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Lettre à Frédéric de Sacconay, Chanceaux, 18 juin 1732
de chansau 18 juin 1732
je reviens a la charge mon cher amy mais il faut prendre
les gens comme ils sont je vous promets pourtant pour vous
consoler que quand je seray en lieu ou je pourray recevoir
vos reponses je me regleray la dessus apres tout ce que
j’en fais cest pour vous faire voire que personne ne vous
aime mieus que moy en verité plus je m’eloigne de vous
et plus je le sens vous aurès peutetre assés mauvaise idée
de moy pour croire qu’il est vray comme je vous l’ay mandé
que je veus passer pour homme a maitresse mais je vous proteste
que jay dit cela pour me divertir car ils ne sont pas assès sots
pour ne penser
que peut tu mander a sylvie
luy promets ne tu touts les jours
de l’aimer toute la vie
a la sotte preuve d’amour
en effet l’on n’ecrit pas touts les jours a une maitresse dans
une route et puis je leur ay dit a qui j’ecrivois en tel effet
un amy bien veritable
est mille fois plus a priser
qu’une femme quoyque aimable
quand on vient de la quitter
quand mes vers seroient aussi bons qu’ils sont mauvais je
serois proscrit si l’on les montroit au beau sexe ma foy
je luy veus pourtant bien du bien
<1v> faute d’une aimable sylvie
qui put partager mon amour
avec fille d’infame vie
je passerois plutost mes jours
cela est faux, mais je deviens diablement paillard et ne puis
pas metre en usage cette leçon que je metois gravée dans l'ame
quand la paillardise vous tient
fuyés le sexe il vous enflame
ce bet enchanteur ne vaut rien
il perd les biens le corps et l’ame
nouveau sujet de procès avec luy, autant d’impromtus que j’ay
fait en vous ecrivant il en ont bien l’air
monsieur le chevalier venés souper cela
veut dire adieu pour vous adieu
le cher de mirabeau