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Lettre à Frédéric de Sacconay, Paris, 10 mars 1779
à paris le 10 mars 1779
ah! monsieur que m'aprené vous? votre lettre m'a percé le coeur
je suis accoutumée depuis longtems avoir tomber des afflictions
sur la tete de mes amis les plus intimes, mais vous me m'aviez
pas encore fait eprouver de sentiment douloureux, je me plaisois
à entretenir notre trop malheureux ami du bonheur que vous
aviez dans votre famille, en effet je n'en ay jamais vû daussy
satisfesante, pour le coeur, et pour la raison, il n a plus de
bonheur à esperer dans la sienne et son ame sensible jouissoit
du votre, il partage bien dans le moment votre chagrin et votre
inquietude, cette chere enfans que vous vené de perdre montroit
un caractere adorable, je la regrette de toute mon ame, et je
frissonne en pensant à son exellente mere, je vous suplie de
me donner de ses nouvelles, je sçai bien que sa sagesse, sa pieté
votre tendresse, les soins de tous ceux qui la connoisse, qui l'aiment
et l'honnore, pourons la distraire, 1 mot biffure sa vertus soutiendra sa
resignation, mais je craint le dechirement de son coeur avec
sa faible santé, et vous memes que je vous plaint, je vous vois
serrer contre votre sein votre charmante et precieuse marianne
et je la voit occupée toute entiere de son tendre pere, dont elle, est
la joye et la consolation, je partage bien aussy tous les chagrin
et les allarmes de mesdames vos soeur, voulé vous bien monsieur
leur dire tous mes sentiments et les assurer ainsi que mesdames
vos filles que personne ne leur est plus tendrement et plus
sincerement devoué que moi
<1v> depuis plus de 2 mois il m'est survenus une incomodité singuliere
aux 2 pouces on a cru que cetoit la goutte, mais il paroit que c'est
une maladie de nerfs, je ne puis les plier, n'y les relever que
par convultion avec un craquement que tout le monde entend,
et chaque mouvement me coute une douleur assé vive, quelques
fois meme je n'en puis pas faire du tout, jai fait tous les remedes
qu'on ma indiqué, et enfin je m'en tient au plus grand de
tous, qui est la patience, il m'en coute beaucoup pour écrire, mais
comme on ma conseillé à tous prix le mouvement je tante des
efort, je suis bien dedomagée de celui que je fais dans ce moment
par la satisfaction de vous entretenir du vif interest que je prend
à tous ce qui vous touche
C'est pour parler de votre digne ami qu'il faut avoir du courage,
ses chagrins ne prenent point de fin, ses odieux enfans ne
cesse de verser l'amertume sur sa vie, il na que les du Salliant
pour sa consolation, et voila que sa pauvre fille a failly le jetter
dans le desespoir, elle est à son 16eme jour d'une fievre putride
avec la malignité, apres nous avoir donné les plus vives
allarmes, Dieu mercy elle est absolument or de danger depuis
le 12; et ces medecins assurent qu'elle cera en parfaite santé le 21.
il a encore eut il y a 8 jour une corvée bien etrange, vous
vous rapellé peut etre un homme qu'on apelloit le Colonel St Leu,
qui etoit tres famillier chez lui, il avoit naturellement l'air
serieux, il ce disoit malade de puis quelque temps, ce qui lui
donnoit l'air triste, mais cela n'inquietoit personne, il dina chez
le dimanche chez moi, et ce mercredit matin on le trouva
sur le boulevard la tete cassée par un pistolet qu'il tenoit
<2r> encore dans sa main, il avoit une lettre à la boutonniere adressée
au lt de police qui en renfermoit une adresse à notre ami pour
lui recomander la memoire et le cadavre de son fidelle... sans
signature, de sorte qu'il fut obligé d'aller reconnoitre ce malheureux
il demanda qu'il fut reporté chez lui, et enterré honorablement
ce qui a été fait, voila pour son cadavre, à légard de sa memoire
ce pauvre homme y avoit pourvü lui meme, en fesant toute
sa vie des actions honnettes, il avoit deposé depuis du tems un
paquet cachetté à l'adresse de votre ami, contenant ses dernieres
volonte, une lettre pour le Roy de pologne, et une pour chacun
de ses amis, dans les quelle il y avoit des billiets à ordres des
legs qu'il leur fesoit, celui de Gebelin est de 2000 lt il dispose de ses
bijoux livres meubles en faveur de ses amis aussy, et de la nipes
à son laquais, sa lettre est de 8 page ecrite avec tout le sentiment
et toute la raison possible, il ne parle pas de son projet de ce detruire
mais de sa mauvaise sante, qui n'etoit que dans son ame,
il n'en avoit point de signe exterieur, on ne scai à quoi attribuer
une fin si tragique, et si lomgtems meditée, il etoit bien venus
par tout, fort à son acte du coté de la fortune, sage dans sa
conduite, honnette dans ses maniere, on ne lui connoissoit
aucune passion, n'y aucun inconveniens dans sa position, tous
ceux qui le connoissoit ont été fort touché dune fin si funeste,
et c'est au travers des chagrins les plus cuisant que votre amy
a été obligé de ce preter à remplir les desirs que pauvre homme
avoit manifesté
je mapercois monsieur que ma lettre est remplie didée, et dimages
douloureuse, je vous en demande pardon, je ne doit pas vous
<2v> divertir, mais je devrois vous distraire, je scai que vous etes fort
bien instruit des affaire publique, je ne vous en parle pas, les
méconte sur mr distamt deplaise fort, les embaras sur les
finances sont un peu moindre, l'argent, qui avoit été fort
resseré, reparoit, il y a eut un emprunt de 14 million sur les
employé des fermes, ont en fait encore un de 20 milions en
rente viagere, on tient la paix d'allemagne pour assurée
ce qui satisfait beaucoup parce que nous voila quitte de la
guerre de terre
menagé votre santé monsieur donné moi de vos nouvelles et de
tout ce qui vous est cher et, ne douté jamais de mon inviolable
attachement