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« Sur la timidité », in Journal littéraire, Lausanne, 22 août 1781, p. 67v-68
<67v> Du 22e Août
Assemblée chez Mons. Vernéde Président; Présens Messrs Gillies,
Verrey, Verdeil, Levade et Secrètan Secretaire
La Question roule sur la Timidité.
Nous devons à Mr Gillies une Définition très juste de la Timidité;
c’est la crainte de danger combinée avec le sentiment de nôtre
propre foiblesse; cette crainte est instinctuelle chez les
Animaux; elle l’est aussi chez les Hommes, en tant qu’elle est
nécéssaire à la conservation de leur Etre physique.
Mr Verrey considérant la timidité sous un point de vûë moins
général l’a definie cette retenuë dans les discours ou dans les
actions provenant de l’apprehension de parler ou d’agir peu
convenablement.
Mr Verdeil voudroit qu’on distinguat une timidité physique suite
nécéssaire de la délicatesse des organes, d’une timidité morale
qui doit sa source à l’éducation, à l’inéxpérience &c.
Mr Levade et Mr le Président ont lû d’excellens Mémoires
sur cette matière. Mr Levade fixe les bornes qui séparent
la timidité de la modestie, de la poltronerie, de la pusillanimité.
Il l’examine dans plusieurs jours différens. Tantôt elle est
excusable ou criminelle, continuë ou momentanée, naturelle
ou artificielle; celle ci est une Arme que certaines femes
marient avec succès. Il est aussi une Timidité Religieuse;
ici la timidité ne sauroit être un défaut; c’est au contraire
le seul préservatif contre les chûtes. Enfin l’Auteur s’étend
sur les moyens de guérir la timidité et sur les ménagemens
qu’on doit aux persones timides. Ce dernier point est
traité avec la plus grande délicatesse. Nous trouvons
dans le discours de Mr Vernède des distinctions très fines
sur les causes de la timidité; il examine ses effets sur des
persones de différens âges; Il avertit qu’il est des
cas ou on la confond mal à propos avec la prudence.
Il pense que les jeunes gens ne tombent souvent dans ce
déffaut que par la fausse idée où ils sont qu’ils doivent
se montrer dans le grand monde tout differens de ce qu’ils
sont dans le particulier, que leur conversation doit être plus
spirituelle, leurs conversationmanières plus relevées.
Au reste l’on voit assés que nous n’avons pas voulu faire
un Extrait régulier de ces Mémoires; nous nous contentons
<68> d’en tracer une Esquisse legère qui n’en peut donner qu’une
idée bien imparfaite. Le Secretaire avoit devant les
yeux la bonne définition de Mr Gillies; Convaincu de sa
propre foiblesse il a été assés timide pour craindre de
defigurer des Ouvrages intéressans.
