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Lettre à Frédéric de Sacconay, Le Bignon, 28 juillet 1774
au Bignon Ce 28 juillet 1774
Depuis ma derniere lettre écrite, mon cher ami, mon
rhumatisme m'a rengregé de sorte, malgré toute recette
et brulure, car je me deffens toujours de mon mieux, qu'
enfin je ne peus plus bouger de mon lit, ni dans mon lit.
c'est là ou j'ai reçu votre lettre du 20 du courant, et je
vous répons de dedans lebain où l'on m'aporté a quatre
j'ai fait ce que j'ai pû pour me remuer, je vous assure,
en marchant, mais je n'ai pas pû les chasser comme vous,
car il y aura demain 3 semaines que cela me tient. sitot
que je pourrai me soutenir en voiture, on me condamne
aux eaux et douche dumont d'or. Dusaillant m'y amene
et ils ont dejà écrit que j'y arriverois le six; je le
desire puis qu'il faut y être, mais je n'en crois rien.
Reste pourtant, mon cher ami, qu'en supposant que
dans ce tems là j'y puisse être, cela me mange tout
le mois d'aout, et ce ne seroit pas la peine d'aller à
vous en 7bre pour bruler tout, vous être à charge aux
vendanges et puis revenir en mauvaise saison. Ce
contretems m'a d'autant plus faché que j'y touchois;
mais cet article est réparable l'année prochaine, et je
vous le promets si Dieu me rend santé. mais j'ai regret
aussi à cet homme de la montagne; car de ma nature
quand je me porte bien, je ne m'écoute gueres et je présume
<1v> beaucoup; mais quand après cela, il me vient du mal
réel quelconque, je ne laisse pas de sentir qu'un foye
très flasque et un diaphragme paresseux, font aisement
complication avec quelque sorte d'incommodité qui me
survienne, et que le bon homme pourroit branler au
manche aisement. je serois bien aise donc de voir votre
docteur bienfaisant, mais vous voyés que Dieu me le
deffend pour cette année; car d'abord il faut ratraper
ses reins, car je ne connois rien de si souffrant et de
si embarrassant qu'un tel rhumatisme sur telle partie
adieu, mon cher ami, ne me parlés pas de mes dames vos
soeurs et fille, car cela me fait trop de mal. mon frere
prétend toujours que sortant à la fin du mois d'aout
du mont d'or, comme il n'y a que 30 lieues de clermont
a Lyon, je puis egalement vous aller faire ma visite
mais je pense que ce seroit tout bruler; et puis comme
selon notre plan, il falloit envoyer à Paris pour
chercher de beaux habits noirs a cause de vos villes, et
que Certainement je ne porterai que des surtouts au mont
d'or, quand je voudrois virer à vous je ne le pourrois.
adieu, mon tres cher ami, tout le monde ici vous aime
et embrasse. mille et mille respects à vos dames et
pendés mon portrait de maniere qu'il fasse la réverence
quand elles entreront. Si elles voyoient l'original aujourd'hui
elles le trouveroient un peu rudament changé sur la route
adieu, je vous donnerai de mes nouvelles encore avant de partir, si
jamais j'en viens à bout
Mirabeau
a monsieur
Monsieur de Saconai en son
chateau de Bursinel, près Berne
Par Pontarlié