ailleurs qu'elle ne voit au
=
tre chose ce n'est la qu'une fable toute pure inven=
tée par les historiens? et on ne sauroit
Comment meme concilier cette preten=
due Apotheose de Romulus avec les Loix
de Numa son successeur  que nous avons
2 lignes biffure

<49v> 7 lignes biffure
Jules Cesar est le premier Romain a qui cet hon=
neur ait été deferé pour etre continué en=
suite 3 mots biffure aux Empereurs,
mais moins par respect pour la memoire
du mort que par une basse flatterie pour
le vivant son successeur. D'ailleurs ja=
mais on ne fit ces Empereurs egaux
aux Dieux, on les supposoit aussi rele=
gués après leur mort dans les champs
Elisees, et l'inscription Diis manibus
prouve bien qu'on ne les confondoit pas
avec les Divinités.

On insiste beaucoup ici sur ce que l'expli=
catïon historique des fables a été admise
par toute l'antiquité, comme il paroit par
lhistoire sacrée d'Evhemere qui soutient,
selon l'opinion commune de son temps,
que les plus anciens des Dieux n'avoient
été que des hommes et que les fables my=
tologiques n'etoient autre chose que lhistoire
d'Egypte et de Grece: on ajoute que
cet ouvrage a été reconnu pour authen=
tique et digne de foi 5 mots biffure
et par les plus anciens Apologistes du Xe qui s'en
sont servis pour comme d'un Livre non
suspect pour retracer le vrai tableau
du Paganisme. 

<50> A cela on repond que l'histoire sacrée d'Evhe=
mere porte tous les caracteres d'un Roman,
et que tous les anciens ecrivains l'ont rejetté
comme une fable 1 mot biffure indigne d'aucune
creance. 

Dans le N'aiant d'autre but que de combattre le Paganis=
me regnant de leur temps, les Peres et les Peres de
Apologistes l'Eglise n'etoient pas appellés a exami=
ner l'autenticité et la verité de l'histoire d'Ev=
hemere, ni a en refuter l'opinion, puisque
cette opinion, quoique fausse, etoit de
leur temps la croiance commune des peu=
ples, ou leur maniere d'entendre et d'expli=
quer la mytologie. Ces deffenseurs du
Christianisme 8 lignes biffure
quelques Philosophes:

netoient point ap=
pellés
non plus a combattre
les explications alle=
goriques de quel=
ques Philosophes,
tout absurdes
quelles fussent
  il etoit question de
combattre selever contre la Religion publique et ce qu'on
croioit generalement communement sur les Dieux; et de
pour cet effet, ils etoient en Droit de s'atta=
cher a un ecrit generalement reconnu
pour conforme a cette creance, commu=
ne, afin d'en tirer avantage comme d'un
monument avoué par ceux qu'ils contre
qui ils disputoient, et de s'en prevaloir avec
d'autant plus d'avantage pour combattre
le Paganisme, tel qu'il existoit de
leur temps.

<50v> Les Mytologues historiens n'ont pu
disconvenir que le Polytheisme a com=
mancé par le Culte des Astres, de tous le
plus ancien,
mais ils veulent qu'on y ait
bientot après associé le culte des Dieux
preposés aux passions, aux besoins, et
aux travaux, aux passions, et dès la même, celui des
hommes celebres. Ainsi 3 mots biffure
ils soutiennent toujours que Jupiter a été
un Roi de Crete, Ceres une Reine de Sicile,
Bacchus un Prince conquerant, Osiris
1 ligne biffure un Roi d'Egypte (le meme que Misraim) qui
fut adoré peu après sa mort avec Isis
sa femme et Orus leur fils. 1 mot biffure Mais d'un
autre côté, comme on eut ete peut etre
choqué de voir des honneurs divins
rendus a des personnes qui venoient de
mourir, on publia, disent ils, que leurs
ames s'etoient reunies aux Astres, et
on les prit pour le Soleil et la Lune,
de la même maniere
qu'on placa un Roi
et une Reine de Syrie
dans ces deux astres
sous les noms d'Adonis
et Astarté.

Ainsi naquit l'Idolatrie en dans l'Egypte
de meme 2 mots biffure en particulier ou elle eut son
premier berceau.

Dans leur Systheme ils sont donc contraints
de soutenir que le culte des hommes en Egyp=
te est aussi ancien que le chef de la nature
et par consequent aussi ancien que le
culte des astres; ce qui dement leur pro=
pre aveu, et et qui est contraire 1 mot biffure a l'Ecri=
ture Se qui suppose qu'il n'y avoit encor
aucune Idolatrie en Egypte au temps
d'Abraham, et au ainsi quau temoignage d'Hero=
dote cité cy dessus, et a la traddition
ancienne des Egyptiens qui regardoient
les astres comme leurs premiers Dieux,
dont le culte avoit precedé tous les
autres.

<51>  Il faut encor qu'ils supposent que des
hommes 1 mot biffure deifiés après leur mort
aient été tout a coup metamorphosés en
Etres physiques comme le ciel, la terre &c.
ou en Divinités qui dominent sur le ciel
l'aïr, les eaux, et même le Soleil et la
Lune, qui, selon Hesiode, ont été les
premiers Titans.

Par quel etrange enchantement est ce
que des hommes deifiés sous les noms
de Cælus, Rhea, Jupiter, Vulcain
Neptune, ont été tout a coup confondus
avec le Ciel, la Terre, l'air, le feu, l'eau?
Comment un Roi de Thessalie est il deve=
nu tout a coup un Dieu, et le Sou=
verain des Dieux? comme par quel
renversement d'Esprit les Grecs ont ils
pu s'imaginer qu'il n'y avoit jamais eu
d'autres Dieux avant lui lui que ses ance=
tres, tous hommes et Princes comme
lui?

Qu Concevra t'on mieux que des colonies
dEgypte et de Phoenicie auront pu
engager les Grecs a renoncer au culte
de certains personages anciens pour
en honorer de nouveaux etrangers,
inconnus jusques alors, et leur donner
les noms du ciel, de la terre &c. Les
hommes changent ils donc si facilement d'objet
de culte? Et quand on supposeroit que c'est la la
source de l'Idolatrie Grecque, sensui=
vroit il que l'Idolatrie des autres na=
tions a eu la même source primitive?
1 ligne biffure

La ressemblance des fables de la Grece
avec celles de l'Egypte et de la Phenicie
a sans contredit quelque chose de frappant.

<51v> 5 lignes biffure
1 ligne biffure
1 ligne biffure
1 ligne biffure
6 lignes biffure

on trouve en Egypte,
en Phenicie, en Grece,
un Jupiter, un un Saturne
une Venus, ou du moins
des personages qui leur
ressemblent
.
Mais qu'en doit
on conclure?
rien si ce n'est que ces Dieux
pretendus n'ont existé
nulle part, que ce sont
des noms allegoriques,
des emblemes, pour
designer les memes idées
et les mêmes objets pour
exprimer des notions
familieres a tous les
peuples, même aux
peuples ignorans et
sauvages,
quelques fois des erreurs
communes populaires dont quel=
ques unes subsistent
plus souvent
encor ou des verites
1 mot biffure grossierement
generalement
1 ligne biffure reconnues
2 mots biffure mais
plus importantes
que des evenemens
particuliers.

Dans lopinion que nous com=
battons tout est inexplicable.

Sil est vrai que Jupiter et Saheme n'aient
été que des Rois de Thessalie, comment donc leur
culte a til été introduit a Memphïs ou a
Tyr; si vulcain a vecu dans la Grece, com=
ment a ton pu se persuader en Egypte qu'il
y avoit regné. Si au contraire ces person=
nages sont Egyptiens d'origïne, comment
les Grecs ont ils pu abandonner leurs anciens
Dieux pour adorer des etrangers?

Homere qui n'omet rien de ce qui peut
flatter la vanité des Grecs n'a point connu
cet Empire des Titans sur la terre; chès lui
les anciens Dieux sont placés dans le ciel
et gouvernent de la toute la nature;

Hesiode n'en parle que comme d'Etres
physiques, qu'il appelle le Ciel, la terre,
le temps, l'air, la mer, le Soleil, la Lune,
la Nuit, et ce qu'il donne comme Theogonie
nest proprement qu'une
Cosmogonie cd: his=
toire de la naissance
du monde, et des diver=
ses parties de la nature.
Partout il suppose
que les Dieux n'etoient
autre chose que les Etres
naturels personifiés
et supposés Intelligens.
 

Qui eut pu cependant mieux savoir
que ces Poëtes si les premiers Dieux n'avoient
été que des hommes? 4 mots biffure
1 ligne biffure.

Si ces Poëtes l'avoient cru que leurs
Dieux n'etoient point d'une autre nature
que les hommes,
comment auroient
ils pu les appeller la race divine
<52> des immortels, qui existent eternellement?
et comment auroient ils pu venir a bout
de persuader aux Grecs que de mortels
ils etoient devenus immortels? 1 mot biffure
1 ligne biffure

Dailleurs, Hesiode en
faisant l'enumeration de
la cour celeste des immor=
tels, il y place indifferem=
ment Jupiter, Apollon
Neptune, qu'on dit avoir
ete des hommes, avec l'au=
rore, le Soleil, la Lune,
la Terre, l'océan.

Qui a mieux distingué que ces deux Poetes
les Dieux d'avec les hommes? 3 mots biffure?; ou voit on
même qu'ils aient transformés les hommes
en Dieux reels et qu'ils les aient placés dans
le ciel, le sejour des Dieux?

Les Grecs auroient ils donc été la seule
nation qui eut commancé par adorer
des hommes? et n'ait adoré que des hommes? eux qui ont supposé
toujours les Dieux d'une nation superieure
et distingué toujours avec tant de soins
les Dieux et les demi Dieux, auxquels
il nont jamais attribué ni la meme pui=
sance, ni les memes honneurs qu'aux pre=
miers.

L'opinion meme des
Grecs et en general des
Payens que leurs Dieux
etoient presens dans
leurs idoles, prouve
que ce n'etoient point
des hommes Divinisés
après leur mort: on
ne croioit point parmi
eux que les ames des
morts habitassent
dans les statues, on
les supposoit autour
des tombeaux, dans
les champs Elisees &c
pour avoir commerce
avec elles il falloit les
evoquer par des sacri=
fices et des enchante=
mens; au lieu que
l'on conversoit imme=
diatement avec les Dieux
dans leur temples et
auprès de leurs au=
tels.

Sil'on admet que les premiers Dieux ont
été des hommes, que la mytologie n'est
autre chose que leur histoire embellie leur histoire embellie
4 lignes biffure

dans cette supposition, il faudra soute=
nir que les premiers chefs des peuples,
leurs Legislateurs, ceux qui les ont
instruits et civilisés se sont 1 mot biffure
leurs
Pretres et leurs Poetes, se sont plus a leur
presenter un cahos de faits monstrueux
1 ligne biffure
4 mots biffure
, funestes même a la
religion et aux bonnes moeurs, s'ils doivent
etre entendues au sens litteral et historique
<52v> quils ont été des la même des insensés ou
des imposteurs 1 mot biffure, et que tous les
peuples les plus anciens de l'orient ont
été assès grossiers, asses stupides et barbares
pour entendre ces recits 1 mot biffure extravaguans au
pied de la Lettre, comme d'autant d'objets
ou de personnages rellement existans.

et de recits faits conformes a la verité.

Cependant les premiers chefs et Legisla=
teurs des Peuples ont toujours été celebrés
pour leurs lumieres, et leur amour pour
l'humanité et la verité; les anciens peu=
ples d'Orient
qui se sont etablis
aux environs de
ce pays primitivement
occupé par la famille
general
n'ont point passé par un etat
de stupidité et de barbarie: dès les temps
les plus reculés ils ont 1 mot biffure cultivé
avec succès les astres et les 1 mot biffure leur raison, et ils
ont toujours connu ete eclaires sur les interets les plus
essentiels de l'espece humaïne la Societe 2 caractères illisible

Ces peuples connurent l'Etre Supreme
sous le nom de Jou, l'Etre par excellence
et
sans etre encor Idolatres, ils se peignoient
cet Etre comme un feu etincellant de lu=
miere, soutien et ame de cet Univers,
dont les Symboles les plus parfaits etoient
le Soleil et la Lune; ils etoient epris
d'admiration pour ces Astres dont le
cours servoit a regler leurs années, et
tous les leurs travaux de la campagne, ils
celebroient a chaque saison des fêtes
solemnelles pour rendre graces a la Divi=
nité de ses biens, et lui demander d'heu=
reuses recoltes.

2 mots biffure De pareils traits n'annoncent
pas des peuples grossiers et barbares,
auxquels on put si aisement 1 mot biffure
4 mots biffure
faire recevoir com=
me histoires reelles et authentiques
<53> des recits qui portoient la plus vive em=
preinte de la fiction, et de n'offroient sous
le point de vue historique, queun 2 mots biffure
5 mots biffure un
cahos
de puerilités inutiles.

Si tout cela n'avoitent été envisagé par
les anciens peuples que comme des
recits historiques, chargés de fables
absurdes, sans 1 mot biffure et sans but,
il seroit impossible de concevoir pourquoi
ces peuples se seroient tous appropriés
en quelque sorte a l'envi, ces histoires
monstrueuses et auroient fait consister
la sagesse a les connoitre, et a les trans=
mettre a la posterité; pourquoi de tels
objets auroient ils été conservés dans
les ecrits des Philosophes et des Historiens,
celebrés et chantés par les Poëtes, peints
ou sculptés gravés sur les murs des Temples,
des edifices publics, en caracteres que
des milliers d'années n'ont pu effacer;
pourquoi tous les arts se seroient ils en quel=
que sorte disputé la gloire de concourir
a la conservation de ces objets comme
etant de la plus haute importance.

Peut on rendre raison d'un tel empres=
sement, si l'on ne sans supposer que tous ces
recits mytologiques ne furent presentés
par leurs premiers auteurs ni recus par
les anciens peuples, que comme des faits
relatifs a des personages humains dei
=
fiés et a leur histoire, mais 1 mot biffure
comme
des expressions figurées, des
fictions ingenieuses, renferment sous
<53v> lenvelloppe des allusions, ou allegories, des ïnstructions
relatives aux Divinités grands objets de
la nature, du culte et de la morale, utiles
pour les Societés dans tous les ages, dignes
d'etre transmises, celebrées et ornées par
les Poëtes de la 1 mot biffure du Tableau tout ce que
l'imaginatïon pouvoit leur fournir de plus pompeux pour les
embellir.

Ainsi le Systheme des Mytologues histo=
riens, qui ne veulent voir dans la Mytolo=
gie que des histoires reelles, mais alterées
et obscurcies par les additions fabuleuses,
qu'inventa l'ignorance et la superstition
du Paganisme, ce Systheme
n'offre qu'une
explication de la Mytologie absolument
insipide, tronquée et puerile qui ne
s'appuie que sur des suppositions gratuites
d'alterations dans l'histoire et dans le Lan=
gage, et qui presente tous les hommes de
l'ancien age comme n'aiant aucune
etincelle de raison ni de jugement.

Dailleurs en supposant qu'il faille
prendre a la Lettre tout ce qui est dit des
avantures des Dïeux et même des crimes
qu'on leur attribue, on ne peut plus rien
comprendre a la Religion des Payens.
Si Jupiter, Apollon, Mercure &c ont furent
ete reellement originairement des hommes, ou ils ont
ete reellement coupables des folies et des crimes dont
on charge leur histoïre, ou ils ne l'ont
pas été; sils l'ont été, il est impossible
de comprendre comment les peuples ont pu
se resoudre a rendre a de tels hommes
des honneurs divïns; s'ils ne l'ont pas été
<54> les foiblesses, les vices, les crimes, les atro=
cités attribuées a ces Dieux ne permettent
pas de croire que les honneurs qu'on leur
1 ligne biffure rendoit 1 mot biffure aient ete
une recompense accordée a des hommes qui
s'etoient distingués de leur vivant par
leur merite. 2 mots biffure Veut on les regarder comme
des hommes reels, il est impossible de com=
prendre que les Grecs aient pu se resoudre
a adorer des de tels scelerats. Comment conce=
voir qu'une mytologie aussi infame ait
pu s'introduire et s'accrediter contre la verité
de l'histoire, nonobstant le penetrant que
les hommes ont manifesté de tout temps
pour ne respecter que le merite et la vertu
dans les morts soumis a leur jugement
et dont ils n'avoient plus rien a craindre.
Autant de choses inexplicables dans
le Systheme des Mytologues historiens.

Comment se persuader que les Grecs se soient
aviser de reverer comme le Dieu Supreme
leur Roi Jupiter, fils de nature, mari infi=
dele, frere incestueux maitre injuste, fantas=
que, colere libertin vindicatif. Des sujets
qui auroient eu le malheur dobeir a
un tel Roi auroient pensé a en consa=
crer la memoire

<54v> Lorsquon leur leur oppose aux Mytologues Historiens qu'il y a dans les Poetes
des choses qui ne peuvent s'entendre que d'une
maniere allegorique, qu'ils prennent sans cesse
Jupiter pour l'air, Ceres pour le blé &c quils
disent que l'ocean est le Roi des fleuves &c.

ils repondent que ce n'est pas la l'ancien etat des
fables, que les histoires primitives ont été con=
verties a la suite des temps en allegories physi=
ques. Mais nous opposons derechef a cela
leur aveux que l'idolatrie a commancé
par le culte des astres, et des differentes parties
de la nature, et que 1 mot biffure nous en concluons que le plus ancien
etat des fables, a été une allusion continuel=
le a la physique, que le culte des hommes
n'est venu que longtemps après, et que le
pretendu sens historique des anciennes fa=
bles n'est qu'une imagination des siecles posterieurs.
Ils ne doivent donc pas dire que le sentiment
commun des anciens Philosophes sur l'ex=
plication allegorique des fables ait a été de leur
part une innovation faite a l'ancienne
Theologie: c'est plutot les Mytologues
historiens qui ont introduit l'innovation,
en prenant les anciens Dieux pour des
hommes.

Ils ne peuvent pas dire non plus que la
croiance des Genies administrateurs soit
une opinion nouvelle ïmaginée par les
auteurs Payens, après la naissance du Xe,
pour sauver le ridicule de la religion payenne
1 ligne biffure
l'Eglise
; car les Peres de l'Eglise et 1 mot biffure les 2 mots biffure Peres de l'Eglise
qui disputoient contre eux 1 ligne biffure
très ancienne et n'auroient pas manqué
d'en relever la nouveauté, si elle eut ete
nouvelle,
puisque linteret de leur cause
leut demandé. 

<55> comment concevoir que cette mytolo=
gie infame ait pu s'introduire et s'accredi=
ter contre la verité de l'histoire, nonobstant
le penchant que les hommes ont manifesté
de tout temps pour ne respecter que le meri
=
te et la vertu dans les morts soumis a
leur jugement et dont ils n'avoient plus
rien a craindre. Tout cela ne peut etre com
=
pris que dans le Systheme de l'explication
allegorique.

Ceux qui tiennent pour le Systheme
que nous combattons sont si peu d'accord avec eux mêmes qu'ils
sont forcés de convenir qu'un grand
nombre de Divinités chantées par les Poëtes
sont des personages allegoriques et que
les fables recits qu'ils font de leurs genea=
logies, leur naissance, leurs familles,
leurs demeures, leurs avantures, ne sont que des fables
allegoriques 2 mots biffure qui ont rapport avec diverses operations
de la nature.
M. Banier lui meme
observe, d'après Cutwork,
que l'opinion des anciens
sur l'origine des Dieux
etoit toujours melée
avec celle de l'origine
du monde.  Il en fournit
la preuve par une ex=
position dela Theogo=
nie des Chaldeens, des
Pheniciens, des Egyptiens
des Atlantides, qu'il com=
pare avec celle d'Hesiode.

Mais sils les Mytologues historiens ne nous donnent aucun carac=
teres precis pour distinguer les fables histo=
riques des allegoriques; et ils ne sauroient
en effet nous en donner, puisque les Poëtes
parlent partout sur le même ton de
tous leurs differens personages, et que
leurs fables sont tellement liées entr'elles
qu'elles ne forment qu'un seul ensemble,
un seul tout, narratif, qui commance
avec lae guerre cahos et finit avec la
guerre de Troie qui en fait la cloture.
Comment distinguer
ce qui est reel de ce qui
n'est
qu'allegorique lors=
qu'il s'agit de faits ap=
puies sur les mêmes
monumens, tradditions
ou temoïgnages, mais
dont aucun ne remonte
a l'origine ou au temps
des evenemens. Com=
ment distinguer les
Dieux et les demi Dieux?
ou trouver sur tout
cela un moien de
debrouillement.

<55v> Cela etant, n'est il pas naturel de penser
que s'il y a des fables allegoriques, elles
doivent etre toutes du même genre, com=
me appartenant a un même Tableau
ou a un tout, dont toutes les parties ont
une source commune?

Quel embaras n'est ce point pour les Mytho=
logues historiens lorsqu'il s'agit de debrouil=
ler ce cahos genealogique des Dieux dont
les uns ne sont que des hommes Deifiés et les

autres des Etres d'Imagination? L'explication
des fables est nest elle pas bien moins embarassante pour
ceux qui supposent toutes les Dïvinités du
même ordre, et nès de la même 1 mot biffure
origine?
Dans le Systheme
historique, comment
concevoir quelque
connexion raisonna
=
ble entre des mortels
divinisés, et des Divi
=
nites allegoriques?
Comment distinguer
les Dieux et les demi
Dieux? puisqu'ils
sont 1 mot biffure de la meme
1 mot biffure. Ou trouver
un debrouillement
de ce melange 1 mot biffure
qu'on suppose d'histoire
et de fictions allegoriques.

Ils ne peuvent disconvenir même que les
fables qu'ils soutiennent Historiques ne pre=
sentent dans leur detail une multitude de
circonstances qui ne peuvent etre 1 mot biffure
historiquement
n'offrent que des traits alle=
goriques. 1 mot biffure Cependant ce sont ces mêmes
traits qui font tout l'interet de ces fables,
et on ne peut pas dire ni quils 2 mots biffure aient ete
traits ajoutés après coup a l'histoire, par
amour pour le merveilleux, ni qu'ils ne soient
que de pures equivoques sur le sens des mots;
car ils sont tellement liés avec tout l'ensem=
ble qu'on ne sauroit les en retrancher sans
le defigurer, ni y rien changer que ce ne
soit arbitrairement et sans principes pour
justifier ce changement.

Que si on ne peut 3 mots biffure ces
circonstances ne peuvent etre expliquées
que par allegorie ne peut on pas 2 mots biffure
doit on pas avouer aussi en conclure que le fond même
des recits est du même genre? Il est sans
doute 1 mot biffure que tout est dans le même gout.

Ainsi ils conviennent
que le mariage de
Jupiter avec μητις
Metis. L'Intelligence
la prudence, le soin
qu'il eut de la cacher
dans ses entrailles, n'est
qu'une allegorie pour
nous apprendre qu'un
Roi doit prendre pour
Sa Compagne la pru=
dence, mais qu'il ne
doit pas en faire une
vaine parade; que
ce qui est dit que le
fils de Metis seroit
devenu le Roi de Ju=
piter lui même, n'est
qu'une Lecon pour
faire comprendre que
l'habilete l'emporte
aisement sur la force.
Mais si ce sont la des
allegories, pourquoi
nen seroit il pas de
meme du regne de
Jupiter, de sa revolte
contre Saturne, de la guerre des Titans?

<57>  Il est certain enfin qu'on n'a jamais pu
fixer les lieux et les temps des evenemens de
ces pretendues histoires; qu'on a jamais pu
assigner même l'epoque du siege de Troie, et
que tous les temps anterieurs ont été appellés
fabuleux et incertains. Ceux qui ont
entrepris de debrouiller ce cahos d'incer=
titudes par l'histoire, s'en sont toujours
tenu a des generalités sans preuves et
même
sans vraisemblance, et ils se sont
si peu accordés sur ces pretendues histoi=
res, que pendant que les anciens ont pre=
senté dans leurs ecrits les Heros de la fable
comme des personnages Grecs d'origine,
les auteurs plus recens ont pretendu
que ces histoires avec ces personages leur
etoient venus d'Orient avec les colonies
qui peuplerent la Grece successivement.
Il est certain que les
Grecs ont fait une dif=
ference entre les demi
Dieux, qu'ils croioient
avoir été des hommes,
et leurs grands Dieux;
nous le voions par la
distinction d'Hercule
Dieu et d'Hercule
Heros. Or selon
les Mytologues hïsto=
riens, il n'y en a aucune.
Jupiter a été un Roi
de Thessalie,
Hercule

n'a été qu'un Heros né dans la
Beotie, il n'y a de
diffrence que le temps
auquel ils 1 mot biffure
.
Les allegoristes 1 mot biffure
peuvent
seuls etablir 2 mots biffure ici
une distincition raison=
nable.

Ainsi en examinant de près le Systheme
des Mythologues Historiens on ne le
trouve fondé sur aucune preuve solide
on n'y 4 mots biffure, il est
contraire aux monumens de l'antiqui=
te les plus respectables, et au lieu d'eclair=
cir la mytologie, il la rend encor plus
obscure.

Il est donc naturel de chercher quelque
Systheme d'explication plus simple,
mieux lié, moins rempli de difficultés,
et qui montre mieux la source des bizarre=
ries et des chimeres en 1 mot biffure repandues
chès tous les peuples.

<57v> Ceux qui se declarent contre l'explication
historique des fables supposent tous qu'elles
ont un objet et une signification toute
qui n'ont rien de commun avec ce quelles
semblent offrir au premier coup doeuil,
et par consequent qu'il faut les entendre
d'une maniere allegorique; d'ou vient
qu'on les comprend tous sous le nom de
Mytologues allegoriques.

Mais ceux ci en s'accordant sur le prin=
cipe general, ne conviennent pas sur
l'etendue du sens allegorique qu'il faut
donner aux fables, et les regles qu'il faut
suivre dans leur explication.

<58> Chapitre VII
Systheme de ceux qui ne voient dans les
sentiment des premiers quelques mytologues
allegoriques, ou celui de MM. De La
Barre et Freret.

anciens Dieux du
Paganisme, que des
Etres imaginés par
les hommes, ensuite
realisés dans leur ima
=
gination: mais qui sup=
posent en même temps
que tous les grands
Dieux des Grecs furent
d'origine Egyptienne.

Refutation.

Selon l'opinion de ces MM. MM. de la Barre et Freret les Dieux
d'Homere et d'Hesiode sont des personages
imaginés, quoique ensuite supposés reellement
existans; le tableau historique ou
ils sont encadrés, n'est qu'une pure fiction
un tissu d'allegories, ou plutot d'illusions;
enfin la Theogonie en entier n'est qu'un
Tableau figuré des differentes religions
qui ont regné successivement dans la
Grece. Voici comment ces MM. enten=
dent cette succession.

Premierement, en prenant s'appuiant sur le temoignage
d'Herodote rapporté chap. 1., ils croient
que les premiers Pelasges ont honoré
dès les premiers temps plusieurs Divinités,
mais très confusement, puisqu'ils ne les
distinguoient ni par leurs proprietés, ni
même par des noms. Telle fut, selon eux,
la plus ancienne Religion des Grecs,
sous le regne de ουρανος Calus.

Dans la suite, ils en vinrent a adorer
les differentes parties de la nature, ou
plutot certaines Intelligences qu'ils
suppposoient les animer. et presider
aux phenomenes.
Comme ils place=
rent a leur tête la Planete de Saturne
<58v> c'est pour cela disentils que la Religion
a cette epoque a été appellée le regne
de χρονος Saturnes.

Enfin des Colonies etrangeres qui vinrent
d'Orient, apporterent aux Grecs le culte
de Jupiter et des autres Dieux qui lui ser=
voient de cortege; a ceux la ils en ajou=
terent encor plusieurs autres allegories.

Tous ces personnages divins furent tous
habillés a la Grecque, en ajustant leurs
noms, leur genealogie, leurs fonctions
aux anciennes tradditions du Pays.

Ainsi Jupiter obtint le premier rang
entre les Dieux

Selon ces Savans, la genealogie des Dieux
ou leur naissance, n'exprime autre chose que
l'ordre des temps ou epoques auxquelles les
Grecs ont commancé a connoitre et ado=
rer chaque Divinité, et la Theogonïe n'est
ainsi que le Tableau Chronologique
de la Religion Grecque.

Ce Systheme se rapproche beaucoup
du vrai; mais on y trouve aussi il offre chès de très
grandes difficultés

On y Il suppose que la Religion primiti=
ve des Grecs a été le Polytheisme. on Le
contraire se prouve par oppose a cela les temoignages
des plus anciens Philosophes Platon,
Anaxagore, Pronapides &c. et même par
tout ce que les Poetes Grecs nous ont trans=
mis <59> de l'ancienne traddition: tout se
reunit pour
prouver que les Grecs, comme
tous les anciens peuples, ont connu dans
les temps primitifs, un seul Dieu eternel
duquel sont procedés et les Dieux et les hom=
mes. C'est ce que Herodote n'a pas saisi
parce que le Polytheisme se trouvant
etabli par tout de son temps, il s'est imagi=
né qu'il en avoit été ainsi de tout temps.
Voies ce que nous avons dit a ce sujet.
On objecte que des peuples
sauvages et ignorans, tels
qu'ont été les
premiers Grecs, n'ont
jamais
pu s'elever par un
3 lignes biffure
a la notion
intellectuelle d'un Dieu
tel que nous le concevons,
a laquelle les hommes n'ont
peuvent
jamais pu arriver que fort
tard.

On repond a cela 1° que
cette notion a pu se conser=
ver par traddition chès
les premiers chefs de colo=
nies, sortis de la famille
de Noë, et se transmettre
pendant plusieurs gene=
rations, même chès des
hommes devenus sau=
vages, tout comme nous
voions les sauvages de
lAmerique
se transmettre
de pere en fils leurs
opinions avec leurs
erreurs religieuses.
5 lignes biffure

2° Il est possible que
les hommes s'élevent
bientot
d'eux memes a une idee quel=
que ignorans qu'on
les suppose: car rien
de plus naturel aux hom=
mes que lidée d'un
pouvoir superieur, in=
visible, qui envoie tan=
tot des biens et tantot
des maux, et de donner
a ce pouvoir quelque
nom relatif a sa Supe=
riorité, comme l'ont
fait tous les peuples.
 

Ajoutons 1 mot biffure que dès la même qu'on suppo=
se qu'en supposant comme l'ont fait que les Pelasges ne distinguoient leurs
Dieux ni par des attributs ni par des noms
4 mots biffure on fournit par la même une preuve quils ne connoissoient
qu'un seul Dieu qui ne pouvoit etre
confondu avec d'autres.

Il est cependant certain qu'ils ont em=
ploié les noms de Coeus, Creus, Phebé,
Hyperion, appellés enfans de ουρανος
ou du Ciel, et freres ainés de χρονος.
Selon M. de la Barre tout cela ne sont la
que des noms d'honneur qui ne signifient
rien. puisqu'on ne sauroit les prendre
pour des noms d'Etres physiques; ce n'est ici il ne s'agit
ni le du Soleil, ni de la Lune &. Ainsi voila
ches les Pelasges des divers Dieux sans aucun
nom significatif et dinstinctif; cela pa
=
roit un peu etrange.

Mais sil'on fait attention a l'etymologie
de ces noms on trouvera cependant qu'ils
designent des Etres Physiques, Voies ces
noms au vocabulaire:
et quils sont
tres distinctifs. Hesiode par enfans
du Ciel a entendu differentes proprietes
du Ciel, comme par enfans de la terre
<59v> Dailleurs  ils sont appellés enfans du
Ciel et selon le style d'Hesiode, ce mot
signifie differens noms, differentes propri
=
etes du ciel, comme les descendans de la
terre ou de la mer, sont divers noms,
divers attributs, diverses productions
de la terre et de la mer.

Pour concevoir cela il ne
faut point defforts ni
une raison cultivée
parl'etude. Chaque
nation a pu imaginer
un seul Dieu comme
elle n'avoit qu'un seul
chef a la guerre; mais
lidée en aurait été fort
grossiere et imparfaite,
ce qui aura pu facili=
ter la naissance du
Polytheisme, jusques
a ce qu'enfin ont ait
appris a distinguer bien
nettement le Dieu su=
preme et eternel des
divers ordres de Dieux
subalternes.

Ainsi nous sommes
très fondés a supposer
que les Grecs comme les
autres peuples, ont admis
d'abord un seul Dieu.
sous la notion confuse
d'Etre superieur, avant
que d'en venir au Poly
=
theisme.

3° A l'epoque marquée parle regne de
χρονος les Grecs se firent des diverses
parties de la nature, diverses especes de
Divinités subalternes proposées a leur
gouvenement, mais ce n'etoit pas encor
la un vrai Polytheisme, parce qu'ils ne
les adoroient pas encor. Selon Hesiode
ce culte n'a commancé que sous le regne
de Jupiter. Car il dit expressement que
sous Chronos, les hommes ne vouloient
point adorer les Dieux comme il convient
ca.d. comme ils furent adorés dans la
suite. Il nous peint encor Uranus et
Chronus comme des Dieux jaloux qui
ne vouloient point partager l'empire
avec les Titans ou les enfans de la terre
cad qui vouloient etre seuls adorés.

Il nous represente au contraire Jupiter
accordant des honneurs et des preroga=
tives a tous ceux qui l'avoient aidé a
vaincre et a chasser les Titans, en
leur assignant a chacun leur pouvoir
et leur departement sur certaines
parties de la nature.

<60> Ce meme Poête suppose que c'est a Meconé
ou Sicyone, l'une des plus anciennes villes
de la Grece, qu'est arrivée la dispute entre
les Dieux et les hommes, pour savoir quels
honneurs ceux ci leur rendroïent. Ainsi
avant la fondation des villes, on ne les
honoroit point encor, et il ne pouvoit y
avoir ni Polytheisme ni Idolatrie.

4° On ne concoit pas que Chronos ait
été la planete de Saturne, trop peu sensi=
ble pour avoir frappé les anciens Grecs
auxquels l'Astronomie n'etoit que très peu
connue, ainsi que les autres arts, tous
posterieurs au regne de Chronos. Dailleurs
ce ne sont point les Planetes qui ont don
communiqué leurs noms aux Divinités,
mais plutot ce sont les noms des Divinites
qui ont été donnés aux Planetes, et cela
même n'est arrivé que fort tard.

<60v> 5 L'opinion que les noms des Dieux de la
Grece et le fond de leur histoire, etoient ori=
ginaires d'orient née d'autre fondement que
l'autorité des Pretres d'Egypte et de Dodone
autorité tres suspecte, quelque grave qu'il
ait pu paroitre a Hesiode. Diodore.

Cette opinion suppose que les Grecs en
adoptant ces Divinités 1 mot biffure habillerent a
la Grecque en raprochant leurs noms et
leurs attributs de la Langue des Grecs et
deleurs anciennes tradditions; si cela 1 mot biffure
quel moien peut on avoir de demonter
qu'elles furent d'origine Egyptienne?

Il est aisé de montrer que les noms my=
tologiques des Grecs peuvent pour la plulart
etre derives immediatement des 1 mot biffure
de leur Langue et expliques etymologi
=
quement sans recourir aux Langues
d'Orient, si ce n'est dans certains cas ou
celles ci peuvent repondre du jour sur les
origines primitives de la Grecque.

<61> On convient qu'il est survenu un grand
changement a la Religion des Grecs lors
qu'ils commancerent a se reunir en Socie=
tés et a batir des villes; car alors, selon Hesio=
de, commanca le culte de Jupiter et dela
foule des Dieux, et ce fut l'epoque ou
nacquit le Systheme de la Mytologie.
2 lignes biffure
Mais il est d'autres au=
teurs  tres respectables
qui nient
que les etrangers aient
eu part a cette revo=
lution. Nous allons
presenter leurs rai=
sons dans toute leur
force.
Comment
  3 mots biffure disent ils,
1 mot biffure supposer, que les noms des
Dieux de la Grece et les fables furent
empruntées d'Egypte des Colonies arrivées
d'Egypte, selon Banier, ou des negocians
Phoeniciens, comme l'ont cru Bochart
et le Clerc? 3 mots biffure,
On dit qu'a l'epoque de l'introduction de l'Idolatrie
dans la Grece, Sicyone, dit on fut fondée
par Egialée, 2 mots biffure Argos par
Inachus, Athenes par Cecrops, tous
trois Egyptiens; que Cadmus avec une
colonïe de Phoeniciens vint batïr
Thebes en Beotie. Donc conclut on ce sont les
Egyptiens et les Phoeniciens qui ont ap=
porté en Grece toute la mytologie
qui a pris faveur dans ce pays.

Mais on ne peut indiquer ni la date de
leur arrivée ni le lieu de leur origïne.
Hesiode Suivant les anciens auteurs
orientaux cités par Herodote dans son
preambule, les Pheniciens sont venus
pour la premiere fois en Grece peu après
la fondation d'argos, ou ils enleverent
Jo fille d'Inachus fondateur et Roi
d'Argos. Ils ajoutent que jusques a la
guerre de Troïe, les Grecs n'avoient eu
aucune relation avec les Asiatiques
<61v> que par des guerres rapines et des brigandages
mutuels: Estil probable que dans ces temps
la même une colonie de Pheniciens soit venue
s'etablir dans la Beotie, et que les Grecs aient
recu leur Religion et leurs Loix, d'une nation
qu'ils regardoient comme ennemie.

Rien de plus suspect de ce qu'on dit de ces pre=
tendus fondateurs Egyptiens ou Pheniciens.
Sicyone doit son origine a legialée, dit on,
mais ce mot est Grec, il signifie hauteur
près de la mer, et c'est la situatïon de cette ville
autrefois ce même nom designoit toute la
contrée nommée dans la suite Achaia.

Argos fut batie par Inachus, et Inachus
est la riviere qui baignoit les murs d'Argos.
Thebes fut edifiée par Cadmus, et la
montagne sur laquelle la citadelle de The=
bes etoit assise, s'appelloit Cadmé. Athenes
dut son origine a Cecrops, et la hauteur
sur laquelle cette ville fut d'abord batie
s'appelloit Cecropia. Tous ces noms sont Grecs et peu=
vent s'expliquer fort naturellement par
eux memes par la Topographie
des lieux, sans avoir
recours a aucun per=
sonage etranger
comme nous le
verrons plus bas.

Suivant l'ancienne traddition de ces villes
que Pausanias nous a conservé, elles devoient
leur origine a des gens du Pays. des Pela=
ges et non a des Etrangers.

Qu'est ce que les Pheniciens ou les Egyptiens
seroient venus faire dans un pays presque
desert, et chès des peuples qui n'avoïent ni
societés, ni villes ni commerce. On sait
que les anciens Egyptiens aborroient la
navigation, qu'il manquoient de mate=
riaux pour construire des vaisseaux,
qu'ils ne s'occupoient point de commerce,
trouvant abondamment dans leur pays
de quoi pourvoir a leurs besoins, qu'ils persis=
terent dans cet usage jusques au regne
de Sesostin ca.d. plus de 400 ans apres
<62> la fondation des premieres villes Grecques.

Des Egyptiens d'ailleurs accoutumés a la
culture, s'ils etoient venus en Grece, se
seroient fixés dans les plaines sur le bord
des rivieres; les Phoeniciens livrés au com=
merce auroient occupé les rivages et
les ports de la mer; et nous voions que les
premieres villes Grecques furent d'abord
baties sur des montagnes et des rochers.

Diodore de Sicile a revoqué en doute
toutes ces transmigrations d'Egyptiens
dans la Grece 4 mots biffure
1 mot biffure
. 

Mais quand on en accorderoit la realité,
de ces anciennes transmigrations, il ne
seroit pas prouvé pour cela que des colons
etrangers soient les auteurs de la religion
Grecque; car il faudroit avant cela prou=
ver qu'a l'arrivée de ces colonies, les Egyptiens
et les Pheniciens etoient deja Idolatres; or
cela n'est pas aisé, car l'Ecriture suppose
2 lignes biffure
.

Quelques chronologïstes ont voulu rappro=
cher la fondation des villes Grecques en
faisant Cecrops contemporain de Moyse.
Mais Cecrops, selon Pausanias, Diodore, 
est le premier qui ait
fait adorer Jupiter comme Dieu supreme.
Or Jupiter n'etoit point le Dieu supreme
des Egyptiens; c'etoit Osiris et ces deux
Dieux ne se ressemblent point. Cecrops
supposé Egyptien auroit donc enseigné
aux Grecs une religion differente de celle
d'Egypte; cela ne se comprend point
<62v> de ce que le culte des deux peuples paroit
ressemblant et 1 mot biffure de ce qu'il a ete

1 ligne biffure
plus ancien dans l'Egypte ou la Phenicie
que dans la Grece, ce n'est pas la une preuve raison
suffisante pour juger qu'il a passé d'un peu=
ple a l'autre, 5 mots biffure
4 lignes biffure

D'ailleurs

D'ailleurs La pretendue conformité des per=
sonages introduits dans la Mytologie n'est souvent que apparente et quand
elle seroit plus parfaite, elle ne prouveroit
rien.

Car les auteurs de ce Systheme supposent
qu'en adoptant des Divinïtés etrangeres
Grecs les habillerent a la Grecque, en les rapprochant
tant qu'ils purent de leurs propres Dieux,
que les Ecrivains Grecs ne n'ont pas manqueroient
de suivre au regard le gout de leur nation dans ce
qu'ils ont ecri sur la religion des autres
peuples. Orus etoit peint en Egypte sous
la figure d'un enfant, Herodote en conclut
que c'etoit l'Apollon des Grecs, Isis avoit
un grand nombre de mammelles, donc
cest la meme que Ceres, nouriciere.
Osiris avoit quelques symboles sembables
a ceux de Bacchus: donc c'est le même per=
sonage. Ainsi ont raisonné les Grecs: avec
cette prevention peut on faire quelque fond
sur tout ce qu'ils nous disent de la conformité
de leurs Dieux avec ceux des autres nations.

<63> Dailleurs si l'on trouve chès tous ces
divers peuples des conformités frappantes entre leurs
Dieux et leurs fables, cela ne prouve
du tout rien, parce qu'il n'est naturel
qu'ils se soient rencontrés sur certaines
notions ou verités simples et triviales, et
quils aient emploioienté a peu près les mêmes Symboles
pour les exprimer. Voiès ce que nous disions
la dessus

On trouve chès tout les des mêmes source
d'erreurs et les mêmes preventions.
Chès
les Egyptiens les fables ont pu venir de
l'abus des Hieroglyphes qui peignoient aux
yeux les operations de la nature ou les usa=
ges de la Societé; chès les Grecs la mytolo=
gie nacquit des equivoques du Langage
que peignoient les memes objets aux oreilles.
De même que ches les Egyptiens se figüre=
rent dans les siecles posterieurs que leurs
Dieux avoient été des Roîs, de mêmes les
Grecs imaginerent que leurs Rois allego=
riques Cælus, Saturne, Jupiter, avoient
ete reellement des Princes de la Thessalie.
Pour tomber dans les mêmes erreurs ces
peuples n'ont pas eu besoin d'emprunter
rien les uns des autres.

Une nouvelle preuve que les Grecs n'ont
pas tiré leur religion des Egyptiens &c.
c'est 1 mot biffure de c'est la diversité des noms qu'ils
ont donnés a leurs Dieux. Lors que les
Grecs dans les siecles posterieurs adopte=
rent quelque divinite Egyptienne, ils
en conserverent scrupuleusement le nom
les attributs et le culte; Pausanias l'affir=
me positivement. Il est donc fort a presu=
mer <63v> que si les Grecs plus anciens avoient
recu leurs Dieux des d'Egypteiens ou de Phoeniciens,
ceux ci les leur auroient fait connoitre tels
qu'ils etoient nommes, representés, honorés
chés eux et les Grecs en auroient de meme
conservé les noms et les caracteres; mais
point du tout. Les noms Grecs n'ont point
de rapport avec les noms orientaux et
signifient des objets choses toute differentes.
Ainsi comment se figurer que Venus
soit αφροδιτη soit exactement la meme chose que Baal=
tis, ou Astarté des Pheniciens, Apollon
φοιβος que Orus, Ceres δημητηρ que
Isis. Pour qu'une divinité soit la même
ches differens peuples, il faut que tous ses
noms expriment la même chose.

Il peut arriver même que les noms se
ressemblent sans que le sens soit le même
ni qu'on puisse rien en conclure pour l'iden=
tite de l'objet. Ainsi de ce que les anciens
Germains adoroient un vaisseau nom=
mé Isis, comme Symbole dela naviga=
tion,  il ne sensuit
pas que leur culte l'objet de leur culte
fut d'origine Egyptien.

La ressemblance des complette des figures des personages ne prouve
pas même que le culte d'une nation ait
été emprunté de l'autre. De ce que Jo,
fontaine d'Argos, fille d'Inachus et d'Ismene
deux fleuves ou elle se dechargeoit, etoit
representée avec deux cornes, sous la
figure d'une vache, il ne sensuit point quelle
fut le même objet que Isis representée
et adoree ches les Egyptiens sous une tete de vache.

<64> Le peu que nous savons des traditions et
des rites de l'Egypte est tout different de ceux
de la Grece. Le culte des animaux et des
productions de la terre, les hieroglyphes et
les Symboles, etoient inconnus des Grecs;
pourquoi ne ces objets la n'auroient ils
Mais pas aussi ete recus parmi eux
en même temps que les Divinités et les
fables d'Egypte.

Pourquoi donc Herodote a til soutenu
que tous les Dieux Grecs etoient Egyptiens
d'origine? est ce comme le veut Diodore,
pure ficton politique? non, il est
plus croiable qu'il a été la dupe des
Pretres d'Egypte et de Dodone. Frappé de
quelques rapports entre les Dieux des Grecs
et ceux des Egyptiens, il en demanda la
raison aux Pretres, qui ne manquerent
pas d'assurer que toutes les Divinités Grec=
ques avoient pris naissance ches eux.
Herodote trouva cette autorite trop
grave pour la rejetter.

Ce qu'il y a de singulier c'est qu'avec cela
Herodote, et ceux qui l'ont suivi, ont assu=
ré que les Grecs, après avoir emprunté
leurs Dieux d'Egypte, en ont changé
a desseïn les noms, les attributs, les
fonctions, les Symboles, les formes, la
genelaogïe pour les habiller exterieurement
a la Grecque et faire croire qu'ils etoient
nès chès eux. Mais si cela est, quelle
preuve peut on ajourdhui nous don=
ner que les Dieux Egyptiens ont été
transportés en Grece? et comment sup=
poser que dans le temps que les Grecs avoient
besoin d'etre instruits par les etrangers, ils
en savoient asses pour defigurer par
<64v> principe un Systheme de Religion.
On ne prouve pas mieux que les fables
Grecques viennent dela Phenicie: car
nous ne connoissons la religion des Pheni=
ciens que par le fragment de Sanchonia=
ton conservé par Eusebe. Mais dans cette
piece assès suspecte on y voit une affecta=
tation masquée de l'auteur ou des traduc=
teur de se rapprocher de la Mytologie Grec=
que. Rien de plus obscur que ce que l'Ecri=
ture Ste dit des Dieux des Syriens et des
Chananeens: On n'a que preuve en soit
ce qu'en a dit Selden de Diis Syris. C'est
dailleurs une foible raison pour croire
qu'une fable est Phoenicienne que des
etymologies bien ou mal tirees de l'Hebreux.

Nous comprenons sans doute comment les
Hebreux ont pu adoptéer le culte des nations
qui les avoient soumis ou dont ils etoient en=
vironnés, mais nous ne concevons pas
comment la nation entiere des Grecs au=
roit reçu les opinions et les coutumes de quel=
ques Egyptiens fugitifs ou de quelques nego=
cians Phoeniciens; cela seroit sans exem=
ple.

Dailleurs il est aisé de montrer que les noms
mytologiques des Grecs peuvent pour la
plupart etre derivés immediatement des
primitifs de leur Langue, et expliquées ety=
mologiquement, sans qu'il soit necessaire
de recourir aux Langues d'Orient; si ce
n'est dans les cas ou celles ci peuvent
repandre du jour sur les origines primi=
tives de la Langue Grecque; et cela peut
arriver souvent, parce que les mots noms
propres de la mytologie, emploiés par les
Poetes, etoient la plupart des termes suran=
nés dont on ne peut trouver le vrai sens
que dans des langues plus anciennes
<65> ou dans celles qui sont
emanées de la même
source; on comprend
que le Grec ancien devoit
approcher d'avantage
des langues orientales
que le Grecs des siecles
suivans, or les noms
des Dieux et des Heros
sont du vieux Grec;
il faut donc en chercher
l'etymologie dans
le Glossaire d'Hesictius
ou des peuples voisins
orientaux les plus
voisins de la Grece.

On ne voit pas en effet pourquoi les Grecs
n'auroient pas pu se faire deux mêmes
et sans le secours des autres nations, des
Dieux et des fables religieuses; comme
l'ont fait d'autres nations autant et plus
barbares queux; comme l'avoient fait les Egyptiens et les Pheniciens eux memes cela eut été tout au
moins aussi facile que d'ajuster la
mytologie Egyptienne ou Phoenicienne, a leurs ancien=
nes tradditions, comme on suppose qu'ils
l'ont fait. Si les Egyptiens et les Phoeniciens
policés plutot ont été assès aveuglés pour tom=
ber dans le Polytheisme, il n'est 1 mot biffure pas sur=
prenant que les Grecs, placés dans les memes
circonstances, aient eu le même malheur.
Ceux ci auront suivi pour s'egarer la meme
route et la meme progression d'idées qui
aura fait passé les premiers de la verité a
la peur.

La Lecture d'Hesiode prouve aussi que
la genealogie attribuée aux Dieux n'a
pas toujours, ainsi qu'on le suppose,
un rapport direct et marqué avec le
pays dont ils sont originaires, ni même
avec le temps ou l'epoque a laquelle
ils ont commancé a etre connus et
honorés. dans la Grece.

Quand il seroit vrai que 1 mot biffure quelques
uns des Dieux nouveaux des Grecs sont
venus d'Egypte et de Phenicie avec cer=
tains arts auxquels ils etoient censés pre=
sider, ce qui n'est pas impossible, nous
ne pouvons dire quels ils sont, parceque
nous ne savons pas en detail ce que les
Grecs ont inventé et ce qu'ils ont appris
des etrangers, et quand nous le saurions,
qui pourroit en conclure que les Grecs
ont emprunté d'ailleurs le fond de leur
Religion et de leur Mytologie?

<65v> Dans le Systheme dontil s'agit on n'ex=
plique point l'origine du Polytheisme
ni ches les Grecs, ni chès les autres nations.
Reste toujours a demander d'ou sont
venus ces premiers Dieux honorés par
les anciens Pelages; ou qu'a été Jupiter
dans sa premiere origine en Grece ou
en Orient; a til été un homme deifié
ou un Etre physique ou allegorique?
Si les Egyptiens ont été les premiers ido=
latres, comment le sont ils devenus?
Comment ensuite ont ils pu faire adopter
leur extravaguante mytologie aux
autres peuples et en particulier aux
Grecs?

Ici il ne s'agit pas proprement de montrer
d'indiquer le pays ou l'idolatrie a pris
naissance, mais de montrer comment
l'idolatrie a pu naitre, qu'elles en ont
été les premieres sources, et les causes
de ses progrés.

<66> Chapitre VII.
Examen de deux autres Systhemes,
celui del Auteur du
Livre intitulé:
l'origine
les progres et la deca=
dence de lidolatrie,
et celui del Auteur
du culte des Dieux
Fetiches.

L'auteur du livre intitulé: l'origine, les pro=
gres et la decadence de l'Idolatrie, Paris
1757. pretend quelle a commancé avant le
deluge, et quelle est née de l'abus de l'Ecriture
Symbolïque en usage dès le premier age du
monde. Selon lui, la coutume de peindre le
Soleil et la Lune pour en former un calen=
drier, d'adorer Dieu au lever du Soleil, et de
s'assembler aux nouvelles Lunes, fit d'abord
deifier ces deux astres. L'Invention du
Zodiaque introduisit ensuite le culte des
animaux. Les premiers qui reflechirent
au mal physique et moral, imaginerent
deux principes, l'un bon et l'autre mauvais;
bientot on en supposa plusieurs et on
peupla l'Univers d'Intelligences du second
ordre auxquelles on rendit un culte.
Après cela aux on rendit aux morts illustres
de grands honneurs qui degenererent bien=
tot en adoration. Ainsi des personages
humains furent mis au rang des Dieux;
on leur prodigua les mêmes titres qu'on
donnoit auparavant aux astres, il
n'en fallut pas d'avantage pour les confon=
dre; Leurs statues chargées de Symboles
furent la source de nouvelles erreurs.
La premiere colonie qui peupla l'Egypte
après le Deluge y porta le gout de l'Ecriture
Symbolique plus ancien qu'elle; mais il
lui fallut de nouveaux caracteres pour desi=
gner un ordre particulier de travaux qu'exi=
geoit le sol de l'Egypte. Les signes anciens
ne servirent donc plus que pour le culte
religieux. et, Dès lors l'intelligence en fut
<66v> reservée aux Pretres seuls. On la perdit enfin entier=
ment lors que l'Ecriture alphabetique plus
commode eut fait negliger negliger oublier l'usage de l'ancienne.
De la sont nees nacquirent les fables, les metamorphoses,
l'adoration des animaux, en Egypte et les
autres folies du Paganisme. Les Grecs
grands admirateurs des Egyptiens appro=
prierent les representations Symboliques de
ceux ci aux Dieux que les navigateurs Phe=
niciens avoient apportés dans la Grece, et
creerent une foule d'autres personages suivant
le même modele. Enfin Rome les adopta
pour la plus grande partie; elle y joignit
ses propres Dieux et ceux des nations vain=
cues.

Ce Systheme qu'on peut appeller le Symbolisme revient a peu près a celui de
l'Abbe Pluche, histoire du Ciel, excepte qu'il
remonte plus haut; il est sujet aux mêmes
difficultés.

On y oppose 1° tout ce qui a été dit ci devant contre
cette pretendue translation des Dieux
d'Egypte et de Phenicie en Grece.

2° L'adoration des astres, des animaux,
et autres parties de la nature, etablit chès
plusieurs nations qui paroissent n'avoir
jamais fait usage de l'Ecriture Symbolique
ni du calendrier, ni connu le Zodiaque
1 ligne biffure

3° le peu de connexions qu'on trouve dans
les divers progrès qu'on fait faire a l'erreur
dans l'esprit des anciens peuples, et la
difficulté de concilier cette progression
avec ce que nous enseigne l'histoire.

4° Le peu de vraisemblance qu'il y a
que avant le Deluge, les hommes sont
tombés dans l'Idolatrie
<67> quil et meme quils aient connu le Calen=
drier et le Zodiaque qui dont l'origine est
posterieure au Deluge.

L'Idolatrie a donc une autre origine que
l'abus de ces diverses instructions. C'est ce
qu'a montré l'auteur du culte des Dieux
Fetiches
publié en 1740: il fait voir qu'au=
cun des Systhemes proposés sur l'origine
de l'Idolatrie ne peut 3 mots biffure expliquer ce
culte universellement rendu aux brutes
et aux creatures inanimées; que l'adoration
des animaux n'avoit aucune relation avec
les astres laquelle ni avec les heros deifiés; que
ce culte étoit direct, absolu, et non point
symbolique ni relatif. Mais ce meme
auteur fait aussi de son côté des suppo=
sitions absolument denuées de preuves
et inconcevables.

D'abord il donne la preference a l'expli=
cation historique des fables, ce qu'il
justifie par le nom même de mytologie
qui; selon lui; signifie le recit des actions
des morts, par ou il insinue que les
Dieux principaux des Grecs ont été des
hommes deifiés après leur mort.

Cependant il convient lui même que cette
methode ne peut rendre raison de toutes
les especes d'Idolatrie, du culte rendu
aux astres, aux animaux, aux etres
même inanimés, qu'elle ne peut expli=
quer le Sabeisme et le fetichisme; donc
cette methode ne doit pas etre preferée
a une autre qui explique tout.

<67v> Il soutient que l'adoration des astres et
des Etres naturels, est plus ancienne que l'Ido=
latrie ou le culte des Heros et leurs images
que c'a ete la premiere religion des Grecs aus=
si bien que des Egyptiens et des Pheniciens,
que le Sabeisme et le fetichisme etoient dans
les premiers temps les deux seules religions
reçues en Egypte; que l'on n'y connoissoit
pas le culte des images statues ni des hom=
mes deifiés; que, selon Sanchoniaton, les
anciens Pheniciens ont adoré de même les
germes de la terre, le Soleil, les vents, le feu.
Cela supposé, comment soutenir avec Hero=
dote que les Grecs ont emprunté leurs Dieux
nouveaux de l'Egypte ou de Phenicie? Com=
ment prouver que les Egyptiens et Pheniciens
ont changé de Dieux et de Religion avant
que d'en faire changer aux Grecs. 1 mot biffure

3° La Grece, dit il Cependant Il nous assure après Herodote que la Grece donna
dans la suite a ses vieux Betyles, les noms
des Dieux etrangers, Mai, comme si les Grecs n'avoient
1 mot biffure pas eu dans leur Langue des noms pour
exprimer leurs Divinités? Mais, dit il, ces
noms propres sont tous orientaux: Cela
signifie qu'ils ont une signification dans les
langues orientales; mais ils en ont aussi
une en vieux Grec, et en Latin, et même
une plus naturelle que celle qu'on leur don=
ne en la tirant du Phenicien.

4° L'auteur a bien developpé les causes
qui ont conduit generalement tous les peu=
ples a l'adoration des Etres naturels; le pen=
chant de lhomme a concevoir tous les Etres
semblables alui même, a supposer de la bon=
te ou de la malice aux choses inanimées qui
lui plaisent ou lui deplaisent, a personifier
les Etres Physiques ou moraux. Pourquoi donc
s'occuper a chercher d'autres origines a l'Idola=
trie de tous les peuples, et dans cette suppos=
ition <68> quelle relation pourra ton trouver
entre les anciennes fables de la Grece et
l'Histoire politique de ce pays?

Mais cepenchant dont on parle auroit
il pu conduire les hommes au point d'adorer
un arbre ou un caillou, au fetichisme.
Nous avons montré ailleurs que toutes
les prattiques du fetichisme supposent
necessairement la croiance des Genies
repandus dans l'univers, croiance qui est
la source commune de toutes les idolatries
et superstitions. Les negres n'adorent
pas autrement leurs Fetiches que les Grecs
n'ont adoré leurs simulachres qu'ils sup=
posoient animées par leurs Dieux.

Mais dit le meme auteur nous supposons
faussement que les Grecs ont eu d'abord la
connoissance d'un seul Dieu et qu'ils sont
tombes ensuite peu a peu dans le Polytheis=
me et l'Idolatrie. Nous ne repeterons pas
ce que nous avons dit au chap. 2 pour
prouver que le Theisme a ete la premiere
religion des hommes, et quand les Grecs
seuls auroient commancé par le Polytheis=
me, lopinion de cet auteur n'en tireroit
pas le moindre avantage de cette suppo=
sition

<69>  autre Systheme qu'on trouve Dans le
mechanisme du Langage,  lauteur suppose que tous les noms
des anciennes Divinités nexpriment quune
quune seule et meme idée relative au Soleil
et aux astres ou aux epitetes qu'on leur don=
noit; qu'ils n'ont ete originairement que
des adjectifs noms orientaux la plupart ad=
jectifs qui ensuite pris pour substantifs
par les peuples qui nentendoient pas les Lan=
gues orientales sont devenus autant de
divinites particulieres; que ces memes adjec=
tifs donnés pour epithetes par flatterie
ou par convenance de signification aux
anciens Rois d'orient ont introduit l'Idola=
trie cad. le culte des hommes deifies; quenfin ces memes adjectifs malen=
tendues ou alterés, pris dans un sens equi=
voque, confondus avec d'autres mots
de la langue des Grecs, ont donne fourni a ceux
ci mille contes puerils et fables absurdes
qui ont produit ce cahos qu'on a ap=
pelle Mytologie.

Pour appuier son opinion il suppose
que tous les anciens peuples, excepté les
Hebreux, n'ont connu d'autre religion
que le Sabeïsme et le Fetichisme.
Mais ce sentiment ne peut gueres
s'accorder avec la Theogonie d'Hesio=
de qui suppose que l'on a etendu
le nom
divinisé originairement  les
diverses parties de la nature, et meme
des choses spirituelles

<70>  Chapitre VIII.
Sentiment d'autres mytologues 1 mot biffure
5 lignes biffure

Systheme du figuris=
me, ou l'on suppose que
les Dieux des Grecs, com=
me ceux d'autres peu=
ples, sont nès successi=
vement dans leur
imagination, sans
autre cause que l'abus
des mots, les equivo
=
ques du Langage,
et des allusions a des
objets naturels, dabord
personifies par proso
=
popée, et ensuite
pris pour personna
=
ges reels.
 

M. Bergier dans son ouvrage
sur lorigine des Dieux du Paganisme

Cet auteur admet tous les principes posés
cy dessus pour expliquer l'origine de
l'alteration du culte primitif et l'introduc=
tion du Polytheisme et de l'Idolatrie, chès
les divers peuples,
ce qu'il suppose presume etre
arrivé partout a peu pres de la même maniere et
par les mêmes causes, sans qu'il soit neces=
saire 1 mot biffure de supposer que ces
erreurs aient été transmises d'un peu=
ple a un autre.

2 mots biffure Suivant cet auteur, la Theogo=
nie d'Hesiode n'est point une genealogie
historique, mais un
autre chose qu'un Tableau de la maniere
dont les Dieux sont nès ou eclos successivement
les uns des autres dans l'imagination des Grecs, un poëme
regulier, 5 mots biffure, dont
le desseïn est de montrer comment les Grecs
de Theistes qu'ils etoient premierement sont
devenus polytheistes, ensuite idolatres
et superstitieux comme cela est arrivé ainsi que cela est
1 ligne biffure
arrive a tous les autres peuples.

Le Poëte a distingué 4 3 regnes successifs
1 mot biffure de Uranus, de Chronus, de Jupiter,
et des Heros, et par la il n'a entendu autre
chose que 4 3 differens etats 1 mot biffure successifs de la
Religion ches les Grecs, qui 4 mots biffure
Grecque auxquels il faut
ches les Grecs, a differentes epoques en ajouter un 4e qui est le culte
des Heros.

<70v> La premiere et La plus ancienne epoque epoque, cest
le temps ou les Grecs adoroient sous le nom
d'Uranus ou Calus, l'Etre Supreme, habitant
dans le Ciel, l'auteur, le Seigneur et le gouver=
neur de toutes choses. Le Poëte rapporte a
cette premiere epoque, la naissance du mon=
de, et la formation des Etres, selon les idées d'une
traddition alterée et confuse, mais en supposant
toujours toutes les parties de la nature ani=
mées par une Intelligence Supreme, et non
encor personifiées; Alors Uranus seul
en possession de l'empire, ne le partageoit
avec aucun de ses enfans, ni aucun des
enfans de la terre; il recevoit seul les hom=
mages des mortels. Ainsi regnoit encor
le vrai Theisme que les anciens premiers Pelages
avoient apporté de l'orient et transmis par
traddition a leurs descendans. Voies
cy dessus, chap. 1.

Sous la 2° epoque les Grecs aiant appris a
considerer le Ciel et ses revolutions pour diri=
ger leurs travaux, ils se firent une idée de
la succession et de la division du temps.

Cette succession marquée par les revolutions
du Ciel fut appellée χρονος qui signifie
(ce qui tourne) mot auquel repondit le
Saturnus des Latins.

De meme que nous confondons souvent
le temps avec le ciel, 3 mots biffure
2 lignes biffure

V. TEM <71> ainsi chès les Grecs ουρανος et χρονος
furent pris indifferemment l'un pour l'autre,
2 lignes biffure
parce que ce sont les mouvemens du ciel
qui marquent le temps, et tous les deux

furent d'abord egalement emploiés pour exprimer
le Dieu supreme.

Ensuite le nom nouveau emploïé plus
frequemment que l'ancien fit peu a peu
tomber celui ci en desuetude, ce qui se fit
avec d'autant plus de facilité que 1 mot biffure
les Grecs plus frappés du mechanisme admi=
rable des Cieux 3 mots biffure et de toute la nature, vinrent
pour lors a se figurer que ce Dïeu Supreme suffi=
samment occupé a presider aux revolutions
generales des cieux, ne avoit commis a
certaines Intelligences superieurs le gouver=
nement des divers parties de la nature, et
des divers Etres physiques, qui par la
prirent pour les Grecs toutes les apparences
d'Etres animés et Intelligens.

Ce fut ainsi qu'une idée fausse et resserrée
de la puissance 2 mots biffure divine fit imaginer
des Divinités subalternes pour la seconder, et
que le Dieu Supreme ne fut plus connu
et adoré que comme le gouvernement gene=
ral du monde, l'arbitre des saisons et qui
preside aux revolutions celestes. Alors ce
grand Dieux qui fait tourner le ciel 1 mot biffure
ne recut plus d'autre nom chès les Grecs
que celui de Chronos, 3 mots biffure
4 mots biffure,
et ce changement
de nom fit dire aux Poëtes que Chronos
etoit fils d'Uranos, et que celui la avoit
mutilé et detroné son Pere, comme il le
fut lui meme par Jupiter.

Alors naquirent les Titans ou Dieux
relatifs aux divers parties de la nature
Les Genies, les Nymphes ou Melies et toutes
ces Divinites qui ne furent que des passions
humaines personifiees, Venus, Nemesis.

<71v> 3 lignes biffure
a Chronos,
Le sommeil, la discorde, les furies, les
parques, la mort, toutes subordon=
nees a Chronos,
qui pendant cette seconde
epoque demeura toujours le Dieu supre=
me, et recut seul les honneurs divins.

16 lignes biffure

Mais l'idée de ce Dieu supreme se trouva
si considerablement alterée sous ce regne
quelle conduisit enfin les hommes au
Polytheisme et a l'Idolatrie, comme cela
arriva sous le regne suivant.

Car a la 3° epoque, on imagina encor de nou=
veaux Dieux pour presider aux actions hu=
maines, aux talens, aux arts, aux Sciences, qui comman=
çoient a etre connues, et ces nouveaux Dieux
2 lignes biffure
qui apprirent aux hommes a jouir des biens de la nature
Dii datores bonorum
attirerent toute latten=
tion des Grecs.
Ainsi Bacchus et Ceres
presiderent a l'agri=
culture; Vulcain a
la mechanïque, Mer=
cure au commerce,
Mars a la guerre,
Minerve aux Sciences,
les Muses a la Poesie
Apollon et Esculape
a la Medecine, les
Graces au maintien
exterieur.
Les anciens Dieux
devinrent aussi en
quelque sorte nouveaux
par la maniere de les
envisager. Jupiter
fut le Roi des Cieux,
Pluton des enfers,
Neptune des eaux.
La plupart furent les
mêmes pour le fond de
l'objet, les noms seuls
furent changés. Calus,
Saturne, ne differoient
pas de Jupiter Roi
du Ciel, ni Ocean Neree
Pontus de Neptune
Dieu de la mer, ni le So=
leil d'Apollon &c.
 

On assigna a tous chacun de ces Dieux anciens et nou=
veaux un departement particulier, on lui fit
une famille, une genealogie; on imagina
entr'eux une Societé, et une subordination
semblable a celle qu'on voioit se former
dans les divers Cantons de la Grece qui com=
mançoient a se policer.

Il en resulta une espece de monarchie ou
hierarchie a la tête de laquelle on plaça
ζευς ou Jupiter qu'on suppose avoir
partagé son empire avec la troupe des
Dieux. Alors fut institué un culte exte=
rieur et pompeux, des fetes, des mysteres;
on batit des temples, les autels furent
chargés de victimes et tout le ceremonial
fut reglé.

Cette nouvelle Cour eclipsa celle de Chro=
nos et des Titans ses ministres, et cela
fit dire aux Poetes que Jupiter 1 mot biffure 1 mot biffure
a la tête des nouveaux Dieux avoit vaincu les anciens
les avoit precipite
dans le Tartase, et qu'il avoit
<72> distribué des honneurs a ceux qui lui
avoient aidé a detroner son Pere.

Cependant Jupiter est toujours le monarque
des Dieux et des hommes qui punit et recompense,
qui ordonne des hommages a rendre aux
autres Divinités et ici proprement comman=
ce le Polytheisme.

La 4e epoque fut celle ou des hommes
fameux, recurent les noms de quelque
Divinité, passerent pour fils de quelque
Dieu ou Deesse et furent placés au rang
des Dieux après leur mort.

Ainsi des Rois furent appelles fils de
Jupiter
pour marquer leur puissance
et leur souveraineté, de Mars pour
marquer leur courage belliqueux, et
leur exploits.
des femmes filles de Venus pour exprimer
leur beauté et leurs graces.

Ce Langage fit bientot attribuer aux
Dieux les passions, les vices, les avantures
des hommes, confondre les Dieux avec les
Heros, et introduisit dans la Mythologie
Grecque toutes les absurdités les plus revol=
tantes; ce qui convertit la religion primi=
tive des Grecs en un cahos d'erreurs, de
superstitions et de libertinage, quon a
peine a concevoir.

Alors Jupiter ne fut plus connu que
comme le Dieu qui exerce son pouvoir
dans le Ciel et dans les airs, autour des
meteores, de la pluie, des orages, du ton=
nere, tandis que dautres Dieux regnoient
avec une autorité presque egale sur
la mer, sur les entrailles de la terre &c

<72v> Ces 4 epoques de la Religion Grecque dis=
tinguees par Hesiode repondent assès bien
a 4 epoques successives de l'etat natio=
nal ou politique des Grecs.

Dans le temps ou la Grece n'etoit encor ha=
bitée que par quelques familles de Pelages
venues d'Orient, dispersées dans un vaste
pays, ne connoissant de Societé que la
domestique, occupees uniquement de
courses, de chasse, de pêche, et des besoins
les plus pressans, ces hommes avoient con=
servé encor quelques vestiges de la traddi=
tion prïmitive avec une notion, du moins
confuse, d'un Dieu Supreme, ουρανος
habitant au Ciel, d'ou il gouverne tout.

Des qu'ils en vinrent a quelques ebauches
de Societé imparfaite et de culture et qu'il
leur fallut une espece de Calendrier pour
regler les travaux communs, les secours
mutuels, les assemblées publiques, &c.
alors ce Dieu supreme devint Chronos
le premier moteur du Ciel, l'arbitre des temps
et des saisons, l'auteur des fruits de la
terre; mais en meme temps on supposa le
concours des Esprits ou Genies subalternes
dans le gouvernement du monde, pour
executer ses ordres et distribuer aux hommes
ses bienfaits.

Quand la population fut assès grande
pour batir des villes, former des corps
2 lignes biffure
politiques, quand
dès la même l'agriculture fut perfectionnée
et qu'on eut inventé divers arts liés inse=
parablement avec elles pourlors on associa
<73> au Dieu Supreme, Monarque de la
nature, Jupiter, une foule de Dieux subal=
ternes pour presider aux talens et aux
divers travaux de l'industrie; le ciel
fut formé sur le plan et le modele des
petites monarchies de la Grece qui comman=
coient a se former.

Enfin a mesure que les Grecs devinrent
plus civilisés, et des la plus guerriers, com=
me aussi plus libertins, ils deifierent
les talens, les bravoures, les passions et
après avoir fait les Dïeux semblables aux
hommes, ils imaginenterent et honorerent
des Heros semblables aux Dieux. 1 mot biffure
10 lignes biffure

Des lors les Divinités parurent comme
metamorphosées en hommes. Jupiter
devint comme un personage particulier
qu'on conçut sous l'idée d'un Roi. Le
ciel appellé l'olympe, ou il etoit censé
habiter, fut pris pour un lieu de la
terre, pour le mont Olympe dans la
Thessalie; dela le pretendu regne de
Jupiter dans ce pays, les combats des
Dieux sur le mont Olympe, et tous
ces recits mytologiques ou les Dieux
sont presentés sur la scene comme
si c'etoient des hommes.

Ainsi si cette fable ne vient
pas, comme dit le Clerc, de
ce qu'on a confondu Jupi=
ter le Dieu Supreme,
habitant dans le ciel, avec
Jupiter, Roi de Thessalie,
qui habitoit sur le mont
Olympe, mais unique=
ment de ce que le Dieu
supreme, n'aiant plus été
envisagé que comme
un personage particulier
Dieu humanise,
on en vint a confondre
l'olympe ciel, avec
l'olyme montagne,
comme si celle ci pou=
voit avoir ete sa de=
meure.
 

Telle fut la progression que l'erreur survit
chès les Grecs comme ches les autres
peuples anciens.

<73v> Selon M. Bergier, 3 mots biffure
4 mots biffure,
il ne
faut donc point chercher l'origine des Divi=
nités et des fables Grecques, ni des eclaircis=
semens pour les expliquer, dans les evene=
mens politiques de la Grece ni dans au=
cune histoire proprement dite de ses
peuples.

il faut encor moins recourir a l'histoire
dEgypte et de Phoenicie ni même aux
Langues des peuples de l'orient, si ce n'est
dans les cas ou la Langue Grecque peut
en avoir empruntés quelques primitifs
ou derivés, sur letymologie des ou la signi=
fication desquelle ces Langues peuvent
des la même repandre du jour.

Les Dieux des Grecs ne 1 mot biffure durent leur nais=
sance qu'aux prejugés d'un peuple igno=
rant et grossier, qui joint joignoit a une admi=
ration peu reflechie des sentimens confus
de frayeur ou d'espoir.

Les noms des Divinités et les fables Grecques
ne sont que des allusions a des objets
naturels personifiés.

Ce ne sont pas comme l'ont pretendu les an=
ciens allegoristes, Heraclite de Pont, Zenon,
Cleanthes, Crysippe, Plutarque, Porphyre
<74> Maerobe, Natalis Comes, Bacon, des
allusions fines et ingenieuses aux secrets
de la nature et des arts, puisque de telles
allusions auroient exigé des observateurs,
instruits des naturalistes, des Philosophes
celebres, des Artistes fameux, qui n'exis=
toient point encor dans les temps anciens
qui ont vu naitre la Mytologie.

Il ne s'agit que d'allusions a des objets
de la nature des plus communs, des notions
toutes simples, des verités 2 mots biffure
triviales, telles qu'ont pu aisement
les concevoir des peuples 1 mot biffure
non civilisés. Tout s'y reduit 2 mots biffure
allusions
a une histoire 2 mots biffure
plus
naturelle, une physique, une topo=
graphie aussi grossieres que le Lan=
gage emploié par ces peuples pour
lexprimer.

Ce Langage d'origïne pauvre, mal
determiné, dont les expressions devenues
dans la suite suranées, ont ete travesties
en d'autres, ce Langage n'a point été
compris par les descendans, ou il leur
a donné 1 mot biffure lieu a mille equivoques,
tournures equivoques dont les Poetes
se sont plu a abuser pour en faire
une sorte de jeu d'Esprit, quils savoient
propre a flatter limagination de
leurs compatriotes; 1 mot biffure 2 mots biffure
6 lignes biffure

car les Grecs avides
du merveilleux ont
toujours saisi dans
la pretendue histoire
de leurs Dieux et de leurs
Heros tout ce qui pou=
voit fournir des ma=
teriaux a une narra=
tion etonnante par
sa bisarrerie mons=
trueuse.
 

<74v> 3 lignes biffure
Ainsi toutes les fables des Dieux an=
cïens des Grecs
ne sont, suivant M. Bergier, qu'une
allusion perpetuelle a l'histoire naturelle
de cet Univers, de ses elemens, de ses di=
verses parties le Ciel, l'air, la terre, la
mer.

histoire aussi mal entendue que les con=
noissances de ces anciens peuples en
fait de physique etoient imparfaites et defectueuses
Lhistoire des Dieux
nouveaux, enfans
de Jupiter, ne sont
qu'une allusion aux
arts et aux talens
d'un peuple sorti de
la barbarie et a
quelques nouveaux
usages.
 

Les fables des Dieux nouveaux, ,et des
Heros ne sont que des allusions a
lhistoire naturelle et la Geographie de
la Grece et des environs, a des objets et
des lieux mal determinés, des topogra=
phies peu exactes et entendues a contre=
sens, a cause des noms qui pretoient
facilement a l'equivoque. Ce sont diffe=
rentes parties du Sol de la Grece personifiées et
confondues ensuite avec des hommes du même nom.

Ainsi une physique grossiere, une geographie
inexacte, des abus de l'ancien langage
et les equivoques sans nombre qu'on
s'est plu a 1 mot biffure 4 mots biffure
, ce sont la, dit cet
auteur, les seules ressources qui nous restent
pour debrouiller le cahos de la Myto=
logie.

<75> 6 mots biffure Pour tirer parti
de cette clef, il faut donc remonter aux
anciens materiaux dont les Poëtes ont
abusé, il faut remonter a la significa=
tion primitive des mots qu'ils ont fait ser=
vir a leurs jeux d'ïmagination, il faut
analyser ces mots en 1 mot biffure les ramenant
a leurs primitifs radicaux, les comparer, demeler
leur double sens et l'abus qu'on a pu en
faire, pour saisïr les causes qui ont pu
faire oublier leur valeurs originaires pour
en substituer d'autres propres a accrediter
des recits fabuleux.

Ceci 1 mot biffure peut s'etendre a toutes les Langes
des pays orientaux qui ont vu naitre les
fables, mais 3 mots biffure M. Bergier l'applique particulierement
a la Langue Grecque.

On n'ignore pas que les Grecs des siecles poste=
rieurs ne comprenoient plus le Langage suranné
de leurs premiers ayeux; et qu'ils aimoient même
a se jouer des ces mots, qui pouvoient le plus preter
a l'equivoque et a la fiction; Ce gout pour les jeux
1 mot biffure
de mots regnoit même
encor dans le plus beau
siecle d'Athenes; et c'est
le sujet le plus ordinaire
des plaisanteries d'Aris=
tophane et les Tragi=
ques
meme avec leur serieux
ne pouvoit s'en
passer pour satisfai=
re les Grecs.
  Ils eurent cela
de commun avec plusieurs nations, et nous
voions cet avons vu cet amour des jeux de
mots dominer la nation francoise, com=
me nous le voions encor fort repandu par=
mi les gens de campagne; et servir meme d'amu=
semens aux enfans. Dela le gout qui a
subsisté longtemps pour les enigmes, les Logo=
gryphes, les anagrammes, les charades &c.

Quand les Grecs donnerent les premiers
noms aux Etres physiques leur Langue etoit
grossiere 1 mot biffure comme eux. Les siecles
suivans aiant amené peu a peu la per=
fection de cette Langue, de nouveaux mots
<75v> aiant ete substitués aux anciens dans l'usage,
le sens primitif de ceux ci fit ainsi que leur
vraie origine furent bientot oubliés; sil
n'en fallut pas d'avantage pour en autoriser
les abus et le parti qu'en tirerent les Poëtes,
amis du merveilleux, et occupés uniquement
de ce qui pouvoit flatter le gout de leur nation pour
les contes pueriles.

A cette cause 1 mot biffure Joignès a cela encor les
licences que les Poëtes se sont donnés pour
alterer eux mêmes les mots, en enchangeant
les voielles, substituant des longues aux breves
ou deux au lieu d'une &c. Ce qui ne contribuoit
pas peu a en faire perdre de vüe la signi
l'origine et la signification primitive, et
dut necessairement en multiplier les abus.
Joig ainsi le mot μεδεα qu'ils emploient
a ete rapporté a μεδω impero, parce qu'ils
lont substitué a μηδεα qui vient de
μαδαω madeo.

Mais on en trouvante une autre cause plus
etendue encor dans la pauvreté de la
Langue a sa premiere origine qui mit
dans une sorte de necessité 1 mot biffure d'emploier com=
me equivalens des mots qui ne le furent
jamais dans les Langues perfectionées.

De la vint par ex: que les anciens Grecs
emploierent indifferemment dans leur Lan=
gage primitif des mots qui designoient des
idées très differentes, comme celles de profondeur,
lieu profond, canal, fossé, aqueduc,
ruisseau, fontaine, riviere, lac, gouffre,
mer, eau, liqueur, idées que nous distin=
guons dans nos Langues par divers mots
que lusage ne nous permet jamais
<76> d'emploier indifferemment l'un pour l'autre.

On comprend quelle confusion a du resulter
inevitablement de la dans les mots et sur=
tout dans les noms propres, et a combien
d'equivoques et de recits fabuleux cette
confusion a pu donner lieu.

J'en dis autant de la diversité des dialec=
tes qui fut si considerable chès les Grecs,
surtout dans les temps anciens, qu'un mot
usité dans un district de la Grece, etoit
inintelligible dans l'autre; et que les
Poëtes qui les emploioient indifferemment
les divers dialectes, purent faire servir
un grand nombre de mots très peu connus a
leurs vües de fiction. Dela aussi
il est resulté qu'on a si prodigieusement
varié dans l'explication etymologique
des noms et des surnoms des Dieux; que
des noms synonimes ont été pris pour
differens et ont fait multiplier les persona=
ges; qu'on a pris pour Dieux nouveaux
ceux qui furent connus de toute ancien=
neté sous d'autres noms; ce qui a produit
naturellement les plus etranges absurdi=
tés et contradictions dans les recits que
les poëtes ont publiés sur les Dieux.

<76v> Ainsi pour entendre Hesiode, selon M. Ber=
gier, il faut se rappeller avoir bïen present
a l'Esprit les principes suivans.

Quil ne s'agit dans ce poëme, et dans tous
les recits mytologiques,
que des alterations
survenues successivement dans le culte
des Grecs. De l'adoration l'idee et du culte du Vrai Dieu
ils ont passé 3 mots biffure a lidee et au culte des Genies admi=
nistrateurs. Les operations 2 mots biffure attribuées
a ceux ci aiant été exprimées en style an=
cien ou poetique ont été prises dans la suite
pour des actions humaines, et l'on en est venu
a s'imaginer que ces Dieux avoient été des
hommes; peu a peu les hommes eux mêmes
ont été pris pour des Dieux; 1 mot biffure enfin
a tout cela on a joint encor des personages
divins de pure allegorie, auxquels les Poëtes
ont donné une existence reelle pour les
mettre au rang des Dieux. Tout ce qu'on
appelle Attributs, fonctions, avantures de toutes
ces Divinites, ceremonïes de leur culte,
genres d'hommages, de sacrifices &c tous
les contes puerils de metamorphoses et de
bisarreries monstrueuses que nous offre
la Mythologie, tout cela ne repose que
sur des equivoques des mots anciens
surannés, alterés, confondus, des allusions
ridicules, des minuties pueriles de Langage
et autres abus de ce genre.

Il ne faut pas oublier 2° que les change=
mens arrivés dans la Religion Grecque sont
depeïnts sous l'ïmage et le nom de com=
bats entre les anciens Dïeux et les nou=
veaux.

<77> 3° Les anciens Dieux pris dans les diffe=
rentes parties de la nature n'etoient au=
tre chose que les Genies administrateurs
qu'on supposoit les animer, les diriger, et
ils n'ont recu originairement d'autres noms
que ceux qui designoient dans la Langue
primitive les divers Etres naturels.

Ainsi 4 les montagnes, les fleuves, les
fontaines, ont été converties en Divinités,
en Nymphes, en Heros, les torrens et
les gouffres en monstres.

5° Les travaux des premiers colons pour
le dessechement des terres, la conduite des
eaux, les digues opposées aux torrens, la
deffrichement, les labours &c.
tout ce qui demandoit de l'activité, des efforts
soutenus, tout a ete decrit sous l'image de
combats guerriers des Heros contre les
monstres.

<77v> 6 Les noms de certains lieux, rivieres, ro=
chers, promontoires &c. Ces noms a raison
de leur etymologie ou de quelque abus
du Langage, ont été attribués a certains
personages ou Heros imagïnaires, qu'on
supposoit y avoit habité, et en avoir fait
le theatre de leurs avantures, personages
qu'on cherchoit a multiplier sans fin
pour relever d'autant le lustre de la nature
Grecque. Après que les Dieux 1 mot biffure eurent
eté créés selon l'imagination des peuples,
les Poëtes ne manquerent pas sur de sim=
ples rapports de mots, de leur donner une
partie avec un ton aussi decidé que sils
eussent pu le prouver par des monumens.

Ainsi on ne doit pas etre supris si les Poëtes
1 mot biffure s'accordent si peu sur la patrie de leurs
Dieux et de leurs Heros: chacun par vani=
te vouloit qu'ils fussent nés dans son pays.

Rien n'egale surtout le parti qu'ont su tirer les
Poëtes du prejugé general sur les Genies
invisibles. Entre leurs mains toute la nature
s'anime, tout vit, tout respire; l'homme est
environné de Genies occupés de ses besoins
et la multitude des personages fournit
des tableaux variés a l'infini et des scenes
toujours nouvelles. En vain la religïon
1 mot biffure est venu a bout de changer nos
idées et nôtre culte, le prejugé subsiste
encor dans nos coeurs, nôtre poësie retom=
be toujours sur la Mytologie ancienne
par une pente presque invisible, nos
Poetes reviennent toujours a la fable par
une sorte de charme magique, et tout
cela nous fait comprendre quelle part les
Poetes ont eu au regne du Polythesime.

<78> Pour ce qui regarde l'Etymologie dans
ce Systheme 1° on n'a recours aux Langues
d'orient que lorsqu'il s'agit d'expliquer les noms
des Dieux Orientaux d'origine, ou certains
mots Grecs qui n'ont dans cette Langue
aucune affinité avec d'autres mots.

2° on a recours quelque fois au Latin
pour expliquer des mots que cette Langue
a tirés de l'ancïen Grec, et qui sont les mêmes
dans les deux Langues: 3° Dans les cas
ou le Grec fournit un nombre suffisant
de termes de comparaison pour verifier
le sens d'un mot, on se dispense de recou=
rir sans necessité a d'autres Langues; mais
4° lors qu'on trouve des mots qui communs
a diverses Langues, qui ne different entr'eux
que par de legeres varietés de forme et
de signification ou qui se rapportent
a des objets communs a tous les peuples,
on s'attache a raprocher et comparer ces
mots pour faire conster de leur identité et
de leur signification primitive. 1 mot biffure

Tels sont entrautres les noms de rivieres
et de montagnes. 5°i on observe que le nom
d'une Divinité devant toujours exprimer
son caractere essentiel et ses fonctions, si elle est nom=
mée en diverses Langues sous dïvers noms,
on est fondé jusques
a un certain point
a supposer que
  tous ces noms 3 mots biffure 3 mots biffure equivalent pour
le sens. 6° Pour l'explication des fables
il importe de connoitre le plus ancien Grec,
celui qui s'ecarte le plus du Grec pur, le
Grec le plus suranné, mais en meme temps
le plus populaire; le meilleur guide sur
ce point est Hesychius.

Mais la principale connoissance necessaire
est celle du Langage propre a la Mytho=
logïe. Dans ce style, les enfans du ciel
ne sont que les divers noms ou epithètes
qu'on a donné au Ciel; les enfans de la
mer sont les divers termes emploies pour
signifier les eaux, quelques parties ou phe=
nomenes de cet element; la posterite du Ciel
<78v> et de la terre ce sont les Etres auxquels on
ne pouvoit assigner d'autres ancetres, et
qui sont aussi anciens que le monde. En
ce sens les astres sont nés de la mer.

Diverses choses ont ete designées sous le
nom et la relation d'enfans a Parens.

1° une existence posterieure: les Etres sont
fils du neant, le jour enfant de la nuit,
du chaos, dit Hesiode, sont nés l'Erebe
la nuit; 6 mots biffure
5 mots biffure
ce qui accom=
pagne: l'aurore est la mere des vents par=
ce que ceux ci se levent avec elle; le sommeil
et les songes sont nés de la nuit &c.

3° la production: la paix est fille de
Themis, Plutus est fils de Ceres 1 mot biffure l'agricul=
ture. Phaeton ou la lumiere, Persée
ou la chaleur ont pour Pere le Soleil

4° le rapport de grandeur: une fontaï=
ne est fille d'un fleuve, les rivieres filles de
l'ocean, ou enfans de Neptune cad
le grand reservoir des eaux.

5 la naissance ou l'habitation dans un
lieu, ou le lieu d'ou l'on est sorti: les pre=
miers habitans d'un pays sont enfans
de la 1 mot biffure terre, γηγενεις, les peuples
maritimes sont nés de la mer, les colons
voisins d'un fleuve sont nés de ce fleuve,
Sparte est fille du fleuve Eurotas, Pho=
ronée est fils du fleuve Inachus ; une
ville situee aux pieds d'une montagne
est fille de cette montagne, un navi=
gateur venu de Lybie en Afrique est
fils de Neptune et de la Nymphe Lybïe.
après cela quel fond faire sur tout ce
que les Poetes disent de la fondation
des villes et de la genealogie des Rois.

6. La ressemblance; les belles personnes
sont filles de Venus, les Rois sont issus
immediatement de Jupiter. 3 mots biffure
1 ligne biffure

7. l'instruction; les guerriers sont enfans
de Mars, les musiciens d'Apollon, les
Medecins d'Esculape, les forgerons de Vulcain.

<79> 19 lignes biffure
11 lignes biffure
8. La naissance d'une Divinité designa
1 mot biffure le temps ou elle a commancé
a etre connue et honorée; ainsi tous les Dieux
sont enfans de Jupiter. 3 mots biffure
2 lignes biffure

9. Souvent 1 mot biffure la filiation ne marque que une simple
succession de noms; Ainsi Chronos
est fils de 1 mot biffure Uranos, &c Jupiter
1 ligne biffure
.

10. Quelques fois ce nom fut
un effet de supercherie;
une femme pour eviter
l'infamie se vantoit d'avoir
eu commerce avec un
Dieu; 4 mots biffure
un homme
les pretres
attiroient les femmes
dans le temple de nuit, sous
pretexte que le Dieu l'exigeoit

ainsi. Dans ce cas
Ceux qui etoient nès
d'un Pretre ou d'une Pre=
tresse de quelque Dieu

passoient aussi alors
2 mots biffure pour fils du
Dieu même; 2 mots biffure
6 lignes biffure
 

Deux noms de la même chose, l'un
masculin, l'autre foeminin, font chès
les Poëtes deux personages, l'un
male, l'autre femelle; et il s'en fait
un mariage, d'ou resulte une famille.

Ainsi ερεβος le soir et νυξ la nuit
font un mariage dans les formes d'ou nais=
sent le jour et la clarté.

<79v> Si le nom d'un animal est feminin, cest un monstre qui a un visage de
femme; si c'est un mot de
3 syllabes, le monstre
pretendu a trois tetes
ou trois corps.

Les Dieux sont males ou femelles selon
le genre de leurs noms, et
comme il a plu
a la Grammaire.
Ainsi Ocean, Neree, Pontus, trois noms
de la mer, sont 3 Dieux; ils poussent
Thetys, Doris, Amphitrite, trois autres
noms de la mer qui font 3 Deesses,
Dela naitssent trois mariages et une immense parenté.

Neree etant un des plus anciens noms de la
mer, on l'a appelle le vieux Nerée et on
lui a assigné pour descendans une foule
de nom, plus modernes dont on a compose
la foule des nymphes marines
Dela vient aussi qu'on ren=
contre des Dieux her=
maphrodites dont le
sexe est indecis; on
trouve un Dieu Lu=
nus comme une
Deesse Luna. De la
cette formule d'invo=
cation. Sive tu Deus
sive tu Dea es
.
 

24 lignes biffure

23 lignes biffure

<80> Dans avec ce Systheme, selon M Bergier,
on peut expliquer tout ce qui est inexpli=
cable dans celui des Mytologues, Histo=
riens.

On concoit d'abord qu'en prenant pour
Dieux ces pretendus Genies administra=
teurs, leurs operations ont pu par une
suite de l'ignorance et de l'abus du Langage
etre envisagé comme des actions hu=
maines, et qu'ainsi on a pu en venir a
attribuer aux Dieux les passions et les
vices des hommes, et a les croire vicieux,
sans cesser pour cela de les adorer comme
on avoit fait dès les temps anciens;
cela se comprend beaucoup mieux
qu'on ne concoit comment on auroit
pu placer dans le Ciel, des hommes
qu'on auroit 1 mot biffure su avoir
vecu dans un libertinage et le crime
et attribuer a de tels Etres l'empire
sur la nature.

Les inclinations vicieuses qu'on est venu
a attribuer a ces Dieux n'ont pas empe=
ché qu'ils ne fussent toujours reputés
arbitres du sort des hommes, et des
la même quils ne recussent des hom=
mages interessés, inspirés par lesperance
ou la crainte, que des hommes timides
<80v> disposés en tous les temps et en tous les lieux
a appaiser les Esprits malfaisans par
quelque culte, avoient deja accoutumé
des les anciens temps a leur prodiguer.

On sait que les hommes ont toujours
eu plus de crainte pour les mauvais
genies que de reconnoissance pour les
bons, et nous en trouvons la preuve
dans tout ce detail que nous avons
presente sur la religion des nations
barbares de l'ancien et du nouveau
monde.

3° Cest un fait constant que les Grecs
ont permis et souffert que leurs Dieux,
quoique objets du culte public et respec=
tés comme tels dans leur temples, fussent
1 mot biffure ainsi que leurs fables, joués
mocques et persiflés sur leurs Thea=
tres 1 mot biffure de la maniere la plus pro=
phane et la plus audacieuse. Nous
en trouvons des exemples dans Euripi=
de. 

On sait d'un autre côte que les Phi=
losophes qui se mocquoient de ces
faux Dieux, ou etoient seulement
soubsconnés de n'y pas croire, etoient
regardes comme des Athées qui s'ap=
poient la Religion par ses fondemens.
Dela la mort de Socrate.

<81> Dans le Systheme des Mytologues his=
toriens il est impossible de concevoir
comment les Grecs 1 mot biffure ont pu tomber
dans une contradiction aussi palpable:
si toute la mytologie eut été une vraie
histoire, comment n'eut on pas été egale=
ment indigné contre les Poëtes et contre
les Philosophes. Mais on trouve une
clef satisfaisante de cette bisarrerie
apparente dans la supposition 1 mot biffure
que les Grecs n'entendoient point
les fables au pied de la Lettre, et que
personne ne pouvoit 1 mot biffure etre trompé
sur ce point. Tout etant regardé
comme figure, allusion, allegorie,
il etoit permis aux Poëtes de se jouer
de l'historique, mais nullement aux
Philosophes de se moquer des Dieux
eux memes objets de la religion publique.

Aussi Strabon de la nature des Dieux 
dit que les fables nous
apprennent sous des expressions mys=
terieuses ce que les anciens pensoient
des choses naturelles, et que tout ce
qu'il y avoit de Grecs sensés pensoient
de même; sans quoi on ne sauroit
concevoir l'audace des Poëtes sur le
Theatre d'Athenes en parlant de
leurs Dieux.

On voit que les Philosophes etoient
bien eloignes d'admettre le sens histori=
ques. Platon dit d'Homere et Hesiode
qu'ils n'ont pas su mentir avec decence
et qu'ils ont represente les Dieux
<81v> tels quils n'ont jamais existe.

En parlant des fables des Dieux et des Heros
il assure qu'on ne doit rien croire de tout cela,
qu'on ne doit il deffend de proposer a la jeunes=
se ces narration soit qu'on les regarde comme
des histoires, soit comme des allegories, parce
que les jeunes ne sont pas capables de saisir
cette distinction. 

Ciceron suppose que les Dieux sont nés
de la physique et ont été transformés dans
la suite en hommes, et que c'est ce qui a
donné lieu aux superstitions et aux fa=
bles.

Dans le Systheme des Mytologues historiens
il est impossible de rendre raison de l'origi=
ne de la Divination ou de la persuasion
generalement repandue que les Dieux pou=
voient devoiler a leurs adorateurs les pro=
fondeurs de l'avenir, par les oracles, le
cours des astres, les entrailles des victimes
le vol des oiseaux, les songes, les songes
et les prodiges. Car Si les Payens en effet
n'avoient jamais envisagés leurs Dieux
autrement que comme des hommes hono=
rés de l'Apotheose après leur mort, com=
ment auroient ils pu se persuader que
ces Etres autrefois semblables a eux
etoient acquis tout a coup par leur
passage a un autre etat; cette intelli=
gence <82> infinie que demande une
connoissance certaine des evenemens
a venir. La mort seule pouvoit elle
leur donner un privilege infiniment
au dessus de l'humanité, ou leur Dei=
fication imaginée et executée par d'au=
tres hommes, leur communiquer un
degre si sublime de penetration.

Nous voions, il est vrai, par Deuter 
et par plusieurs autres monumens que des
1 mot biffure
que dès les permiers temps de l'Idola=
trie, la coutume setoit generalement re=
pandue parmi les Payens d'evoquer
les morts pour les interroger et appren=
dre d'eux l'avenir.

Mais cela ne prouve point, comme
le veulent les Mythologues historiens, qu'on
envisageat les morts, comme aiant été
reellement transformés en Divinités
douées d'une Science infinie. Cette
erreur n'etoit a proprement parler
qu'une consequence tirée de quelque
autre erreur anterieure, s'avoir, la
persuasion ou l'on etoit que les Dieux
par leur nature, superieurs aux hom=
mes en Science et en pouvoir, voioient
sans aucun nuage la chaine des
destinées, et que disposés a prendre interet
<82v> au bonheur des hommes et a leur faire
du bien, ils l'etoient des la même aussi
a leur reveler par quelque signe precis
tout ce quils avoient envie, ou interet
de savoir relativement aux evenemens
futurs; qu'en consequence ils ne manquerent
jamais de le faire lorsqu'on les en prioit
et en emploiant les signes qu'on leur
demandoit, et que pour connoitre l'a=
venir il ne s'agissoit que de se rendre atten=
tif aux a la valeur de ces signes dont
ils se servoient pour les instruire. 

A cette persuasion on joignoit la suppo=
sition que les ames des morts, se trouvant
degagées de la matiere, pouvoient 2 mots biffure
par une sorte de commerce spirituel avec
les Dieux recevoir aisement d'eux la com=
munication de leurs lumieres et de leurs
connoissances, et que dès la les hommes,
en evoquant et interrogeant les morts
pouvoient, par leur entremise, s'instruire
auprès des Dieux de ce qu'ils vouloïent
savoir de la part des Dieux. C'est donc
l'usage d'interroger les Dieux même qui
fit penser a celui de consulter les ames
ou les ombres des morts et fit emploier
pour cela a peu près les mêmes prattiques.

Mais, selon les recits des Poêtes même,
on mit toujours une grande difference
entre les morts qu'on evoquoit pour les in=
terroger, et les Dieux auxquels on s'adressoit
pour les consulter. Jamais les premiers
<83> ne furent interpellés comme etant
des Divinités; on supposoit même qu'ils
ignoroient ce qui se passoit sur la terre;
on ne leur demandoit que les secrets
des Cieux. Les ombres erroient dans
les champs Elisées, tandis que les
Dieux habitoient l'olympe. 

La distinction entre les Dieux im=
mortels et les ames des mortels est
aussi ancienne que l'Idolatrie.

Si les Payens n'avoient jamais eu
d'autres Dieux que des hommes morts,
il n'y auroit jamais eu d'autre sanc=
tuaire pour les consulter et recevoir
les oracles que les tombeaux autour
desquels on supposoit leur ames erran=
tes. Jamais on ne les seroit allé cher=
cher comme les Payens ont fait dans
les antres, et jamais on n'eut vu
naitre l'opinion de cette exhalaison
prophetique qu'on disoit sortir de
telle ou telle caverne.

<83v> En supposant au contraire des Genïes
administrateurs repandus dans toute
la nature , il n'etoit point ridicule aux
Payens d'en supposer de croire que ces
Dieux se rendoient presens dans les an=
tres et les cavernes dont l'aspect seul ins=
piroit une secrette 2 mots biffure. et reli=
gieuse frayeur.

Ce theatre d'oracles etoit d'autant mieux
choisi qu'il pouvoit s'exhaler dela des
vapeurs ou exhalaisons capables de
donner des vestiges a ceux qui y entroient
des vertiges qu'on pouvoit prendre pour
inspiration.

Ce nest aussi qu'en supposant que les
Payens ont adoré des Genies moteurs
de la nature, des astres, des Cieux, de
l'air &c qu'on peut expliquer d'une ma=
niere naturelle l'origine des autres genies
de divination et de la folie de l'astrologie
judiciaire, des horoscopes, des augures
par le chant ou vol des oiseaux, des
haruspices, de l'inspiration par le songe
dela creance aux miracles et aux pro=
diges, aux evenemens extraordinaires 1 mot biffure
4 lignes biffure

1 mot biffure Aucune superstition
plus ancienne que celle
de l'astrologie judiciai=
re et des Sciences occul=
tes. Les chaldeens com=
mancoient a peine a
s'occuper de l'Astrono=
mie qu'ils se vantoient

deja de pouvoir lire dans
le Ciel la destinée des
hommes et des Etats:
a cela ils joignoient
l'usage des sortileges,
et des enchantemens
et de la magïe, pour
detourner les malheurs,
dont on etoit menacé;
et procurer toutes
sortes de bonheur par
des expiations, des
sacrifices et des cere=
monies magiques. 

Tous ces
genres de supers=
titions et tous le
ceremonial du Paga=
nisme, nont au=
cune connexion
avec le culte des
hommes, et
 
<84> 1 ligne biffure
ne peutvent etre expliqués que par la
meme supposition de Genies adminis=
trateurs repandus partout et qui se
mellent de tout ce qui se passe ici bas.

Ces mêmes allusions forcées et grossieres,
ces equivoques ridicules, ces jeux de mots puerils
qui ont donné naissance dans limagi=
nation des hommes a tous ces pretendus
Genies ou Dieux subalternes a leur
genealogie, leurs avantures, &c et qui 1 mot biffure
1 ligne biffure
2 mots biffure
, ces mêmes puerilités ont
decidé de la maniere dont ils devoient
etre honorés, des lieux qu'il falloit leur
consacrer, des victimes qu'on devoit leur
offrir, des animaux et des productions
sur lesquelles ils avoient Droit, et de toutes
les superstitions introduites dans le
culte des Payens. Rien de tout cela
ne peut etre expliqué dans le Systheme
des Mytologues historiens, car si les
Dieux n'ont été que des hommes elevés
par d'autres hommes, a tel ou tel grade,
comment a til pu arriver par ex:
qu'un même Dieu fut tout a la fois
le Dieu des bornes, des chemïns, des
voyageurs, du commerce, des marchans
des voleurs, des orateurs, des ambassa=
deurs, un autre fut le Soleil et le
Dieu des portes, un autre la Deesse
de la chasse et des accouchemens &c

<84v> Il n'en faut pas chercher d'autre cause
que les diverses acceptions qu'on a pu don=
ner au meme nom, selon qu'on le rappor=
toit a differens primitifs; tels furent
les noms de ερμης Mercure, Janus
Diane.

21 lignes biffure

<85> 8 lignes biffure
Qui est ce qui decidé la maniere dont les
temples devoient être placés, c'est l'allusion
des noms. 1 mot biffure Jupiter cad. haut elevé
a ete honoré sur les hautes montagnes
Neptune c.d. qui domine sur la mer
a ete adoré sur les promontoires, Vulcain
ca.d. le feu, sur les Volcans.

Les animaux consacrés aux Dieux
etoient aussi relatifs a leurs noms ou a leurs
attributs, l'aigle qui vole au haut des
airs fut l'oiseau de Jupiter, le Paon
fut consacré a l'orgueilleuse Junon,
le cheval, animal guerrier a Mars,
il fut aussi attribue a Neptune par lequivo=
que du mot ιππος. Le Lion fut assigne
a vulcain a cause de sa chaleur &c.

<85v> Les victimes blanches furent reservées
aux Dieux celestes, les noires devouées
aux Dieux infernaux.

Qui est ce qui decida des Divinités tute=
laires des villes; ce fut encor l'affinité des noms.
Les Atheniens prirent αθηνα Minerve,
a cause de son nom αθηνη,
ceux d'Argos, αργεση Junon
a cause de son surnom δας de αργειη,
ceux de Chypre Venus a cause de son
nom κυπρις.

Ce furent ces allusions qui dans la suite
firent ïmaginer que ces Divinités etoient
nées dans le lieu ou l'on les adoroit.

Ainsi leur nom de Jones n'est point venu
de Joun fils de Japhet, ni de Jon fils de
Xuthus, qui signifie humide, et de Creusa
fontaine de Boetie, mais de ιων, ιαων qui designe un pays
maritime. Par la même raison ils furent appellés ηθιονης
de αθιεη, ou υαντες Hyantes de
υη humidité.

Leur nom de Achei ou Achivi ne vint
point d'Acheus frere de Jon, mais de
αχ qui signifie eau, comme celui de
Dores ne fut point tiré de Dorus fils de
Neptune et d'Alope, mais de δωρις
nom de la mer, du rad. δωρ eau.

Hellenes vient aussi peu de Hellen
fils de Deucalion; c'est le derivé de ελ=
νη fontaine qui a été aussi le nom de
plusieurs rivieres.

<86> Application du Systheme de M. Bergier
ala Topographie de la Grece et a la
Theogonie dHesiode.

Ici nous trouvons l'origine même
des beaux noms que les Grecs donnerent
a leur nation, comme les aiant tiré
de ses anciens Rois ou Chefs de Colo=
nies, dans un temps ou cependant
elle ne pouvoit encor etre composée que
de hordes vagabondes; car ces beaux
noms ne sont dans le fond que diffe=
rentes allusions 2 mots biffure a la situa=
tion des Grecs parrapport a la mer;
3 lignes biffure
dou vient que dans lEcriture Se la
Grece est appellée les Isles et les pays
maritimes.

Greci vient de γραικια ou γηρνα Grecia terre
arrosee de γορ couler.

Pelagi vient non de Pelagus fils d'Areas, mais
de πελαγος mer, et comme ce
nom a été donné, tantot aux habitans du
Peloponnese, tantot a ceux de l'Attique, d'au=
trefois a ceux d'Ionie, l'on a envisagé les
Pelages comme un peuple vagabond qui
avoit habité successivement ces dïverses
contrees.

Le nom de Myrmidones leur de μυρμος
fourmi, leur fut donné, non parce que
Jupiter pour peupler la Grece, changea
des fourmis en hommes, mais pour en expri=
mer la population, qui, au bout de quelque
temps en fit comme une fourmiliere d'hom=
mes (μυρμηδων).

Les noms que les Grecs donnerent a leurs
diverses contrées ne furent aussi que des allusions
aux situations locales. Ainsi,
le Peloponnese tira son nom, non de Pelops
fils de Tantale, maïs de 3 mots biffure
1 ligne biffure
4 mots biffure;
de quelque mot qui
signifioit eau, marais, ce qui est aussi
<86v> la signification du mot Tantale 
d'ou est venue la fable de Tantale
plongé dans les eaux, fils de Jupiter, la
pluie, et de Pluto, lieu profond. Il fut
appellé aussi πελασγια et de la il est appelle
aujourdhui Morce de mor morre la mer. Les
anciens Grecs l'appelloient απιηγη, pays
reculé parcequ'il est comme separé dela
Grece par un Isthme.

Bœtie βοιοτια vient de βοιη baye,
golphe, nom donné a ce pays a cause
de la multitude de ses eaux. Par la même
raison il fut appellé αιωνια, υγυγαια,
υαντις, et a cause du rapport de ce der=
nier nom avec υς pourceaux, ses habitans
furent appellés par derision les Pourceaux
de Boetie.

Cythere, κυθεραια fut ainsi nommée
a cause des rochers dont elle etoit environ=
née comme d'une ceinture, de l'orient. Kitter
ceindre; a quoi fait allusion la fameuse Cein=
ture de Venus. κυθερων fut aussi le nom
d'une chaine de montagnes de la Bœtie qui
formoient une enceinte.

Chypre κυπρος, nom donné 3 mots biffure emploie
comme synonyme de κερασης la cornue,
cette isle fut ainsi appellée a cause d'un angle long
et poïntu qu'elle forme du coté d'orient.
D'autres croient quil vient de κιοπρυς
le caprier, qui est epineux.

L'isle des Pheaciens qui est celle de Corfou
fut appellée αρπη et δρεπανη parce que
du côté d'orient elle a la figure d'une
faulx armée de dents, et c'est ainsi
qu'elle devoit paroitre a ceux qui venoient
de Grece. Strabon dit que la côte voi=
sine du promontoire Rhium dans l'Achaie
etoit aussi appellée δερπανη, parce quelle
avoit la meme figure.

La ville d'Argos fut ainsi appellée
a cause de son elevation, d'ou αργειος
montagne de cappadoce.

<87> La ville de Corynthe prit son nom de
χορυνθος lieu elevé de χορυνος elevé. 

Il en est de même des diverses autres contrées,
qui ont tiré leurs noms, non des premiers
Colons qui les ont habitées, lesquels au=
roïent du plutot tirer leurs noms natio=
naux du sol, mais des differences de
leur situation de ces contrees; Chacun sait en effet que
les noms de lieux en tout pays et
en toute langue, sont tirés de leur
position Physique, ou des productions
du sol, de quelque qualité naturelle
ou accidentelle a l'endroit. Ainsi quand
on lit
 

42 lignes biffure

<87v> Vainement objecte t'on que ce qui a fait
renoncer a l'application historique, ce n'est
que des Etymologies arbitraires des noms
des Dieux qu'on s'est forgées avant que
davoir examiné le fond de la chose. Cette
objection est sans fondement. On a comman=
cé par se convaincre que les anciens Dieux
n'etoient pas des hommes, et on en a conclu
avec raison que les fables n'etoient pas des
histoires, mais des allusions.
5 lignes biffure En recherchant
les sources de celles ci, on n'en a vu aucune
plus naturelle, plus assortie a la grossiereté
d'un peuple ancien, que les obscurités et les
equivoques de l'ancien Langage, et dès
la on s'est vu dans la necessité de recher=
cher les divers sens des mots: les recherches
Etymologiques sont donc venus ici seule=
ment a l'appui d'une these deja prouvée
comme un surcroit de lumieres et de
raisons en faveur du Systheme opposé
a celui des Mytologiens historiens, qui
n'en seroit pas moins faux quand même
les Etymologies alleguées seroïent fausses.

Enfin dans ce Systheme, on ne nie pas
absolument quil ny ait eu certains hommes chantés
par les Poëtes Grecs comme des Heros, quoi
qu'on eut d'ailleurs de fortes raisons pour
le revoquer en doute comme l'ont fait Platon, 
Thucidide dans son preambule, qui pa=
roissent tous n'avoir fait aucun fond sur
l'histoire pretendue des Heros et de leurs a=
vantures. 

Seulement Mais toujours on se croit on fondé a regarder
ce qui est dit de leur genealogïe &c. comme
n'etant point historique, puisque dans les temps
ou l'on suppose qu'ils ont vecu il n'y eut ni
historiens, ni monument, ni meme d'evenement
<88> dont on eut pu faire une histoire, et
que tout a l'air d'une fiction forgée long=
temps après, en suivant une topographie
grossiere des lieux ou l'on dit qu'ils ont ha=
bité, des villes ou des environs dont on a fait
le theatre de leurs exploits et de leurs avantu=
res, et des lieux qu'on suppose qu'ils ont par=
courus.

Qui ne voit que chès un peuple encor très
grossier on n'a pu conserver pendant 5 ou
6 cent ans une genealogie et une histoire
exacte des premiers Chefs ou Heros du Pays,
et que les premiers ecrivains Grecs posterieurs
de 200 ans a la guerre de Troie ou se sont
trouvés les derniers Heros, n'ont gueres pu
rassembler de materiaux pour en former
une histoire reelle 1 mot biffure et fidele dans
tous ses details. Ils peuvent avoir recueil=
li quelques debris de tradditions eparses
ridicules, contradictoires, mais avec cela ils
nont jamais pu forger qu'un Roman.

Les ecrivaïns qui ont paru longtemps a=
près, ont sans doute elevé bien des doutes
sur des faits si peu vraisemblables, mais
ils n'avoient plus de moiens pour en demon=
trer la fausseté surtout depuis que la su=
perstition avoit deja envelloppé les peuples
de ses tenebres. Dailleurs les fêtes, les mys=
teres, les ceremonies se trouvant deja eta=
blies sur ce fondement, consacré ainsi
par la religion, on ne pouvoit plus le de=
truire. 5 mots biffure

Les alterations survenues au Langage ne
permettoient plus de decouvrir le sens des
anciens noms ni les abus qu'on pouvoit en
avoir fait; les montagnes, les marais
les fleuves, les torrens, avoient été metamor=
phosés en personages, comme ceux ci en
Heros; on crut dans la suite que c'etoit
ces Heros reels qui avoient donné leurs
noms a ces montagnes &c pour y avoir
habité etenavoir fait le theatre de leurs
avantures. Quand les Philosophes
même auroient decouvert et pu prouver
que ces Heros pretendus navoient jamais
<88v> existe, ils n'auroient pas osé le dire. Les Grecs etoient
attachés aleurs Heros encor plus qualeurs Dieux
ils etoient infatués de la gloire qui en rejailli=
soit sur leur nation. Chaque ville se vantoit
davoir eu le sien, davoir été son berceau ou
son tombeau; plusieurs en tiroient des privileges,
les principales familles s'en faisoient même des
titres de proeminence: mille prejugés religieux
soutenoient ici la creance populaire, et
ces poëtes n'avoient pu se dispenser de s'y con=
former dans leurs chants. Qui eut osé attaquer
des fables que la vanïté et linteret rendoient
sacrées.

Ainsi tout ce qui a du preceder les olympia=
des n'est que fiction, on ne peut faire aucun
fond sur tout ce que la fable nous presente
devenemens et de personages; il est du moins
impossible de distinguer le mensonge de
la verite. Les Heros pourroient meme
avoir exïsté, et toute leur histoire n'etre
quun tissu de fables, de la meme espece que
la genealogie poetique des Dieux anciens
composée selon la meme methode.

Tout cela peut s'appliquer aux fables
que les Romains ajouterent a la mytho=
logie Grecque, comme appartenant a l'Italie,
et qui durent aussi leur naissance au
local et a l'abus des noms propres, comme
on peut le voir dans ovide.

On peut l'etendre a tous les peuples, car
le sujet des premieres poësies ou Romans
a été des exploits vrais ou faux, d'anciens
Preux de la natïon qui ont été plus
souvent des Etres imaginaires que des
personages reels.

<89> 15 lignes biffure
Athenes, dit on, fut fondée par
Cecrops originaire de l'Attique, selon les
uns, Egyptien, selon les autres; et qui
etoit tout a la fois homme et serpent.

Il avoit epousé Agraule fille d'Acteus;
il en eut un fils appellé Erysicton, et
trois filles Aglaure, Herse et Pandrose.
Il eut pour successeurs Cranaus, sans
lequel arriva le Deluge de Deucalion
et qui donna a l'Attique le nom de
sa fille Atthis, ensuite Amphiction
qui fut servi par Ericthon.

Il y eut contestation entre Neptune
et Minerve pour savoir lequel des deux
produisoit le plus excellent ouvrage et
donneroit son nom a la nouvelle ville.
Neptune frappa la terre de son trident
et en fit sortir un cheval; selon
<89v> Appollodore, il fit paroitre une source
d'eau dans le milieu de la citadelle.

Minerve d'un coup de lance fit naitre
l'olïvier qu'on voioit encor plusieurs siecles
après dans le temple de Pandrose, et rem=
porta ainsi la victoire; consequemment
elle donna son nom Athené a la ville
de Cecrops, et promit d'y faire fleurir
les Sciences.

Ici nous trouvons tous les traits d'une fable
forgée après coup sur la topographie
d'Athenes, et l'abus des mots.

Cecrops etoit la croupe de montagne sur
laquelle Athenes fut d'abord batie, et ou
l'on placa ensuite la citadelle nommée
Cecropia, ακροπολις, a cause de sa situa=
tion. Cette citadelle fut appellée κεκραφ
αγυπτιος qui, en vieux Grec, signifia
hauteur fermée ou environée de murs.

Dans la suite on se figura que c'etoit
ici le nom de l'Egypte, et Cecrops futur
personage Egyptien, chef d'une colonie.
L'histoire d'Inachus, Danaus, Agialée
n'eut pas d'autre fondement.

Cecrops epousa Agraule fille d'Acteus
αγραυλον signifie campagne, αυλων vallée
ακτη rivage; Il ne s'agit donc ici que
d'une terre basse, ou vallée qui touche
d'un côté au rivage de la mer, et de l'autre
a la hauteur sur laquelle commanca
de batir Athenes. Comme cette montagne
etoit escarpée par le bas, en confondant
τρακων lieu escarpé, avec δρακων
serpent, l'on dit par allegorie que
Cecrops avoit le bas du corps d'un ser=
pent. On racontoit la même chose d'Eric=
thon successeur de Creops, parce que le nom
<90> εριχθων terrain elevé, fut aussi donné
a la montagne Cecrops; par ou Ericthon
etoit devenu le semblable et le sucesseur
de Cecrops.

Cecrops et Agraule eurent pr enfans
Erysicthon, fruit de la terre, Aglaure
bon vent ou bel aïr, Herse la rosée,
Pandrose la pluie; c.ad. que la plaine
entre la hauteur Cecrops et la mer
etoit cultivée, qu'avec le secours d'un
bon air, de la rosée et de la pluie, il y
croissoit du grain.

La fable de Neptune repose sur l'equivo=
que du mot ιππος qui signifie une
fontaïne et une monture. Neptune
ou l'ocean a pour enfans les fontaines
et les rivieres; mais en confondant πιπος
de l'eau avec ιππος cheval, on a dit que
le cheval etoit une production de Neptune.

Nous parlerons ailleurs d'Athené, Minerve
et nous verrons pourquoi la ville dAthenes
l'avoit choisie pour Divinite tutelaire.

Les anciens Atheniens furent nommés
Cranai et Cecropides parcequ'ils etoient
habitans d'une hauteur, mais les Grecs
posterieurs aimerent mieux rapporter ces
noms a deux Rois Cranaus, et Cecrops.

Le pays d'alentour fut nommé ακτειη ακτικη
l'Attique, non pas a cause d'une pretendue
Nymphe Athis, mais de ακτη rivage
parce qu'elle est environnée de la mer, de
la αττικη
.

Le mot Amphyction compose de αμφι
et de κτιω posseder, habiter, fut le nom
des colons qui demeuroient autour d'Athe=
nes dans l'Attique.

<90v> Le fameux conseil des Amphictions ne
fut autre chose dans son origïne que l'assem=
blée de la commune des habitans de la cam=
pagne avec ceux d'Athenes.

Autre preuve que la topographie des lieux
a donné naissance a la genealogie de leurs
fondateurs.

Inachus Roi d'Argos, disoient les Argiens,
donna son nom a un fleuve qu'il consacra
a Junon; ce fleuve eut un fils nommé
Phoronée qui avec 13 autres fleuves, Cephise
Asterion et Ianchus son propre Pere, fut
arbitre entre Neptune et Junon, qui dis=
putoïent a qui auroit cette contrée sous
son empire. Le different fut jugé en faveur
de Junon. Neptune en eut du ressenti=
ment et pour se vanger, il mit tous ces
fleuves a sec; d'ou il arriva que ni le
fleuve Inachus, ni les autres ne purent
donner d'eau que tout au plus dans la
saison ou les pluies sont abondantes.

En effet durant la secheresse de l'Ete, il
ny a que dans cette contrée que le marais
de Lerne qui ne manque point d'eau. 

De la le surnom
de Dipsium donné a la ville d'Argos
et ce fut pour cela que le culte de Jupiter et de Junon
Dieu de la pluie, fut si celebre parmi
les Argiens. Ces peuples surpris de ce
que leurs rivieres manquoient d'eau
tandis qu'il y en avoit tant chès leurs
voisins forgerent cette fable pour en
rendre raison. De la on peut voir que
la meilleure clef pour expliquer les fables
heroiques seroit une carte topographique
des plus detaillées ou les moindres objets
seroient exactement marqués.

<91> 6 lignes biffure

<91v> 

<92> 13 lignes biffure

<92v> 

<93> 17 lignes biffure

<93v> 9 lignes biffure

<94> Chapitre X
A Echantillons des explications tirees
Application des principes de M. Ber=
gier du Systheme precedent
a la Theogonie d'Hesïode.

Invocation des Muses
ou Preface poetique de la Theogonie.

2 lignes biffure
etre entendu.
Hesiode s'adresse aux Deesses
de la Poësie pour lui decouvrir la naissan=
ce des Dieux.

μουσαι ελικωνιαδες, Les divinités qui
president a la musique; de ελικων 1 mot biffure
instrument a cordes, lyre, 1 mot biffure 1 mot grec illisible 2 mots biffure; les
Grecs aiant confondu ce nom avec celui
du mont Helicon , c'en fut assès pour
supposer quelles Muses habitoient sur cette
montagne. 5 mots biffure
7 lignes biffure

μουσαι V. MA 5 mots biffure
3 lignes biffure

Les Muses ont eu d'abord pour departement
la Poësie, parce que celle ci a été un des
premiers talens cultivés chès les Grecs;
dans la suite on leur attribua presque
tous les genres d'erudition; 2 mots biffure
1 ligne biffure.

<94v> Hesiode place les Muses sur le mont Helicon
parce qu'il etoit lui meme d'Ascra village
de Bœtie au pied de ce mont.

Ce sont des Deesses parce que Musa est foe=
minin; le Poëte leur attribue ici les amuse=
mens ordinaires a de jeunes filles.

κρηνην ιοειδεα, 3 mots biffure
de l'eau, source qui jaillit, de l'eau source vive,
scaturiens. V. J.

βωμος κρονιωνος l'autel de du fils de Saturne
ou Jupiter; il pouvoit y avoir du temps
d'Hesiode un temple ou autel dedié a
ce Dieu sur le mont Helicon ou dans
le voisinage. L'usage de placer les autels
de ce Dieu sur les montagnes faisoit allu=
sion a son nom. Cetoit aussi le Dieu du Ciel,
le tres haut.

περμηθθος 4 mots biffure
1 ligne biffure
2 mots biffure

fleuve du mont Helicon, cher aux Muses. 

ιππουκρηνη, Hippocrene (de ιππος
sign: montagne, 5 mots biffure liqueur, eau,
riviere et κρηνη source)
3 lignes biffure
cad fontaine de la montagne, parce qu'elle
couloit au pieds de l'Helicon ou simple=
ment source d'eau. 5 mots biffure
1 ligne biffure
4 mots biffure
La fable du cheval Pegase
qui avoit fait naitre la fontaine d'Hippo=
crene d'un coup de pied, 2 mots biffure
est fondée sur l'equivoque du mot
ιππος qui sign. aussi cheval, montagne
eau,
et du mot πηγας, παγος, qui
sign. de la glace et un rocher, en sorte que
<95> πηγγασος ιππος a été traduit mal a
propos par cheval Pegase puisqu'il de=
voit signifier eau glacée, ou eau d'un
rocher, et πηγασις κρηνη fontaine
froide ou du rocher. Voila 2 mots biffure
pourquoi au lieu de dire que l'Hippocrene
sortoit du pied du rocher, on a dit qu'elle
sortoit du pied de Pegase qu'on prenoit
pour un cheval. 

Voila d'ou vient que les fontaines ou nym=
phes Hippia, Hippe, Euhippe, Alcippe
Glaucippe, Menalippe &c. ont été pour
la plupart metamorphosées en cavales
par les Poëtes. 

11 lignes biffure
ολμειος le fleuve Olmius, de
1 ligne biffure
autre fleuve de l'Helicon. 

δια αιγιοχον, ce n'est ni agida tenen=
tem, ni a capra nutritum, c'est une
epithete plus noble, plus honorable,
c'est Jovem summa tenentem, alté habitan=
tem, 5 mots biffure
1 ligne biffure
4 mots biffure
. En confondant
<95v> αιξαιγος 1 mot biffure elevation, eminence
1 mot biffure avec αιγειος montagne de Crete,
et αιγη une chevre, ογος, tenens, ou
habitans, avec οχη alimentum, on
a traduit αιγιοχος par a capra nutritum
et on a dit que Jupiter avoit été nourri
par une chevre sur le mont Egée dans
lisle de Crete. 3 mots biffure

ηρην αργειην, Junon d'Argos. Les
Poëtes ont donné aux Divinités le surnom
des lieux ou elles etoient honorées et dont
elles etoient tutelaires, 1 mot biffure et ils ont pris
même occasion de la de supposer qu'elles
y etoient nées, ce que les peuples aimoient
a publier par vanité. C'etoit pour l'ordi=
naire la suite de quelque equivoque ou
fausse allusion. La Ville d'Argos avoit
ete ainsi nommée a cause de sa situa=
tion elevée, 4 mots biffure
3 mots biffure 2 mots biffure
Junon avoit été sur=
nommée αργας-ειη, a cause de sa
hauteur; c'en fut assès pour que les
Argiens la choisissent pour leur Divini=
te tutelaire; 5 mots biffure
3 mots biffure
.

γλαυκωπις αθηνη, Minerve aux yeux bleus.
Pour distinguer les Divinités, les Poëtes
leur donnoient differens attributs, et
les Peintres les representoient de diffe=
rentes manieres. Minerve etoit peinte avec des
yeux bleus, parce qu'ils la supposoient
blonde, flava Minerva. Cela dependoit
originairement de la fantaisie des Sculpteurs
ou des Peintres qui prenoient des beautés
terrestres pour modeles des Divinités qu'ils
vouloient representer. 

<96> ελικοβλεφαρος epithete d'Aphrodite 1 mot biffure
1 mot biffure
, de ελικος versatilis qui tourne 
3 mots biffure, et βλεφαρον la paupiere
prise pour l'oeuil; c'est le synon. de ελικω
πις, et du Latin Poeta 2 mots biffure
qui regarde du coin de l'oeuil. Cela signifie
Venus au regard affecté, aux yeux doux.
3 mots biffure

ψ 26. κακ´ελεγχεα mala prolum
mechans vauriens epithete de familia=
rité entre les Bergers qui sont en usage
de s'ecrier de loin des injures; c'est un
trait de l'ancienne sïmplicité dont Hesio=
ode se felicite.

11 lignes biffure

ψ 2 chiffres biffure45. Hesiode ne suppose pas ici qu'il
faut exclure des Divinités le Ciel et la
terre, puisque ailleurs ceux ci sont appellés
Dieux; ni que les Grecs anciens aient mecon=
nu le Dieu supreme qui fut appellé ουρα=
νος.

52. 1 mot biffure Ce qui est dit des Muses nées
de Jupiter et de Mnemosyne est conformé
aux idées populaires; car le peuple croit
que toute la Science ne vient que de la me=
moire. Cette genealogie suppose qu'on a
toujours envisagé les talens de l'Esprit comme
<96v> un don du Ciel. Enfin cela suppose que les
Muses n'ont été connues que sous le regne
de Jupiter, et sont dès la ses enfans dans le
même sens que tous les Dieux nouveaux.

Cette idée des Muses est venues de l'admira=
tion qu'on a toujours eue pour les talens de
l'Esprit et surtout pour la Poësie; 1 mot biffure
11 lignes biffure

Elles sont nées dans la Pierïe contrée
autour du mont Pierius; Hesiode met la
leur berceau, a cause du voisinage du
mont Olympe, ou l'on supposoit la
cour des Dieux; 2 mots biffure Il y avoit un
mont Pierius en Syrie; ce nom signifie
1 mot biffure, eminence ou rocher. Dela
Pierus fils de Magnes, aimant Apollo=
dor. 

54. Eleuthere de ελευ telle, hauteur et
τηρειν montagne, c'est une ville
montagne en Boetie et une ville batie sur le
penchant. Peut etre y avoit il la un
lieu nommé μνημα, et ce qui fit qu'on
la consacra a Mnemosyne, et quil devint
sa patrie.

<97> 60 Hesiode ne place les Muses sur l'O=
lympe que parce qu'il suppose que c'etoit
la demeure des Dieux.

68 Le Dieu Supreme
regne sur lolympe
cad. le ciel, suivant
lidee commune a tous
les peuples.
 

75. Les divers noms des Muses sont relatifs
3 mots biffure au genre particulier d'eru=
dition que l'on attribuoit a chacune d'elles.  Du reste
on voit assès que cette distinction des Muses est arbitrai=
re et ïncomplette.

79. Calliope est regardée comme superieure
a toutes les autres, parce que l'Eloquence est
necessaire a ceux qui gouvernent et qui presi=
dent aux grandes affaires, et que rïen
n'egale l'empire de la persuasion.

Ceux quï n'ont admis que 3 Muses, les
nommoient μελεθη, μνημη, αοιδη,
et les disoient filles d'ουρανος et les
plus anciennes.

82. Les anciens Rois ne prenoient de
l'ascendant sur les peuples que par la force
de leur eloquence 2 mots biffure, comme
les Caciques chès les Sauvages.

96 Partout le Poëte represente les Rois
comme les favoris, et les eleves de Jupiter,
parcequ'ils exercent parmi les hommes la
meme autorité qu'on attribuoit a Jupiter
parmi les Dieux.

105 Hesiode distingue ici les Dieux
celestes 1 mot biffure et terrestres nès du Ciel et de
la terre, les Dieux infernaux nès de la
nuit, les Dieux de la mer; mais cette distri=
bution n'est pas toujours fidelement observée.
Il distingue surtout avec la derniere precision
les Dieux anciens et les Dieux nouveaux
nès deceuxla, et il marque leur distribution en divers
departemens qui s'est faite sous le regne
de Jupiter. 

<97v> Chap. XI.
Regne de Uranus.

L'histoire de la naissance du monde ne
s'est conservée par la traddition que chès les
Patriarches et les Hebreux. 3 mots biffure
1 mot biffure.
Alterée promtement chès les familles
dispersées 3 mots biffure, les Grecs n'en
retinrent que des notions tres imparfaites; les
Philosophes n'enfanterent sur ce point que des
reves aussi absurdes que la traddition popu=
laire a laquelle les Poëtes se sont arretés. Rien
1 mot biffure n'est conforme dans celle ci a la narration de Moyse que
ceseul 1 mot biffure article; c'est que le χαος, ca. le
vuide, le neant a precedé l'existence de
cet Univers, ce que Moyse suppose evidem=
ment. 

Mais quoi de plus absurde que de dire que
le Chaos ou le neant etoit le principe de
toutes choses; Ex nihilo nïhil fït. Les Philo=
sophes 4 mots biffure imbus de cet
axiome, admirent, les uns l'eternité du
monde, les autres, l'eternite de la matiere
ou des atomes. L'idée d'une matiere infor=
me et eternelle dont le monde avoit été fait
6 mots biffure s'etant dans
la suite repandue, on crut que c'etoit elle
que Hesiode avoit desïgnée par le cahos
et conseq. Ovide la rendit 1 mot biffure ce mot
χαος par celui de rudis indigesta que
moles
, qui ne repond point au terme Grec;
que lequel emporte vuide, absence, neant
exclusion de toute matiere 2 mots biffure. 

Ainsi ce mot d'Hesiode ne repond
nullement a tohu vebohu, de la Genese qui
suppose une terre noiée dans les eaux, et une
matiere preexistente, mais il signifie le neant
qui preceda l'Etre; primo omnium chaos
fuit, ac deinde Tellus lato.

<98> 117. Dès que le Poëte a confondu le mont
olympe avec le ciel, il n'est pas surprenant
qu'il ait placé les Dieux tantot dans le ciel
et tantot sur la terre. 

118. ολυμπος est le nom de 7 montagnes
placées trois en Europe, trois en Asie, une
en Afrique. Ce doit etre donc un nom ap=
pellatif converti en nom propre; 1 mot biffure et ce
nom signifioit en general 1 mot biffure montagne, eminence, elevation,
qui brille et que l'on
voit de loin,

de la vient que ce mot a signifié aussi le
ciel, et qu'on a supposé en Grece que
les Dieux habitoient l'olympe cad.
le Ciel;  dans la suite, a mesure que l'idée
de Dieu s'est degradée en celle d'un persona=
ge, on lui a assigné une demeure sur
la terre, et par equivoque on a dit que
les Dieux habitoient sur le mont olym=
pe en Thessalïe. 3 mots biffure
1 ligne biffure

119. 1 mot biffure ταρταρα racine doublée
de ταρ lieu profond,  qui repond a
inferi, lieu situé in μυχω interio
sinu terrae
, au centre de la terre, le point le
plus eloigné du Ciel. 

120. ερος; Dès que le Poete vouloit faire
des mariages entre tous les personages qu'il
alloit mettre sur la scene, il falloit bien
que l'amour y presidat. 

2 lignes biffure
5 mots biffure.
Dans Sancho=
niaton, on assigne aussi pr principe de tous
les Etres, le chaos, les tenebres, et l'Amour.
3 lignes biffure.

<98v> 123 2 lignes biffure
1 mot biffure
Cela sign. sans doute que le neant
a precedé l'etre, les tenebres la lumiere; c'est
en ce sens d'existence posterieure que le
monde est sorti du neant, et le jour de la
nuit. Le mot Sortir en francois a deux
sens qui donnent lieu a la même equivoque.
Je sors de dormir, je sors de bons Parens.

ερεβος sign. l'occident, le soir,  comme
2 mots biffure 2 mots biffure
. Selon les anciens le septen=
trion etoit couvert d'une nuit eternelle;
1 ligne biffure
3 mots biffure
comme l'occi=
dent est le côté de la nuit, les Poëtes ont
souvent confondu le couchant et le nord
et ont pris l'un et l'autre pour exprimer
les tenebres. ερεβος est masculin;
νυξ 1 mot biffure, foeminin; de ces deux noms
est 1 mot biffure issu un mariage, d'ou sont nés 2 mots biffure
ημερη le jour et αιθηρ la clarté. 1 mot biffure
2 mots biffure.

126. γαια la terre, produisit selon d'au=
tres auteurs, ακμων nom le plus ancien
nom qu'on ait donné au ciel, qui fut
Pere d'ουρανος, autre nom qui succeda
au premier. Mais en quel sens la terre
a telle produit le ciel? il est certain que
le ciel doit avoir été crée au même mo=
ment que la terre  qui n'a pu
exister sans etre environée d'un espace
au dessus d'elle. 4 mots biffure
3 mots biffure.
Mais Hesiode appelle
indique sans doute par cette expression l'idée
qu'il se formoit du ciel, qu'il envisageoit
comme une espece de voute solide a laquelle
les etoiles sont attachées, ou une calotte qui
<99> qui sert de couverture a la terre, et qui
est faite pour elle; ce qui lui a fait dire
dun cote
que le ciel est enfant
de la terre, et
  2 mots biffure de lautre que le Ciel, issu de
la terre est devenu son mari par le servi=
ce qu'il lui rend.

129. Cela suppose que la terre d'abord
parfaitement ronde unie, couverte d'eau
partout, devint en plusieurs endroits
excavée, ce qui fit paroitre les mon=
tagnes. Vïrgile et Ovide attribuent
cela a une divinite; Quisquis fuit
ille Deorum, lussit et extendi campos,
subsidere valles, fronde tegi sylvas,
lapidosos surgere montes
. Hesiode
convertit les Etres même inanimés
en Dieux etn les introduisant comme
autant de personages.

25 lignes biffure

<99v> 35 lignes biffure

<100> 131 Le Poëte designe la mer sous deux
noms; l'un πελαγος 4 mots biffure
3 mots biffure
reservoir d'eau, et ποντος
1 mot biffure, profondeur; deux idées ordinai=
rement associées, parceque les eaux ne
se trouvent que dans les lieux profonds.

La terre seule dit le Poëte, a produit
les montagnes et la mer, et il dit 
Bïentot unie au Ciel, elle mit
au monde l'ocean, ωκεανος, qui
signifie reservoir extremement pro=
fond, ce qu'exprime aussi l'epithete βαθυ=
δινην. 1 mot biffure.

134. Autant de noms divers du ciel,
de la terre, ou de la mer. Ainsi κοιος
κρειος, υπεριον, signifient tous ce sont
6 mots biffure, 3 noms
du ciel que le Poëte appelle ses enfans.

1 mot biffure Ce meme mot Japet
pris de pat a
signifie aussi
ce qui est etendu
nom qui convient
bien ala terre.
  ιαπετος designe l'argïle,
la glaise  qui est une production
de la terre, Japetigenus, race petrïe de
limon: on a imaginé apparement
cette idée en voiant les premiers Statuai=
res faire des statues d'argile.

135. θεια Thea, nommée aussi Tithea
sign. le bas et la profondeur, la terre
et la mer;  Thea, Theia, Thoé sont
appellées des nymphes des eaux, filles
de l'ocean et de Thetis ; il ne
faut pas les confondre avec Thea dont il
s'agit.

ρεια c'est la terre ïnculte 3 mots biffure sous
nos pieds. 

τηθνς a exprimé premierement la terre,
ensuite la mer, la terre parcequ'elle est basse,
la mer, parce qu'elle est profonde; le bas
et le fond sont deux idées toujours associées.

<100v> On est étonné de trouver ici deux Etres allegoriques θεμις et μνημοσυνη
joïntes aux enfans du Ciel et de la
Terre; L'une est la Loi; la justice, qu'on a fait
descendre du Ciel, pour faire comprendre quelles
sont un don; l'autre est la memoire qu'on
a regardé comme present de la Divinité:
mais du moins pourquoi les supposer filles de la terre?
c'est vrais: par une equivoque de mots:
on a confondu θεμις avec θεμα fondement
sol; 5 mots biffure
beau;
et μνημοσυνη avec μνημειον
qui a rapport a la terre .

Mnemosyne  etoit fille et
epouse de Jupiter dont elle a eu les Muses;
ici elle est fille du Ciel, soeur de Saturne
tante de Jupiter; cela n'est pas si surprenant
parce que le Ciel et Jupiter sont originai=
rement le même objet.

136. φοιβη Phoebé la Lune,  sa couronne dorée est ce cercle
jaunatre dont elle est souvent environnée.

187. 3 mots biffure χρονος sign. revolution, durée,
temps, comme χορωνη sign. rondeur,
1 mot biffure, et Saturnus 2 mots biffure tire de
turnus et torno a le même sens 2 mots biffure.

5 mots biffure Chronos est fils d'ou=
ranos
parce que
le second de ces noms
a ete substitué au
premier pour mar=
quer 1° le Dieu Supre=
me, 2° le Ciel com=
me elevé sur la
terre, 2° par
  2° parce que ce
sont les revolutions du Ciel qui marquent
le temps; saturne est le dernier des enfans
du Ciel, qui suit Hyperion et Phebé, 1 mot biffure
1 mot biffure
le Soleil et la Lune qui servent a distin=
guer les temps.  3 mots biffure
8 lignes biffure

<101> Tous les deux ont epousé la terre, le premier
dans le nom δεγη, le second sous celui de
ρεα.

Une preuve que χρονος signifie le temps
c'est que selon Pausanias  les
Poëtes ont dit que le Dieu καιρος oppor=
tunus etoit dernier enfant de Saturne.

On a fait ainsi du temps un Dieu. 

Il est appellé αγκυλομητης versipellis
parce qu'il tourne, qu'il va par tours
et detours au sens figuré, comme nous
dison, jouer le tour, un tour d'Esprit
un tour d'adresse. 3 mots biffure
3 lignes biffure

138 On verra plus bas pourquoi Saturne
est appellé le plus violent des enfans de la
terre, l'ennemi du ciel.

139. lυ'eκnλnωeπmεiς Cyclopes, selon le senti=
ment commun, sont des ouvriers en fer;
enfans de la terre, parce qu'ils cherchent
des mines dans ses entrailles. Les Poëtes
les ont placés sur le mont Etna, dans les
Isles de Lipari de Lemnos et autres lieux
ou il avoit des volcans. Leur nom vient
de κολαπτω, κεκλαπα, frapper,
ou de l'Hebreu Klapah, marteau. Leurs
noms propres βροντη, σεροψ, αργη
sont de même relatifs a leur profession.

2 mots biffure Sous ce nom on a designé aussi toute es=
pece d'ouvriers qui se servent du marteau;
c'est pourquoi on a dit de plusieurs villes
de la Grece qu'elles avoient ete baties par
les Cyclopes.

<101v> 142 Ils sont dits semblables aux Dieux θεοις
parceque les anciens Grecs n'attachoient pas
une si grande idée a ce mot, non plus qu'a
lepithete de διος que Homere attribue a
un porcher. 

143 Ils n'avoient qu'un oeuil au milieu du
front; fable fondée sur la fausse etymologie
du mot κυλκωψqu'on derivoit malapro=
pos de κυκλος cercle, rondeur, et οψ oeuil.

Apres les decriptions grotesques et effraian=
tes que l'imagination des Poëtes leur a four=
nies pour peindre des forgerons, il n'est pas
surprenant qu'ils 1 mot biffure aient fait des Cyclopes les fabricateurs
de la foudre?

On pourroit donner une autre Etymologie
des Cy du nom de Cyclopes. Les Cyclopes
sont supposés les compagnons de Vulcaïn.
Or ηφαισος, Vulcanus, designent les vol=
cans, ou la terre vomit des flammes
κυκλωπες pourroit donc signifier les trous
ronds, les crateres par ou le feu sort des
volcans. Vulcain metamorphosé une fois
en forgeron, il fut tout sïmple de lui donner
les Cyclopes pour compagnons. Ceux ci
forgeoient la foudre, parceque le feu des
Volcans ressemble souvent aux eclairs,
et qu'il est accompagné d'un bruit sembla=
ble au tonnere. En ce sens, les Cyclopes
sont bien reellement enfans de la terre.
Voiès Strabon sur certaines cavernes de
Laconie nommées Cyclopees.

Les Cyclopes etoient surnommés γασεροχειραι
ventres crevés, de χειρας fissure.
En rapprochant ce mot χειρ main,
on publia que leurs mains etoient atta=
chées a leurs ventres. εκατονχειρος βριαρεως
Centimanus Briareus, signifiant
a la lettre montange qui a 100 ouvertures.

<102> 147 Les noms des Geans dont parle
Hesiode sont d'origine Grecque; κοιτος
signifie grand, elevé. 2 mots biffure βριαρεως est formé
de βρι augment. et αρης fort, vaillant,
2 mots biffure γεγης est le même que γιγας Geant.

On leur donne cinquante têtes et 100 bras acause
des hommes dont ils etoient accompagnés. 

C'est peut etre ici un reste de traddition sur
les anciens Geans dont l'histoire sacrée
et prophane attestent l'existence. Ils sont
appellés enfans du Ciel et de la terre, par=
ce qu'on a deduit γιγας de γη, au lieu
de le rapporter a γαιω croitre, s'elever.

On a nommé aussi enfans de la terre, les plus
anciens habitans d'un pays, les Autochto=
nes ou Aborigenes; et comme on ne conce=
voit pas que la terre eut pu les produire
toute seule, on leur donnoit le Ciel pour Pere.

D'ailleurs on a été generalement dans l'opi=
nion que les premiers hommes etoient plus
grands et plus robustes que leurs descen=
dans. Il n'est donc pas surprenant qu'on ait
dit que la Terre avoit enfanté des Geans
d'autant plus que dans le style ancien,
enfant et habitans sont synonymes;
4 mots biffure les Orientaux ches les Hebreux sont
appellés enfans d'orient, ceux de Sion
enfans de Sion &c. 2 mots biffure 4 mots biffure
5 lignes biffure

Parce seul echantil=
lon il est aisé de com=
prendre que toute
lhistoire des temps pri=
mitifs porte l'empreinte
de la fable.
 

Si l'on examine la chose de bien près, il paroitra
cependant tres vraisemblable que les Geans dont parle Hesio=
de ne sont autre chose que des montagnes,
car 1° γιγας derivé de γαιω ne signifia
rien autre chose que hauteur, elevation,
2 mots biffure <102v> 2° Dans le fragment de Sanchoniaton, Cas=
sius, Liban, Antiliban, Bralys, sont de
meme appellés des Geans; 3° chès les Poëtes
l'Etna, le Vesuve &c, sont des Geans fou=
droiés, 4° les peuples de l'Amerique croient
encor que les montagnes sont habitées par
des Geans, des mauvais Esprits; mêmes idées
chès tous les peuples grossiers, memes sour=
ces de prejugés.

155. Ici le Poëte com5 lettres biffuremance a parler du Ciel
comme d'un personnage, a confondre le
ciel physique avec le Dieu supreme qui
en regle les mouvemens. Les enfans du
Ciel et de la terre etoient odieux a leur Pere,
il les tenoit cachés dans les entrailles de la terre
&c. Cette fable peut venir d'un equivoque
du mot ουρανος 4 mots biffure qu'on a cru derivé
de ουρον l'eau, 1 mot biffure 4 mots biffure et
4 mots biffure. 2 mots biffure
. La Grece etant un pays
fort aquatique, il fut impossible dans les premiers temps de le cultiver
4 mots biffure, avant qu'on eu fait
des fossés, des canaux pour ecouler et detour=
ner les eaux; auparavant les germes de la terre pourris=
soient dans son sein: voila l'inimitié entre
ουρανος le ciel ou la pluie l'eau, et les enfans
de la terre. Il est arrivé en effet de cette etymologie que ουρανος
a été souvent pris pour la pluie, comme
nous le verrons.

Mais cette fable, 3 mots biffure plus vraisembla=
blement, signifioit que Ouranos etoit
seul adoré, a l'exclusion de toutes les
parties de la nature ou des Intelligences
subalternes; quoique nè de la terre, il
etoit le seul Maitre 3 mots biffure et le seul
qui reçut les honneurs dïvins; tout le
reste etoit caché et comme enseveli
dans la profondeur de la terre.

<103> 181. 2 mots biffure Les mytologues historiens ne peuvent se dispenser ici de recourir
a l'allegorie. Cette fable offre d'abord un
sens physique, et elle est fondée sur une
equivoque grossiere; ουρανος sign. signigie l'eau; la
pluie, μηδεα un canal, κρονος est confon=
du avec γρωνος une fosse, un trou, ou
κρουνος une fontaïne source. 2 mots biffure Pline parle
d'un Lac ou puits dans la Medie, nommé
κρονος, puteus Saturni 
ainsi la phrase grecque κρονος ημησε
ταμηδεα του ουρανος signifie a la
lettre un fossé, a coupé, le canal ou cours des
1 mot biffure eaux.
3 lignes biffure

Ces noms representés
comme correspondans
a des personnages,
selon la maniere des
premiers Grecs, donne=
rent aux Grecs suivans
matiere a equivoque,
et firent naitre la fa=
ble de Saturne, qui
coupe ou mutile les
parties de son Pere
Ouranus.
 

Avant cette operation Ouranos retenoit les
enfans de la terre dans le sein de leur mere,
c.a.d. que les eaux de la pluie repandus sur
la surface de la terre, la rendant trop humi=
de, les grains ne pouvoient pas en sortir et
pourissoient dans son sein; mais lorsqu'on
eut tiré de la terre les metaux, l'on fit
des instrumens avec lesquels on creusa des
fossés pour dessecher les campagnes, des
saignées qui retrancherent une partie des
eaux repandues; ce qui rendit le sol plus
propre a l'agriculture. C'est ainsi que les
travaux des anciens colons pour rendre
le sol susceptible de culture, est devenu
le fond commun de la plupart des fables;
plusieurs même peuvent comme celle ci
etre expliquées par le double sens des
noms d'Uranus et de Chronos.

1 ligne biffure
que
Si l'on rapporte μηδεα a μηδω imp=
ero, comme signigiant imperium, cela a pu signifie que Chronos
a retranché le regne d'Ouranos, parce
que le premier nom fut substitué au
<103v> second pour designer le Dieu Supreme.

Cest dans le même sens que les Poëtes ont
supposé que Jupiter avoit aussi mutilé
Saturne, auquel il succeda.

Du reste il est possible qu'on ait eu en
vue l'un et l'autre de ces sens, et qu'on ait
voulu marquer par la le double change=
ment qui arriva dans la Societe et dans la
Religion, lorsque les Grecs commancerent
a etre moins barbares, a se fixer et faire les
premiers essais des Sciences et des arts.

Ainsi par le traitement fait a Cælus, Satur=
ne lui est substitué dans le culte jusques
a ce qu'il soit lui même detroné a son tour
par Jupiter.

185. εριννυς en Syr. 1 mot biffure Erino, 1 mot biffure discorde
colere vengeance, furie passion violente, dont souvent
lhomme n'est plus le maitre; 2 mots biffure dela vient qu'elle
a été convertie en divïnité, ou puissance
superieure a l'homme.  Les Furies
sont representées sous trois noms propres
qui 1 mot biffure offrent la même idée que le nom
appellatif, αλεκτω, μεγαιρα, τισιφονη
Alecto, Megece, 1 mot biffure Tisiphone. Selon Hesy=
chius, ποινη Poena etoit une 4. On les
appelloit aussi ευμενιδες Eumenides
qui sign. grande colere.

La naissance des Furies paroit designer
les guerres, les dissentions, les fureurs qui
succederent bientot a l'age d'or, selon les
Poëtes et surtout chès les Grecs. 

Le Poëte fait naitre εριννυς du sang
d'Ouranos mutilé; peut etre parce qu'il a
supposé que ce mot venoit d'une racine
primitive qui a rapport aux eaux et
dès la a ουρανος la pluïe.

<104> 186 γιγας de 1 mot biffure signifie haut
elevé montagne, promontoire. On a
supposé les Geans enfans d'Ouranos mutilé
par une equivoque avec le mot γυγαιος
Guigot, nom de fontaïne; 2 mots biffure on aura trou=
vé ici un rapport avec ουρανος l'eau,
la pluie.

187. νυμφαι Intelligences invisibles,
repandues partout. Chaque Deesse 2 mots biffure
considerable en avoit plusieurs a sa suite
pour lui faire cortege. Elles sont appellées μελια melia en
tant quon les supposoit douces, bienfaisantes, faciles a appaiser,
ou qui ou accordant facilement leurs faveurs,
sed faciles nymphae risere sacello,
faciles venerare napæas. 

Les Nymphes sont aussi d'ordinaire les Intelligences
qui habitent dans les eaux; dela des fontai=
nes appellées Nymphes. 

μελης est aussi un nom de riviere; ainsi
νυμφαι μελιαι peut signifier simplement
genies des eaux. Dela leur naissance
du sang d'ouranos cad. de la pluie.

Ainsi les Nymphes Melies sont nées du sang du
ciel parce que leur nom a rapport a la pluie.
4 mots biffure; 2° parce qu'elles n'ont
commancé a etre connues qu'après le regne
de Calus. 5 mots biffure
2 mots biffure.

Ainsi l'empire de Calus a été detruit a
la naissance des nymphes melies. Ici
commance le regne chronos, on
ne peut rien dire de la durée du regne de Calus
ni de celui de chronos, cad. du temps
qui a precedé le Polytheisme, parce qu'on
ignore quand les Grecs ont commancé a
cultiver les arts. Hesiode rapporte le
regne de Jupiter a la fondation de Sycione.

<104v> Sur le temoignage de Platon dans le Timée,
Saturne est appellé fils de l'ocean et de Thetis,
1 ligne biffure
parce qu'il 1 mot biffure est venu en Italie par mer.
C'est ce que les Poetes ont dit, parce qu'ils ont
voulu trouver l'age d'or en Italie comme
chès les Grecs.

Les Poetes ont dit aussï que l'isle des Pheaciens
ou de Corfou, etoit appellée αρπη et δρεπανπη
parceque Saturne y enterra la faux avec
laquelle il avoit mutilé son Pere. 2 mots biffure
7 lignes biffure

Les personnages dont Hesiode a placé la
naissance sous le regne de Calus vont repa=
roitre la plupart sous les regnes suivans, mais
sous d'autres noms.

Il est aisé de voir combien il seroit ridicule
de supposer que le Poëte ait voulu meler
l'histoire des premiers Souverains de la Grece
avec la genealogie des Etres physiques, et
combien nous sommes fondés a dire que
tous les personages sont tous de la même
espece, ou qu'il ny a de difference qu'entre
ceux qui sont des Etres naturels et ceux qui
sont purement allegoriques.

<105> Chap. XII.
Regne de Chronos ou Saturne
et des Titans.

On ne voit ici qu'une allegorie continuel=
le sur la maniere dont les Grecs joignierent
a la Divinité supreme des Dieux subalter=
nes, et par quelle succession d'idées ils devin=
rent polytheistes. Même confusion entre
les Etres physiques et des personages ima=
ginaires; mais une partie de ceux qui vont
paroitre sur la scene ont fait une plus
brillante figure dans la Mytologie que
les precedens.

188. επηπειροιο; ce mot qui signifie 1 mot biffure
4 mots biffure,
le continent; mais
il pourroit très bien etre pris ici pour
un adverbe de temps, 1 mot biffure continuo
incontinent. Cela signifieroit que
Chronos, cad. les cavités de la terre qui
absorbent les eaux de pluie ou du Ciel,
les conduisent continuellement et sans relache dans la
mer par des canaux souterreins.

191. De l'ecume qui s'en forma naquit
une nouvelle Divinité. C'est Venus.
Tous les noms de Venus, chès les divers peu=
ples, signifient la passion de l'amour, et
ce qui la cause, la beauté, les attraits,
même ce qu'il y a de plus grossier dans
cette passion.

1° Selon Ciceron 
Venus est une Divinité purement alle=
gorique; 6 mots biffure
5 lignes biffure

<105v> Les divers noms de Venus prouvent en effet
qu'on setoit persuadé qu'un penchant si im=
petueux etoit l'effet d'un genie superieur
aux forces de la nature. 

2° La fausse allusion de ουρανιη, surnom
de Venus, avec ουρανος, et de αφροδιτη
avec αφρος l'Ecume, a fait dire qu'elle etoit
fille du Ciel et de l'Ecume. Mais ουρανιη
peut venir de ουρεω, c'est pour cela qu'elle
est une nymphe des eaux ; αφρος
signifie spermen Aristoph: ainsi
αφροδιτη sign. se prend dans le sens le plus
obscene.  2 mots biffure

Quand Venus est appellée fille de Jupiter
et de Dioné 
c'est la même genealogie que la precedente,
puisque Jupiter est le Cïel, et διωνη une
nymphe des eaux. 

Dela les Romains 1 mot biffure avoient surnommé
Venus Cloacina la Deesse qui preside
aux egouts du corps humain. Les Grecs
l'appelloient μιγωνιτης. 

2 mots biffure La Venus ουρανιη adorée a Ascalon
et a Cythere 
etoit donc une Divinité honteuse
qui n'avoit rien de commun avec le Ciel
que l'equivoque du nom.

Il est faux que c'ait ete
le nom de la Planete de
Venus, mais que c'est
fort tard qu'on a donne
aux Planetes des noms
de Divinites.
 

Si la Venus est la même que Astarté
Deesse des Pheniciens, 4 mots biffure
3 mots biffure
puisque ce mot paroit etre le
meme que le chaldeen Esther, qui
repond a l'Hebreu Hadassa, adasch
belle, aimable, ce que les Grecs prononcoient
Atossa 1 mot biffure nom 1 mot biffure de la fille de
Cyrus, on en peut conclure que ce nom
<106> Ainsi Astarté etoit encor relatif a la volup=
té et l'amour. 

Ainsi αφροδιτη sign. de même tout ce qui a rap=
port a l'amour, et il conserve cette signifi. dans
les composés επαφ-ος, αναφρ-ος.

Les Spartiates appelloient Venus Marpho
la belle, la beaute. 

Il y avoit deux villes, l'une en Italie, l'autre
en Afrique, appellées Aphrodisium; ce
nom n'avoit peut etre aucun rapport a
Venus, non plus que les villes nommées
Astaroth a Astarté, ou la ville de
Venusium a Venus. Cependant si l'on
suppose que Astaroth, Aphrodisium
Venusium, sont la même chose que Beaulieu
Belle ville, beau manoir en francois,
on comprenda encor que les noms donnes
a Venus sont tous relatifs a la beauté.

Il en est de même des autres noms donnés a cette
même Deesse 4 mots biffure chès
les Arabes Alytta, et ches les Assyriens, Melitta,
3 mots biffure voies lut, lyt 3 mots biffure
3 mots biffure 1 mot biffure chès les Perses
et les Armeniens Anaitis de voies na, ne
nau, 4 mots biffure.

Quelques peuples de la Grece la nommoient
Pytho 2 mots biffure de ποθος amour, les
Cypriotes πανδεμις, l'union, le lien de
toutes choses. 

192. on donnoit a Venus les surnoms de
κυπρις, et κυθερεια. Le premier a de
de l'affinité avec Cupio et Cupido des La=
tins, et les Ecrivains Grecs s'en servent pour ex=
primer la passion de l'amour 2 mots biffure V. CUP.  Le second
est analogue a l'Hebreu Kitther lier,
ceindre, environner, 2 mots biffure
on a cru. <106v> Ces noms ramenent a l'idée primi=
tive de lien et d'union a laquelle on a rappor=
té celle de la Deesse. On a cru qu'elle avoit
tiré ces noms des Isles de Cypre et de Cythere
ou elle avoit un culte; point du tout;
c'est l'allusion de leurs noms a celui de Ve=
nus qui aura fait penser ay etablir ce culte
et qui a donné lieu de dire qu'elle y etoit
arrivée a sa naissance. L'Isle 1 mot biffure
17 lignes biffure

On a supposé un adonis amant de
Venus en Syrie; c'est une allusion a
un fleuve ou riviere de Syrie, voisine
de Biblos, selon Lucien et Pline. La raci=
ne est εθδη ηδονη plaisir volupte.

Ce que dit Ciceron 
qu'il y a eu 4 Venus differentes suppose
peut etre que le nom de Venus a été donné
a 4 belles femmes, belles ou libertines, dont
peut etre les avantures ont été mises sur le
comte de la Deesse; mais s'il n'y a eu qu'une
Venus Deesse, 1 mot biffure passion divinisée 2 mots biffure
3 mots biffure
personage allegorique. 

<107> 101. ερος και ιμερος, l'amour et le
desir ou la passion; deux personages
ordinairement reduits a un seul, nom=
mé chès les Latins Cupido fils de
Venus; on lui en avoit supposé un
autre contraire nommé ανδερος
antipathie. 

Au ch. 43 celuici parle d'un Temple de
Venus Praxis de Megare ou l'on voioit
l'amour, le desïr, la passion, representés
par 3 statues. Il rapporte nombre
de surnoms donnés a Venus selon ses
diverses fonctions, ou les lieux ou elle
etoit adorée.

207. Les enfans du Ciel 2 mots biffure
les premiers et plus anciens Dieux Grecs sont
appellés Titans, nom d'elevation et
de Superiorité.

210. Comment concilier tout ceci avec
cet age dor sous le regne de Saturne
dont 1 mot biffure ont parlé les Poëtes et Hesiode. 
Si ces Crimes des
anciens Grecs n'etoient pas appuiés sur
une traddition unïversellement admi=
se, les Poëtes n'auroient jamais ima=
giné des faits deshonorans pour leur
nation. L'age dor est donc une mise=
rable fiction en Grece et en Italie,
qu'il faut attribuer a la prevention
generale qui a toujours fait croire aux hommes
que les siecles qui les ont precedé, va=
lentlaient mieux que le leur, et qui est sur=
tout si forte chès les vieillards, lau=
dator temporis acti.

<107v> 211 Le Poete attribue a la nuit tout ce
qu'il y a de facheux dans la nature, la
mort, le chagrin, la vengeance &c. L'etat
des morts a été regardé par les anciens peuples comme une nuit
eternelle; voir le jour, dans leur style
c'est vivre. La nuit rend les douleurs
plus aigues, les chagrins plus cruels. Dela
vient que ches tous les peuples la nuit est
prise pour un sujet de douleur 2 mots biffure.

212 Le sommeil et les songes sont la produc=
tion ordinaire de la nuit.

213. Momus censeur, medisant de pro=
fessïon, est enfant de nuit, parce que la
medisance cherche les tenebres, et n'ose se
montrer au grand jour.

215. Rien de plus absurde que les explica=
tions historiques de la fable des Hesperi=
des; rien de plus simple que la manière
allegorïque de l'entendre. Les Hesperie
dans Ovid.  est une nym=
phe des eaux; les noms propres des Hespe=
rides ne designent pas autre chose que des
eaux et des Nymphes aquatiques, αιγιη
αρεθουσα, ερυθια, Etym (224) Hesperie. 

Le mot de χρυσομηλον tiré de μελας
μελης, noms de rivieres, est synonime
a χρυσορροας-ης, noms de plusieurs
autres fleuves. On a pris ici χρυσος pour
de l'or et on a cru que ce nom avoit été
donné a ces fleuves, parce qu'ils charioient
de l'or dans leurs sables, point du tout.

C'est encor un nom de rivieres, de gouffres,
de canaux, en sorte que χρυσομη
ne signifie autre chose que eau profonde,
canal profond. Ainsi les Hesperides avec
leur pommes d'or, ne sont autre chose que
des fontaines avec des eaux profondes.
2 mots biffure

<108> Le pretendu Dragon qui gardoit les pom=
mes des Hesperides est, selon Pline, une
riviere qui serpentoit; equivoque qui
vient de ce que les rivieres vont ordinai=
rement en serpentant, et de ce que οφις
serpent, etoit le nom d'une riviere d'Arcadie: ici en
particulier on a confondu τραχων
lieu escarpé avec δραχων dragon;
le sens est que des rochers escarpés for=
cent les eaux des fontaines de couler
dans un canal etroit et profond 2 mots biffure.

Le nom d'Hercule designe une digue
pour arreter les eaux, comme le verrons
dans la suite.

Les Hesperides etoient probablement
trois fontaines a l'occident de Troesene
dans l'Argolide, qui formoient le ruis=
seau Chrysomeles, ou autrement
Chrysorrhoes, dont le cours etoit extre=
mement tortueux: on fit une digue
et un canal qui conduisoit directement
ces eaux: voila comment Hercule en
leva les pommes ou plutot les eaux
des Hesperides et tua le Dragon: c'est
sans doute ce canal qui fut dans la
suite appellé fontaine d'Hercule a
Troesene. cad fontaïne arretée
ou fermée par une digue. 

Les Hesperides sont suppo=
sées filles de la nuit a cause de leur nom,
ou parce qu'elles sortoient de cavités pro=
fondes ou parce quelle couloit a l'occident de Troesene.
Elles sont placees au
dela de locean parce
que le Poete suppose
que toutes les fontai=
nes coulent au dela
delocean
 

La fable de Troescene de la toison repose sur le meme
fondement que celle des Hesperides.

<108v> 217 μοιραι, et κειραι, Parca, trois
mots qui expriment l'idée de Deesses occu=
pées a faire la part ou le sort des hommes,
a prononcer sur leurs destinées une sen=
tence irrevocable. 

Leurs troïs noms propres sont relatifs
a l'image sous laquelle les anciens represen=
toient la vie durée de la vïe humaine, cad.
comme un fil continu que la mort venoit
couper. L'une tient la 1 mot biffure quenouille
et dirige la filasse, l'autre met le fil sur
le fuseau, laderniere coupe le fil.

219. 12 lignes biffure

220. La puissance attribuée aux Deesses
fatales
sur les Dieux, suppose la notion
confuse de quelque Loi souveraine a la=
quelle tout etoit soumis: Homere, Virgi=
le &c peignent Jupiter lui même comme
soumis aux Lois immuables du destin; 
puisqu'on croioit les Dieux malfaisans et capables
de crimes, il falloit bïen supposer quelque
chose capable de les contenir.

223. La Nuit mit au monde νεμεσις la
vengeance divine qui poursuit les criminels
leur fait sentir des remords et quelque fois
les corrige. 

<109> 224 La fraude, les amours criminels,
sont appellés enfans de la nuit, parce qu'ils
cherchent les tenebres; la vieillesse et la
discorde par a cause de la tristesse que
la nuit inspire. 

3 lignes biffure

233. ποντος produisit νηερεα c.d
les rivieres et les eaux en general. Etym (209)Les
Eloges donnés a Nerée viennent de
1 ligne biffure
2 mots biffure
ce qu'on regarde ordinai=
rement les vieillards comme de bonnes gens.
on la appellé le vieux Nerée parce
que c'est un des plus anciens nom de la
mer chès les Grecs.

237. Tout ceci ces noms ne sont que des noms
3 mots biffure relatifs a l'eau, la pluie, &c que le
Poëte fait naitre les uns des autres.

Taumas Pere d'Iris, fut de la mer et de
la terre, Dieu de la pluïe, n'est autre chose
qu'un nom qui signifie pluvieux 1 mot biffure
1 mot biffure
φορκυς a le même sens que Taumas
son frere. 4 mots biffure

240. 1 mot biffure Doris epouse de Nerée
n'est encor qu'un nom de la mer et des
eaux; ainsi elle est fille de l'ocean, epou=
se de Neree; de ce mariage sont nées
les nymphes marines, qui ne sont autre
chose que des noms synonimes, tous
relatifs aux eaux.

Homere , Apollod. 
les ont nommés a peu près de même que
Hesiode; le premier les a rassemblées pour
en faire le cortege de Tetys. Virgile
en parle, 
ce sont 1° differens noms de la mer
ou de l'eau; 2° des epithetes de la mer
<109v> qui expriment quelques unes de ses proprietés
ou quelques unes de ses parties; 3° des noms
d'Isles; 4° des epithetes de ces Isles ou des cô=
tes de la mer; 5° quelques uns paroissent
etre des noms de vaisseaux; d'ou vient que
les vaisseaux d'Enée se trouvent tout a coup
chargés en nymphes marines 
et que les vaisseaux sont appelles nymphes filles de la mer.

259 εναρνη de ευ gouffre; d'ou
Avernus Lac d'Italie. La fausse etymologie
qui a fait naitre ce nom de ορνις oiseau
a fait dire qu'ils sortoit de ce Lac une exhalai=
son qui faisoit perir les oiseaux. 

265 Thaumas Dieu de la pluie epouse
Electra naiade. 

266 Electra enfant eut de Thaumas
ιρις l'arc en ciel qui vient de l'eau et
de la pluie

Iris pris de 3 mots biffure ιρω-εω parler, signi=
fie la renommée; de la on a feint que Iris
etoit la messagere des Dieux; ensuite la
confusion d'Iris messagere avec Iris
arc en ciel, a fait dire que celui ci servoit
d'echelle, parlaquelle celle la descendoit
sur la terre, et Hesiode lui donne l'epithe=
te de Ceter, tout comme on peignoit Mer=
cure avec des ailes aux pieds. C'est ainsi
que par de fausses allusions on a melé
la fable avec la physique.

Iris est souvent envoiée par Junon
parce que celle ci est prise pour l'air agité
et pluvieux.

267. Les Arpyes designent les Sauterelles;
elles sont filles de Thaumas et d'Electra,
de leau et de la pluie, parceque les pluies
chaudes font eclorre les oeufs des sauterelles
et quelles paroissent alors en grande quantité.

<110> Le nom αρπυιαι convient aux insectes
qui devorent les fruitsEtym (233), surtout en orient.

αελλω sign. vent impetueux; Etym (61) 2 mots biffure
que c'est le vent qui amene les nuées de sau=
terelles, et qu'elles en suivent la directïon.

οκνιτιετη exprime la velocité de leur vol;
Etym (147)μεπαχρονιαι cad. quelles volent au
dessus du temps; preuve que l'air, le ciel
le temps ont été confondus. 2 mots biffure

279 Les Grées sont 1 mot biffure deux rochers fameux
de la mer Egée V. CAR , que Homere  appelle
γυραιη πετρη ou il
pretend que Neptune fit perir Ajax.
Ils sont nommés γηρεαι dans Timée.  Ce
sont les rochers du promontoire γηραισος
a la pointe meridionale de l'isle d'Eubée.

Etym (300) On confondit aisement γυραιη
et γηρεαι avec γραια un vieille; on
imagina ensuite qu'ils etoient ainsi nom=
més parce quils etoient tout blancs, a
partu canas
. 4 mots biffure
5 mots biffure.
On
dit quel les Grees sont filles de Phorcys et
de Ceto, cad. de l'eau et de la mer, par=
ce que ces rochers sembloient sortïr
de la mer. 1 mot biffure

272 L'un etoit appellé πεφρηδω
signal vu de loïn, lïeu eminent. L'autre
ευνω 3 mots biffure, enatans, qui
paroit au dessus des eaux. Le Poete dit
que ces Grees sont toujours couvertes d'un
superbe voile cad. d'un nuage ou de
brouillard de la mer. Selon Appollodore,
elles avoient le Casque de Pluton ou
de l'Enfer, Orci Galeam. Homere se sert
de ce terme αιδος κυνην pour exprimer
un brouillard fort epais.

<110v> Les Grees sont ainsi nommées par les Dieux et
par les hommes. cad que leur nom est dans
le vieux langage de la Grece; de la vïent qu'on
n'en comprenoit plus le sens.

Quelques Mytologues ont admis une 3e Gree
nommée Dino, de div. 2 mots biffure, ddune,
montagne sur le bord de la mer 2 mots biffure.
On a dit que les Grees n'avoient qu'une dent
et qu'un oeuil pour elles trois cad. qu'un
de ces 3 rochers etoit plus pointu que les au=
tres, et qu'il y avoit un trou rond en forme
d'oeuil.

274. On a cru que les 3 Gorgones etoient
les 3 vaisseaux, les premiers vaisseaux a
voiles que virent avec etonnement les Grecs
et que Hesiode a dit qu'elles habitoient
au dela de l'ocean, parce que ces vaisseaux
etoient venus de l'ocean dans la mediter=
anée &c. Les descriptions que d'autres auteurs ont
faites des Gorgones s'accordent assès bien
en effet avec l'appareil des vaisseaux.

Mais cette explication ne s'accorde gueres
avec tout l'ensemble des fables, est il paroit
que sans sortir de la Grece, et a s'en tenir
a la signification des termes, en rapprochant
Hesiode et Appollodore, on peut juger que
cette histoire de Persée et des Gorgones
n'est qu'une description plate et grossiere
de quelques fontaïnes, de leurs proprietés
du lieu de leur cours.

Selon Appollodore, les Gorgones sont des nym=
phes. c.a.d des eaux, ou les Genies qui les
habitent; ce mot vient de γοργω fontai=
ne.

2° Les 3 noms de Gorgones rapprochés signi=
fient a la lettre, ce qui coule dans la mer
par un canal etroit. Pausanias 
place les Gorgones près du Lac Tritonïde;
c'est sur une equivoque du mot τριτων
<111> qui signifie l'eau, la mer 2 mots biffure.
3° Les Gorgones sont des monstres qui ont le
corps et la tête de serpens: allusion a la cou=
tume des poëtes qui peignent sous cette image
le cours tortueux des fontaines et des rivieres;
elles habitent du côte de la nuit parce qu'elles
sortent des cavités obscures: elles sont au dela
de l'ocean: Hesiode parle ainsi de toutes les
fontaines: elles sont voisines des Hespérides,
qui sont des fontaines , Meduse
a eu commerce avec Neptune , c'est
que la fontaine coule dans la mer. 2 mots biffure
Il est Persée ne sign. autre chose que le
bouillonnement lorsqu'elles coulent avec
rapidite 2 mots biffure. Il est fils de Danaë, petit fils
d'Acrisius, pretendu Roi d'Argos. 1 mot biffure
κρισιη . est une nymphe. Acrisius
un ruisseau d'Argolide, Danaë sa fille
est une fontaine qui s'y jette; les fonataïnes
sont filles des rivieres
. Persee est fils de
Danaë et de Jupiter changé en pluie; quand
il pleut, les fontaïnes coulent a gros bouil=
lons. Selon d'autres, προιτος Prœtus
avoit corrompu Danaë cad. un tor=
rent en se melant a une fontaine en
avoit troublé et precipité le cours; tel
est le langage des Poetes; 3 mots biffure
2 lignes biffure

Persée avoit pour fille γοργοφονη mur=
mure des eaux, une fontaine qui bouillon=
ne fait du bruit en coulant.
Persée va trouver les Grees pour savoir
le chemin qui conduit aux nymphes,
cad. les fontaines enflées par les pluies
trouvent dans les rochers un chemïn pour
s'ecouler et se reunir aux rivieres. Les
Grees sont soeurs des Gorgones, parce que les
fontaines coulent ordinairement au tra=
vers des rochers.

<111v>Persée coupe la tête a Meduse 
tandis que les Gorgones sont endormies cad
qu'une eau impetueuse melée avec une eau
dormante, rompt les digues de cette derniere,
force souvent une fontaine a changer de
canal, et a s'ouvrir un chemin par un autre
endroit. Il fait cette expedition avec le secours
de αιδος κυνη l'obscurité de l'enfer, cad. par des
conduits souterrains. Avec la tête de Me=
duse, il change en rochers les habitans
de l'Isle de Seriphe. Il y avoit apparem=
ment dans cette Isle une fontaïne Da=
naë et une fontaïne Persea, comme
dans l'Argolide; voila pourquoi Appol=
lodore y fait demeurer Persée avec sa
Mere. L'une des deux charioit peut etre
du tuf, et formoit des pierres sur ses bords,
dela les Grecs ont publié qu'elle avoit
produit tous les rochers dont l'isle etoit
environée.

281. Du corps de Meduse naissent Chry=
saor et Pegase, enfans de Neptune.
Chrysaor est le meme que Chrysorrhoas
nom de plusieurs rivieres et nommement
de celle qui passe a Troësene dans l'Ar=
golide, dont il s'agit ici: Chrysaor
né de Meduse, est un ruisseau né d'une
fontaine a laquelle on a coupe la tête
cad. que l'on a fait changer de bassin.

πγασος ιππος Voies cy dessus 6 mots biffure
5 lignes biffure

<112> Strabon  dans la description de
Corïnthe parle de la fontaine Pirene
située presque au sommet de la monta=
gne, et dont les eaux descendoient dans
la ville par des canaux souterrains.
On disoit que Pegase buvant dans cette
fontaine avoit été surpris par Bellero=
phon, et que Pirene etoit une nymphe
soeur de Pegase. Bellerophon est un
trou dans lequel l'eau s'engloutit; ainsi
l'histoire de Pegase, de Pyrene, de Bellero=
phon, des Gorgones, est une description
malentendue grossiere des fontaines de Corinthe
et de l'Argolide.

Rien de plus ridicule que de supposer que He=
siode ait voulu dire que les chevaux avoient
ete apportés en Grece par des vaisseaux qui
venoient d'Afrique.

On a dit que le cheval etoit une production
de Neptune parce que'il celui ci etoit surnommé
ιππιος ce qui signifie cad. aquatique: on a cru par
equivoque que cela signifoit cavalier
et conclu que Neptune etoit le Pere des
chevaux et le Maitre de l'equitation
Pausanias  parle de deux rivieres
Eripha et Parthenias changées en Cava=
les: de meme on a pris les Gorgones pour
des jumens de Numidie. Lerreur a passé
chès les Latins; ils traduisirent hippios
par consus; d'ou sont venus les jeux
consualia a l'honneur de Neptune
cavalier; dela on lui consacré l'Hippo=
potame ou le cheval marin. Comme
l'art de monter les vaisseaux venoit de
Neptune Dieu de la mer, on lui aura aussi
attribué par analogie le talent de monter
les chevaux et de conduïre les chars.

<112v> Chès certains peuples les vaisseaux legers
etoient nommés coursiers, chevaux; d'ou
certains Mytologues ont conclus que
Pegase, cheval ailé, n'etoit autre chose
qu'un vaisseau a voiles.

282. Fable batie visiblement sur
de fausses etymologies

285 Voici une nouvelle Circonstance que
Hesiode tire du mot chrysaor, en le
prenant au même sens que Homere lors
qu'il donne cette epithate au soleïl, pour
sign. lumiere brillante ou doree, c'est
en ce sens que les Cariens adoroient
Jupiter Chrysaor. 

287. Chrysaor (ruisseau) epousex de Callirhoé, cad
belle eau, belle fontaine, fille de l'ocean
comme toutes les nymphes des eaux: 1 mot biffure
1 ligne biffure
ruisseau
. Il devient Pere de Geryon
monstre a 3 tetes.

La fable des boeufs de Geryon a fait que
les Poëtes ont placé ce Roi pretendu 1 mot biffure
en divers lieux comme l'Epire, l'Espagne,
dont on vantoit les paturages; mais
ces boeufs et leur enlevement par Hercule
sont une fable toute pure.

γηρυων signifie terre abreuvée, detrem=
pée, 1 mot biffure, un marais, Etym (219) ce marais
est fils de Chrysaor et de Callirhoé, d'un
ruisseau et d'une fontaine. Selon Pausa=
nias  le Poëte Sthesicore avoit
fait un poëme sur Jupiter Geryon;
c'est Jupiter qui arrose la terre. Geryon
avoit 3 tetes, et selon Appollod. trois corps,
qui se reunissoient en un seul ventre, cad,
qu'un marais etoit formé par 3 sources
qui y deposoient leurs eaux. observes que
<113> si de l'epithete τρικαρηνον vous etes
α, il reste τρικαρηνον qui sign. trois sources.

Au dessous du ventre, il avoit l'extremité
de 3 corps, parce qu'il en sortoit 3 canaux
ou 3 ruisseaux.

On comprend comment Geryon demeuroit
dans une isle, puisque c'etoit un terrain
environné d'eau; c'est ce que sign. φυτυε
a quoi le Poête ajoute l'epithete circumflua
pour le mieux designer. ρυρυθιαν
qui gardoit les boeufs de Geryon, etoit le
ruisseau même qui l'environnoit. ορθος
enceinte, enclos, est ici metamorphosé
en chien, parceque κυων, canis, designe
aussi quelque chose de creux, d'ou
κυνια lac ap. Strab. ainsi ορθος κυων
του γηρνυνου sign. a la lettre l'enceinte
creuse d'un marais.

Les Boeufs La fable des Boeufs vient de
l'equivoque du mot βους, βοας, eau
riviere, d'ou bosphore. Etym (104) Ces eaux etoïent
roussatres comme sont ordinairement les
eaux croupissantes. Geryon nourissoit
ces pretendus Boeufs de chair humaine
parce que ces eaux causoient par leur
infection des maladies qui faïsoïent
mourrir beaucoup de personnes.

Hercule conduïsit ces boeufs a Tyrinthe.
βιη ηρακλεη sign. a la lettre
un canal fermé, une ecluse, Etym (143) d'ou
nous devons conclure que les eaux ou
marais Geryon etant arretées plus haut
par une digue, on les conduisit par
un canal dans la riviere de Tirynthe;
riviere en effet formée par plusieurs
ruisseaux, et qui après avoir coulé pres de la
ville, se precipite dans un gouffre appelle
Claustra Tyrinthis. 

<113v> Ainsi toutes ces fables precedentes ne sont
qu'une description mal entendue des rivieres
fontaines, marais, rochers de Corinthe et
de l'Argolide, ou l'on a placé la posterité de
Persée.

295. Callirhoë enfanta la redoutable
ζχιονα vipere femelle dont le male est εχις
5 mots biffure Ce mot 2 mots biffure
1 ligne biffure

peut desïgner une eau qui serpente. La
confusion de ces deux sens fait tout le fond
de la fable. 1° c'est un monstre composé de
deux natures puisqu'il designe de l'eau et
un animal; il a le visage de nymphe
parceque ce terme est du foeminin. 2°
Il est fils de Callirhoë, ce qui coule; cela
s'entend de l'eau; mais le serpent peut etre
aussi appellé enfant des eaux, parce qu'il
nage très bien, et se plonge dans les rivie=
res; 3° Il est tacheté de divers couleurs
et vit de carnage. 4° Il se tient sous terre
sous les rochers. Cela est vrai des serpens
et des fontaines. 5° Il est immortel et ne
vieillit point: on peut l'entendre et des sour=
ces d'eau qui ne tarissent point, et des ser=
pens qui semblent se rajeunir en changeant
de peau 6. Il est placé εν αριμοις: ce
nom peut signifier la Syrie ou en general
les montagnes.

306. Qu'est ce que Typhon mari d'Echidna
C'est tout ce qu'il plait aux Poëtes, parceque
ce nom peut signifier divers objets; 1° Selon
Hesiode, c'est un vent tempete orageuse, un tour=
billon de vent qui submerge les vaisseaux: voila
pourquoi quelques uns ont dit que Junon
ou l'air l'avoit conçu, en recevant les vapeurs
de la terre dans son sein. Il a eu commerce
<114> avec εχιδνα avec l'eau qui tourne et qui
serpente; parce que τυφαον peut egale=
ment signifier un tourbillon d'eau et un
tourbillon de vent. 2° Il designe une
riviere ou un gouffre; 2 mots biffure
1 ligne biffure
5 mots biffure;
τυφων
selon plusieurs, etoit le nom de l'Oronte
riviere de Syrie, parce qu'elle serpente dans
un gouffre et tourbillonne en plusieurs
endroits: voila l'alliance de Typhon avec
εχιδνα dans la Syrie. 2 mots biffure
10 lignes biffure
3 on la pris
aussi pour un volcan, 1 mot biffure qui envoie des tourbillons
de fumée et de flammes. 3 mots biffure
4 lignes biffure
4 mots biffure
Voiès la description du
mont Etna.  Tous les lieux sul=
phureux et remarquables par des volcans,
ou des feux souterrains, ont été nommés
le domaine de Typhon 4 mots biffure
3 mots biffure

Comme Homere avoit oui parler d'un
Typhon en Syrie, qui est une riviere, et
d'un Typhon en Sicile, qui est un vol=
can, il a confondu l'un avec l'autre. 

<114v> Il a depeint Typhon comme un volcan
et il la place εν αριμοις chès les Arame=
ens cd. les Syriens. Hesiode 2 mots biffure en dit
2 mots biffure la meme chose, et il le prend pour un vent violent.

Ils n'en parlent même l'un et l'autre que par
oui dire.  Comme les Poetes
Latins n'entendoient pas ce mot Grecs, ils ont cru
que Homere avoit voulu parler del'isle
Inarimé ou Pythecusa près de Nap=
ples, et Virgile la ainsi repeté. 

309. De Tyhpon et d'Echidna est venu
orthos, chien de Geryon. Nous avons
vu que orthos sign. une enceinte et
meme l'enceinte d'un marais. 
Une eau qui serpente et qui tourbillon=
ne peut environner un marais. On donna
a orthos deux têtes, parce que cette eau
provenoit de deux sources.

311 κερβερος κυων του αιδεος sign.
qu'on traduit dans la fable cerbere chien
de l'enfer sign. a la lettre la profonde
ouverture de l'enfer
. Les Grecs regardoïent
les cavernes et les gouffres comme les bou=
ches ou les soupiraux de l'enfer; dès lors
nous comprenons comment Typhon et
Echidna c.d. les eaux tournantes qui
tourbillonnent ont enfanté ce monstre,
ont produit les gouffres ou elles s'englou=
tissent. Hesiode lui donne 50 têtes. 
Il n'en avoit originairement
que trois ou plutot trois gueules, et on
les avoit imaginées a l'occasion de quel=
que caverne ou il y avoit 3 ouvertures;
mais il n'en coutoit rien de les multiplier
le monstre en devenoit plus terrible.

On la placé a la porte de l'enfer non seule=
ment parce qu'il signifie gueule de l'enfer,
<115> mais encor pour s'accommoder a l'usage
ancien d'avoir des chiens pour garder la
maison. Homere n'a pas manqué d'en mettre
un a la porte du Palais d'Ulisse. Le chien
des enfers ne pouvoit etre qu'un monstre.
Homere parlant du chien que Hercule
tira des enfers  ne
le nomme point ni ne le decrit; ce sont
les Poetes suivans qui en ont fait un
tableau.

313. υδρα sign. un serpent aquatique.
On pretend que l'Hydre du marais de Lerne
avoit un grand nombre de têtes; qu'a mesure
que Hercule en coupoit une, il en renaissoit
une autre; qu'enfin il fut obligé de se servir
du feu pour les empecher de renaitre; ce qui
signifie, dit on, qu'il y avoit beaucoup de
serpens, que plus on en tuoit, plus il en
revenoit; que Hercule aiant imaginé de
mettre le feu aux jongs cela fit perir tous
les oeufs, &c Hercule fit cette expedition
par le conseil de Minerve cad. par un
trait de prudence et d'industrie nouveau.

Iolaus dont il emprunta le secours peut
sign. du bois, en le derivant du Grec 1 mot biffure
υλη ou l'Hebr. Elah.

Mais Pausanias pretend que cette Hydre
n'avoit quune tête, que c'est le Poëte Pisan=
dre qui lui en a donné plusieurs. 
Il parle aussi d'une fontaine Lerna, dans
la ville de Corinthe. 

Cette remarque nous ïndique le vrai sens
de la fable. υδρα a signifié de l'eau originai=
rement de l'eau; elle a été changée en
serpent par les Poëtes; mais Hesiode
ne lui donne point ce nom. Junon
l'avoit nourrie par haine contre Her=
cule.  Jupiter et Junon sont
<115v> souvent pris pour la pluie: les lacs et les
marais sont nourris et augmentés par
celle ci. Junon, toujours ennemie d'Hercule
c'est la pluie qui fait enfler les eaux, rompt
les digues et les ecluses qui les contiennent.

ιολαος pour ιουλος sign. une cavité
dans la terre, un canal Athenée
Etym (235) Hercule par le moien d'Iolaüs tue l'Hy=
dre de Lerne cad. qu'une digue et un
canal arretant et detournant les eaux
font secher ce marais. En effet Lerne
aujourdhui a une issue et se decharge
par deux canaux dans la mer.

Servius explique la chose de même. Apo=
lore confirme l'explication, en disant que
Hercule trouva l'Hydre près des sources
de l'Amymone. Cela sign. donc qu'avant
qu'on eut fait une digue et un canal pour
conduire directement dans la mer les eaux
de l'Amymone, elles se jettoient dans le
marais de Lerne, et inondoient les environs.

Il ajoute qu'un cancre donnoit du secours
a l'Hydre et mordit Hercule au pied. καρ
κινος designe un cancre marin et un chan=
cre; celui ci signifie allegoriquement une veine d'eau
qui mina le terrain sous la digue et y fit
une ouverture. Euripide appelle cette Hydre
de Lerne κυνα cad une cavité, ou se
rassemblent les eaux, comme κυνια Lac
d'Acarnanie.

319. La Chimere est une montagne de
Lycie de laquelle il sortoit souvent des
flammes. Homere la decrit comme Hesio=
de.  Mais qu'est ce dont
que ce composé de 3 animaux 1 mot biffure
avec 3 tetes? Cest 3 sommets de la mon=
tagne. Le premier etoit nommé λεων
ou λυων plein, uni; c'etoit le lieu le moins
<116> le moins elevé de la montagne sur lequel
il y avoit une espece de plateforme; le
second s'appelloit χιμαιρα, qui designe
le lieu le plus haut, 4 mots biffure
3 lignes biffure
2 mots biffure
. Le 3e portoit le nom
de τραχων scabreux, escarpé. Or les
3 mots biffure Poëtes ont pris λεων pour
un Lion, χιμαιρα pour une chevre
sauvage, τραχων pour un Dragon
et voila le monstre; c'est pure equivo=
que.

Maïs que veut dire ce Bellerophon
l'un des descendans de Persée, que l'on
suppose né dans l'Argolide, 1 mot biffure qui a passé
la mer monté sur Pegase pour aller
vaincre ce monstre pretendu? βελ
sign. eau, dou βελος riviere de Syrïe,
dont on fait descendre les Belides ou Da=
naides. βελλεροφοντης sign. donc
1 mot illisible prendre de ροφω-εω avaler englou=
tir, un gouffre ou l'eau s'engloutit. Etym (136) On
le dit fils de Glaucus, Dieu marin, et
frere de Pirene fontaine de Corinthe. 
La Chimere qu'il vainquit dans
l'Argolide, c'est une riviere, χειμαρος ou
χειμαρροος cd. un torrent qui coule
pendant l'hyver et un autre torrent
χιμεριος dans la Thresprotie.  πηγασος ιππος c'est de
l'eau glacée, de l'eau de neige. Ainsi Belle=
rophon qui domte la Chimere par le moien
de Pegase, c'est un gouffre qui formé
par la violence des eaux de neige englou=
tit le torrent χειμαρος ou χιμαιρα.

<116v> Comme les Grecs confondoient les objets
les plus disparates, sur le moindre rapport
de noms, ils prirent le χειμαρος de l'Argo=
lide pour le χειμαρα de Lycie, et firent
ainsi voiager Bellerophon au dela de
la mer.

326. Le Sphinx fut origin. une figure
Egyptienne monstrueuse qui avoit le
visage d'une femme, le corps dun Lion les
ailes d'un oiseau; voici comment ce mons=
tre fut transplanté dans la Boetie. Il y
avoit dans le voisinage de Thebes une
chaine de montagnes qui formeoit une
enceinte ou un demi cercle; elle est nom=
mée κυθερων au midy, et σφινξ σφιξ
φικιον vers le nord; 1 mot biffure ces deux noms signi=
fient l'un et l'autre lien ou ceinture.

Les Boetiens sur la seule ressemblance
des noms imaginerent qu'il y avoit eu
chès eux un monstre semblable qui avoit
donné le nom a leur montagne de
Sphinx.

Ils racontoient que ce monstre proposoit des
enigmes aux passans et devoroit ceux qui
ne pouvoient pas les deviner; que Oedippe
venu de Corinthe aiant heureusement
expliqué l'enigme, le Sphinx alla se preci=
piter dans la mer. Pure allusion a la to=
pographie du pays.

Dans cette plaine entourée de montagnes
il y a un lac et plusieurs rivieres. Selon
Hesiode, la chimere unie au chien orthos
a produit le Sphinx; la chimere cest χιμαρροος,
les torrens d'hyver, le chien orthos
c'est un creux, un lieu bas environné, σφιξ
ce qui resserre de σφιγγω. Cela signigie donc
Etym (150) <117> que les eaux grossies pendant l'hyver et
resserrées de toutes parts, mettoient les habi=
tans de la plaine fort a l'etroit. Voila les
enigmes du Sphinx ou plutot les embar=
ras qu'il causoit: peut etre que quelques
personnes perirent dans ces eaux rassem=
blées, et furent ainsi devorées par le Sphinx.

οιδιππος sign. eau enflée, de οιδος
ιππος: il y avoit une fontaine de ce nom
a Thebes.  κορυνθος est
le terme generique de montagne qui a don=
ne le nom a la ville de Corinthe, de
1 mot biffure elevé. On concoit que les eaux
enflées et descendues des montagnes se
firent une ouverture du côté dela mer,
et allerent se jetter dans le golphe 1 mot biffure
Hilyca ou elles tombent encor aujour=
dhui; ainsi Oedippe dissipa l'embaras
et força le Sphinx de se precipiter dans
la mer.

Sous le regne d'Oedippe il y eut une con=
tagion a Thebes; ce fut cad. qu'après
l'ecoulement des eaux il survint une
epidemie. L'oracle declara qu'elle etoit
arrivée parce que Oedippe avoit tué
son Pere Laius, et epousé sa mere Jo=
caste. 1 mot biffure λαιος etoit une riviere en
Boetie dont le lit fut efface ou detourné
par l'enflux des eaux, qui s'eleverent
encor jusques a une fontaine nommee
Jocaste et s'y melerent.

De ce commerce naquirent Eteocles et
Polynice, deux autres sources d'eaux
la premiere appellée ετεοκλεις par=
cequelle etoit fermée chaque annee
ou a sec pendant l'eté, lautre πολυνεικη
qui coule abondamment parce quelle Etym 287
<117v> couloit toujours en eté Etym (209). Tel est le sens du
regne alternatif d'Eteocle et de Polynice Rois
de Thebes.

327. Il ne sagit pas ici d'un Lion, animal
propre au midy, mais de λειων lieu plein
et uni dans la foret de Nemée, dont les
eaux croupissantes infectoient les environs.

Selon quelques uns, il etoit né de Typhon
ou d'un ruisseau, selon d'autres Hesiode
de la chimere et du chien Orthos qui
sont des eaux. Il avoit été nourri par Ju=
non ou par la pluie; il fut tué par Hercule
cd. par une digue et un canal bien fermé
qui detourna les eaux ailleurs.

4 lignes biffure

333. Après ce qui a été dit 215 on comprend
ce que etoient les pommes d'or, le dragon
qui les gardoit, pourquoi il est né de Ceto
et de Phorcys, deseaux et de la pluie.

Tout dans les fables Grecques se rappor=
te aux eaux, et cela n'est pas surprenant
vu les frequentes ïnondations auxquelles
la Grece etoit exposée, l'objet etoit important.

Telle est la posterité de Ceto et de Phor=
cys, des eaux et de la mer. 1° les Grees
qui sont des rochers 2° les Gorgones, qui sont
des fontaines; 3° Geryon, marais de
l'Argolide, 4° Echidna les eaux qui tournent
et Typhon les rivieres et les gouffres;
5 Orthos, enceinte aquatique, 6° Cerbere,
gouffre ou caverne 7. l'Hydre de Lerne,
lac ou marais, 8 La chimere torrent
d'hyver, 9° le Sphinx embaras causé
par les eaux 10 le Lion de Nemée, autre
marais 11 le ruisseau forme pr les Hesperides
<118> autant de preuves de ce qui a été dit que
les fables des Dieux sont le tableau de
la nature en general, celle des Heros et
des monstres, la topographie des diverses
contrées de la Grece.

337 Les fleuves sont chès les Poëtes enfans
de la mer Tethys epouse de l'ocean, (deux
noms dela mer) a cause de la ressemblan=
ce de nature, et parce qu'ils sont moins con=
siderables, tout comme il on suppose les
fontaines filles des rivieres. A la reserve
du Nil, du Pau et du Danube, Hesiode
ne connoissoit que les fleuves de la Grece
et de l'Asie mineure. Cette ignorance de
la Geographie avoit fait naitre chès les
Grecs une infinité de fables sur les fleuves.

338. On voit par les noms des fleuves
et leur etymologie, qu'ils sont tous origi=
nairement des noms appellatifs, parce
que les peuples habitans sur les bords
d'une riviere se sont contentés de l'appeller
simplement du nom d'eau ou eau
courante, sans chercher d'autre nom
distïnctif. Ces noms n'expriment autre
chose que l'idee generique d'eau, de
profondeur, de canal, &c inutilement
leur chercheroit on d'autres etymologies
que dans les mots de la Langue même
qui expriment ces idées.

Ces fleuves ont été mis par Hesiode au
nombre des Dieux. On sait qu'il est peu de
rivieres qui 1 mot biffure n'aient éte l'objet d'un culte de la
part de ceux qui en habitoient les bords.

L'utilité qu'on en retiroit, les ravages qu'elles
causoient quelque fois en se debordant, firent
croire qu'elles etoient habitées et conduites
par un Genie tantôt bienfaisant, tantot
irrité.

<118v> 346 Les noms des nymphes ou naiades
ne sont non plus que des noms de fontaïnes
dont les Poëtes font autant de Deesses.

D'ou est venu l'usage de consacrer la che=
velure des jeunes gens aux fleuves et
aux fontaines? Peut etre de l'usage ou
etoient les jeunes Grecs de se baïgner dans
les eaux courantes. Il arrivoit quelque fois
que les nageurs se trouvoient accroche par les cheveux aux
branches ou aux racines des arbres qui
croissent sur le bord des eaux. La persua=
sion ou l'on etoit que tous les fleuves etoient
habités par un Genie, fit dire que c'etoit
le fleuve qui avoit saisi le noyé par les
cheveux. Ceux qui en echapperent se
crurent obligés de consacrer leur cheve=
lure au Genie du fleuve qui les avoit epar=
gnés et bientot la coutume s'etablit de
couper ainsi ses cheveux et de les offrir
aux fleuves pour ne pas etre arreté par la
en se baignant. On fit la même ceremonie
a l'honneur d'Apollon, parce qu'il presidoit
aux exercices des jeunes gens. De longs che=
veux pouvoient incommoder beaucoup
les lutteurs; on jugea qu'il valoit mieux
s'en deffaire et les vouer au Dïeu que
de les conserver; c'est peut etre la raison
qui ïntroduisit chès les Grecs et les Romains
l'usage de se raser la tête.

La même raison qui avoit fait deifier
les fleuves fit aussi decerner un culte
aux fontaines. Il n'etoit pas aisé aux
Grecs de deviner d'ou pouvoit venir une
source d'eau qui ne rarifioit point et dont on n'appercevoit pas le reservoir; ils con=
clurent qu'un Genie obligeant se char=
geoit de la faire couler par un pouvoir
superieur.

<119> 348 Jupiter a reglé le sort de tous les
Dieux et leura distribué leurs emplois.

Tout ce que les Poëtes ont dit de fabuleux
sur les Nymphes se reduit donc a des
descriptïons grotesques de fontaines, de
leurs cours, des effets qu'elles produisoient,
des proprietés vraies ou fausses qu'on y
remarquoit ou supposoit.

362 Sans doute qu'on dut supposer aussi
un pouvoir dïvin pour gouverner un
element aussi admirable que la mer, et
en general toutes les parties de la nature.

Les Payens ne trouvoient de ressources a leur
ignorance qu'en multipliant sans fin
les Divïnités subalternes.

371 Thia sign. la profondeur. Elle est
fille du ciel et de la terre ; c'est donc
la mer. Hyperïon est le ciel. Ils ont
enfanté le Soleil, la Lune, et l'Aurore,
parceque le Soleil en s'elevant paroisoit
aux Grecs sortir dela mer Egée, tout com=
me il se couchoit dans la mer Ionienne.

La fonction de l'Aurore est d'ouvrir les portes
du Ciel. Les Latins lui avoient substitué
Ianus avec 2 ou 4 visages pour rendre
lidée d'Homere, qui dit que le Soleil voit
et entend toutes choses ou qu'il repand la
lumiere de tous cotes .
d'ou vient qu'on le disoit fils d'Apollon.

375 Crius est le ciel, Etym. (300) Eurybie la mer. 
ασρειος leur fils c'est tout
ce qui luit au ciel, les astres. Les Grecs disoient
que le ciel et la mer avoient enfanté les as=
tres parce qu'ils voioient ceux ci sortir dela
mer au commancement de la nuit, tout
comme le Soleil a son lever, παλλας c'est
la clarte, περση la chaleur. Ceux qui ont
enfante les astres, ont produit en même temps
la clarté et la chaleur; ces vieux mots
<119v> surannés qui n'etoient plus en usage au
temps des Poëtes ont été personifiés par
ceux ci.

377. Astrée est l'epoux de l'Aurore, parce
que l'Aurore succede aux astres, mais
l'aurore avoit plusieurs autres maris.
Elle est la mere des vents, parceque les
vents s'elevent ordinairement avec l'auro=
re, surtout sur mer.

383 ce vers signifie qu'en associant le
feu al'eau froide on la fait bouillir.
1 ligne biffure
bouillonne
Cette famille de Styx ne
designe autre chose sinon que l'impetuo=
sité du cours de cette fontaine ou de
ce ruisseau d'Arcadie qui tombe dans
la riviere Chratis. Ces Etres physiques
pris dans la suite pour des Etres moraux
sont devenus la matiere d'une genea=
logie puerïle.

404. Latone ou l'enfantement est regar=
dée comme fille de Coeus, le Ciel et Phebe
la Lune, a qui les anciens attribuoient
une grande influence sur la naissance
des enfans.

409. φοιβη, ασεριη, εκατη, signifient
brillante, 3 epithetes de la Lune que le
Poëte fait naitre l'une de l'autre, reprodui=
sant le même objet sous 3 differens noms
il en fait 3 personages. Perses epouse
Asteria, parce que ce sont les astres qui
produisent la lumiere et la chaleur. Feu
chaleur, lumiere, sont exprimés par les
memes racines dans toutes les Langues.

<120> 412. Le Poëte suppose que l'opïnion
populaïre des ïnfluences de la Lune est
très ancienne; les hommes qui auront
observé celle qu'elle a sur les marées,
n'auront pas manqué de lui en attribuer
aussi sur les divers chamgemens de 1 mot biffure
la pluie et le beau temps, et tout ce qui
sort de la terre.
On a commancé a y
croire aux influences de la Lune deja
sous le regne de Calus , avant
celui de Jupiter, et la naissance de l'Ido=
latrie.

417. 12 lignes biffure

423 La Lune a eu plus de privileges
que tous les autres Dieux de nouvelle
institution, parcequ'elle etendoit ses
ïnfluences dans le Ciel, et sur la terre
dans l'ordre civil et religieux.

424. On trouve ïci la distinction de Dieux
anciens, et de Dieux nouveaux; le Poëte
2 lignes biffure

<120v> On voit que Titanes ne sign. autre chose
que les premiers Dieux que les Grecs ont
adoré cad. les differentes parties de la nature
personifiees par oppos. aux Dieux nouveaux qui ont
presidé aux arts et aux sciences, et dont
le culte a éte plus pompeux. Etym (187).

Le Poëte suppose que le culte de la Lune a eu
des progres successivementfs. augmenté D'abord elle ne
fut connue et honorée que sous un seul nom
dans la suite, elle le fut sous les noms
de ηρα ou Junon, αρτεμις ou Diane,
ειληθυια ou Lucine λητω Latone,
εκατη, φοιβη, σεληνη, μηνη. A l'epo=
que du regne de
Jupiter on se figure que sous differens noms
la Lune exerceoit son empire, même sur
les Esprits, et sur tous les evenemens de la vie
qu'elle disposoit du sort des mortels.

429. De la vint qu'on adressoit a la Lune
des voeux que l'on faisoit a differentes Divï=
nités, a Junon pour etre vïctorïeux et honoré
a Diane pour etre heureux a la chasse, a
Lucine pour la fecondité des femmes et
des troupeaux, a Latone pour la prosperité
des famïlles, a Hecate pour le beau temps
dans les voiages.

L'opinïon qui a fait presider la Lune a la
naissance et l'education des enfans, est fondée
surceque c'est par Lunes ou mois qu'on
comte le temps de l'accroissement de l'enfant
dans le seïn de sa mere; 2° sur le prejugé que
le terme des couches depend des progrès de la
Lune, que celle ci influe sur la difference
des sexes. cela a pu conduire a faire depen=
dre de la Lune toutes les destinées; d'ou est
venu le proverbe: il nest pas né en bonne
Lune
.

<121> 453. Rhea est la terre, Saturne le temps.
Leurs enfans ne sont plus des Dieux Titans;
ce sont des Dieux nouveaux adorés sous
la 3e epoque de la Religion Grecque.

454. En supposant εσιη Vesta, fille du
temps et de la Terre, le Poëte semble sup=
poser qu'il fallut du temps aux Grecs pour
apprendre les divers usages du feu, et il
raconte , que Promethée deroba le
feu aux Dieux. Mais il ne s'agit peut
etre ici que du culte de Vesta et des Dïeux
Lares, qui n'est pas de la premiere antiqui=
té; et qui ne commanca que lorsque chaque
famille eut son foyer particulïer, c.d.
a la formation des Societés. Ici l'epoque
de la naissance, c'est celle du culte. L'usage
chès les Grecs, puisqu'il y avoit chès
eux des volcans, et que le Poëte a parlé
ailleurs des Cyclopes.

L'agriculture n'aiant pas été connue dès
les premiers temps de la Grece, Ceres
est aussi fille du Temps et de la Terre.

Les avantures de Ceres et l'enlevement
de sa fille Proserpine ne sauroient etre
pris dans le sens hïstorique, parceque
cette histoire ne supposeroit que des faus=
setés, comme p. ex que la Sicile est le
premïer pays du monde ou l'agriculture
ait été connue, qu'une Reine de Sicile
ait passé la mer pour venir l'enseigner
aux Atheniens, que la Sicile ait été peu=
plée et cultivée avant la Grece, que la
navigation et le commerce aient été etablis
entre la Grece et la Sicile, avant que les
Grecs aient eussent connu l'agriculture, que
celle ci a été ignorée en Grece sous les
Princes Titans et qui l'art de faire le
païn est du a une seule personne. &c

<121v> Proserpïne ne signifie autre chose que le fruit du labou=
rage. Elle est fille de Jupiter et de Ceres cad
du Ciel et de l'Agriculture; elle se tenoit en
Sicile dans la vallée d'Erïna parceque c'est
un des vallons les plus fertiles de cette Isle.
Elle est enlevée par Pluton, Dieu des enfers,
parcequ'il faut enfouir le graïn en terre
pour le faire germer. Sa mêre Ceres la
cherche partout le monde; parce que par=
tout l'agriculture est occupée a tirer des fruits
de la terre. Son char figure de la charue
est conduit par Triptoleme, cd celui
qui romp les sillons. Proserpine retrouvée
dans les enfers est condanée a y demeurer
6 mois, et les 6 autres avec sa mere, parce
que pendant l'hyver les grains sont envevlis
en terre, et reparoisent en été.

Les fêtes de Ceres et ses mysteres n'ont été
d'origine qu'une representation des travaux
du labourage accompagnée de joie, après
la fïn de ces travaux; on les fit passer
dans la suite pour des ceremonies myste=
rieuses, et les differentes circonstances dont
on ne connoissoit plus le sens donneoitrent
lieu dimaginer les avantures de Ceres.

Le mot ηρη pouvant etre pris sous diffe=
rentes acceptions, a donné lieu a ce que a
la fable de Junon, qui est prise tantot pour
la Lune, d'ou les surnoms de Juno Lucïna
novella, calendaris &c tantot pour
l'air et le ciel, d'ou vient qu'elle est appellee devenue
soeur et Epouse de Jupiter, qui designe aussi l'air
et le Ciel, qu'elle est appellée fluonia et
matuta, l'air qui produit la rosée du
matin; de la vient ce qui donna lieu a la fable que Jupiter
avoit suspendu Junon entre le Ciel et
la terre , tantot pour
<122> pour hera, Reine; d'ou elle a été appellée
Reine des Cieux et des Dieux, tantot
pour ηρα, de Hebreu harah, qui accou=
che, d'ou vient qu'on lui a preté la même
influence qu'a la Lune sur les accouche=
mens; tantot pour αρα colere;
d'ou vient qu'on a supposé Junon fiere,
colere, jalouse, et qu'on lui consara
le paon.

La mauvaise humeur et la jalousie
de cette Deesse viennent encor d'une autre
source. Junon est souvent l'air, quand
l'air est orageux, Junon est en colere.
Quand Jupiter fait enfler les eaux, il
fait des infidelités a Junon, il corromp
les nymphes, si l'orage fait deborder
les ruisseaux &c, alors c'est Junon qui
persecute les maitresses de son mari et
veut perdre ses enfans.

Quand il pleut d'un cote, et que le Soleil
luit de l'autre, la serenité de l'aïr com=
bat en quelque maniere contre le
mauvais temps; on disoit en Style
poëtique que Jupiter se battoit avec
Junon; Le Langage et voila l'origine
du mauvais menage et des querelles
de Jupiter et de Junon. Ce langage
pueril subsiste encor dans les campa=
gnes; quand ils voient tomber de la pluie
et luire le Soleil en même temps, ils
disent que le Diable bat sa femme
1 mot illisible ηρα Junon etoit la Lune dans
son origine, et les fables qu'on a debitées
a son sujet n'ont été fondées que sur l'equi=
voque des divers sens de 2 mots biffure son
nom que l'on ne connoissoit plus sous
le nom d'Hecate, elle etoit au rang
des anciens Dieux; mais sous le nom de Herae
elle ne fut connue que sous le regne de Jupiter.

<122v> 455 Pluton offre le meme sens que αδης; c'est l'interieur de la terre
le sepulchre; on a supposé que les entrailles de la terre etoient
le sejour des manes ou des ames, a cause de
l'usage etabli d'enterrer les morts. On a cru
qu'un Roi regnoit sur eux, parce que c'etoit
d'dans un temps ou les Grecs etoient gouvernés
encor par des Rois. Pluton est le fils de 1 mot biffure
κρονος parce que ce mot sign. quelque fois
un gouffre profon, et de Rhea, la terre.

Selon Sanchoniaton, Pluton ou Dis est
le mouth des Phenicïens, la mort.
Pluton a été appellé le Dieux des richesses
parce que l'on fouille la terre pour y trouver
les metaux.

Il y avoit une nymphe Pluto fille de l'ocean
(355), parce que ce nom designe un lieu pro=
fond.

Oreus, autre nom latin de Pluton a la même
energïe puisque Orea, selon Isidore,
signifie vase profond propre a mettre
de l'eau.

Pluton est frere de Jupiter, fraternité alle=
gorique comme les personages; un personage
qui preside aux richesses et aux funerailles
ne sauroit etre qu'un Etre imaginaire.

Puton est descendu aux enfers, tout
comme Orphee, Thesee, Hercule; ces
noms sont tous relatifs aux eaux qui
tombent dans des gouffres; ces eaux condui=
tes par des digues et des canaux ont été
changées en personages tirés des enfers;

456 Neptune est celui qui domine sur les
eaux; 1 mot biffure il est epoux de la mer qui envi=
ronne la terre; son trident n'est autre
chose que l'instrument du pecheur, pour
percer le poisson, la fougne ou fouine.

<123> Le Culte de Neptune n'a eu lieu que depuis
que les Grecs ont connu la navigation, 1 mot biffure
Neree etoit l'ancien nom de la mer. La
vieille traddition que Neptune etoit venu
de Lybie, ne signifioit autre chose si non
que les Grecs avoi2 lettres biffureent appris la Navigation
des Pheniciens de Carthage. Il ne s'agit
ici daucun inventeur de cet art. 

457. Herodote  nous apprend
que les Perses nommoient Jupiter toute
l'etendue du Ciel, et M. Foumont  a prouvé que Jupi=
ter est la même chose que Cœlus. Il est
appellé fils de chronos ou du temps par=
ceque la pluie est fille du temps ou du Ciel,
et parce que Jupiter a succedé a Saturne
dans le culte.

Homere  a nommé Pluton
Jupiter infernal
; Eschyle appelle Jupiter
le Dieu de la mer; Hesiode parle de Jupiter
terrestre; preuve que ce nom ne signifie
autre chose que Dieu, Seigneur, Maitre.

En distinguant diverses parties de son do=
maïne, on en a tire divers personages:
Selon Diod. de Sic. la royauté a été attri=
buee a Jupiter a cause que son culte a tou=
jours été plus pompeux que celui des autres
Dieux; c'est pour cela qu'il a été appellé
Coryphée, ou très haut ,
et qu'on lui dressoit des temples sur les lieux
les plus elevés; d'ou sont venus les surnoms
Olympien, Hymettien, Capitolin, &c.

<123v> 458. Le Dieu qu'on supposoit resider au Ciel
devoit naturellement etre regardé comme le Dieu
du tonnere et de la pluie &c. De la les espithetes de
tonnant, foudroiant, pluvieux &c, et pouquoi
selon Varron , Jupiter a
ete pris pour l'air, pour le vent, pour les nuées pour
la pluie, pour le jour. Dela ses divers surnoms
de ce Dieu et l'orïgine de plusieurs fables, bizarres,
le denouement naturel de tous les mariages, de
tous les commerces scandaleux, de tous les
crimes qui ont été attribués au plus grand
des Dieux. 1 mot biffure Reconnu pour le Genie
administrateur des phenomenes du Ciel, il est
devenu l'auteur de tous les biens et les maux qui
en resultent pour la terre, serenité, orage &c
c'est lui qui fait deborder les ruisseaux, qui trou=
ble les eaux, qui corromp les nymphes &c.

Les autres Dieux qui ne president qu'a telle ou
telle partie de la nature deviennent ses enfans
ou ses vassaux, exposés a sa colere. Il est le
plus redouté et le plus honoré des Dieux.

Telle est la veritable origine du culte qui
lui a été rendu par tout.

Il est fort incertain si le Dieu adoré dans
les Sables de la Lybie a été le même que Jupiter.
2 lignes biffure. Les Grecs l'ont
appelle Jupiter parce qu'ils avoient le foible
de rapporter tous les Dieux etrangers aux leurs.

459. En quel sens Saturne avaloit il ses
propres enfans? au même sens que Coelus
enterroit les siens, dans un sens allegorique;
c'est qu'il ne vouloit pas qu'aucun autre des
enfans du Ciel, lui disputoit l'empire sur les
immortels; cette figure etrange est fondée sur l'equi=
voque de κρονος avec γρωνος une fosse,
un gouffre, qui avale tout et même des
pierres.  Ceci n'a aucun rapport a
l'usage des victimes humaines offertes a Saturne
par les Tyriens, car cet usage fut ignoré
des premiers Grecs sous Saturne.

<124> 464 Le Poëte tourne ici en prediction ce qui
arriva dans la suite; et il suppose que Saturne
quoique Dieu Souverain est soumis aux Loix
du destin. 

467.-184. Cette narration prise historique=
ment n'offre que des absurdites, une Reine qui
se sauve de Grece en Crete dans un temps
ou il n'y avoit ni commerce ni navigation ni
agriculture, un roï qui a la cruauté de
devorer ses propres enfans dans la crainte
d'etre detroné, dans un temps ou la royaute
n'etoit pas encor une dignité asses brillante
pour l'acheter par des crimes.

477. Il faut lire ici λυτιον latibulum
de l'Hebreu lut caché Etym (243); la ressem=
blance de ce mot avec λυκτος ville de Crete
a fait dire que Rhea s'etoit allé cacher
dans cette Isle, traddition qui n'etoit pas
admise partout. 

480 Rhea avoit confié Jupiter enfant
aux Curetes appellés aussi Corybantes ou
Dactyles Ideens. Que signifient ces noms?
Strabon  rapporte la dessus diverses
tradditions. κυρετοι prononcé ensuite
κρητοι designe des elevations ou mon=
tagnes Etym (300) δακτυλοι a signifié
en general quelque chose de pointu. Etym
(174)
ιδα est le nom generique de monta=
gne Etym (98) Dactyles Ideeens etoient donc
des promontoires couverts de forets; un de
ces Dactyles même se nommoit Ida
γαργαρα est le sommet du mont Ida, et
Etym (300) comme il dominoit sur toutes les montagnes
voisines, la fable a dit que Garganes, ou
-is, etoit le Roi des Dactyles Ideens.

Les Corybantes n'etoient autre chose encor
que les promontoires de Crete qui ressembloient
aux doigts de la main extremement ouverts,
ou aux differentes pointes d'une crete de coq,
ensuite l'ignorance du sens de ces noms les
a fait prendre pour celui des premiers ha=
bitans de l'Isle de Crete.

<124v> Rhea confia Jupiter cad. la pluie a ces Dac=
tyles, cad. ces promontoires; cela ne sign. autre
chose si non que c'est de leurs sommets
que s'elevoient les vapeurs ou nuages qui for=
ment la pluie. Jupiter ainsi elevé etoit a l'abri
des poursuites de κρονος cad. des gouffres
profonds qui engloutissent les eaux.

Ces Dactyles Ideens selon le rapport de Diodore
passoient pour inventeurs du feu apparem=
ment parce qu'on y avoit vu quelque aurore
boreale.

483. Le titre θιαιγειος donné a Jupiter aiant
ete confondu avec le mont Egée de l'Isle de
Crete, on a dit que Jupiter avoit été nourri
sur cette montagne. Par un nouveau
contresens, on a cru qu'il faisoit allusion
au Subst. αιγες les chevres, et l'on a dit
que Jupiter avoit ete nourri par la che=
vre Amalthée sur le mont Egée. 

Il se peut aussi qu'on ait supposé Jupiter
né et elevé en Crete parce que son culte a
commancé dans cette Isle, et que les Cretois
le reveroient deja sous le nom de ζευς pen=
dant que les Grecs ne connoissoient encor
que Chronos, qu'enfin les Cretois furent
les premiers qui firent connoitre aux Grecs
son nom et son culte; mais plusieurs au=
tres peuples revendiquoient aussi cet honneur,
preuve que tout ce qu'on a dit de ce Dieu
etoit pure fable, et que les pretentions de tous
ces peuples etoient egalement appuiées sur
des noms de lieux.

484. Qu'est ce que cette pierre devorée par
Saturne? Le clerc veut que cait été un
enfant, par l'equivoque de 1 mot illisible avec 1 mot illisible
mais puisque la scene a été en Grece, il
faudroit montrer l'equivoque dans la
langue Grecque.

Bochart veut que cait ete une pierre consacrée
a la memoire d'un evenement, comme celle
que Jacob nomme Bethel d'ou on a fait
βαιτυλοι Bethyle.

<125> Ce mot en Grec d'orïgine composé de
la partie, augment βα, βαι, βοις et
de τυλος pierre bosse calleuse Etym (189) il signifie
grosse pierre; d'ou vient que la ville de
Pyle dans la Messenie etoit nommée
βαιτυλος: ainsi ce mot ne vient point
de l'Hebreu Bethel inconnu aux Grecs. 

485. Saturne occupoit dans la Religion
Grecque le meme rang que Jupiter tint
dans la suite, en qualité de Roi des Dieux.

492.-497 Quel est ce Pytho? c'est la ville
Delphes.  ce nom signi=
fie lieu profond, une nymphe des eaux. 
Il a designé d'abord la caverne
d'ou parloient les oracles; d'ou Appollon
fut appellé Pythien, sa metresse Pythie,
et toute vapeur semblable a celle qui sortoit
de cette caverne. toute divination, a été
appellée Esprit Pythïen; c'est faussement
que tout ceci a été rapporté au Serpent
Python. Etym. 146.

Ainsi Pytho est le synonime de δελφος
le ventre, et δελφοι Delphae nom donné
a la ville a cause de sa situation: source
de la fable obscene sur la maniere dont
la Pythie recevoit l'enthousiasme.

En disant que Jupiter planta auprés
de Pytho la pierre devorée par Saturne
Hesiode indique en termes obscurs l'etablis=
sement de l'oracle de Delphes, qui fit cesser
le regne de Saturne et etablit celui de
Jupiter.

Ce qui contribua le plus a faire regarder la
ville de Delphes comme un lieu sacré ce fut
sa situation singuliere sur le penchant du
mont Parnasse, les rochers affreux dont elle
etoit environnée, aussi bien que la caverne
dou l'on croioit qu'il sortoit une exhalaison
divine.

<125v> Ces rochers Le respect quils avoient concu pour
loracle, leur persuada que c'etoit Jupiter lui même
qui avoit planté ces rochers en terre comme
un monument de sa victoire sur Saturne;
on publia ensuite que la terre les avoit fait
avaler a Saturne, mais qu'il avoit d'été obli=
gé de les revomir.

Le mot chronos designe un lieu profond
un antre. Ainsi cette phrase, la Terre prit
une grosse pierre &c, a pu signifier en ancien
Grec, la terre posa un rocher en forme
de langes ou de ceinture auprès de la
caverne; dela le reste de la fable.

Ainsi 1 mot biffure l'etablissement du regne de
Jupiter se trouve ridiculement confondu
avec la topographie de la ville de Delphes:
on a vu la même chose dans la fable de
Uranus et de Calus, Chronos. 

Apollon s'etablit dans la caverne après
avoir tué le Dragon qui gardoit l'oracle
δραχων pris pour τραχων ne designe
ici que l'enceinte de rochers dont Delphes et
la caverne etoient environnées. C'est la même
fable que celle de Rhea.

501 Ces fils du Ciel, Coeus, Creus, Japetus 
qui ne sont autre chose que differens
noms du Ciel, ne furent point honorés sous
Saturne, mais sous Jupiter ils reparurent
comme sortis de prison.

503. Ici le Poëte met au nombre des enfans
du Ciel les Cyclopes parceque leurs noms
expriment des Phenomenes du Ciel. Ce sont
eux qui ont donné le tonnere a Jupiter. 

506. Jupiter n'est Souverain que parcequ'il
peut se faire craindre; idée basse et servile.

507. Japetus c'est l'argile , il epouse
κλυμενη fille de l'ocean Etym (235); parceque pour paitrir
l'argile, il faut y meler de l'eau. D'autres supposent
Clymene epouse du Soleil et mêre de Phaeton
parce qu'ils rapportent le nom a κλυω briller Etym (1 mot biffure).

<126> Selon Varron , Japetus epouse
la nymphe Asia.  cad. la boue, le
limon, Etym (104).

ατλας de ατλαω αντλεω-αω puiser
verser et faire des efforts pour soutenir
Etym. (165). De ce double sens on a forme
deux sens: la 1° que les Pleiades, constel=
lation qu'on croioit pluvieuse, etoient filles
d'Atlas, la 2° que Atlas soutenoit le ciel.

510. Qui est ce μενοιτιος fils de Jape=
tus, l'argile et de Clymene les eaux? Selon
Appollon , il gardoit les boeufs de
Pluton; ces boeufs de Pluton, sont les
eaux d'un lieu profond. Il s'agit donc ici
d'un canal fait de terre glaise, ou d'un
torrent creusé dans la glaise. En effet
μενος sign. couram. ιτιος sign. bruiant
de [ιτη bruit. Etym (202) ainsi μενοιτιος
sig. un courant d'eau qui fait grand
bruit. Jupiter  la precipite
dans l'erebe, cad. que la pluie, a force de
creuser, a fait entrer ses eaux dans un
gouffre, comme cela arrive aux torrens
formés dans la terre marneuse. On lui
attribue des violences de la ferocite a cause des ravages
causés par les eaux, et du double sens
du mot μενος.

511 Promethée sign. ce qui est bien detrem=
pe, Epimethee ce qui l'est peu Etym (116),
on comprend pourquoi ils sont fils de Jape=
tus l'argile, et de Clymene l'humidite.

Eschyle dans son Prome=
thée le fait aussi fils de
Themis cad lhumi=
dite. 

Ces mots pris d'une autre origine signifient
sage et insensé Etym (121). Ce double sens
est la source des fables suivantes.

Rien de plus absurde que ce que dit Bo=
chart pour prouver que Promethée est
Magog Pere des Scythes ou Tartares, dont
la posterite demeure sur le mont Caucase.

<126v> On ne le connoit que parce qu'en dit Hesiode
qu'il fut le premier que fut assès fol pour
epouser une femme, trait de Satyre qui nous
fait comprendre que cest ici un personage alle=
gorique comme tous les autres.

517. Atlas est, selon les mytologues, la chai=
ne des montagnes d'Afrique qui semble porter
le Ciel a cause de sa hauteur; on en a fait
un personage, on la placé près des Hesperi=
des parce quil est au Sud-ouest de la Grece;
il a tiré son nom d'un Roi fameux dont
parle Diodore , mais dont 1 mot biffure
lhistoire porte tous les traits de faussete.

Il n'est pas a presumer que les Grecs connus=
sent seulement ce mont Atlas.

Ches eux Atlas est venu de αντλαω
puiser et porter; ce mot exprime un pui=
seur d'eau, ou celui qui porte sur ses epau=
les; ουρανος sign. aussi un vase d'eau
de quoi sagit il, d'un homme puiseur d'eau
qui la porte dans un vase sur sa tete et
sur ses bras: voila le pretendu mont
Atlas chargé du Ciel.

Comme ηρακλεης une digue un aqueduc
a souvent servi a faire venir des eaux
dans une ville et a dispoensé les habitans
d'en aller chercher sur leurs epaule, cela
a fait dire que Hercule avoit dechargé
Atlas de son fardeau. Voila pourquoi Atlas
a ete placé près de Hesperides qui sont des
fontaines. Les nymphes Atlantides ne sont
que des eaux ainsi elevées par des digues
et des canaux. Leurs noms propres sont
des noms de fontaines, de ruisseaux, d'aque=
ducs. L'on en a fait la constellation des
Pleiades a cause de Pleioné leur mere
fille de l'ocean, ou parce qu'on a cru que
sous cette constellation le temps etoit ordi=
nairement pluvieux.

<127> 521-534. Rien de plus absurde que tout ce qu'on
a dit sur lhistoire du supplice de Promethée
et de sa delivrance par Hercule. Ce Promethee
a osé disputer d'habileté contre le souverain
des Dieux 1° en invantant les arts, surtout le
secret de faire des figures humaines 2° en
rendant aux hommes l'usage du feu que
Jupiter leur avoit oté, 3° en leur apprenant
a garder pour eux la meilleure part dans les
sacrifice. 1 mot biffure Tout cela ne sign. autre
chose si non que la terre ou pâte detrempée
a fourni la matiere des premieres statues;
quelle a servi a faire les foyers ou l'on
a conservé le feu, enfin quelle a ete petrie
en matiere de gateau pour etre offerte aux
Dieux a la place des victimes sanglantes.

Allegorie Satyrique sur la maniere
dont le culte fut reglé sous le regne
de Jupiter, la 3e epoque de la Religion
Grecque, ou il ne sagit plus encor que
de Dieux de même espece que sous la
precedente; Etres imaginaires et allegori=
ques, mais neanmoins differens des Titans
du regne precedent qui presidoient aux
diverses parties de la nature considerés
physiquement; puisque ces Dieux nouveaux
doivent regner sur les arts et les talens par
lesquels lhomme devient maitre de la nature
et qui le supposent deja policé. Ainsi Vesta
preside au foyer et a la Societé domesti=
que; Ceres a l'Agriculture. Junon aux
Mariages. Pluton aux funerailles, Neptune
a la navigation, Jupiter a la Societé civile
disposant a peu près de tous les evenemens
le maitre des Dieux et des hommes.

Il est a remarquer que plusieurs Divinites
qui avoient paru sous Cœlus, ont reparu
sous Chronos, et doivent reparoitre sous
<127v> sous Jupiter, sans autre changement que
le nom, et que Jupiter dans le fond est le même
personage que Chronos et Cœlus.

Cependant la filiation des Dieux anciens faisoit
principalement allusion a une physique gros=
siere et sauvage, aulieu que celle des Dieux
nouveaux a ordinairement plus de rapport a
lhistoire de la Religion; cest l'etablissement
successif de leur culte; presque tous sont
enfans de Jupiter parce que leur culte a éte
etabli sous ce nouveau regne: mais par=
tout cest toujours même style, memes
equivoques, meme abus des mots.

<128> Chap. XIII.
QuatrTroisieme epoque

de la Religion Grecque, regne de Ju=
piter et des autres Dieux; etablissement
des Sacrifices.

C'est ici a proprement parler que commance
le Polytheisme et l'Idolatrie. Les Genies
inferieurs auxquels on supposoit que la
Divinité supreme avoit confié l'admini=
stration des diverses parties de la nature,
n'avoient point encor reçu des hommages
religieux. Mais l'idée que ce Dieu Sou=
verain avoit remis entierement le gou=
vernement de toutes choses a ces Ministres
subalternes, porta peu a peu les peuples
a donner a ceux ci leur confiance
et a leurrendre leurs hommages au
prejudice du culte qu'ils rendoient
auparavant au Monarque seul.

Jupiter fut d'abord le Dieu souveraïn
comme l'avoit été Saturne; mais a force
de partager son autorité avec d'autres
Dieux, il lui en demeura très peu, et
son empire fut en quelque sorte relegué
dans le ciel.

Tous les Dieux grands et petits, vieux
et nouveaux, reçurent a la fin le même
culte, ils eurent des statues, des temples,
des autels, des sacrifices.

Et ce qu'il y a de sïngulier, la Religion
acheva de se corrompre chès les Grecs preci=
sement lorsqu'ils vinrent a se civiliser
par la culture des arts; a mesure qu'ils
acquirent de nouveaux talens, ils forge=
rent de nouveaux Dieux pour y presi=
der. Lorsque leurs premiers ecrivains
parurent, les fables etoient deja si ancien=
nes et accreditées que personne ne s'avisa
de reclamer contre l'erreur, elle fut fut
<128v> suivie si aveuglement par les Poëtes, qu'on
ne sauroit etre trop surpris que ce qu'ils nous
disent de la dapres la traddition vulgaire puisse nous
montrer encor quelques vestiges de la religion
primitive, et nous montrer indiquer la maniere dont
l'Idolatrie s'est etablie. C'est la fable qui
a produit le polytheisme des Payens, comme
c'est l'histoire de la Creation fidelement conser=
vee chès les Juifs qui les en a garantis.

535-560. Hesiode parle ici de la revolution
qui a produit la 3e epoque de la Religion Grecque,
et qui a commancé avec les premieres Societés
politiques, a la naissance des villes et des arts.

Plusieurs choses le prouvent:
1° C'est a Sicyone qu'arrive la dispute entre
les Dieux et les hommes, parce que cette ville
ancienne avoit brillé la premiere par la
culture des arts, sejour convenable a Prome=
thée qu'on en suppose l'inventeur.

2° C'est la que Vulcain fit une statue par=
faite, parceque la Sculpture ne fut executée
nulle part avec plus de perfection.

3° A Sicyone a commancé le premier etat
monarchique  et Promethée
est appellé Roi: par cons. le regne de
Jupiter est posterieur a la culture des arts
et a l'etablissement des Societés politiques.

4° Epimethee epouse la premiere femme,
parce que ce fut alors qu'on fit des Loix
sur les mariages pour les assujetir a des
formes.

5° Dans ce même temps fut reglée la
maniere d'offrir les sacrifices, par un repos
de la chair et la combustion des os.

Ainsi a la fondation de Sicyone, naissent
dans la Grece la police et la religion publique.

Dans Eschyle, Jupiter est peint comme un
usurpateur qui a reduit les Dieux et les hom=
mes en esclavages, et Promethée vante les services
qu'il a rendu a ces nouveaux Dieux, mais
surtout aux hommes par linvention des arts. 

<129> C'est a l'argile detrempée dont on a fait
des statues pour les adorer, que les Dieux
sont en quelque sorte redevables de leur
culte: c'est a elle que des hommes doivent
la construction de leurs maisons, de leurs foyers,
&c.

Le regne de Jupiter et des autres Dieux est
donc de même date que l'invention des arts,
et l'institution des Societés dans la Grece,
et tout ce regne n'est que pure allego=
rie.

Comment Promethée offroioit un Boeuf
puisque dans les premiers temps l'on noffroit
aux Dieux que des fruits et des gateaux?
Quelques uns croient qu'avec de la pâte
on faisoit des figures d'animaux pour
les offrir au lieu des animaux même.

Cecrops en offroit nommés a cause de leur
1 mot biffure figure βους  Promethée
ou la pâte detrempée servoit a cet usage;
voila pourquoi on lui attribue une trom=
perie dans l'oblation des sacrifices.

563. Le vol du feu par Promethée
n'est pas un grand mistere; il ne s'agit
que du secret trouvé pour lors de conser=
ver le feu et de le transporter sans
danger. Jupiter l'avoit 1 mot biffure oté aux
hommes. cad. que le feu allumé
au grand air etoit souvent eteint par
la pluie; on a feint que Jupiter avoit
fait cela par vengeance, et parce que
les hommes n'offroient aux Dieux que de
simples gateaux, et n'avoient plus besoin
de feu pour bruler la victime.

1 mot biffure Promethée  trouve le moien
de conserver le feu dans une tige de
ferule
, cad. une plante creuse remplie
d'une moëlle que le feu consume lentement
et qui peut tenir lieu d'agaric ou d'ama=
dou; on envisageoit cette decouverte
comme très ingenieuse, caracterisant
<129v> lhomme d'esprit, ce qui repond a un des
sens du nom de Promethée.

Promethée attaché a une colonne, selon
d'autres, au mont Caucase, enchainé selon
Apollodore par Vulcain, offre une circons=
tance nouvelle. 1 mot biffure Le mot κιον signifie
paroi, cloison, καυκασος designe un
contrefeu. Etym. 1 mot biffure (287). On ne peut
prattiquer un foyer dans des hutes de bois
sans enduire de glaise la paroi contre la=
quelle on veut le mettre, comme font encor
les charbonniers. Voila ρπομηθευς la terre
detrempée attachée a κιον, et a καυκασος
on a mis auprès de lui, non pas αιετος
une aigle mais αιθον du feu selon
Hesychius. Ce feu ronge et calcine
le bas de cet enduit, et le fait tomber, et
il faut le renouveller souvent voila le
supplice de Promethée qui recommance a
chaque instant. ηρακλεης une cloture
plus ferme, une maconnerie a dispensé
de l'usage de la terre glaise, c'est Hercule
qui a delivré Promethée de son supplice.
Telle est la fable qu'a fourni le double
sens du nom.

571. C'est ici une allusion a l'art de faire des
statues porté a la derniere perfection par les
sculpteurs de Sicyone. Vulcain formant une
femme de terre, c'est un ouvrier en bronze qui
fait le moule d'une statue. Minerve qui tra=
vaille a l'orner, cest l'adresse quil faut pour
observer les proportions et imiter la nature.

Le Poëte peint letonnement dont les Grecs furent
saisis, a la vue d'un tel ouvrage. Ce qu'il ajoute
que de la est née la pernicieuse vengeance des
femmes, n'est qu'un trait de malignite contre
le sexe.

C'est Promethée qui avoit fourni le premier la
matiere des statues, parce que les premieres furent
<130> faites d'argile detrempé, et comme il falloit
les cuire au feu, Vulcain est ici regardé comme
l'agent principal. Selon Hesiode 
Epimethée reçut la statue de Pandore
que Promethée lui avoit commandé de rejeter.
Promethee est l'argile detrempée; pour lui
donner de la consistance, il faut l'amener
a Epimethée, cad. a un etat moins detrem=
pé: cette operation ne peut se faire que par
Vulcain cad. le feu. Comme Epimethee
sign. aussi un sot, on a dit par sarcasme
que Epimethée avoit fait la sottise de rece=
voir une femme et de la garder.

617. Ici le Poëte n'apprend point quelle est le
sujet de la colere de Jupiter contre ces Geans.
Jupiter les enchaine et bientot Cottus l'en
remercie et ils combattent pour lui. Jupiter
les renvoie dans leur prison, et le Poëte les ap=
pelle fideles satellites de Jupiter. Il ny eu
point de liaison en tout cela.

625 Apollodore  dit que Jupiter avant
de les delivrer tua leur gardienne
Campé, cette campé ne sign. autre chose
que lien. Etym. 270.

629. Cette guerre imaginaire, qui n'est autre
chose qu'une revolution arrivée dans la Religion
Grecque, eut pour issue le detronement de 1 mot biffure
Chronos, cad que Jupiter devint le Dieu
principal des Grecs, comme Saturne l'avoit eté
avant lui; le vrai Dieu adoré auparavant
sous les noms d'ouranos et chronos, cessa
d'etre connu; Jupiter ne differa plus des au=
tres Dieux que par un pouvoir plus etendu,
le polytheisme et l'Idolatrie devinrent la seule
Religion des Grecs.

630 Titanus Dii sont ici les anciens Dieux
les Dieux des ages precedens. 
3 lignes biffure

<130v> 632. Tous les noms de montagnes sont ordi=
nairement le terme generique de hauteur
ou elevation. Tels sont Othrys et Olympe.

633. Sous Saturne et Cœlus les Dieux subal=
ternes etoient nommés simplement Titanes
Etres superieurs, parce que les hommes n'atten=
doient de biens que du Dieu Souverain dont
ils etoient les ministres, et auquel seul ils
offroient leurs encens. Sous Jupiter, ils furent
appellés Dii datores bonorum, on attendoit
les bienfaits d'eux, et tel etoit l'unique motif
de leur culte, 5 mots biffure
3 mots biffure
; on ne s'avisoit pas de deman=
der a de tels Dieux la sagesse et la vertu qu'ils
ne possedoient pas eux mêmes. Dela 1 mot biffure
la fierté du stoicien qui disoit que le Sage
est plus grand que Jupiter, et la priere
dont parle Horace. 

Mais que peut sign. ce campement de Jupiter
sur le mont Olympe; il en est de ceci comme
de la cour qu'il y tenoit avec les Muses 
même au sommet couvert de neïge. 
Ce n'est ici qu'une confusion grossiere
d'olympe ciel et montagne. Les Titans
ne sont supposés campés sur l'othrys que
pour les placer en face des Dieux retranchés
sur l'Olympe. Les peuples de l'Indostan
ont aussi une traddition de Geans ou de
montagnes revoltées contre les Dieux
par tout la mytologie est a peu près la
meme; 7 mots biffure

636. Par ces 10 ans le Poëte insinue que
la revolution arrivée dans la religion ne se
fit pas tout d'un coup.

639. on convient que le Nectare etoit une
liqueur. 1 mot biffure Mais le mot βροσια
paroit composé de α augment. et βρωσις
cad. nourriture excellente, delicate. Etym.
(3 chiffre biffure).

<131> 644. Ces mêmes partisans de Jupiter sont
appellés  enfans de Saturne et de Rhea
c'est donc 1 mot biffure toujours ici le Ciel et la
terre, personages allegoriques.

653. Ceux que Jupiter a voulu attirer a son
parti, il les a tirés de l'obscurité en partageant
avec eux les honneurs divins.

665. 2 mots biffure Dans la description de ce combat 4 mots biffure
2 lignes biffure
tout
demontre que c'est une allegorie; tout y
aboutit a obscurcir les Titans par la
multitude des traits, et les releguer dans
les tenebres.  Cela n'a pas cependant
empeché que Saturne et plusieurs Titans
n'aient encor recu un culte en Grece et
ailleurs, mais ils ont été beaucoup moins
connus.

697. Titans ne sign. donc pas enfans
de la terre, quand on parle des Dieux;
autrement l'epithete terestre seroit ici
inutile.

720 Hesiode se representoit la terre comme
une croute extremement large et eparse
environnée par tout de l'ocean, qui couloit
autour comme un grand fleuve et qui
touchoit immed. le ciel par le bord opposé
a la terre; que sous cette croute, il y avoit
un espace egal a celui que nous voions
sur nos têtes, jusques a la voute du ciel,
espace absolument vuide et obscur.
Cest a peu près l'idée que le peuple se forme
de l'enfer.

775. on croioit l'eau du Styx mortelle;
on la regardoit a cause de cela comme une
fontaine des enfers; peut etre aussi parcequelle
se perdoit sous terre. 

779. Ces colomnes d'argent sont apparemment
des stalactites brillans qui se formoient dans des
grottes souteraines ou l'eau tomboit des rochers
<131v> 793 Une eau extremement froide cause souvent
une extinction de voix et même une maladie
a ceux qui en boivent quand ils ont chaud. Ce
Phenomene put paroitre singulier aux anciens
Grecs et ils l'opinion setablit parmieux que
leau du Shyx produisoit cet effet particulierement
sur ceux qui se parjuroient. 

806 ωγυγιον pourroit etre traduit abun=
dantem, puisque γυγαιος est un Lac de Ly=
die.

814 Les Titans ne sont supposés dans l'obscu=
rite, que parce qu'ils etoient oubliés ds le culte.

815 Il est surprenant que ces Geans soient
aussi relegués dans le Tartare . Le
sejour qu'on leur assigne fait allusion a
leurs noms κοττος repond a κωθαν grand
1 mot biffure vase, profondeur (Etym. 274), γυγης a γυγαιος Lac.

817. Ce mariage est fondé sur la signifi
de βριαρεως compose de βρι augment. et
αρεως humide et celle de χυμο πολος
de κυμος flot et πολος ce qui domïne,
quasi dominans fluctibus. Etym. 221-157
1 mot biffure.
De ces noms allusifs aux eaux
on a fait des Geans a la faveur de l'equivoque.

820. Jupiter a chassé du Ciel les Titans par=
ce quils nont plus été au nombre des Dieux
principaux qui habitent le Ciel.

821 Il sagit d'un volcan et même de lEtna
car Apollod.  dit que la Terre enfanta
Typhon en Sicile. Eschile dans le Promet.
dit que Typhon est enterré sous l'Etna, et les
Poëtes ont appellé les montagnes a Volcan
Typhœi cubilia. 

<132> On comprend cela par la description
1° Typhon nait de la terre et du Tartare
parceque les volcans sortent des entrailles
de la terre par les montagnes et y font de
profondes ouvertures.

2° Ses tetes de serpent ou de dragon sont
les sommets escarpés d'ou sort la flamme
par la confusion de δραχνω avec τρα
χων.

3° Le feu lui sort de la gueule et des yeux
parce que l'eruption se fait ordinairement
a la cime des montagnes.

4° Il a la voix terrible &c ce sont les mugisse=
mens souterains qui precedent les eruptions
violente. La terre semble gemir &c.

5 La mer et les flots en bouillonnent, cela
se voit dans les isles voisines.

6° Jupiter foudroie Typhon, parceque
le bruit que fait le volcan ïmïte le ton=
nere et qu'il lance des pierres enflammées.
La terre continue de bruler, parceque
les volcans subsistent plusieurs siecles.

7° La terre devient liquide &c 1 mot biffure cela
a trait a ces torrens de pierres fondues
qu'on a appelle lave.

8° Typhon est l'auteur des vents orageux
parce que l'eruption est precedée par des
vents souterains; d'ailleurs le mot sign.
aussi tourbillon de vent.

9° C'est le dernier enfant de la terre, par=
ce qu'il s'est formé des volcans, ou il ny en
avoit point autrefois, c'etoit peut etre le
1 mot biffure de l'Etna au temps d'Hesïode.

Typhon est souvent confondu avec Ence=
lade, autre Geant, dont le nom sign. aussi
Volcan, de l'Hebr. Keled flamme.
1 mot illisible intus urens. Etym (287)

<132v> 831 Contradiction avec ce que le poëte dit
opera et d. 

884 cela peut sign. que ce sont les hommes
qui ont été les auteurs du regne de Jupiter
et des fonctions attribuées aux autres Dieux.

885 Il ne s'agit entout ceci que d'un nouvel
arrangement dans la religion des Grecs.

886. μητις sign. lhumidite. Jupiter etant
le Dieu de la pluie, souvent confondu avec elle,
on devoit lui lui donner l'humidite pour
epouse. C'est sont les Poëtes qui ont pris Metis
pour la Sagesse, et en ont fait descendre
Minerve.

895 Minerve chès les Latins, αθηνη chès
les Grecs, ογγα ches les Thebaïns, Neith
ches les Egyptiens, sign. la même chose, c'est
l'ïndustrie, la Deesse de l'occupation.

Dans toutes les langues etre occupé, et ou atta=
ché, c'est la même chose, tout mot primitif
qui sign. lïen, designe aussi occupation
etude, meditation, pensee ainsi αθηνη
sign. Deesse de l'occupation Etym. (179).

ογκα Deesse de l'activité Etym. (297), Neith
la fileuse, (206) 2 mots biffure Minerve
la tisseranne. Etym. 132 Il n'est pas
surprenant que 1 mot biffure la Deesse pourvue
de tels noms ait passé pour presider aux
arts, aux sciences, a la tisseranderie.

On peut expliquer par ceci l'histoire des
Mineides et d'Arachné, dans Ovide.

Plusieurs villes comme θηναι Athenae
ανθανα, ενθηναι 1 mot biffure Athena Diades
atina
en Italie, avoient pris leur nom du
mot primitif θηνω lïer (Etym. 179) mais
les Atheniens pretendoient avoir tiré le
leur de celui de la Deesse, qu'ils avoient
choisi a cause de cela pour tutelaire.

<133> Parceque ελαια a rapport a ce qui lie et
unit, conseq. l'olivier, l'olive et l'huile
furent consacrés a Minerve, et on dit que
Minerve avoit fait sortir l'olivier de terre
par un coup de pied. Cela ne sign. autre
chose si ce n'est que cet arbre et son usage
sont un fruit de l'industrie. L'huile fut aussi
consacrée a Minerve a cause du besoin que
les ouvriers en avoient pour s'eclairer pendant
la nuit.

On lui donna comme symbole une Chouette
parceque cet animal voit clair pendant la
nuit et represente ainsi les ouvriers laborieux
et les genies percans: peut etre que ce fut aussi
par le rapport de γλαυξ noctua avec
γλαυκωπις, surnom de Minerve, qui peut
signifier yeux de chouette.

Le mot εργον signifiant travail et combat,
la Deesse du travail a eu aussi dans son
departement l'art mïlitaire, ce qu'on lui attribue
sous l'epithete de Pallas Etym (156) d'ou
Homere lappelle Pallas Athené, et pourquoi
on la peint armée de la lance et de l'egide
sur laquelle fut attachée la tête de Meduse
pour la rendre plus terrible. Herodote 
dit que les femmes de Lybie portoient par
dessus leurs habits une peau de chevre sans
poil, peinte en rouge, bordée de cordelettes,
qui ressembloient a des serpens. Comme
on supposoit Minerve née en Lybie sur les
bords du Lac Triton, on crut quil falloit
l'habiller comme les femmes de ce pays la.

Cette peinture fut prise dans la suite pour
la tête de Meduse coiffée de couleuvres, et
on representoit Minerve avec cette tete sur
sa poitrine.

<133v> Lon a dit que Minerve etoit sortie du cerveau
de Jupiter, parce que l'industrie reside principa=
lement dans la tête; c'est ce que sign. son nom
τριτογενεια, capite genita, car τριτω signi=
fioit la tete chès les Athamanes et les Cretois
et en dialecte Etolien: voila pourquoi les uns
disoit quelle etoit fille de κορυφη, d'autres
de Cranaus, le crane. Etym 300. Mais Apollodore et
d'autres ont cru de la que Minerve etoit née
aupres du Lac τριτων en Afrique, et que
c'est pour cela qu'on lui avoit donné des yeux
couleur de vert de mer. 

γλακωπις peut cependant signifier yeux
pers. ou yeux de chouette 1 mot biffure Etym. (297).

On l'appelloit aussi κορυφοισια de αορυφη
la tete, et comme Jupiter etoit appellé κορυ
φαιος il n'en fallut pas d'avantage pour ima=
giner qu'elle etoit sa fille; ce qui pourroit sign.
aussi que son culte a commancé sous le
regne de Jupiter.

On consacroit le coq a Minerve εργανη ou
Minerve ouvriere, parce que le chant du coq
reveille les ouvriers; on la representoit avec
cet oiseau sur son casque. Tout a été
calqué sur des allusions.

901 Jupiter epouse 1 mot biffure θεμις la justice qui
2 mots biffure se prend ici dans le sens le plus
etendu pour l'amour de l'ordre, qui produit la
proportion et la convenance: car elle est suppo=
sée mere de ωρα opportunitas, ευνομια
bonne Loi; δικη, le Droit, ειρηνη la paix.

904. Themis est la mêre des Parques parce
qu'une des fonctions de la Justice est de distri=
buer les peines et les recompenses: cela ne s'accor=
de pas avec ce que dit Hesiode  que
les Parques sont filles de la nuit, mais il arrive
souvent aux Poëtes de se contredire, et Hesiode
d'ailleurs ne fait que rapporter les opinions
populaires fondées sur des equivoques et
des allusions arbitraires, qui desla ne sauroient
etre uniformes.

<134> 906. Il ne s'agit pas ici dela nymphe Euru=
nomé , dont le nom est tiré de ευρα
eau et νομη habitation. Etym. 219. Ce nom
est composé de ευρο qui exprime grandeur
excellence, et νομος coutume, maniere,
il sign. bené morata qui a de belles manie=
res, et ce titre convient a la mere des graces
Aglaë, Euphrosine, Thalie.

912. Il est dit que Ceres  est
fille de Saturne, soeur de Jupiter; ici on
la lui donne pour epouse aussi bien que
Junon qui est de même sa soeur. On com=
prend qu'il 5 mots biffure
2 lignes biffure
2 mots biffure. Il
n'y a ici qu'une physi=
que grossiere et de plates allusions. Que
Jupiter la pluie, epouse Metis l'humidité
Themis ce qui est liquide, Eurunomé ce
qui demeure dans les eaux, Ceres l'agricul=
ture, dont il a pour fille Proserpine les
fruits de la terre, parce que la pluïe les fait
germer et croitre, voila le fond primitif
de la fable sur quoi tout le reste a ete
imaginé!

915 Voiès ce que nous avons dit sur ψ 53.

918. Latone sign. enfantement ou fecon=
dité. 

Apollon est un surnom de Phoebus
φοιβος, απολλων.
φοιβος a differentes significations et
dela une foule de fables.

D'abord on la cru synonime a εφεβος
comme on a cru απολλων derivé de πολλος
et on a traduit φοιβος απολλων un
grand jeune homme, et on a represente
ce Dieu sous cette forme: on concoit aise=
ment pourquoi on l'a spposé né de Latone.

<134v>1 mot biffure απολλων peut se rapporter a
παλλω chasser. Etym. 156. C'est le synonime de
ιηιος bon tireur, epithete frequente du
meme Dieu; en ce sens φ. α. sign. jeune
chasseur; on comprend pourquoi on le sup=
pose frere de Diane la chasseuse, et com=
ment cet attribut est lié avec le precedent,
et a 1 mot biffure rapport aux rayons du Soleil qui sont
comme des traits lancé par un chasseur. 

3 φοιβος est ce qui donne la lumiere, le
Soleil Etym. (141) απολλων pourroit etre
pris de πολεω tourner Etym. (157). Ainsi
φ. α. c'est le Soleil qui tourne. Phebe c'est
la lune; d'ou vient qu'on donne a Apollon
Diane pour soeur.

4° φοιβος a exprimé aussi la divination
Etym (chiffres biffure) ainsi φ. α. signifiera aussi
puissant devin; conseq. on a fait presider
Apollon a la magie. Et comme la poësie
et la musique passoient pr une espece de divi=
nation, on n'a pas manqué d'associer Apol=
lon aux muses et le faïre presider a leurs
concerts.

5° Peut etre est ce parce qu'on a rapportér
απολλων a πολευω guerir Etym (chiffre biffure)
(197)
, qu'on a entendu aussi par φ. α.
un divin medecin, ou le Soleil qui guerit.

Dailleurs on sait que chès les anciens la
medecine etoit regardée comme une sorte
de magie; le peuple a toujours cru aussi
que rien n'etoit plus propre a guerir les mala=
des que de les exposer aux rayons du Soleïl.

Voila pourquoi Ph. Ap. est devenu le Dieu
de la medecine, le Pere d'Esculape et qu'on
a attribue au Soleil le pouvoir contradictoire
de tuer les hommes et de les guerir.

<135> 6° πολειν sign. aussi paitre, nourir Etym. (157) et
en y rapportant απολλων on a fait de
φ. α. un jeune Berger, et on a dit que
chassé du Ciel par Jupiter, il etoit devenu
berger d'Admete Roi de Thessalie, dont il
gardoit les boeufs. Dela nymphe Adme=
te  on a fait un Roi et les eaux
ont été changées en Boeufs. Cette fable
signifie que le Soleil banni du Ciel pen=
dant l'hyver par les nuages et les pluies
laisse glacer les eaux et les retient comme
enchainées.

Le Laurier etant un Symbole de linspi=
ratïon  il a fallu le consacrer a
Phoebus, et pour faire entendre que cet
arbre lui etoit agreable, on a composé
la fable d'une nymphe Daphné fille
du fleuve Penée, metamorphosée en lau=
rier, parcequ'il croissoit des lauriers aux
bords du fleuve.

Parceque la corneille passoit pour predir
l'avenir on a forgé une autre nymphe
Coronis dont Apollon etoit amoureux.

Ainsi tous les traits de la fable d'Apollon
s'expliquent par les equivoques de l'ancienne
Grece. 4 lignes biffure

[grec] en ancien Grec, sign. chasseuse et
accoucheuse; 1 mot biffure Diana sign. la même
chose, et la Lune qui preside aux accouche=
mens; elle est soeur d'Apollon tireur habile
fille de Latone, celle qui enfante, Dailleurs
tous les peuples ont pris le Soleil et la Lune
pour frere et soeur. A

Apollon a ete surnommé Lyceus et Diane
Lycea de λυκη la pointe du jour.

<135v> On leur attribue la punitïon de Niobé. Cetoit
un rocher du mont Sypile en Ionie. Tantale
son Pere est un marais voisin. Amphïon son
mari de αμφι. ιων etoit une eau environnante.
Les enfans de Niobé etoient les fontaines et les
ruisseaux qui sortoient du mont Sypile; ils furent
depechés dans un temps de secheresse; de la 1 mot biffure
on dit quils avoient eté tués par les
fleches d'Apollon et de Diane.

Les Grecs disoient que les habitans de la Tau=
rique immoloient autrefois a Diane tous les
etrangers. Voici l'origine de cette fable, φοιβη
signifie golphe, on donnoit ce nom au
Pont Euxin ou a quelque golphe voisin de
la Taurique. La navigation sur cette mer
etant perilleuse, on se figura que ποντος
ευξινος etoit le même que αξενος inhospi=
talié, funeste aux etrangers. De la on dit
que ceux qui passoient sur cette mer etoient
immolés a φοιβη ταυρικη qu'on prit pour
Diane Taurique.

921. L'idée du mariage de Junon avec Ju=
piter est prise de l'equivoque de ses noms.
ηρα confondue avec αηρ l'air le ciel
epouse le Dieu de l'air ou du Ciel. ηρα
feminin de ηρος, Hera Dame, Reine
a pour mari le Roi des Dieux et des
hommes, ηρα de l'orient. harah
et du Grec ηροσεν genuit, genitrix
mere, doit etre unie au Pere des hommes
et des Dieux. ηρης lumiere feu, flam=
beau, la Lune, Lucina est l'epouse du Pere
du Jour Diespiter, ηρα sign. les vapeurs
la pluie est liée a Jupiter qui en est le
Dieu.

<136> 922. ηρα mere, met au monde ηβη
la jeunesse, même rapport qu'entre Juno
et Junior. ηβη, liqueur, fille de Jupiter
et de Junon, qui donnoit a boire aux Dieux
Hebé qui rapportoit a l'eau, premiere boisson
des hommes, fut remplacée dans le service
des Dieux par Ganymede, liqueur qui
donne de la joie, boisson enyvrante qui
fut preferée a Hebé.

αρης Mars a été appellé fils de Junon, non
seulement a cause de la fierté et de l'humeur
Colere qu'on attribuoit a cette Deesse, mais encor
par une equivoque cad parce qu'on a confon=
du αρης-εος avec αρμος, αρηος arrosé,
humide: αρης pris en ce sens devoit avoir pour
parens Jupiter et Junon, Dieux de la pluie.
C'est par la même raison qu'on a dit de plusieurs
ruisseaux qu'ils etoient fils de αρης cad. d'un
lieu marecageux, ce qu'on a pris pr fils de Mars.

αρεισπαγος etoit un terrain uni et humide
au dessus d'une colline. Par equivoque on
crut que Mars avoit été jugé au tribunal
qui s'y assembloit pour un meurtre, et cela
etoit encor une allusïon a αρης sign.
fer, parce qu'on y jugeoit le fer qui avoit
servi a tuer, ou a un equivoque du
mots αρης marecageux.

924. Jupiter fit sortir de son cerveau la
respectable Pallas comme il avoit caché
Metis dans ses entrailles, avant quelle accou=
chat.

<136v> 927 Vulcain Dieu du feu est appellé par les
uns fils de Jupiter et de Junon, par d'autres fils
du Ciel ou de l'air, ce qui revient a un parce
que l'air ou le souffle allume le feu. Vulcain
ne designe autre chose que les cavités d'ou il
sort du feu, les fournaises, les volcans. Comme
les premieres masses de fer fondu sont sorties
des Volcans, on a dit que Vulcain etoit
l'auteur de la metallurgie. Ce Dieu n'avoit
ete connu et honoré que sous le regne de
Jupiter.

930. On a supposé que les Titans et les Nereides
composoient la cour de Neptune.

934. Mariages imaginaires fondés sur des
equivoques; de κυπρις Venus confondu avec
κυπρος le cuivre et αρης le fer avec Mars.
Il est fut dit de Vulcain ειργαζετον τον κυπρον
il travailloit le cuivre, on entendit cela de
son commerce avec Venus: il fut dit qu'il avoit
trouve le secret de souder αρης avec κυπρον
on crut qu'il avoit decouvert 1 mot biffure l'intri=
gue de Mars avec Venus. Venus avoit epousé
Mars parce que le fer succeda au cuivre
dans l'usage.

937. αρμονιη proportion, concert, elle
est fille de Venus ou la beauté, il seroit mieux
dit quelle en est la mere.

938. On suppose ici que ερμης est fils de Maia
parce que [grec] sign morceau et Maïa la
même chose; Dans un autre sens Mercure est
fils de Jupiter, parceque son culte n'a commancé
qu'avec celui de Jupiter. Hermes signifie aussi
coulant, et en ce sens il a Jupiter ou la pluie
pour pere, et pour mere. Maia, l'une des Atlan=
tides, une fontaine ou aqueduc.

<137> Chap. XIV.
Cinquieme Partie
Heros placés au nombre des Dieux
IV° epoque de la religion Grecque.

Ceux qui ont passé pour des heros mis
au nombre des Dieux ont été appellés
aussi la plupart fils de Jupiter, parce qu'ils
ont commancé a etre connus et honorés
sous son regne, et qu'ils ont recu de lui
leurs emplois. 

Ces Dieux font tous allusion a des talens
des usages qui n'ont pu etre familiers aux
anciens Grecs, ce sont les Dieux de la Grece
devenue moins barbare.

2 lignes biffure Après
tant de fables et d'etres imaginaires personi=
fies, quelle foi ajouter a ce que les Poëtes
racontent des pretendus Heros qui ont vecu plusieurs
siecles avant eux. Strabon a observé
l'allusion evidente du nom des Heros d'Ho=
mere avec les noms propres des lieux d'ou
il les fait partir; il en a bien vu l'origine
des fables. Quelque respect qu'on ait eu
pour les archives d'Homere, a cause dela
vraisemblance qu'il a scu observer dans
ses narrations, d'autres Poetes l'ont contre=
dit, en suivant des tradditions differentes,
lorsquelles pouvoient flater les preventions
de leurs concitoïens. Tout ce qui a precedé
la guerre de Troïe, et toutes les fables n'ont
eté que de pur jeux d'imagination.

5 mots biffure Qu'a ete le fameux Hercule?
1 ligne biffure
Herodote en fait un Dieu d'Egypte et de Phe=
nicie, les Grecs en font un Dieu issu de Parens
Grecs. Les uns sacrifioient a Hercule Dieu,
d'autres a Hercule Heros. Il peut y avoir eu
un ou plusieurs Heros appellés Hercule, mais
<137v> leur Histoire est toute allegorique; ce 1 mot biffure nest
autre chose que le detail des travaux que les premiers Colons
de la Grece ont été obligés d'essuier pour rendre
ce pays habitable.

Le Culte de Bachus 1 mot biffure etoit d'origine Phenicienne;
1 ligne biffure
1 mot biffure,
mais la fable forgée sur son cen=
te n'est qu'une allegorie sur la maniere de
cultiver la vigne et de faire le vin; 1 mot biffure
2 lignes biffure

490 1 mot biffure Il n'y eut peut etre jamais d'homme
dont le nom propre fut Cadmus; ce qui est
dit que Cadmus apporta les Lettres des Pheni=
ciens en Grece, peut s'entendre sïmplement d'un
homme venu d'orïent, un chef; l'etablissement
du Cadmus Phenicïen en Boetie peut n'etre
qu'une fable. Cadmus sign. elevation,
montagne. Semele sign. colline. 
Dela Semele fille de Cadmus,
et Bachus fils de Jupiter et de Semele,
parce que le vin est fils du Ciel et des collines
Bachus amat colles.

2 mots biffure Ce que dit Hesiode qui etoit Beotien, il
le dit d'apres une traddition de son pays
ou on honoroit Cadmus comme fondateur
de Thebes et ayeul de Bachus. Cela pou=
voit signifier qu'un navigateur d'orient
avoit enseigné aux Grecs l'art de cultiver
la vigne. D'ailleurs Bacchus n'a jamais
recu d'autres noms que des noms relatifs
aux liqueurs enyvrantes et ce qui prouve
quil n'a jamais été qu'un personage allego=
rique. Tels sont les noms διωνυσος; βαγχος,
&c. Toutes les fameuses conquetes attribuées
a Bachus dans un temps ou il etoit impossible
d'en faire, ne sign. autre chose que les ravages
de l'yvresse sur les hommes. Les divers Bachus
ne sont que les diverses boissons enyvrantes
<138> dont les hommes ont fait usages; les cornes
etoient le signe des premiers Vases dont les
hommes se sont servi pour mettre des liqueurs
car dans les langues orientales le mot qui sign. corne
sign. aussi vase, cornu olei. Les fêtes
et les mysteres de Bacchus ne furent dans
l'origine que des fêtes de vendanges: peu
a peu on vint a imiter l'yvresse, et la joie
degenera en licence.

945 Aglaë sign. la beauté aussi bien que
Venus que les autres Poëtes donnent pr epouse
a Vulcain: αγλαια sign. aussi la lumiere,
elle est epouse du feu.

947. Ariadne epouse de Bacchus ne
marque autre chose que l'abondance du
vin qui croissoit dans l'isle de Naxos con=
sacrée a Bacchus, de αρι augment. et
et αδην abondamment: l'immortalité
d'Ariadne suppose que cette abondance a
été toujours la même. Elle est fille de Minos,
parce que μινωα sign. un plant de vignes
fort abondant. C'est le même que Minos
Roi de Crete.

950 Hercule a epousé dans l'olympe la
belle et sage Hebé, pour faire entendre que
Hercule a été rajeuni dans le ciel.

956 περσηες ou περσιον est la plante
appellée Solanum marinum, la morelle,
transformée en nymphe fille de l'ocean
fille de epouse du Soleil, parce qu'elle ne croit
que dans les lieux exposés au Soleil et que
περσης sign. la chaleur ; elle est
mere κιρκαια Circæa qui est aussi une
espece de Solanum, dont le Poëte fait une
nymphe, c'est ce que nous appellons la mandra=
gore dont le suc rend l'homme abruti, et dela
est né la fable de la fameuse magicienne
Circe.

<138v> On n'a pas manqué de placer Circé dans la
ville d'Italie appellée Circeii parcequelle etoit
environnée d'eau, d'ou vient que cette isle se
nommoit aussi αιαιη Æœa; nom d'une
autre isle dans la colchide, environnée des
eaux du Phase. Dela vint que Circé a été
transportée en Italie, et c'est la ou les compagnons
d'Ulisse furent changés en animaux.

1 mot biffure La fraternité d'Æetes avec Circé
n'est appuiée que sur la ressemblance du
nom avec αιαιη demeure de Circé, et
peut etre de ce qu'on disoit de la Colchide
qu'elle etoit fertile en poisons et en magi=
ciens. αιητης peut venir aussi de αιθω
bruler, nouvelle raison pour dire que ce
Roi etoit fils du Soleil et frere de Circé.

958 ιδυια est une nymphe des eaux 
on lui fait epouser Æetes confondu avec l'isle
Æœa. On sent aisement que tout est fabuleux
dans lhistoire de la fameuse Medée; fille d'une
nymphe, soeur d'Absyrthus riviere; elle ne
peut etre qu'une fontaine qu'on croioit en=
chantée ou ensorcelée: μηδεια vient de
μαδαω madeo; mais en le prenant de
μεδω impero, on en a fait une Princesse
puissante qui commandoit même a la nature.

963. Il est evident que le Poëte s'adresse a des Intelli=
gences identifiées avec le Ciel, la mer &c.

965 La posterité des Deesses doit etre prise dans le
même sens que celle des Dieux; on a supposé qu'elles
avoient eu commerce avec des hommes sur de pures
equivoques ou des raïsons physiques mal enten=
dues: 6 mots biffure
2 mots biffure
.

969. Ceres le bled, mariée a Jasius lhumi=
dite, enfante Plutus, une recolte abondante
cela se passe en Crete, a cause de son nom
de fertilite, ou parce qu'il y avoit quelque lieu
nomme Jasius.

<139> 975. Toute l'histoire de Cadmee et de sa famille
n'est qu'une description malentendue de Thebes
et des environs, suivant Apollodore.

καδμος sign. hauteur; ce nom fut donné
a l'eminence sur laquelle on batit la citadelle
de Thebes appellée Cadmeia.

Cadmus avoit epousé αρμονιη jonction
assemblage, cad que le mont cadmus for=
moit une chaine, une suite de plusieurs au=
tres montanges: elle est appellée fille de
Venus, parce que αρμονιη signifie souvent
un bel ordre, beaute.

Cadmus etoit fils de 1 mot biffure αγηνωρ, elevé sur
les autres et de τηλεφασσα qu'on voit
de loin; deux epithetes données au mont
Cadmus et prises ici pour ses Parens.

Une riviere appellée 1 mot biffure φοινιξ couloit
pres de Thebes, et on appelloit φοινικια
la contrée quelle arrosoit; dela la fable
d'Agenor Roi de Phenicie et de l'arrivée
des Pheniciens dans la Grece.

Cadmus, dit on, fut obligé par son Pere
d'aller a la poursuite d'Europe sa soeur
enlevée par Jupïter Roi de Crete; rien ne
ressemble mieux a une fable.

Europe est une nymphe , une
fontaine dont l'eau etoit engloutie par
un canal souterain. ταυρος conduit
formé par la pluie, est le Jupiter chan=
ge en Taureau, qui enleve la nymphe
Europe, fontaine soeur de Cadmus
et fille d'Agenor, parce qu'elle sortoit de
la montagne la plus haute.

Cadmus arrivé dans la Grece alla consul=
ter a Delphes l'oracle d'Apollon, et par
son ordre, il partit de Delphes, et du mont
Parnasse, pour venir dans la Boetie
en traversant la Phocide. En effet

<139v> Tout cela repond a la topographie de la Grece
la chaine des montagnes s'avance depuis le
Parnasse, le long de la Phocide, bien avant
dans la Boetie.

Apollon avoit ordonné a Cadmus de suivre
une vache et de batir une ville ou elle s'arre=
teroit; equivoque avec βοῦν, de βουνος
colline, hauteur, il s'agit de la chaïne de
montagnes a l'extremité de laquelle fut
batie Thebes.

Cadmus envoia ses gens puiser de l'eau a la
fontaine de Mars, mais ils furent tués par un
Dragon qui la gardoit. αρεια κρηνη signifie
fontaine qui arrose, δρακων est le même
que τρακων lieu elevé escarpé. La fable
sign. que les habitans de Cadmus, montagne,
alloient puiser de l'eau dans une fontaine
au pied d'un rocher escarpé, ou plusieurs
personnes se tuerent. Par la même equivoque
ona dit que Cadmus et son epouse avoïent
eté changés en Serpens.

Minerve ou l'industrie conseilla de tuer le Dra=
gon et d'en semer les dents; cad. de tailler
le rocher en forme de dents ou d'escalïers; alors
il sortit de ces dents et du sein de la terre des
hommes qui s'entretuerent, lorsque Cadmus
eut jetté des pierres au milieu d'eux; c.a.d.
avant la fondation de Thebes, les habitans
de la montagne demeuroient dans le creux
des rochers, et semblerent sortir de terre, on
les appeleoit σπαρτοι, dispersés, souvent
il y en eut de tués par des pierres detachées
de Cadmus rocher.

Les noms des compagnons de Cadmus
εχιων, ουδαιος, χθονιος, abaissé, υποπρηνωρ
un peu plus bas, πελωρ elevation qui
avance, promontoire, ne sont que les noms de
divers terreins qui environnent le mont Cadmus
dont on a fait les fondateurs de Thebes.

<140> Cadmus fut obligé de se rendre esclave de
Mars pendant un an, pour expïer le meur=
tre des enfans de ce Dieu. αρης sign. le fer
tout instrument tranchant; il fallut em=
ploier le fer pour applanir le sommet de
Cadmus, pour en tirer les pierres, fonder Cadmeæ &c, ainsi
Cadmus fut subjugé par Mars.

Cadmus eut 4 filles Ino, Agave, Autonoe
Semele et un fils Polydore.

autant de fontaines qui sortoient de la
montagne. Polydore de πλυ et δωρος
fluens, multum fluens.

ινω Ino, lieu profond, plein d'eau
elle fut femme dAthamas, roi de Thebes
cad. un fleuve de Thebes. Elle se precipi=
ta dans la mer ou elle fut changée en
nymphe sous le nom de Leucothea, de
θεα nymphe et λευκος blanc, c'est a dire
eau blanche, nom d'une fontaine de
Samos, et d'une autre en Italïe appelle
aussi Albunea; une eau qui se precipite
dun lieu elevé ne peut manquer de paroitre
blanche couverte d'ecume.

Elle avoit eu pour enfans Learque et Meli=
certe. Le 1er fut tué par son Pere dans un
accès de fureur qui lui fut envoié par
Junon. Ino plongea le 2e dans une
chaudiere d'eau bouillante. λεαρχος
de λεα pierre et αρχος elevé, sign. un
rocher placé sur les bords de l'Athamas
qui fut detaché par les eaux dans un
debordement et disparut, debordement
causé par Junon ou l'orage. Athamas
prit son fils pour un Lion, cest une equivo=
que de λεα pris pour λεων.

Ino se jette dans un creux d'eau qui bouillone
cad. dans la mer, avec son fils Melicerte,
cad de l'eau renfermée ou environnée,
un golphe, un port, enfant d'Ino, eau
profonde, comme sont les ports.

<140v> Ino ou Leucothoë a été appellée par les Latins
Matuta la rosée, parce que celle ci est une
eau blanche, et quelle a cause de cela
encor on la confondu avec l'aurore.

Agavé autre fille de Cadmus est au nom=
bre des Nereides , une des Danaides,
et une des Bacchantes, (Apollodore) par cons.
c'etoit aussi une fontaine; elle avoit epousé
Echion cad. un rocher au pied duquel
elle couloit, elle en eut un fils πενθεος
cad. lacrymans, terrein humide dont
l'eau distilloit par gouttes, et fut dechire
par les Bacchants cad. boulversé par
les eaux.

Autonoë est aussi une nereide, epouse
dAristée; fils de la fontaine Cyrene, et petit
fils du Penée; de leur mariage nacquit
Acteon, changé en cerf pour avoir vu
Diane se baigner avec ses nymphes.

ακταιων de ακτη rivage, etoit un
rocher voisin d'une fontaine, d'ou l'on
voioit pendant la nuit l'image de la Lune
peinte dans les eaux: ελαφος cervus
signifie ici lieu elevé, epithete du rocher
Acteon.

Semele fut aussi une fontaine. Jupiter
eut commerce avec elle. cad la pluie
fit grossir cette fontaine. Junon jalouse
inspira a Semelé le desir de voir Jupiter
avec tout l'eclat du foudre, mais cette nym=
phe en fut embrasée, et mit au monde
Bacchus avant terme. Cela sign. que dans
un temps d'orage accompagné de tonnere
le cours de la fontaine fut arreté par l'ebou=
lement des terres, et qu'il sen forma
un marais βακκος, ιακκος, noms
donnes au Dieu qui arrose, abreuve,
ce marais confondu avec ce Dieu, a fait
placer dans la Boetie, la scene de la plupart
des fables de Bacchus.

<141> 979 Voiés ψ 287.

984. μεμνον sign. noir ημαθιων couleur
de sang, rouge, τιθων blanc, d'ou τιθωνοκομος
qui a les cheveux blancs; etsont ici les
differentes couleurs dont le ciel est passé au
lever de l'aurore. on les donne a celle ci pour
enfans et pour marï. Memnon est appelle
Roi des Ethyopiens parce qu'il etoit noir,
Emathion roi de Mace=
doïne, parce que celle ci se nomoit ημαθια.

986. Plaeton de φαω et αιθω luire
briller, brillant, la lumiere est fils de Cephale ou φαλος
blanc, clair, luisant, ou le Soleil, marié
avec l'Aurore ou Clymene de κλυω
briller. Venus qui enleve Phaëton encor
jeune pour le placer dans son temple, c'est
une allegorie pour exprimer que Venus
aime le brillant de la jeunesse.

Selon Appolodore Cephale etoit mari de
Procris. l'Aurore la rendit infidele et l'enleva
a son Epouse, il ajoute que Cephale etoit
fils d'Hermes et de Herse, qui est la rosée
ερμης sign. tout comme ερση et προκρυς
la rosée. Cephale le brillant de la rosée
est uni avec elle il en est le fils et l'epoux;
l'aurore l'enleve, parce que la rosée se dissipe
après le lever du Soleïl. Ainsi tous les noms
Synonimes sont peres, enfans, epoux les
uns des autres.

992. L'enlevement de Medée et de la Toison
d'or par Jason ou le voiage des Argonautes
dans la colchïde n'est qu'une fable dans le
gout de toutes les autres qui et dont les personages
n'ont pas plus de realité que ceux de la guerre de
Troie, qui la suivi; la preuve de cela est 1°
que l'impossibilité du fait dans un temps
ou les Grecs etoient encor barbares, et hors
detat dentreprendre une expedition dans la
<141v> colchide 2° que les pretendus heros Hercule
Thesée, Orphée, n'ont rien qui fasse presumer
quils aient été des hommes, quand on voit
que les uns sont fils de Jupiter, ou la pluie,
les autres de Neptune ou de la mer &c. et que
leurs noms designent des objets physiques.

Ainsi Medée sign. tout ce qui coule,
Jason a le même sens, c'est un fleuve
voisin de la colchide. de la Voila Jason allant
en colchide, Roi d'Iolcos ville de Magne=
sie, confondu avec κολκος la colchide;
ιασον αργος sign. le Peloponese ou l'Achaïe
pays environne de mers. Voila Jason
avec son navïre Argo. ιασοναργοναυτης
la mer qui coule près d'Argos, voila
Jason l'Argonaute; il etoit fils d'Aeson
riviere de Pierie ou de Macedoie.

κρυσο μαλλον δερας peut sign. peau
a toison d'or; mais δερας sign. le col
passage etroit, χρυσος lieu profond,
μαλλον est augmentatif, ainsi ce mot
sign. aussi canal fort etroit, et profond;
il est gardé par δρακων, ou τραχων
rocher escarpé, par lequel les eaux sont
resserrées et forcées de couler dans une gorge
etroite et profonde.

La toison d'or etoit encor gardée par des
taureau d'airain. ταυρος signifie aussi
canal, torrent, καλκειος profond,
Jason qui les tue par le secours de Medée
c'est la mer ou les eaux enflées qui se
font un passage par la violence des flots.

Qu'est ce donc que la conquete de la toison
d'or par Jason l'Argonaute aide de Medée?
Ce sont les eaux du Golphe de Magne=
sie, sur lequel etoit placée la ville d'Iolcos
qui se creusent un canal pour se jetter
<142> dans la mer Egée. Jason fut forcé a
cette expedition par linjuste et superbe
Roi Pelias, cad. une branche du mont
Pelion qui resserre la mer du côté du
nord, et la reduit a un canal assès
etroit. Jason fut aidé par tous les Heros
enfans des fleuves et des rivieres de la
Grece, cad. par le concours de toutes les
eaux de la contrée dans un temps d'inon=
dation. Les enfans de Boree, Calais,
et Zetes, eurent part a cette operation
cad. les vents du nord qui precipitoient
le cours des eaux vers la mer.

Ainsi les exploits de Jason ne sont que les
changemens operés par quelques inonda=
tions sur le sol de la Grece. On lit une fable
semblable dans Strabon. 

L'on a dit que le navire Argo parloit, c'est
une confusion grossiere des deux sens de
ρεω parler et couler. Cela sign. que
la mer d'Argos couloit.

1000. Medée, canal, a été nommé cou=
rant d'eau, comme sa mere.

1001. Medée fut eleve dans les montanges
par Chiron fils de Phylliras: un cou=
rant deau fut formé par les torrens qui
descendent des montagnes.

1002. Les 1 mot biffure inondations se font par
la volonté de Jupiter, Dieu de la pluie.

1003. φωκο-η veau marin est
fils de ψαμαθη le sable, fille de Nerée
qui eut commerce avec αιακος nom
du fond des eaux: de αια 1 mot biffure eau
et αγκος fond, cela sign. que le veau
marin nait dans le fond des eaux et
vit sur le Sable.

<142v> 1006. Tethys est la mer, Pelée, un marais
αχιλλευς Achille ne signifie autre chose
que de l'eau. Il eut pour demeure la Phtiotide,
entre deux golphes, et pour sujets αχαιοι
ελληνες μυρμιδονες cad. des peuples mari=
times. Tethys le plongea dans les eaux du
Styx. Les Centaures etoient des torrens, la moëlle
des Lions, le suc des lieux humides. La velocite
qu'on lui attribue caracterise la rapidité
de ses eaux, il fut tué par Apollon cad
le Soleil. Tout ce que la fable dit d'Achille
fut allusion aux eaux.

1008. αγχρισης sign. un mari, αινειας
un bel enfant, cette fable sign. qu'une belle
personne met au jour un bel enfant.

1011. Latrius est un etre chimerique, il en est
ainsi d'Adrius, le nom de la mer Adriatique
vent d'αδρος superieur, parce que cette mer
est a l'orient de l'Italie, mare Superum.

1015 Les anciens Grecs appellerent l'Italie
εσπερια comme etant a l'occident de la
Grece; ses peuples τυρσηνοι Tyrrheniens,
par la même raison. Dela la mer de Tos=
cane fut appel. Tuscum, Etruscum
Tyrrhenum inferius, interius.

1016 Ces mots ναυσιθοος et ναυσινοος
font entendre que Ulisse dans l'isle de
chès Calypso ne pensoit qu'a trouver
un vaisseau pour senfuir.

<143> Chap. XV.
Bouclier d'Hercule

Qu'il y ait eu un ou plusieurs Heros nommés
Hercule, ouqu'il n'y en eut jamais, que l'Her=
cule Thebain soit un homme ou un person=
nage fabuleux, son histoire n'est autre chose
qu'une topographie malentendue.

Hercule descendoit de Persée et on a sup=
posé que les 1 mot biffure descendans d'Hercule
aussi bien que ses 1 mot biffure ayeux, avoient habité
l'Argolide, Tirynthe, Mycenes &c. 

Il y avoit a Mycenes une fontaine Persea
et une fontaine ηρακλεις a Troesene.
Donc disoient les Grecs l'une avoit tiré son
nom de Persée, l'autre d'Hercule.

Persée et Andromede eurent pr enfant
Alcée, pere d'Amphytrion, et Electryon
Pere d'Alcmene. p. cons. celleci mere
d'Hercule avoit epousé son germain.

Persée est une fontaine. 
ανδρομεδα (de ανδρο exprimant la force
et μεδα l'eau) est un lieu ou l'eau coule
en quantité, une fontaïne comme son
epoux. Celui ci l'avoit delivrée du mons=
tre marin κητω cad. la mer pour
empecher Andromede de tomber dans la
mer on en conduisit les eaux dans la fon=
taine Persea, et par la Persée epousa
Andromede après l'avoir delivée.

αλκαιος leur fils, une riviere, avoit
epousé ιππονομη autre nymphe aquatique. 

ηλεκτρυων autre frere, semblable a
ηλεκτρη autre nymphe 
eu une riviere de Messenie, il en est ainsi
d'αμφιτρυων et d'αλκμηνη. Dans les fables
<143v> tous les personages dont les noms sont Synoni=
mes descendent les uns des autres, ou sont mariés
ensemble.

Du mariage d'Amphytrion et d'Alcmene sont
nés ιφικλης et ηρακλεης tous deux sign.
valide claudens. Hercules etoit fils de Jupiter
qui avoit rendu alcmene grosse pendant
l'absence de son mari cad. que dans un
temps ou le fossé amphytrion etoit a sec, Jupi=
ter fit pleuvoir et Alcmene grossit; qu'ensui=
te le fossé aiant été rempli et commancant
a couler, Alcmene en fut encor plus enflée
il fallut deux digues pour arreter leurs
eaux; et voila leurs deux enfans Iphicles
et Hercule, deux fortes ecluses. L'une plus
foible, Iphicles, fut emportée par la mer
ευρυθια  et alla trouver
ainsi Eurysthée.  L'autre
plus forte ηρακλεης resista et de la vint
les grandes prouesses qu'on lui attribua.

Le nom le plus ancien d'Hercule est βιη
ηρακλειη  qui sign. aqua
firmiter clausa.

Electryon pere d'Alcmene avoit des boeufs
qui lui furent enlevés par les Teleboiens
ou Taphiens; Amphytrion defit ces bri=
gands, ramena les troupeaux et tua Elec=
tryon. Ces boeufs sont comme ceux de
Geryon  ne sont que des
eaux, τηλεβοαι des gouffres profonds
ταφιοι des fossés. Le canal Amphi=
thryon conduisit les eaux loïn de ces
gouffres, et ramena ainsi les troupeaux, mais
il tua Electryon, il fit disparoitre cette
source: Il ne pouvoit pas posseder Alcmene
avant que de s'etre vangé des Teleboiens 
parcequ'il ne pouvoit pas meler ses eaux,
a celles de cette fontaine, avant que de lavoir
ecartée des gouffres.

<144> La scene de cette histoire etoit l'Argolide,
mais comme il y avoit aussi en Boetie des
fontaines et des canaux de meme nom aux=
quels il fallut mettre des digues, les deux
epoux se trouverent ainsi transplantés a
Thebes avec leur fils Hercule. Voila
a qui se reduit tous les travaux d'Her=
cule Thebain. La secheresse du terroir
de l'Argolide est la seule cause pourquoi
le culte de Jupiter et de Junon, Dieux
de la pluie, a ete si pompeux dans ce pays,
et pourquoi la fable a decrit si pompeuse=
ment l'art de faire des digues, des canaux
&c, ou Hercule et ses travaux.

Dans toutes les langues les noms donnés
a Hercule ont designé, digue, chaussée
arret, enceinte, pour contenir les eaux.

Telle est la signif. du mot Phoenicien Meli=
certe
; d'ou vient que nous voions les Phoeniciens
faire des voeux a Hercule.

Il en est de même de Desanaüs du mot
Phoenicien naüs de l'eau et dessa lien
arret, arret des eaux; ainsi encor de
Agenor qui sign. la même chose. Agenor
etoit fils de Belus Roi de Phenicie. βελος
est une riviere a deux stades de Ptolemaï=
de, Agenor est son fils, comme Hercule
d'Alcmene courant d'eau. Agenor eut
pr fille Europe nymphe: enlevée par
Jupiter changé en Taureau, cad
de la pluie en canal, ce qui signifie
qu'un torrent formé par la pluie fit dis=
paraitre la fontaine Europe.

Le nom Egyptien d'Hercule, Osochor, pour
Hos-sihor, de hos arret et sihor
le Nil. sign. les digues qui arretent les
inondations du Nil. Hercule Egyptien
passe pr plus ancien que Hercule Grec,
parceque l'Egypte est le premier pays ou on
a fait des digues.

<144v> La multitude des torrens, fontaines, villes
ports, appellés Heraclaiæ a fait attribuer
a Hercule une multitude d'exploits, et
imaginer dès la une multitude d'Hercules
differens pour sufire a tant d'exploits.

Le plus fameux est d'avoir separé les deux
montagnes Calpé et Abyla, nommées
colonnes d'Hercule. Mais 1 mot biffure cela repo=
se sur l'equivoque de κιων ηρακλειων
qui sign. interseptum firmiter claudens;
Selon Pline, Strabon, Pompon, Mela
on a cru qu'autrefois le detroit de Gibraltar
n'etoit pas ouvert, et que l'Afrique etoit continen=
te a l'Espagne par un isthme: on a supposé
que βιη ερακλεη la mer ainsi renfer=
mée avoit force la barriere, et s'etoit creuse
un canal entre les 2 montagnes; l'equi=
voque a fait attribuer cela a un per=
sonage nommé Hercule, ce voiage
pretendu de Phoenicie en Espagne a pu donner
lieu a toutes les autres fables.

Comme le promontoire du côté de l'Afrique
se nommoit Antée, on en a fait un
geant domté par Hercule.

On disoit encor que Hercule avoit creusé
un canal pour dessecher la vallee Tempe
et qu'il avoit submergé la Boetie en
arretant les eaux dune riviere. On voit
par cet echantillon que tous les pretendus
travaux d'Hercule ont trait a quelque
revolution survenu dans les eaux.

On a deja expliqué plusieurs, l'enlevement
des pommes d'or &c  la defaite
de Geryon , de l'hydre de Lerne,
du Lion de Nemée,  la victoire sur le
fleuve Achelous,  la delivrance
de Promethée,  Atlas dechargé de
son fardeau.  Tout aboutit a retenir
detourner, ou faire ecouler des eaux.

<145> 1° Hercule agé de 8 mois etouffa deux
serpens que Junon avoit envoiés pour le
devorer lui et son frere: les serpens sont
des ruisseaux, les inondations qui rompent
les digues sont attribuées a la colere de
Junon. Hercule ou une digue recem=
ment construite a arreté le cours impe=
tueux de 2 ruisseaux. Il s'agit des deux
ruisseaux d'Amphytrion, et d'Alcmene,
grossis par la pluie. Iphicles, effraié se sau=
va, une des digues fut emportée, l'autre
resista, c'est Hercule qui tua les deux
seprens.

2° Hercule pendant sa jeunesse fut char=
gé de garder les boeufs d'Amphytrion
qu'il promena longtemps par le monde.

C'est une digue qui se plait a contenir
des eaux. Un Lion descend pour devorer
les Boeufs d'Amphitrion et de Thestius.
Il s'agit d'un λεων ou torrent qui en=
traine les eaux et ravage la campagne
comme le Lion de Nemée. Thestius est une
riviere de Thessalie. La fable dit que
Hercule eut commerce avec les 50 filles
de Thestius, il s'agit de fontaines filles
des fleuves: la digue qui arretoit les eaux
de Thestius les aiant fait remonter, elles
se melerent avec celles des fontaines qui s'y
dechargeoient et en couvrirent les bassins;
ainsi Hercule corrompit des nymphes.

Leurs noms dans Appollodore sont apeu
pres les mêmes que ceux des nymphes aqua=
tiques dans Hesiode.

3° Dans les montagnes d'Arcadie, Hercule
atteignit a la course une biche qui avoit
les cornes dorées et les pieds d'airain et la
porta sur ses epaules jusques a Mycenes.

<145v> Il s'agit d'un ruisseau des montagnes d'arca=
die nommé ελαφος a cause de sa rapidité
que l'on conduisit par une digue et un aque=
duc jusqua Mycene. κρυσοκιρας n'expri=
me autre chose qu'un bras profond de
riviere et καλκο πους un lieu pleïn d'eau.
La fable repose sur l'equivoque de ces mots.

4 Il en est de même du sanglier d'Eryman=
the καπρος est un nom de riviere, de
canal; cela sign. la riviere d'Erymanthe
en Elide quil fallut contenir par une digue.

5. Hercule vuida les etables d'Augias Roi
d'Elide, en y faisant passer les deux rivieres
Alphé et Penée. αυλη sign. canal, il
sagit de curer un canal, en y faisant
passer les eaux d'une riviere avec le secours
d'une digue. αυγιας etoit fils de Neptune
parce que c'etoit une riviere d'Elide dont
le canal avoit été debarassé eny faisant
entrer par le moien d'une digue une par=
tie des eaux de l'Alphée.

6. Rien deplus absurde queceque la fable
dit des oiseaux du Lac Stympale.
ορνειαι est une riviere d'Arcadie qui coule
a peu de distance du Lac Stymphale, et
ce nom est commun a plusieurs autres.
λυκοι est aussi le nom de plusieurs
rivieres de differens pays. Hercule ou
une digue detourna plusieurs sources
ορνεια qui s'ecartoient des autres eaux
λυκων, et qui incommodoient dans la
campagne. Cela reussit par le moien de
plusieurs καλκεα κροταλα cad.
canaux profonds, car κροταλος sign
canal riviere, de même que καλκις.

<146> 7. Dans l'isle de Crete, Hercule se rendit
Maitre d'un Taureau furieux produit par
Neptune, qui avoit enlevé Europe. ταυρος
c'est un canal, un torrent. Un torrent
de l'isle de Crete eut besoin d'une digue pour
le retenir dans son lit, ainsi Hercule s'en rendit
Maitre, il le conduisit a Eristhée cad. la mer.

Ce taureau parcourut la Laconie, l'Arcadie
&c. cad. que dans ces diverses contrees il
y eut aussi des torrens a contenir.

8. Il s'empara des cavales de Diomede
Roi des Bistoniens dans la Thrace qui
nourissoit ces animaux de chair humaine
ιπποι signifie des rivieres; διομεδης
a Jove fluens, un torrent, fils de Cyrene
une fontaine, αρης, αρεος son Pere est
ici un lieux bas, et aquatique, un marais. 

Diomede etoit Roi des Bisto=
niens parce qu'il dechargeoit ses eaux dans
le cap Bistonide. Il nourrissoit ses ιππους
ses eaux de chair humaine parce que plusieurs
personnes y avoient été submergées. Hercule
une chaussee, une ecluse &c le rendit plus
aisé a traverser.

9. Hercule enleva le baudrier de Mars
a Hyppolite, Reine des Amasones, 1 mot biffure
qui habitoient les rives du Thermodoon.
μαζα sign. detrempé d'eau. ιππολυτη
dissous par les eaux, αρεος ζωσηρ
ceinture d'eau ou de marecages. Il fallut
des canaux et des levées de terres pour
mettre a sec un terrein detrempé et fan=
geux. Lorsqu'il fut ainsi environné
on le nomma ηρακλεης terrein ferme,
au lieu de [ιππολυτη ou αμαζον quil
portoit auparavant. Voila Hercule vic=
torieux d'Hippolyte et des Amazones.

<146v> Junon cad. la pluie qui fait enfler les
eaux fit tout ce quelle put pour faire
manquer cette expedition.

La scene de celle ci etoit dans la Grece, Pau=
sanias parle dun torrent Thermodoon
dans la Boetie, d'un camp des Amazones
dans l'Attique. Mela parle d'un Thermo=
doon dans l'Ionie. Dans la suite Thesée
fut encor obligé de combattre les Ama=
zones dans l'Attique: partout il y avoit
des Amazones a domter cad. des terreins
fangeux a dessecher.

Selon Diodore, les Amazones se battirent
en Afrique contre les Gorgones cad.
des fontaines.

10. Hercule passanta Troie delivra
Hesione fille de Laomedon, qui devoit
etre devorée par un monstre marin, il
tua le monstre et demanda pour prix l'atte=
lage de chevaux dont Jupiter avoit fait
present a Laomedon; celui ci l'aiant refusé
Hercule prit Troie et fit epouser Hesione
a Telamon.

1 mot biffure ησιονη sign. terrein fangeux,
1 mot biffure λαομεδων son Pere, est une
source qui sort d'un rocher et abreuve
le marais, τροια designe un trou
un terrein enfoncé entre des montagnes.

Les murs de Troie suivant la fable, avoient
ete batis par Neptune et Apollon, cad.
que la premiere chaussée faite pour desse=
cher le terrein Troja etoit faite de boue
sechée au Soleil. Neptune exigeoit pour
recompense les chevaux de Jupiter possedés
par Laomedon, cad. les eaux de la pluie;
pour que le terrein demeura sec, il falloit
conduire directement dans la mer les eaux
de Laomedon, quand il avoit plu.

<147> Laomedon aiant refusé ces chevaux
Apollon irrité envoia la contagion a Troie,
Neptune une inondation ou le monstre
κητω qui devoroit tout. Pour faire cesser
ces fleaux, l'oracle ordonna d'opposer
ace monstre Hesione fille de Laomedon
cad. une enceinte de terre glaise abreuvée
par Laomedon, plus forte que la premiere.

Hercule fut construit en donnant Hesio=
a Telamon cad. lien, en retenant
la glaise avec des fascines sans quoi
Hesïone auroit été emmenée par
les eaux comme la premiere chaussée.

11 Hercule passant en Egypte tua le Roi
Busiris fils de Neptune et de Lysianassé
qui sacrifioit les etrangers a Jupiter.

βουσιρις sign. le grand fleuve du Nil
fils de Neptune Dieu des eaux et Lysia=
nasse nymphe marine. 

Il immoloit &c. ξενος sign. ignorant,
comme hospes en latin, et Jupiter est pris
pour la pluie. Les inondations du Nil
faisoient souvent perir les etrangers et ceux
qui ne s'y attendoient pas. Hercule ou
l'art de faire des digues arreta ces ravages
et prevint les surprises. C'est de ces precau=
tions contre les submersions que l'Egypte
avoit tiré son nom. La traddition Egyptienne
portoit que Hercule avoit arreté le Nil
dans une de ses inondations.

12. Hercule descendit aux Enfers par
l'antre du Tenare, il en tira le chien Cerbere
qu'il conduisit a Euristée et le laissa retour=
ner ensuite. Cebere, sort des eaux qui
tombent dans un gouffre. 
En y faisant une digue on les tire de l'enfer
pour les conduire a la mer. Si la digue vient
<147v> a se rompre, Cerbere retourne aux enfers.

Tous les travaux de Hercule ne sont que des
eaux arretées detournees &c. par des digues
&c. Les debordemens aiant ete peints sous
la figure de monstres devorans, l'art d'en
faire cesser les ravages la été sous l'emble=
me d'un Heros destructeur de monstres.

Les anciens Historiens nous parlent de la
secousse qui ouvrit la vallée de Tempé, et
fit couler dans la mer les eaux du Penée
qui inondoient la Thessalie. Les uns l'attribuent
a Neptune, d'autres a Hercule. Les Poëtes
racontent que les Geans entasserent les monts
Ossa et Pelion pour escalader le Ciel et que
Jupiter les ecrasat d'un coup de foudre.

Ces Geans ce sont les montagnes contigues
qui faisoient refluer les eaux dans les terres
car ουρανος designe un lieu plein d'eau
et la meme phrase sign. monter au Ciel
et faire remonter les eaux. Un tremble=
ment de terre aiant fait un debouche,
l'inondation cessa; ce fut l'exploit attri=
bue a Jupiter. Il en est de meme d'au=
tres inondations, ce fut la le cannavas
des fables heroiques.

On comprend par tout ce qui a ete dit
qu'aucun des travaux d'Hercule ne peut
etre attribué a un homme, et que tout
ceci a trait a des revolutions naturelles;
cela se confirme encor par ses alliances
et sa posterité.

Il demanda en mariage Iole, fille de
Euryte, Roi d'Œchalie. ιολαυς est
un canal.  ευρυτος signifie
bien arrosé, ou qui coule bien. Après la
mort d'Hercule Iole epousa Hyllus
son fils, c'est une riviere de Lydie.

<148> Hercule fut esclave d'Omphale Reine
de Lydie, fille de Jardanus, a laquelle Tmolus,
son mari avoit laissé son royaume. elle
contraignit Hercule a filer. ιαρδανος
est une riviere. 2 mots biffure ομφαλη une colline
située sur ses bords. τμολος est une
montagne de Lydie fort connue. Omphale
a 1 mot biffure reduit Hercule en servitude et la
oblige de filer; cad. pour faire une digue
au Jordanus, il fallut suivre le contour de
la colline et faire tourner l'ouvrage au=
tour comme un fil. l'Equivoque vient
de ceque νεω sign. aller, nager, filer,
et se confond avec ναω couler.

D'Omphale et Hercule nacquit αγελαος
aqueduc, nom de riviere. Tel etoit l'objet
de la digue faite sur le Jardanus autour
de la colline Omphale. L'evenement passé
en Elide le fit transplanter en Lydie a
cause de la ressemblance des noms.

L'Alliance d'Hercule avec Dejanire fille
d'Œneus est plus celebre. Pour l'obtenir il fut
obligé de combattre contre le fleuve Achelous
changé en taureau et ensuite en serpens.
Hercule lui arracha une corne; le fleuve,
pour la ravoir, fit present a son vainqueur
dela corne d'abondance.

οινεος est une riviere d'Etolie, Dejanire sa
fille une nymphe, elle eut de son mariage
avec Hercule la fontaine Macarie. Achelous
se changeoit en serpent parceque ses eaux
alloient en serpentant, il devenoit ταυρος
cad. canal. Hercule lui arrache une cor=
ne, cad. qu'une digue lui enleve une de ses
branches formée par les eaux de Dejanire, et
on la conduit dans les terres pour les fertiliser
ainsi la corne d'Achelous devient la corne
<148v> d'abondance.

Hercule se trouvant au bord de l'Evenus avec Deja=
nire, traversa lui meme la riviere, et confia son
epouse au Centaure Nessus qui etoit chargé de
transporter les passagers a l'autre bord; celui ci
aiant insulté Dejanire, Hercule le perca d'une
de ses fleches.

Evenus est une corruption d'Œneus, la riviere
cy dessus. Nessus centaure est un torrent.
Il faisoit violence a Dejanire parce qu'il mêloit ses
eaux bourbeuses a celles de cette fontaine. On
fit une digue entre deux pour separer le lit de
Nessus, et le conduire dans l'Evenus. βελος sign.
riviere, canal. Ainsi Hercule ou la digue
formant pour Dejanire un canal separé
de Nessus la mit a couvert de ses outrages.

Nessus près d'expirer donna de son sang a Deja=
nire comme un philtre pour fixer le coeur de
Hercule. Elle en teignit une tunique et la
fit donner par Lichas a son mari. Lorsqu'il
etoit sur le point depouser Iole. Hercule
revetu de cette robe empoisonné, se sentit
dechirer les entrailles, et devenu furieux alla
se bruler sur le mont Oeta.

Le Torrent Nessus charioit un bitume
puant dont on se servit pour revetir Her=
cule la digue: λεικας porteur de la robe,
c'est un platrier un macon qui crepit
un mur.

Le mont Oeta au Nord de la Grece, offroit
certains phenomenes ignés, comme des au=
rores boreales qu'on appelloit ηρακλεις
πυροεις; longue bande ou barre en=
flammée; et ces mêmes mots sign. Her=
cule brulant; il n'en fallut pas d'avantage
pour imaginer la mort d'Hercule dans
un bucher sur le mont Oeta.

Hercule après sa mort fut transporté aux
Cieux ou il epousa Hebé, cad la Deesse dela
<149> jeunesse ou celle qui versoit a boire aux
Dieux; cetoit toujours une union avec
des nymphes.

Par cette explication de la fable d'Hercule on
voit 1° pourquoi il a été regardé par les uns
comme Dieu, comme un Genie occupé a
contenir les eaux par toute la terre, par les
autres comme un Heros, dont les avantures
furent particulieres a la Grece qui en est le
plus frequent theatre. 2° quel est le sens
des epithetes donné a Hercule βουφαγος
avaleur d'eaux, epithete qui convient bien
a un canal formé par des digues, αδδη
φαγος avaleur de fontaines; απομυεων
απομνων. Excludens, 1 mot biffure ecluse qui
detourne les eaux; nom qui a été confondu
avec απομυιος chasseur de mouches.

μυσηγετης conduit fermé, epithete
qu'on a pris pr conducteur des muses.
ποδητης, qui retient les eaux, d'ou
par equivoque Hercule lieur de chevaux.

Ceux qui ont entendu historiquement les
exploits d'Hercule ont supposé plusieurs
personnages de ce nom. Selon la traddition
d'Olympie, le plus ancien fut un Dactyle
1 mot biffure Ideen sorti de l'isle de Crete, auquel
on fut redevable de l'institution des jeux
olympiques. Ces Dactyles Ideens etoient
des montagnes hautes, pointues, couvertes
de fonts.  Il y eut peut etre en
Elide une montagne de cette espece appellée
ηρακλεη, barriere cloture, ou l'on batit
ensuite Olympie, et le stade ou se celebroient
les jeux. Peut etre même a t'on fait de la barri=
ere de la lice un personage, voila commun.
Hercule est devenu l'auteur des jeux olym=
piques.

<149v> Remarques

ψ1. Le commancement est perdu.

4. Il ne coutoit rien au Poëte de peindre comme
une merveille cette Alcmene dont il suppose
que Jupiter devint amoureux.

11. Ampytrion etoit 2 mots biffure ou promis avec
Alcmene lorsque celle ci eut commerce avec
Jupiter, tout cela n'est pas fort moral.

13. Hesiode aimoit a faire de Thebes et de Boetie
sa patrie le rendes vous, voies des Dieux et des Heros.

20. La vengeance, et exercée pour plaire a une
femme, etoit regardée comme agreable aux Dieux.

24 les Boetiens ne passoient pas pr si bons cavaliers.

29. Titre pompeux que ne meritoit pas
un personage, esclave de ses passions &c.

32.Typhaon, typhaonion, thilphosion
sont differens noms de l'Helicon.

52. βιη ηρακλεη ne peut s'entendre d'un homme.

57. Mars Pere de Cygnus lui sert de second
pour l'aider a detrousser les pelerins qui alloient
au temple de Delphes.  Cela n'empeche
pas que Cygnus ne soit tué par Hercule et
Mars est blessé lui meme. Quel Dieu.

61 L'on est servi de char a la guerre avant
que d'avoir de la cavalerie.

675. Les Poëtes ont toujours supposé que ceux
qui vivoient au siecle des Heros etoient plus
grands et plus robustes que les hommes des sie=
cles suivans.

122. L'airain ou le cuivre ont été en usage
longtemps avant le fer. l'Armure ici decrite
est apeu près la meme que celle de nos guer=
riers des siecles passés, a la reserve qu'elle netoit
pas de fer comme celle ci.

<150> ψ137 αδαμαντος vrais. a été pris
de אדם qui jette un vif eclat, ignitus,
d'ou vient que lon dit un diamant d'un beau
feu. 1 mot biffure Le même mot sig. couper, tran=
cher, ce peut etre aussi lorigine du nom
comme il l'est de celui de αρης, σιδηρος
l'acïer et le fer, propres a faire des taillans
metal peut venir de la memesource.

140 Imitation de la description du bou=
clier d'Achille dans Homere; on comprend
que tout y est exageré a la maniere des Poetes.
Des figures mouvantes ou parlantes qui y
sont placées introduites dans le même sens
que nous disons c'est un Tableau parlant,
vivant &c. pour donner l'idée d'une imitation
parfaite.

141. La Damasquinure est un art des plus
anciens, dont le gout s'est conservé jusques
a nos jours.

ηλεκτρον etoit chès les anciens un ver=
meil ou melange d'or et d'argent. Ho=
mere n'en a point parlé. Ce mot electrum
vient de ηλεκτωρ le Soleil, cad. très
brillant.

κυανος de bleu, d'azur, couleur donnée
a l'acier par la trempe, acier

178. κενταυροι Centaures c'etoit des torrens
qui descendent des montagnes; pourquoi on
les a placés la plupart dans les montagnes de
Thessalïes: on a dit que c'etoit des monstres
moitié hommes, moité chevaux par la confu=
sion de ιππος eau et cheval. Il etoient
fils d'Ixion et d'une nuée. ιξιον est une
1 mot biffure nom de montagne. Ixion etoit
commensal de Jupiter et devint amoureux
de Junon. 1 mot biffure cad. comme cette montagne
<150v> s'approchoit du Ciel par sa hauteur. Ixion
demeuroit avec Jupiter, et aiant son sommet
dans les airs, il aimoit Junon; 1 mot biffure il tou=
choit aux nues, et eut commerce avec elle.
Les centaures en etoient nés parce que les nuées
qui tombent en pluie sur les montagnes font
naitre les torrens.

Ixion dit la fable en punition de son audace est attaché dans
les enfers a une roue qui tourne sans cesse; c'est
une circonstance de nouvelle invention depuis
qu'on a seu se servir des eaux courantes
pour faire tourner les moulins.

Nessus sign. torrent. χειρων Chiron
le lit d'un torrent, celui ci etoit fils de Satur=
ne changé en cheval et de Phillyre, χρονος
exprime un lieu profond.  Saturne
changé en cheval, cest une ouverture d'ou
il sort de l'eau, Phillyre est une nymphe
fille de l'océan, ou riviere, tout cela produit
un torrent. Chiron eut pr fille ιππο appellée
Ocyroë, et metamorphosée en cavale. &c. &c.
ευρυτων ruisseau plein d'eau &c &c.

Les Lapithes sont les ennemis des Centaures.
Ce sont des fossés faits pour detourner et
contenir les eaux des torrens. Ils sont aidés
par Hercule, l'art des digues.

Thesée etoit fils de Neptune, selon d'autres
d'Egée et d'Aethra. Neptune et Egée desi=
gnent tous les deux la mer, αιθρη, hyver
tempete, pluïe violente. θησευς derivé
de θης θητος manoeuvre, ouvrier a gage,
travail de pionnier; Thesée imitateur et compagnon
d'Hercule pour detruire les monstres sign.
donc les travaux pour combattre les
Amazones. cad. les terreins fangeux et
aquatiques. Thesée epousa une Amazone
dont il eut ιππολοιος dissous par les eaux
et de l'equivoque nacquit la fable d'Hypolite
trainé par ses chevaux effraies a la vue dun
monstre marin.

<151> Thesee vainquit le Minotaure dans
lIsle de Crete; les Poetes ont placé en Crete
une riviere d'Argolide qui portoit ce
nom et celui d'Asterion.

Il descendit aux enfers pour en tirer Proser=
perie: cad. il cultiva les lieux bas pour
en tirer du grain; il enleve Ariadné
l'abondance.  Il epousa
1 mot biffure φαιδρη la joie, il enleva ελενη, 1 mot biffure
Helene, lieu a contenir les eaux. Par=
tout 1 mot écriture du travail et du labou=
rage.

Pirithous etoit fils d'Ixion comme les
Centaures. C'est un courant d'eau rapi=
de; il epousa ιπποδαμεια Hippodamïe
l'art de contenir les eaux, cad. le
torrent fut dompté par une chaussée
et des fossés.

Aux noces de Pirithoüs commanca la
guerre entre les Lapithes et les Centaures,
ceux ci etant yvres vouloient faire violence
aux femmes invitees &c. Quand les eaux
des fontaines sont troublées par des torrens,
les Poëtes disent que ce sont des nymphes
violées par des monstres. Hercule, Thesée
&c. tuerent ou blesserent ou poursuivi=
rent ces brutaux, &c. toute cette fable
se rapporte aux grands travaux immense qu'on
eut a essuier dans differentes contrees de
la Grece pour 3 mots biffure les rendre
habitables et les mettres en culture; c'est
a quoi se reduisent tous les exploits des
heros.

227 Une proprieté du casque de Pluton
etoit de rendre invisible ceux qui le
portoient. 

254 On a toujours feint que les parques
assistantes de la mort beuvoïent le sang
des mourans.

<151v> 353. Les pretendus voiages d'Hercule et
Trachine sont fondés sur ce que cette ville
se nommoit Heraclea Trachinia
cad. ville fermée et située sur une hau=
teur.

455 Cela sign. que le coup fut detourne
par un tour d'adresse.

461. Ηερακλεης digue, chaussée est
toujours victorieux αρης lieu humide
et marecageux.

472 Ceyx etoit fils de l'etoile du matin
et de Chione, suivant d'autres, de l'aurore, il
avoit epousé Alcyone, ils furent tous deux
changés en Alcyons; Cygnus est dailleurs
un oiseau fort connu; par tout on voit
des equivoques de noms.

477. Anaurus est une riviere de la Phtiotide
cest la ou s'est passé le combat de Hercule
contre Cygnus: selon Pausanias cetoit pres
du Penée. Ce heros pretendu fut donc un
torrent dont on arreta ou detourna les
eaux par une digue.

Cygnus est l'oiseau qui habite les eaux.
Il est fils de αρης cad. un lieu humide
un marais qui donne naissance au ruisseau.
Il epouse Themistonoé fille de Ceyx. 
Themisto est une nymphe, noë sign.
qu'elle coule. C'est donc une fontaine qui
tomboit dans le ruisseau Cygnus.

Ce ruisseau faisoit perir des hommes
par ses inondations, de la on en a fait
un brigand fameux.

Le fleuve Anaurus dans un de ses debor=
demens, couvrit le lieu ou passoit Cygnus.
De la lidée de son tombeau inaccessible.

Nouvelle confirmation de l'explication
des travaux d'Hercule.

<152> Jupiter amoureux de Leda se changea
en Cygne pour avoit commerce avec elle.
Jupiter changé en Cygne est uncour=
ant d'eau formé par la pluie. ληδα
pour λεαδεα sign. le sommet des ro=
chers: cad. une veine d'eau formée
par la pluie penetre au travers d'un
rocher.

Leda accouche de deux oeufs; cad.
il sort du rocher deux bassins ronds
d'ou l'eau s'ecouloit. L'un est appellé
κασωρ; nom d'un animal aquatique
et plongeur, analogue a κασαλιη
fontaine, meme equivoque λυτρα
qui signifie un animal et un bain. Lautre
πολυδευχες qui coule abondamment
1 mot biffure ελενη soeur, sign. vase, riviere.

Les deux freres sont appellés διοσκονρα
parcequ'ils sont enfans de la pluie, tous
deux fameux αθλητοι c'est a dire
puiseurs d'eau.

Selon un autre traddition, ou plutot
equivoque, Jupiter changé en Cygne
eut commerce avec νεμεσις fille de
l'ocean, changée en oie. νεμεσις est
un ecoulement d'eau qui se change
en χην un lieu creux, ou riviere.

L'oeuf de Nemesis fut deposé dans
un marais et conservé par Leda. &c

Castor et Pollux epouserent les filles
de λευκιππος cad de l'eau blanche
et sulphureuse de la ils furent representes montés sur
des chevaux blancs avec des chapeaux
couronnés de joncs. Dans les sources sul=
phureuses, il paroit des flammes ou
feux follets, dela les feux nocturnes
sur mer appellés Castor et Pollux.

<152v> Les deux filles de Leucippe etoient nom=
mees φοιβη, ιλαειρα, noms de la lune
qui sign. brillantes; deux epithetes données
aux feux appellés Castor et Pollux.

Helene est devenue leur soeur parce
que ελανη sign. un flambeau.

On supposa vrais que l'eau sulphureuse
des fontaines Castor et Pollux avoient la
vertu de punir les parjures aussi bien
que l'eau du Shyx; d'ou la coutume de
jurer par leurs noms, aecasto, aedepol
le nom d'Hercule qui sign. 1 mot biffure firmite
claudens, devint aussi un serment
par son analogie avec jurer, serrer,
fermer, Mehercule, Mehercle.

Etendue
intégrale
Citer comme
Chavannes, Alexandre César, Anthropologie ou Science générale de l'homme: Mythologie, Tome I, [Lausanne], [1767]-[1800], cote BCUL A 909/1/9. Selon la transcription établie par Lumières.Lausanne (Université de Lausanne), url: http://lumieres.unil.ch/fiches/trans/891/, version du 30.08.2019.
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