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Lettre à Frédéric de Sacconay, Paris, 09 avril 1736
de paris ce 9e avril 1736
je vous suis bien obligé mon cher saconay, de la distinction
que vous faites de mon amitié, mes sentiments pour vous
en méritent qui ne puissent etre comparés a rien
rien personne ne tire plus la raison au clair que vous et mr de
villards, jay passé deux heures chex luy ce matin, je nay eu
avec luy que des conversations, superficielles, ausquelles jay
pourtant trouvé des charmes infinis, la pluspart des gens
ne disent que des mots mais vous dites des pensées
ce que vous me dite mandés au sujet du faux tour que les
applaudissements mal dirigés peuvent donner a notre
esprit, est admirable cette réflexion est nouvelle pour
moy et je la suivray, de meme que la leçon que tu me
fais sur limpiete, mon dieu que de pareilles lettres ne
m’arrivent elles dans un temps ou jetois plus a moy
tu es lhomme du monde qui se possede le mieux surtout
sur l’article des femmes, mais il te faudra tout cela pour
ne te pas laisser aller a tout ce que voudra te persuader
la charmante g. a ta place je naurois pas tant
de force
<1v> larrangement de l’appartement de mr de villards ses
discours et un livre intitulé essay sur l’homme par
mr poppe, m’ont presque donné le gout de la retraite
le livre ne traite pourtant pas de cela mais jay trouvé
quelques raisonnements qui y conviennent et auxquels
il ny a rien a répondre
mande moy la définition de l’affaire de lofficier allemand
adieu mon cher saconay l’on na pas toujours icy le
temps de faire une longue lettre rien nest égal a mon
amitié pour toy
mirabeau
assure tout ce qui tappartient de mes tres humbles respects
fais souvenir un peu de moy ton aimable societé
