Transcription

de coulomb le 20 x^bre 1773

j'ay reçu mon cher amy votre lettre du 9^e x^bre et j'y vois que
je n'ay pas un moment a perdre si je veux que la mienne vous
trouve encor a bursinel. je ne pourrois en vérité vous éclair=
cir que par un volume historique passé présent et futur, qui
mème ne seroit pas a propos; outre que je n'en aurois pas la
force, menant d'icy par écritures de ma main une famille en
émoy et en action, des amis agités et furieux, car les encombres
nous en font toujours trouver grand nombre, et la masse des
honnètes gens indignés, qu'il faut pourtant remercier quand
ils vous donnent des marques destime et d'enthousiasme, dont on
n'a que faire, quand on craint le bruit par nature, et qu'on doit
le craindre par celle mème de l'affaire.

qu'il vous suffise donc amy très cher de scavoir 1° que dieu me
conserve la tète, et ils en conviennent touts, parce que je la colle
a ma conscience, 2° que languissant encor et a ma première
sortie, j'ay dû venir icy a la campagne, chez un amy qui ou
je me refais néanmoins très bien. 3° qu'a force de suspends
néanmoins le temps de la crise aproche, et que de manière ou
d'autre leffet de cette crise sera, ou de finir, quelque dégouté que
jen puisse etre surtout a un tel prix, la grande affaire pendante
et capitale qui devoit me tenir en suspends cet été, auquel cas
je deviens libre autant que je le puis etre et nos projets s'avancent
d'autant: ou de prendre un tour tout contraire, auquel cas, par
d'autres raisons majeures et prises seulement dans ma tète, je vous
embrasseray cher amy peutètre plutost que vous ne pensés.

je ne puis pour le présent vous en dire davantage. adieu quand
vous m'écrirés mandés moy si grasset trouve du débit de l'instruction
populaire.

a monsieur

Monsieur de Saconai, en son
chateau de Bursinel, en suisse
En Suisse
Par Pontarlier