,
« Assemblée LXXVI. Lecture du chapitre de l'Anti-Machiavel "Comment un Prince doit faire pour se faire estimer" », in Extrait des conférences de la Société de Monsieur le comte de la Lippe, Lausanne, 02 janvier 1745, vol. 2, p. 404-406
LXXVI Assemblée
Du 2e Janvier 1745. Présens Messieurs DeBo=
chat Lieutenant Baillival, Seigneux Bourguemaistre, Polier
/p. 405/ Professeur, Seigneux Boursier, Seigneux Juge, D’Apples Professeur,
Baron DeCaussade, DuLignon, De Saint Germain Conseiller,
Seigneux Lieutenant.
Messieurs, Votre derniere conference roula surDiscours de Monsieur le Comte.
ces deux articles. Vous prouvates l’obligation ou chacun est
d’observer les bienséances d’état; Et vous montrates l’utilité de
ces bienséances.
L’état dont il s’agit ici, c’est l’assemblage des diverses cir=
constances qui distinguent un homme d’un autre, c’est une ma=
niére d’être relative à la Société.
Les Bienséances dont nous voulons établir l’obligation
sont les marques extérieures des sentimens dont nous devons
avoir le cœur rempli.
Tous les Hommes dans quelque état qu’ils soient sont
obligés à remplir de certains devoirs les uns envers les au=
tres, et envers la Société. Le Prince est obligé de veiller à
l’avantage du Peuple qui lui est soumis. Le Sujet est obli=
gé d’obéir au Prince qui le gouverne. La Société ne sau=
roit fleurir si les Individus ne sont persuadés que tous les
Membres qui la composent sont dans la ferme résolution
de remplir chacun les Devoirs dont ils sont chargés, lors=
que l’occasion s’en présentera.
Sans cette persuasion il n’y aura point de confiance
réciproque, et l’on ne fera ce à quoi l’on est engagé qu’a=
vec repugnance, qu’avec défiance, et par là la Société
soufrira du peu d’empressement et de zèle que les divers
Ordres d’Hommes qui la composent, auront à s’aquiter
des Devoirs qui leur sont imposés.
On peut conclurre de là que chacun est obligé de
manifester qu’il a une sincère intention de remplir ses en=
gagemens. Or on ne peut faire connoitre cette intention
que par de certaines actions. Donc chacun est obligé de fai=
re connoitre par ses actions et par sa conduite qu’il est
dans ces dispositions.
L’utilité de ces Bienséances ou de ces actions qui té=
moignent les Sentimens dont nous sommes pénétrés est
très grande; elles font que chacun remplit avec plaisir &
avec empressement les obligations qu’il a à notre égard,
dans la persuasion ou il est que nous remplirons aussi les
nôtres à notre tour; elles établissent une confiance récipro=
que /p. 406/, elles gagnent le cœur.
Mais en parlant de ces Bienséances, il en est une qui me
regarde, c’est de vous témoigner, Messieurs, ma vive recon=
noissance pour les soins que vous prenez de moi, et pour l’af=
fection dont vous me donnez de si fortes preuves, en travail=
lant à remplir mon esprit de connoissances solides et mon
cœur de beaux sentimens. Recevez aussi, Messieurs, les vœux
ardens que je renouvelle aujourd’hui pour votre conservati=
on et pour votre bonheur.
On a lu un Chapitre de l’Anti-Machiavel qui a pourSujet de la Conférence. On a lu un Chapitre de l’Anti-machiavel.
titre, Comment un Prince doit faire pour se faire estimer,
Et on a trouvé que si l’Auteur avoit joint aux Leçons de Mo=
rale, qu’il donne pour corriger les Principes dangereux de Ma=
chiavel, la pratique de ses Sages Maximes, la réputation de
Machiavel & son Système de Politique seroit tombé en
ruïne.
On a proposé pour la huitaine la Question suivante,
Comment on peut concilier la subordination dans
laquelle les Hommes vivent les uns a l’égard des
autres avec les Principes de l’égalité naturelle?