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Lettre à Frédéric de Sacconay, Paris, 02 juin 1758
de paris le 2e juin 1758
je me trouve mon cher saconay, obligé de vous écrire
pour un fait qui m'intéresse fort, presqu'aussitost
que ma dernière lettre est partie.
je vous prie de vous faire informer de berne, s'il
est vray que votre état ait pris ombrage de la
capitulation qui fixe la levèe du nouveau régiment
de porentruy, et qu'il motive cet ombrage sur ce
que l'un des deux bataillons dont il est composé
doit demeurer auprès du souverain chex lequel ce
régiment est levé; ce que c'est en un mot que cette
affaire, et quelle est la sorte de chaleur qu'y met=
tent les bonnes tètes de votre ètat, 1 mot biffure d'ou
part cette nouvelle idèe, et jusqu'ou elle peut aller.
ne craignès point du tout que ce que je vous
demande ait aucun trait a rien d'essentiel icy; vous
me connoissès assès 1° pour en croire a cet égard
ma parole, 2° pour juger que je ne suis point
homme a vouloir me faire valoir ny m'immiscer
dans les affaires au moyen de petites bribes politi=
ques que je pourrois envahir ç'a et la. je suis a
mille lieues de cette façon de faire, autant par mon
<1v> caractére que par mon existence. tout l'intérest que
je prends a cecy ne part que de celuy qu'y ont des
personnes qui me sont chères, et a cet ègard je n'exige
de vous que ce que la prudence vous permettra de
me faire scavoir.
autre question; est il vray qu'on a arrèté a londres
et a leipsic le revenu des fonds des bernois, soux
le prétexte de l'engagement du régiment de ienner?
c'est une nouvelle de traverse a laquelle je ne crois
aucun fondement, attendu l'absurdité de l'opération
quelle supose, en un temps ou les emprunteurs ont
tant d'intérest a mènager les prèteurs.
mandès moy je vous prie mon cher amy le plus
promptement que vous le pourrès, ce que vous
scaurès sur ces deux choses: adieu je vous embrasse
de tout mon coeur.
a Monsieur
Monsieur de Sacconai
a Berne en Suisse Bursinel
