Transcription

Barbeyrac, Jean, Brouillon de lettre à Leurs Excellences de Berne et aux Curateurs de l'Académie de Lausanne, Lausanne, [mars] [1717]

Illustres et Magnifiques Seigneurs

Ce n'est pas sans regret, que je me vois obligé
de demander mon congè à LL. EE. et de m'adresser
pour cet eet à Vos Grandeurs, coe aux Sages et
affectionnez Curateurs de l'Académie, dont j'ai l'honneur
d'être Membre. Lors que LL. EE. me firent la
grâce de m'appeller de Berlin, 3 mots biffure,
pour exercer la nouvelle Profession en Droit et en
Hist. qu'elles fondêrent en 1710. comme je me fis
faisois un grand plaisir de 1 mot biffure venir dans leurs
Etats, pour jouïr de la douceur de leur Gouvernt
j'esperois aussi d'y trouver d'ailleurs tous les agrémens
possibles par rapport au 5 mots biffure comerce et à la société de ceux avec qui j'aurais à vivre:
douceur du commerce: et à cet égard là mes espérances
n'ont point été trompées. J'ai vêcu ici tranquillement
et trouvé bien des Amis, dont la séparation me sera
un grand sujet de tristesse. Mais j'avouë 2-3 mots biffure
6-7 mots biffure qu'à l'égard de
d'une meilleure la fortune, que j'étois venu chercher ici, et dans dont l'espérance m'avoit
delaquelle j'avois fait quitter à Berlin avec un etablissement à Berlin et je m'étois par là éloigné de mes parens
7 mots biffure dont j'étois content, tous mes parens et un bon nombre 1 mot biffure d'amis, dont j'etois content les les choses se sont rencontrées fort autretq je n'avois crû .
je n'ai point trouvé ce que m'étois proposé. J'avois
demeuré 1 mot biffure ici autrefois, dans ce païs dans ma première jeunesse; et tout y étoit alors à grand
marché; de sorte que, quoi que la pension qu'on
m'offroit ici ne fût pas considérable en elle-même,
je me fla crus m'imaginai qu'elle le fuit, dans la supposition
de l'ancien état des choses, que je trouvai fort changé. Je
vis bien tôt, qu'il faisait 1 mot biffure beaucoup plus cher vivre à Lausanne, qu'à Berlin, et ql
qu'il 2 mots biffure n'avoit fait autrefois à 1 mot biffure Lausanne même. Ainsi, ma pension n'a
point été suffisante pour m'entretenir avec ma famille.
Les petites profits aubaines des Leçons particulières auroient
pû y suppléer en quelque manière: mais la
jeunesse de ce païs a si peu d'inclination pour les
bonnes choses, et y est si peu encouragée par ses parens,
que je n'ai eu que très rarement des ces sortes d' Auditeurs,
3 mots biffure et en très petit nombre, 1 mot biffure pour donner des leçons. Une
autre chose auroit pû encore m'aider, c'est le profit je veux dire, un nombre
qu'atire des Pensionnaîrs: mais je me suis vû
hors d'état d'en tenîr, faute d'avoir une Maison
<1v> fixe et assez grande. comme Tous les Professeurs en avaient ici
autrefois, et comme j'avois crû q LL. EE. leur fournissaient, et j'avois
compté d'en 1 mot biffure trouver une q me fût affectée. Il y a quatre ans, que 1 mot biffure l'occaon s'etait
s'etait présentée d'en 5 mots biffure avoir je priai LL. EE. de vouloir
bien l' en acheter; et une 2 mots écriture fû ainsi a très bon compte et quoi q ma demande ne fût pt accordée pr le coup, et Monsr le Tresorier Steiger nous dit ici, que
qlq heurs après, en pleine Academie, q la chose n'etoit que differée. Cependant je
n'ai pointdepuis aucun cet de cela cela, et depuis q je suis ici 1 mot écriture j'ai eté obligé
de me loger coe j'ai pû, tous les jours exposé à demenager et chérement,
quoi que je n'eusse du logement q pour ma famille; exposé d'ailleurs à tout moment
fréquement à l'incomodité de déménager. J'ai refusé un très
grand nombre de pensionaires, surtout Etrangers, q seroient venus
ici, s'ils avoient pû loger chez moi; et il est certain s'en seroit
presenté bien d'autres, si l'on n'avoit 4 mots biffure sû l'impuissance où j'étois de les retirer.
q je n'avois pas de quoi les loger. Malgré tout cela, je
ne me suis point plaint de mon sort: j'ai vêcu tranquille tout douct le
mieux q j'ai pû; je ne me suis point 2 mots biffure intrigué, pr chercher
qlq meilleur établisst j'ai attendu tranqllt q la providence
me le fournit elle-même; sans penser seult q cela dût
jamais arriver; et la vocation q m'est adressée, me vient
d'un endroit où jen ai j'avois aucun Ami, pas même aucune
conaissance. Les avantages La pension fixe qu'on m'offre dans l'Université
de Groningue e de 1500 fl. 3 mots écriture, va au delà du double de tout ce que j'avois ici, sans compter
et j'aurais l'on me donne outre cela une Maison q m'est destinée avec un jardin, dans
l'androit le plus comode de la Ville, et, outre cel dans un païs où l'on m'estime qla fa vivre st pour le moins à 1 mot biffure aussi bon marché qu'ici. Mais d'ailleurs le casuel
outre cela tout le casuel qu'il est, ne peut qu'y être considérable, de la
manière q les choses vont dans les une Universitez, surtout dans coe celle la
celles de Hollande. On a toujours là des Collèges particuliers, et nombreux:
il y a vient des profis assez grands 5-6 mots biffure de la
promotion des Docteurs, du Rectorat, q circule et de bien d'autres affaires
Académiques. Cela étant, un homme comme moi, q e
Réfugié, et qui a famille, pourroit-il refuser un tel
établisst sans fa trahir ses intérêts, et ceux de ses Enfans? pt être même ceux du public, à q il devient par là plus en état d'etre utile.

J'en laisse fais juges Vos Grandeurs le juger. Elles savent bien aussi,
q les gens de lettres, q ne regardet pas leur profession coe
un vil mêtier, et q ont à coeur de s'éclairer eux-mêmes
pr être en état d'instruire les autres, 1 mot biffure sont obliges à faire
des dépenses assez considerables, sans avoir, aucune ressource pr cela
pour y fournir les ressources qu'on a dans les autres genres
de vie. Il leur faut des Livres, il faut qu'ils entretiennent
des correspondances pr les avoir, et pr même faire venir surtout dans un païs coe celui-ci, où il n'y a pt de Bibliothèques, il faut qls aient comerce avec les savans
des autres païs. Le manque de Tout cela coûte; et comment
y fournir, lorsqu on n'a pas même de quoi vivre? 1 mot biffure
2 lignes biffure
Pour le bien q je veux et à la Rep. des lettres en général, et
à ce païs en ptrculier, je souhaitte de tout mon coeur,
que ceux q me succéderont, trouvent dans ce poste, avec
de plus grands avantages, aussi bien le plaisir de voir plus
de gens q goûtent l'utilité des sciences, et q s'y attachent
<2r> comme il faut. Je l'apprendrai avec plaisir dans mon éloignement,
et sas en être jaloux. C'est un des voeux les plus avantageux q
je crois pouvoir faire pour le bien q regarde les sujets de LL.EE. et par conséquent pr LL. EE. Elles mêmes, q ne se proposent q 1 mot biffure le bien de ceux q Dieu a mis sous leur juste dominaon legitime.
J'aurai toûjours pr elles toute la vénération et toute la reconoissace
possible, et je prierai Dieu ardemment le Seigneur ql bénisse tous leurs
1 mot écriture et 1 mot biffure 1 mot biffure projets, qu'il conserve les personnes 1 mot écriture toutes les personnes
q sont Membres du Conseil de 1 mot écriture de l'Etat la Rep.; et qu'il vous comble vous en
particulier, Magnifiques très honors Seigrs de toutes ses
bénédictions les plus précieuses. Ce sont les sentimens respectueux de
celui q se dira toute sa vie

Illustres et Magnif. Seigneurs

De votre Grandeur

Le très humble et
2-3 mots lacune

Etendue
intégrale
Citer comme
Barbeyrac, Jean, Brouillon de lettre à Leurs Excellences de Berne et aux Curateurs de l'Académie de Lausanne, Lausanne, [mars] [1717], cote Koninklijke Bibliotheek, Den Haag, Hs. 121, E 3. Selon la transcription établie par Fiammetta Palladini pour Lumières.Lausanne (Université de Lausanne), url: http://lumieres.unil.ch/fiches/trans/1275/, version du 14.02.2024.
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