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Lettre à Jean Alphonse Turrettini, Lausanne, 26 mai 1712
A Lausanne ce 26 Mai 1712.
Je suis ravi, Monsieur, que vous soiyez disposé à revoir vos Dissertations, & à
donner au Public les nouveaux Ouvrages dont vous parlez. Tout le monde les verra
avec plaisir, & vous pouvez compter que Mr de la Motte ne négligera rien de tout
ce qui dépendra de lui pour les faire bien imprimer. Il en sera lui-même le Correcteur,
& on ne sauroit trouver une personne plus exacte. Il a corrigé tout ce que j’ai publié, & il
corrige presque tout ce qui s’imprime de plus considérable à Amsterdam, entr’autres l’Hist.
de l’Académie, qui demande tant de patience & d’habileté dans un Correcteur. Je vous conjure,
Monsieur, & en mon nom, & au nom de toutes les personnes de bon goût, de qui je ne
crains pas d’être desavoué, de donner tout le tems que vôtre santé vous permettra à revoir
vos Dissertations, & à mettre au net les autres Traitez dont vous me parlez: quand ils ne
seroient pas en état à vous contenter tout-à-fait, il vaut mieux que vous les
polissiez & les perfectionniez dans de nouvelles Editions, que d’en priver plus long tems le
Public. L’Abrégé d’Hist. Eccles. sera surtout très-bien reçû, parce qu’on n’a
presque rien qui vaille en ce genre. Le Traité de la man. d’interpréter l’Ecrit. Ste, n’a
jamais été plus nécessaire: il servira à augmenter le bon goût qui se répand
peu-à-peu de toutes parts, & contribuera, plus que toute autre chose, à sapper
les fondemens des Systèmes Scholastiques. En un mot, tout ce qui viendra de
vous, quamvis non ultimam limam passum, sera, j’en suis sûr, très-bien
reçû.
Je vous envoie la lettre que vous souhaittez pour Mr l’Abbé Bignon. Mr
vôtre Cousin n’a besoin d’autre recommandation que de lui-même, parmi tous les
honnêtes gens; & la mienne d’ailleurs n’est pas de grand poids. Cependant je
n’ai rien à vous refuser, & Mr l’Abbé Bignon est si galant homme, qu’il
reçoît avec plaisir tout ce qui lui vient de la part des gens de lettres, avec qui il
entretient des correspondances par tout. Mr vôtre Cousin vous saura à dire s’il
n’y a rien qui me regarde dans le Journal de Paris; car, comme je vous l’ai dit, j’ai
envoié il y a deux ou trois semaines un Mémoire à Mr l’Abbé Bignon, pour être
inséré dans ce Journal.
Le volume de l’Uranologium & des Dissertations de Pétan me suffira pour le
présent; sauf à vous prier quelque jour de m’envoier les autres, si j’en avois grand
besoin. J’ai fait demander en Hollande si l’on trouva facilement l’Edition qui y fut
faite; car les magasins des Huguetons, qui l’ont imprimée, sont depuis long tems impénétrables.
J’eus toutes les peines du monde il y a trois ou quatre ans, d’avoir un exemplaire d’un volume des
Oraisons & Diss. des Mrs Le Clerc, Pére & Oncle, qui ne se trouvent que là. Je suis,
Vôtre très-humble
& très-obéïssant serviteur
Monsieur
Mr DuClerc m’a chargé de vous assûrer de
ses respects. Quand vous verrez Mr Rouviére, je
vous prie de lui faire nos complimens.
Barbeyrac