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Lettre à Frédéric de Sacconay, Paris, 18 décembre 1754
de paris le 18e Xbre 1754
nombre d'affaires arrivèes a la fois mon cher saconay, et brochant sur
le tout les détails d'une couche de Me de Mirabeau, m'ont empéché de rép=
ondre aussitost que je l'aurois voulu a votre lettre en datte du 30 du mois
passé. le mème jour dieu m'a accordé un second fils; quoyque ce soit
un dixième enfant, cepandant comme je n'avois qu'un garçon et que
j'avois j'ay beaucoup de biens substituès ce qui en faisoit souhaiter d'autres; ma
philosophie a cet égard a été dèmontée par la joye des domestiques et de
ma maison qui est nombreuse, de la cela a gagné mes amis et enfin tout
le monde m'en faisoit compliment chose rare en un paÿs ou le préjugé
de touts le plus contre la nature et l'ordre de dieu est assès commun sur=
tout parmy les grands. quand a vous mon cher et premier amy je
suis sûr que vous m'en féliciterès de bon coeur, du moins en pareil cas
aurois je pour vous une vèritable joye.
je suis fort aise que vous ayiès èté content de Me de langallerie et je
luy ay obligation de ne m'avoir pas oublié; quand a la proposition d'une
chambre que je lui priay de vous faire, je ne pensay pas vous aprendre
rien de nouveau; il doit ètre dit entre nous qu'en touts lieux ou la
providence voudra nous rejoindre, celuy qui y aura domicile y sera moins
le maitre que l'autre; et je n'oublie pas que la première exécution de ce
traité a 22 ans de datte bien complète, et fut de telle façon qu'elle ne
doit jamais sortir de ma mémoire.
montpézat m'est tombé de mème icy deux fois, mais il m'a paru le
mème qu'a l'académie, il me parut penser a ses affaires, quoyque
toujours un peu juif errant; je luy envie bien le plaisir qu'il a eu de
vous embrasser.
<1v> je suis très fort de l'avis mon cher amy que vous exécutiès le projet
du voyage de Me de saconay, et acceptiès a cet égard la proposition
de Mrs vos parents; c'est une ressource contre les peines de l'incertitude
qu'elle partageroit avec vous, et en cas de mauvais succès, l'objet vu
de loin aura moins de prise de beaucoup sur elle, elle soulagera vos
peines au lieu qu'elle les eut augmentèes en les partageant de plus près
en un mot quel que soit lévènement c'est la le mieux et mon amitié
vous èxhorte vivement de prendre ce party la.
vous recevrès cette lettre au commencement de l'annèe mon très
cher, je vous la souhaite heureuse et dans les vues de la providence par
votre volonté comme elle le sera par le fait; j'en dis autant a Madame
que j'assure de mon respect, eta Me votre mère, a Mes vos soeurs et
a toute votre famille; adieu mon très cher je vous embrasse de tout
mon coeur.
A Monsieur
Monsieur de Sacconnai au
chateau de Bursinel
a Geneve a Berne
en suisse