Transcription

La Harpe, Frédéric-César de, Mémoires. Suite de la cinquième période, 1801-1802 (Cahier K), Lausanne, 1837

Cahier K.

Continuation des Mémoires
de F. C. delaHarpe
depuis le mois de Juillet 1800
jusques à l'année

 

Suite de la Ve Période

2d Sejour à St Petersbourg
d'Aout 1801. au 7. May 1802
et retour à Paris en Juillet 1802

 

Lettres et Mémoires de ma Correspondance
insérés ou indiqués dans
ce Cahier

Fragment d'une Lettre du 24 Avril. 1802.

Considérations sur la conduite de S. A. I. le gd D.
Constantin.

Fragment de la même lettre. sur l'Aristocratie prétoriene
des régimens de la garde

Lettre du 29e Avril 1802. Observations rélatives à
la Réponse à faire au Doklad du Sénat

Fragmens d'une lettre du 4e Juin 1802 de Königsberg.
Observations et Itinéraire

Fragmens d'une lettre de Leipzig du 23. Juin 1802.
Suite de l'Itinéraire.
Observations sur l'administration prussiene

Fragmens d'une lettre de Francfort du 27. Juin 1802.
Suite de l'Itinéraire.
Observations sur 1 mot biffure quelques contrées de l'Allemagne,
derniers Voeux et conseils avant de rentrer
en France.

fin de la Période Ve des Mémoires

 

<230> Avant de m'éloigner de l'Empereur, je
desirai soulager mon coeur, en lui offrant
of présentant une dernière fois, mes obser=
vations sur 1 mot biffure la conduite de son frère
le Gd Duc Constantin, qui entourré de
Complaisans vicieux qu'il protegeoit ou=
vertement, s'attiroit deja courroit le risque de s'attirer l'animadversion
publique. Plusieurs fois il en avoit été ques=
tion, dans nos entretiens, des moyens de le
soustraire à ce dangereux entourrage, auquel
il tenoit par la générosité de son coeur, qui
ne lui laissoit voir dans les individus qui le
composoient, que des homes poursuivis par
une malveillance injuste et jalouse. 1 mot biffure
1 mot biffure L'attachement que je professois
pour cet ancien élève, qu'on m'avoit 1/2 mot biffure
1/2 mot biffure enlevé au moment où il avoit le
plus besoin de conti d'être fortement occu=
pé et surveillé, me décida à revenir à
la charge, et à transmettre le 24 Avril à l'Empereur
1 mot biffure les considérations suivantes.

 

Il m'en coute de presser V. M. I. de faire
paroitre et sentir d'avantage l'Empereur
à Mgr vôtre frère: l'attachement qui me
lie à tous deux, me dicte ce conseil. 

Vous ne devez, Sire être influencé par
personne. A la raison, aux principes et à
l'austère vérité appartient exclusivement
cette prérogative; et cependant on répête
à tort ou à raison (ce que je ne déciderai
pas), que vôtre frère vous entraine quel=
quefois plus loin que vous ne voudriez.

On voit avec peine qu'il jouïsse d'une con=
fiance 1 mot biffure dont il n'use pas toujours avec
sagesse et retenue.

Je connois les motifs de votre condescendance;
ils sont louables. Vous voudriez le ramener
par la bonté, mais avec la conoissance que
j'ai de son caractêre, cette condescendance
est insuffisante, si elle n'est pas tempé=
rée par un peu de sévérité, et pour le
Bien de ce jeune home, il faut lui ap=
prendre qu'elle peut avoir un terme.

C'est un service à lui rendre, Sire, que
de lui apprendre qu'il est soumis aux
loix et à un Supérieur, come tout le
reste; qu'il ne lui appartient pas de
protéger ceux qui insultent à la décence,
et au bon ordre, et qu'il peut être puni
lui même pour avoir usurpé ce droit
de protection.

Des homes sans moralité et capables
de tout l'entrainent de faux pas en
faux pas, et l'opinion publique, dont il
dit, se moquer, se prononce de jour en

<231> jour, d'une manière effrayante contre
lui. 

Vous seul, Sire, pouvez y mettre un
terme, et sauver ce jeune home. Je
dirai plus, vous le devez, à votre peuple,
aux bonnes moeurs, à votre auguste
famille qui doit servir de modèle, et
à Vousmême qui êtes appelé à éxercer
la sublime fonction de Réformateur
en Russie.

Voici, selon moi, coment on pourroit
s'y prendre.

a) mander Mgr auprès de vous, en lui
fixant l'heure à laquelle il doit venir

b) l'accueillir avec amitié, mais avec
un maintien sérieux, lui représenter
avec douceur ses erreurs et ses torts 1 mot biffure, avec douceur,
et en lui faisant entrevoir néenmoins
que votre patience fraternelle étant
fatiguée, vous serez réduit à regrêt,
à faire votre devoir, come Empereur.

S'il s'échauffe, et cela arrivera
sans doute, l'écouter avec calme, en
l'éxhortant doucement à se modérer.
S'il passoit de nouveau les bornes, lui
comander de sang froid, le silence; et
s'il n'en tenoit pas compte, le congédier
séchement, mais sans humeur, et ne
l'admettre en votre présence, qu'après
vous en avoir demandé la permission,
et surtout après avoir reconnu ses
torts. Tenez ferme sur ce point, je
vous en conjure., Sire! et imposez si=
lence à quiconque ôseroit intercéder,
ou se mêler de vos affaires domesti=
ques.

Il faut que ce jeune home se doute
de ce qu'en langage de cour, on appèle
une disgrace. Croyez, Sire, qu'on la
lui fera sentir; car ne ménageant per=
sonne, il ne sera pas ménagé lui
même.

c) S'il boude, ne pas s'en inquiéter.
En continuant à le tenir à une dis=
tance convenable, toujours sans humeur
apparente: en ne lui adressant la
parole en public, que lorsque ses fonc=
tions l'appèleront à vous parler
come à son Souverain: en coupant
court s'il entamoit un autre entre=
tien, et mettant de côté toute fami=
liarité, il ne tardera pas à s'apper=
cevoir, qu'il est tems de revenïr sur
ses pas.. Dans ce cas Sire, adressez
lui, en peu de mots, une éxhortation

<232> amicale, en peu de mots, rendez lui vos
bonnes graces, mais pas tout à la fois, et
qu'il remarque ces gradations; il a de
l'esprit; il les approuvera.

d) Je ne puis croire que Mgr persiste
à bouder longtems, surtout si V. M. I.
demeure calme et inébranlable.

Mais, si de faux amis l'engageoient à
persévérer dans ses torts, ou à les aggra=
ver; alors, ce seroit bien le cas de le
considérer come devant être sous tutêle,
et de confier momentanément à d'autres,
l'éxercice actuël de ses fonctions.

Il seroit triste d'être réduit à prendre
de pareilles mesures qui trouveroient
pourtant leur justification dans la néces=
sité; et je pense trop bien de Mgr pour
croire qu'il voulût s'expôser à une sem=
blable correction.

Peutêtre qu'un voyage lui eût fait
adopter d'autres habitudes. Aujourdui
il ne paroit pas s'en soucier. L'y con=
traindre seroit injuste et ne produiroit
aucun fruit.

Le ramener par un mélange de sévé=
rité et de douceur est tout ce qui reste
à faire.. Tandisque cela est encore
possible il ne faut rien épargner pour
réussir, avant que les méchans qui se
disent ses amis, abusent de sa jeunesse et
de son inexpérience, pour lui faire comet=
tre des fautes graves, que l'Empereur doit
prévenir, puisqu'il n'auroit pas le droit
de les pardonner.

Le tempérament du malade vous est connu
Sire. Vous seul devez être son médecin; mais
il faut de la fermeté et de la persévérance.

Mon intention est de lui demander un
entretien particulier, et s'il est disposé à
m'écouter je lui parlerai avec tout
l'intérêt qu'il m'inspire.

 

Je profitai de l'occasion pour rappeler
ajouter rappeler à l'Empereur certains

voeux que j'avois exprimé dans nos entre=
tiens et que je tenois à n'être pas oubliés

<233> Je rappèle à V. M. I. les bustes de
Trajan, Nerva, M. Aurèle, Scipion etc.
qui sont à Paris, et dont il seroit facile
d'obtenir de bonnes copies pour votre
Cabinet

Quel
A différentes reprises la question avoit
été agitée dans nos entretiens particuliers,
sur la convenance d'entretenir de
confier la protection du Gouvernement
à un Corps d'armée privilêgié, ou d'y
appeler à tour les régimens de la
grande armée. Cette Elle Cette question étoit demeu=
rée indécise; il me parut à propos de
la remettre sur le tapis, en rappelant
à l'Empereur mes précédens argumens.

 

Il me semble, Sire, lui disoi

Il me semble Sire, (lui disois je, à la
même date) que votre trône seroit bien
mieux gardé par des régimens de campa=
gne qui, tous les 2 ans, seroient relevés
par d'autres, et chercheroient par leur
bonne conduite, à mériter vos éloges.
Alors, vous connoitriez votre armée,
et vous seriez connu et aimé d'elle.

La distinction offensante établie en=
tre les Gardes et les régimens de campa=
gne, cesseroit, et ces derniers se récrute=
roient de sujets bien nés et bien élevés
ainsi qu'en Prusse, en Autriche et ailleurs.
Enfin, Sire, l'un des plus actifs foyers
des troubles et des révolutions en Russie,
seroit éteint, s'il n'y avoit plus de
régimens de gardes proprement dits,
et la Capitale seroit purgée d'une
foule de jeunes militaires, dont la
légêreté, l'inconséquence et la corruption
font très souvent des instrumens au profit
d'homes astucieux et pervers. Des éxem=
ples récens justifient ce que je dis.

Une opération pareille, si elle étoit
une fois résolue, ne pourroit s'éxécuter,
qu'autant que V. M. I. en garderoit
le Secret pour elle seule, jusqu'au der
=
nier moment; car tout ce qui est
grand en Russie, tient à la conserva=
tion de cette Aristocratie prétorienne.

Des camps d'éxercices formés anuelle=
ment autour de St Pétersbourg, ou
ailleurs, fourniroient des moyens assu=
rés pour l'éxécution, dès que tout aur=
roit été préparé d'avance, par vous
seul, et l'un de ces préparatifs seroit
la réduction 1 mot biffure successive des Sous-=
officiers sans fonctions réelles. 

 

<234> C'étoit le moment de rappeler à l'Empe=
reur quelques voeux, émis dans nos entre=
tiens, et auxquels j'attachois quelque importance.

 

Je rappèle à V. M. I. lui disois-je dans
cette lettre, les bustes de Trajan, Nerva, M.
Aurèle
, Scipion etc. qui sont à Paris et
dont il seroit facile d'obtenir de bonnes co=
pies pour son Cabinet.

Ces images, Sire vous diront bien des
choses. Plutarque, Polybe, Tacite, Thu=
cidyde et Gibbon pourront de tems, inter=
rompre vos occupations, en vous donant
de nouvelles forces, pour les reprendre.

On retrempe son ame, en conversant avec
les grands homes, et rien n'inspire plus
de courage, que lorsqu'on les voit aux
prises avec les obstacles et les périls. Vous
devez beaucoup à ces personages: conver=
sez Sire, dans le silence de vôtre Cabinet,
avec ce qui nous reste d'eux.

Je rappèle, à V. M. I. qu'elle doit à son
peuple, un bon portrait. 

Le présent le plus cher à mon coeur,
seroit un jour, celui de son portrait
peint à 3-4 caractères biffurel'huile, mais ressemblant.
Il ne sera pas un meuble d'ornement
dans la demeure de celui que vous honorates
publiquement du nom de votre ami, de
celui à qui vous accordates tous les droits
d'une amitié égale; il ne sera pas un sim=
ple tableau pour celà il en coûte tant
de s'éloigner de vous.

 

L'approche de mon départ
Peu de jours après Mrs de Novossiltzof
et le prince Adam Czartoryski se réuni=
rent chez moi, pour conférer sur la
grande mesure de la formation des
Ministêres, de qui les occupoit beaucoup,
et un peu après, le Comte Kotschoubey
nous réunit chez lui, pour discuter une
dernière fois, les bases de ce grand travail
et celles de la réponse à faire au Sénat.
Une tendance à peu favorable aux
vues que cette assemblée avoit avoit émises
dans sa Representation (Doklad), s'é=
tant manifestée, et pouvant, in=
fluer d'une manière
avoir une influ=
ence fâcheuse, si cette réponse 1 mot biffure
n'étoit pas une ne paroissoit pas
en même tems que l'Oukase destiné
à la création des Ministêres, je pro=
fitai des derniers jours qui précédè=
rent mon départ, pour soumettre à
l'Empereur quelques 1 mot biffure mes dernières observations
suivantes dans une lettre du 29e Avril 1802.

<235> le 29e Avril 1802 à l'Empereur
les observations qu'on va lire.

 

Ière observation

Il faut nécessairement répondre par une
mesure, à l'invitation adressée au Sénat
par l'
Oukase du mois de Juin 1801. 

La représentation (Doklad) de celui ci
ne peut sans doute en demeurer là, elle
me paroit seulement être incomplette.
Le Sénat aurroit du présenter avec
un Résumé de ce qu'il avoit fait pendant
un nombre d'années déterminé, pendant
p. ex. pendant depuis 20 ans. Il aurroit
du rendre compte de la manière dont il
expédie les affaires, et joindre l'énuméra=
tion de celles qui sont à terminer, en
marquant les dates des jours auxquels
elles lui sont parvenues.

Ce compte seul eut mis en état de
juger, si, constitué come il l'est, et vou=
droit l'être par son
Doklad, il peut
remplir le but de son institution.

Rien ne calmeroit plus surement ceux
de ses membres qui aspirent à des pou=
voirs plus étendus, qu'un travail de
cette espêce, dont les résultats seroient
que les affaires sont traitées lentement
et sans systême, et qu'un grand nombre
demeurent arriérées.

Vous demandez qu'on étende vos attri=
butions, diroit-on au Sénat, les docu=
mens en mains, et vous n'avez pas même
pu terminer les affaires comprises dans
vos attributions d'aujourdui; est-il
séant de vous charger d'occupations
nouvelles, lorsque vous n'avez pu
suffire aux anciennes?

Demandez au Sénat des renseigne=
mens sur les objets ci-dessus me paroit
donc indispensable. L'avis pourroit en
être suggéré dans le Conseil, ou bien
l'Empereur en feroit directement la
demande.

2e Observation

Il ne peut être question de jouër au
plus fin avec le Sénat, qui n'est pas une
puissance. Il faut agir franchement
avec lui.

La mesure à prendre par l'Empe=
reur, doit porter un grand caractêre,
qui anonce bien celui que doit avoir
son rêgne.

Son intention a été d'accorder au
Sénat, tout ce qu'il falloit pour coo=
pérer au Bien général; elle n'a pu
être de s'occuper exclusivement de
cette assemblée.

Examiner avec soin la marche
de l'Administration générale de son

<236> Empire: suivre attentivement les mou=
vemens de ses rouages divers, a du être
l'occupation principale de l'Empereur.
Il lui falloit des faits; il s'est donné le
tems de les recueillir; et il en est résulté
pour lui cette grande vérité; 1 mot biffure, que
loin de devoir s'occuper d'une mesure
partielle, il étoit urgent de simplifier
l'administration, d'en classifier mieux
les travaux, et d'accroitre son action,
en la centralisant, en élaguant ce qui
la retardoit, en y introduisant un ordre
et une marche sysêmatique qui n'é=
xistoient pas auparavant.

Les travaux de l'Empereur n'ont donc
plus pour premier but, le Sénat seul
Sénat, mais bien l'administration
entière de l'Empire; ce qui est d'une
toute autre importance, et porte néces=
sairement le cachet de la grandeur.

3e Observation

S'occuper exclusivement de la fixation
des attributions du Sénat, entraineroit
dailleurs, des inconvéniens.

En effet. a) Ces attributions doivent correspon=
dre à celles qu'on assignera à chaque Dépar=
tement, lors de la classification des
branches diverses de l'administration
générales, et ne peuvent par conséquent
pas être considérées isolément, sans porter
atteinte à cette correspondance.

b) Si l'Oukase destiné à fixer ces at=
tributions, les réduit prèsque à rien,
dans la réalité, on dira que le Sénat a
été joué.

Peutêtre que plusieurs de ses meneurs
ont mérité de l'être par leur présomp=
tion; mais l'Empereur doit persé=
vérer dans ses égards pour le corps
entier du Sénat. Il doit honorer en
lui, l'émanation la plus marquante
de l'Autorité Impériale, améliorer son
organisation, et procéder envers lui avec
une noble loyauté, qui atteste la pureté
de ses intentions.

Cette assemblée tenant son éxistence
entière de l'Empereur seroit-il digne
de lui de tergiverser avec elle?

c) Si l'Oukase gardoit le silence sur
certains pouvoirs que le Sénat s'attribue
et qu'il éxerce (p. ex. les
oukazes qu'il
expédie directement dans les provinces), il
paroitroit les lui avoir confirmé tacite=
ment; et come l'éxercice de ces mêmes

<237> pouvoirs, est précisément l'un des abus
aux quels on veut remédier par l'établis=
sement des Départemens ministériels, il
s'ensuivroit ces 2 alternatives,: où, qu'il
faudroit le dépouiller imédiatement après
d'une partie de ces attributi pouvoirs, ce
qui exciteroit des clameurs bien fondées,
ou, qu'ïl faudroit ajourner encore, pendant
plusieurs années, la réorganisation des
Départemens ci-dessus, dont l'urgence est
si bien reconue..

Cette dernière alternative acquiert
même, un si grand poids, à mes yeux,
qu'il m'est impossible de croire que cette
réorganisation puisse être entreprise de
longtems, si l'on s'occupe s'occupe préli=
minairement du seul Sénat. 

4e Observation

Faire entrer dans l'oukase qu'on desti=
ne à mieux organiser l'administra=
tion entière, tout ce qui concerne le
Sénat, fournira, aucontraire, les moyens
de déterminer d'une manière certaine
ses attributions, de les faires quadrer avec
celles des nouveaux départemens ministé=
riels, et de prévenir ces conflits de
compétence, qu'entraineroit une Organi=
sation décousue, composée de pièces rap=
portées.

Le Sénat occuperoit exerceroit occuperoit dans la Hiérar=
chie, des pouvoirs subordonnés à l'auto=
rité Impériale, la place la plus émi=
nente; et le soin avec lequel ses fonctions
aurroient été clairement précisées, prouve=
roit que l'intention sérieuse de l'Empe=
reur est qu'il les éxerce dans toute
leur intégrité.

Ainsi a) il continueroit à être la
Cour suprême de Cassation et d'Appel,
tant au civil qu'au criminel.

b) Il continueroit à être la haute Cour
de Justice pour les fonctionaires supé=
rieurs, dont le gouvernement voudroit
faire éxaminer judiciairement la
conduite.

c) La faculté de demander aux Dé=
partemens ministériels,, des renseigne=
mens et des explications, pour les trans=
mettre à l'Empereur avec ses propres
remarques, lui donneroit sur l'ad=
ministration générale toute la me=
sure d'influence qu'on peut lui concéder. 

<238> d) La nécessité où se trouveroient
tous les Départemens, de lui présenter
anuellement leurs comptes pour être
soumis à sa critique avant de les faire
passer sous les yeux du Monarque seul
administrateur suprême, aumoins pour
longtems encore
, rendroient enfin cette
assemblée infiniment respectable.

Assurément le Sénat ainsi réorganisé,
n'aurroit point à se plaindre.

Revêtu des fonctions les plus augustes, il
en conoitroit toute l'étendue, et ne se perdroit
plus, come aujourdui, dans le vague de celles
qu'on lui attribue, et dont on prétend
qu'il ne s'acquitte pas trop bien.

D'après ces considérations, il me paroit
incontestable, que tous les articles rélatifs
à l'organisation du Sénat, doivent entrer
come Elémens dans l'
oukase destiné à
réorganiser l'administration générale de
l'Empire.

Il sera aisé de faire précéder cet oukase
d'un Considérant basé sur des faits et de
grands résultats bien connus et de prou=
ver à tous, sans jactance et tout simple=
ment a
du adopter une pareille mesure
pour opérer le Bien.

Mais come il s'agit ici d'une opération
majeure, l'Empereur doit s'armer de
courage et de fermeté, et user de sa
Prérogative
, sans recourir à des ter=
mes moyens, qui n'aurroient l'appro=
bation de personne, et feroient dailleurs beau=
coup de mal.

St Petersbourg le 29e Avril 1802.

 

L'Empereur accueillit ces observations avec
sa bienvaillance accoutumée, et les mesures
qui furent prises après mon départ et qui
comprirent la réponse ci faite au Sénat,
m'apprirent, qu'elles n'avoient pas été présen=
tées en vain.

Ces observations furent les derniers objets qui
m'occupèrent. Les derniers jours J'employai
le reste de mon séjour, à visiter ce que je
n'avois pas eu le tems de voir, à prendre congé
des parens, des amis et des connoissances que je ne devois
plus revoir, avec lesquels que mes occupations
ne m'avoient pas permis de fréquenter aussi
souvent que je l'aurois desiré, toutes mes jour=
nées ayant été consacrées à celui pour lequel
<239> j'avois entrepris le voyage. Il étoit tems
cependant que je m'éloignasse. La confian=
ce que l'Empereur me témoignoit, avoit
réveillé l'envie, et quoique j'eusse refusé les
distinctions honorables persisté à refuser
les témoignages les distinctions honorables
qui me furent offertes, elle auroit certai=
nement poursuivi l'étranger auquel le
Chef de l'Etat avoit accordé une confian=
ce aussi marqué. Je sentis tout le pre=
mier que cette confiance pouvoit nuire
aux grandes réformes dont on alloit s'oc=
cuper, et dont que la malveillance s'at=
tacheroit à les faire mal accueillir,
come étant les résultats de l'influence
éxercée par un cet étranger. J'eus de la
peine à persuader l'Empereur, mais en=
fin il consentit à mon éloignement,
et le 6 May à 10 heures du soir
cet excellent prince vint me serrer dans
ses bras. Ce moment fut pénible, et
l'auroit été bien davantage, si j'avois
pu prévoir les dures épreuves par lesquel=
les il devoit passer, avant notre
réunion à Langres, en Janvier 1814.
Je promis de lui transmettre les
observations que j'aurois faittes dans
dans mon le voyage que j'allois entre=
prendre, et tins parole. 1 mot biffure Une
lettre du 4e Juin datée de Königsberg
contient l'appèle su lui fait part
d'observations sur le mauvais état
de la partie de grande route qui la plus voisine
de la capitale, sur les véxations que
les voyageurs éprouvoient en traver=
sant les provinces allemandes de
l'Empire et les causes du rançonement auquel
ils doivent se soumettre pour être éx=
pédiés. Je lui comunique les retards
qu'éprouve fâcheux qu'éprouvoit l'or=
ganisation définitive de la nouvelle
Université de Dorpat, qu'on attribuoit
à la lenteur d'expédition des mesu=
res destinées qui nécessaires pour
quelleisset entrer en activité. En
traversant la Courlande, je recueillis
quelques renseignemens sur les plain
1 mot biffure
 je recueillis les plaintes élevées
au sujet de la distribution des Arendes
féodales
, faitte par le Gouvernement,
au préjudice des indigènes privilèges
garantis aux indigènes, 1 mot biffure et pus
me convaincre, à Liebau, de la réussit=
te des procédés employés par le Capi=
taine du Génie Holst, pour fixer les
sables mouvans, qui menaçoient de
<240> de fermer les abords et le port de cette ville,
procédés 2 mots biffure qu'on sembloit vouloir contester à leur auteur.
L'Empereur devant bientôt traver=
ser ces contrées pour se rendre à Me
aller conférer avec le roi de Prusse, à
Mémel, il me parut utile de lui comuni=
quer ces observations, pour qu'il put
les s'assurer si elles étoient fondées, et avi=
ser aux moyens de faire le nécessaire.

Je fus obligé de m'arrêter à Königs=
berg, pour attendre que les équipages
du roi de Prusse eussent passé. Arri Des
lettres que j'y trouvai m'apprirent les
désordres qui avoient eu lieu, en Suisse
dans le but de s'affranchir des redevan=
ces féodales, et qui avoient fourni aux
François l'occasion d'intervenir, et. J'appris
aussi par elles que tout se préparoit
en France pour la proclamation future
d'un Empereur des Gaules, dont l'ambition
ne prenant son un vol plus hardi, depuis la
Consulte de Lyon me laissoit peu d'espoir
dans la l dans la l'1 mot biffure lettre que don que la
lettre dont j'étois porteur pût être bien
accueillie.

 

Que les égaremens, me disois je dans cette
lettre disois
écrivois-je à l'Empereur,, dans
lesquels vient de tomber, un homes qui
avoit des titres fondés au nom de grand
ne vous détournent point de la route
que vous vous êtes tracée. Jamais
entreprise ne fut plus méritoire que
la votre. La place qui vous attend
dans l'histoire n'a été occupée jadis,
que par Trajan et par les Antonins.

Les siècles modernes n'ont produit aucun
home de votre rang, auquel il fut
permis de la partager; la Destinée et
l'heureuse étoile de la Russie vous y
appèlent et vous avez pris l'engagement
sacré de la mérïter.

Ah! soyez l'Empereur du peuple, le pro=
tecteur des lumières, le deffenseur des
vrais principes; et que le Génie du bien
vous préserve de penser ou d'agir jamais
come croyant que le peuple n'est bon
qu'à faire des souliers
. 

Deux homes attiroient jusqu'à présent,
l'attention des homes à idées libérales
qui mettoient leur espoir en eux. Vous
êtes demeuré seul, Sire; ne leur
enlevez pas leur dernière ressource.
Puissent votre courage et vos forces
toujours à l'unisson, vous permettre
d'achever votre Ouvrage.

 

Le trajet par les Etats prussiens me
fournit des sujets de comparaisons dont
que je m'empressai de faire mention

<241> Le Mon trajet par les Etats prussiens
me fournit des Données intéressan=
tes et des Sujets de comparaison
que je m'empressai de faire entrer
dans une lettre que j'adressai le 23
Juin, à l'Empereur, depuis Leip=
zig.

J'avois espéré de voir à Königsberg
le célèbre professeur Kant, ce 1/2 mot biffure
1-2 mots biffure Patriarche révère une nouvelle secte de
philosophes qui ont a éxercé une grande
influence sur la marche des Gouver=
nemens, et sur 1 mot biffure les homes chargés
de gouverner. Je tenois beaucoup à pas=
ser quelques momens dans la société
de cet home de Génie, que ses principes
hardis et sa conduite invariable haute pro=
bité, n'honoroient pas moins que ses
ouvrages; mais il étoit tombé, à cette
époque, dans un tel état de foiblesse,
que ses 1 mot biffure amis me déconseillèrent
d'insister, afin de ne point emporter
la triste réminiscence du Génie, dans
sa décadence.

J'eus à Königsberg l'occasion de
faire la connoissance de plusieurs
homes distingués, parmi les profes=
seurs, les administrateurs et les
comercans. Le passage du roi, me
procura l'honeur de m'entretenir
avec Mr de Behm 1er Conseiller du Cabi=
net de S. M., depuis Chancelier, et l'un
des homes d'Etat influens à cette époque.
Notre entretien fut court et roula prin=
cipalement sur les affaires de ma patrie,.
qui me parurent qui paroissoient embarrasser un peu la

La Politique prussienne, qui nous avoit dédai=
gné en 1798 et 1799, lorsque nous nous
pouvions encore quelque chose comen=
çoit alors à se douter quelle avoit
comis une faute, en nous 2-3 caractères biffure délais=
sant, et craignoit sérieusement, que
fatigués par nos souffrances, le moment
n'arrivat bientôt où notre nation seroit tentée
de se reposer enfin dans les bras du
Géant son voisin qui seul paroissoit encore
s'intéresser à elle. Mr de Behm ne put
s'empêcher de reconnoitre qu'on s'étoit
montré trop indifférent, et j'étois en
train de le confirmer dans cette opi=
nion, lorsquil 1 mot biffure fut averti que
le Roi mandoit auprès de sa personne.
Il me demanda alors, si je ne 1 mot biffure me
proposois pas d'être présenté 1-2 mots biffure
à S. M.. mais, simple voyageur, je
n'avois aucun titre pour aspirer à cet
honeur, et partis le lendemain.

<242> 1 mot biffure Le Service des Postes étoit très mal fait à
cette époque et sa lenteur excitoit les plain=
tes de tous les voyageurs

Le service des postes se faisoit, en Prusse,
à cette époque avec une lenteur, qui lais=
soit au voyageur le tems de maudire
les mauvaises routes, les sables, les po grossiers
maitres de postes, et les phlegmatiques pos=
tillons. "C'est une misérable politique
(disois-je à l'Empereur,), que celle d'entraver
et d'écorcher les étrangers, dont la bourse
et la fréquence contribuent, tant à activer
la circulation. Nulle part, je crois, ils ne
sont rançonnés avec plus de rusticité; on
diroit qu'après avoir payé leur argent, ils
doivent beaucoup de reconoissance à Mrs
les maitres de poste, de ce qu'ils veulent bien
les expédier."

Arrive-t-on en Prusse? Il n'y a
Une autre calamité poursuivoit le pau= 1-2 mots biffure
encore alors le pauvre voyageur à son entrée sur le
territoire prussien. "Il n'y a pas de bico=
que, où l'on ne subisse aumoins 2 inter=
rogatoires fastidieux et ridicules, finis=
sant souvent par la demande d'un Trink=
geld
". Mais il éxistoit des compensa=
tions à ces erreurs administratives, et je
m'empressai d'en énumérer quelques unes
dans ma lettre du 223e Juin.

 

Le comerce de Königsberg, y disois je, est très
actif, et fondé en partie sur l'exportation
des produits de la Lithuanie russe qu'il
vous importeroit, Sire, de procurer exclu=
sivement à vos sujets, en faisant éxé=
cuter le canal projetté pour la jonction
du Niémen avec l'Aa.

On construit à Königsberg beaucoup de
vaisseaux marchands. L'un des princi=
paux entrepreneurs, Mr Philippe Abegg
étant de ma conoissance, j'ai eu la
facilité de bien voir.

Le comerce jouït dans cette ville ainsi
qu'à Memel, Danzig, Elbing, et en géné=
ral, dans toutes les places de comerce des
Etats prussiens, de beaucoup de considéra=
tion, et je ne conseillerois pàs à un
Général ou à un Gouverneur de province,
d'en agir avec les négocians, d'une manière
aussi cavalière que seroit celle d'un

Capitan-Izpravnik  à l'égard d'un
de vos marchands.

Relevez, Sire, cette classe d'homes utiles,
soutenez la, protêgez la, honorez la,
rapprochez là de votre persone. Ayez
le courage d'appeler auprès de vous, les
individus les plus marquans,, consultez
les; créez, en un mot, le Tiers-Etat; c'est
le seul qui vous procurera Crédit, force
et ressources; enfin il formera le Contre=
poids qui vous manque.

<243> Il éxiste, dans les Etats prussiens, une
masse imense de lumières, et une liberté
de parler et d'écrire, prèsque illimitée. On
parle de tout et tout haut, sans excepter
le monarque, mais toujours avec ces ména=
gemens et ces égards qui rendent la criti=
que supportable et utile, jamais avec
la légêreté impertinente du François à la=
quelle le Russe se laisseroit aller si vo=
lontiers.

On trouve en Prusse, à qui parler sur tou=
tes sortes de matières. Il éxiste une pépi=
nière d'homes préparés pour toutes les
branches de l'administration, et destinés
à en faire l'occupation de toute leur
vie; ainsi, il y a peu de novices,
peu de bavards, et peu d'importans dans
les bureaux.

Les rois de Prusse ont eu le bon esprit,
malgré leur lezine héréditaire, de
faire voyager, dans leurs Etats, des sujets
distingués, auxquels tous les Dycastêres
sont forcés de découvrir les secrets de leur
organisation, occupations etc. etc.

J'ai eu l'honeur, Sire, de vous proposer
d'en faire autant, j'y reviens avec plus
de confiance dans ce moment, puisque
ce sont les instrumens qui vous man=
quent, et qu'il n'y a pas de tems à per=
dre, si vous voulez avoir pour vous
seconder, de bons instrumens nationaux.

J'eus le plaisir de me retrouver à
Königsberg dans un cercle infiniment
intéressant d'homes distingués par leur
mérite, que j'avois connu, lors de mon
premier passage. Avec quelle impa=
tience ils m'ont questionné sur le
Trajan de la Russie! Ah! si vous
aviez entendu les voeux qui partoient
de leurs coeurs, vous en aurriez touché;
car votre desir est d'appartenir, par vos
oeuvres, à la Societé des amis du
genre humain et des lumières, societé
invisible mais puissante et indestructi=
ble, dont les membres dispersés sur
tous les points du globe, sont partout
réunis pour deffendre les droits de la
pauvre humanité, contre ses détracteurs
enemis, qui n'échaperont pas au Juge=
ment de la postérité, de quelque mas=
que qu'ils se couvrent."

"Les 14 milles qu'on parcourt depuis
Elbing à Danzig représentent la
Hollande; on ne sçait ce qu'on doit le
plus admirer. La richesse du sol,
la beauté de la culture, le grand
nombre et la propreté des habitans,
la bonne tenue des bestiaux, tous ces

<244> objets frappent à la fois le voyageur
et lui font faire des comparaisons qui
ne sont pas à l'avantage de plusieurs
autres territoires.

Ce furent les 1ers colons appelés par
les Chevaliers qui assainirent et culti=
vèrent cette riche terre. Leurs descendans
jouïssent aujourdui de leurs travaux;
c'est ainsi qu'il en sera un jour de la
Russie.

En Les environs de Danzig etc. anoncent une riche capitale.
Les ennemis des villes municipales et de la
liberté devroient bien nous expliquer
pourquoi ces villes ont fleuri, tandis=
que l'Espagne, le Portugal et la Polo=
gne ont décliné.

Les administrations municipales ont
eu constament les résultats les plus satis=
faisans. Pourquoi Königsberg, Elbing,
Danzig, Stettin, Leipzig etc. etc., prospê=
rent-elles ? C'est qu'encore aujourdui
ces Villes sont gouvernées par de Magis=
tratures jouïssant de pouvoirs très éten=
dus, et de toutes les attributions hono=
rifiques propres à leur assurer la
considération."

"Ces magistratures doivent sans doute
être tenues en respect; car elles aussi sont
ambitieuses et envahissantes, ainsi que nous
l'avons éprouvé en Suisse; mais elles excel=
lent à trouver et mettre en pratique, ce
qui convient au peuple, et l'on s'apper=
coit bientôt qu'elles se sont occupées, non=
seulement à lui faire du bien, mais
encore à lui procurer des jouïssances.

C'est ainsi que les environs de ces villes,
et de plusieurs autres, sont partout déco=
rés de promenades, de jardins publics, de
guinguettes où le peuple de toutes con=
ditions, trouve sans grands fraix, des
facilités pour s'amuser, les jours de fêtes.
Voilà, Sire, ce qui éxistoit à Riga,
à Revel etc. etc., lorsque ces villes avoient
encore des magistratures considérées; et
pourquoi les at-on dégradées?

Sire, j'ôse vous en conjurer; rendez-leur
leur ancien lustre, distinguez les; faites
de même pour vos capitales, pour
les grandes villes comunes de vos provinces, et
vous ne tarderez pas à vous apperce=
voir qu'elles ont fait mieux que vos
officiers. Vous n'êtes pas jaloux de
leurs attributions: pourvû que le Bien

<245> s'opêre, que vous importe, qu'il soit
fait par ces magistrats municipaux,
ou par des magistrats impériaux?
L'essentiel est que le peuple soit
bien gouverné, par gens qui le
connoissent
, qui soyent intéressés
à son bonheur, et qui veuillent aussi
lui procurer des jouïssances honnêtes;
or, il ne peut obtenir tout cela que
de magistratures municipales ayant
des pouvoirs étendus, considérées, et
soustraites aux effets de la mauvaise
humeur de vos officiers imédiats qui
ne doivent plus se permettre, désor=
mais, de les bafouer impunément."

"Il ne manque au gouvernement
prussien que d'adopter des vues
plus étendues proportionnés à la
puissance de cette monarchie, et de
ne plus tondre d'aussi près, ses Sujets,
pour accumuler un trésor qui
les appauvrit, gêne leurs jouïssan=
ces et les empêche d'entreprendre.

Puisse votre bon génie, vous pré=
server, Sire, de la manie thésauri=
sante! Ne faites contribuer vos
Sujets qu'autant qu'il le faut, pour
satisfaire aux besoins de l'Etat; vous
trouverez le surplus dans leurs bour=
ses, dès que vous aurrez fondé le Crédit
public
sur les bases de l'Economie, de
la réforme des loix, de la sureté des
proprietés et des personnes, et sur=
tout, lorsqu'on aurra la certitude
que l'Etat remplit exactement les
engagemens qu'il contracte
.

 

En traversant la Poméranie, je fus
forcé de stationner longtems, parce=
que de nombreuses voitures char=
gées de ballots de marchandises
précieuses expédiées de Hambourg,
Leipzig, Stettin etc. et venant
d'Angleterre, avoient enlev employé
tous les chevaux. C'étoit une Cara=
vane destinée à faire entrer ces marchandises en
fraude en Russie
de contrebande, en
Russie, par les bureaux de la Pologne.

4-5 mots biffures

Mon séjour à Berlin fut de cour=
te durée. J'eus l'occasion d'y être
présenté au Prince Louis de Prusse
<246> fils ainé du Prince Ferdinand, home
distingué
et de converser assez longtems
avec lui, pour rendre justice aux ma=
nières pleines de grace et d'urbanité qui
le distinguoient, mais il me resta quel=
que défiance sur le Libéralisme qu'il
affectoit 1 mot biffure professoit, et qu'un home
de son rang ne devoit laisser paroitre qu'a=
vec réserve, devant un voyageur étran=
ger. Cet aimable prince fut tué, peu d'an=
nées après à Saalfeld peu de jours avant la en combattant avec bravoure
pour la deffense de la monarchie prus=
sienne, que Napoléon étoit sur le point
de dissoudre.
à Salfeld, peu de jours
avant les funestes journées de Jena et
d'Auerstelt qui risquèr ébranlèrent jus=
ques dans ses fondemens la monarchie
prussienne.

J'eus la bonne fortune d'assister à Ber=
lin à une représentation du célèbre
drame de Schiller, Jeanne d'Arc, qui
mettoit alors en jeu, toutes les passions,
et devoit faire une profonde impres=
sion sur celle d'un Helvétien, fortement
convaincu, que sa malheureuse pa=
trie si l'oriflame étoit Helvétique étant arboré sur
le Somet des Alpes, l'Epée de Dunois
étoit saisie, par un home digne Pa=
triote digne de la manier.

Ce Drame est l'une des 1 mot biffure plus belles
compositions de Schiller, et jouée
par des Acteurs comprenant bien leurs
rôles, 3-4 mots biffure qui la plus pro=
pre à éxalter le patriotisme et le
dévouement, dans les momens de crise,
où il s'agit d'être ou de ne pas être.

"Si vous aviez le tems de lire quelque
ouvrage de littérature, (disois-je a
propos de l'au Schiller à mon correspondant)
mon Correspondant à propos
de l'auteur de ce drame)

je vous conseillerois la lecture du Don Carlos
de Schiller, en particulier celles des
Scènes entre Philippe IId, D. Carlos, le
Duc d'Albe et le Marquis de Posa, et
surtout celle qui a lieu entre Posa et
Philippe 2d qui sont de vrais Chefs d'oeuvres."
Avant de quiter la Prusse, il me restoit
encore quelque 2-3 mots biffure à expri=
mer mon opinion, sur le reproche qu'on
s'y permettoit, sur ce que les Ministres
rêgnoient
.

 

Il ne m'appartient pas de prononcer
"(mandois je à l'Empereur)" sans doute
on a quelque peine à retenir les minis=
tres dans la route qui leur a été tracée,
et dont ils tendent perpétuellement à
s'écarter; néenmoins on peut y
parvenir, par une surveillance sévêre,
en voyant par ses propres yeux, en

<247> rendant faisant promte et bonne justice
de tous ceux qui s'émancipent, de propos
délibéré. Puisse votre bon génie, vous
préserver, Sire, du malheur de subir
le joug ministêriel! N'eûssiez vous
autour de vous, que des Sully et des Colbert
je vous dirai toujours: Ecoutez vos mi=
nistres, questionnez les, mais tenez les
en respect
; ordonnez seul, prononcez
seul, sans qu'ils puissent prévoir votre
décision, sans qu'ils s'émancipent jus=
qu'à l'influencer, sans qu'ils con=
noissent votre secret.

Je sçais que vous n'avez pas la dange=
reuse foiblesse de redouter l'influence,
et je vous en félicite, puisque le vrai
moyen de déprendre d'individus ineptes
ou malveillans est, de prendre le con=
tre pied de ce que conseillent les gens
capables.

Lorsque vos ministres verront que
la raison seule est vôtre guide: lors=
qu'ils seront assurés d'être constament
pesés dans ses balances, alors ils contrac=
teront l'habitude de remplir fidèle=
ment leurs fonctions; mais, je vous
le répète, Sire: Que jamais votre
vigilance ne se repôse! Si j'avois
l'honeur d'être votre ministre, je
vous éxhorterois à m'appliquer
la rêgle, en premier.

 

Mes lettres de Leipzig du 23. Juin et
de Francfort du 27e Juin rendent comp=
te, de ce que j'avois pu observer dans
ces 2 villes, à Dresde, à Weimar, en
traversant la Saxe et l'Allemagne
jusqu'à Francfort.

En parcourant à Dresde la belle Galerie de
travaux tableaux et la riche collection
du Grüngewölb, la facilité avec laquel=
le on y étoit admis, 1-2 mot biffure con=
trastoit trop avec les entraves 1/2 mot biffure
1/2 mot biffure que rencontroient à Petersbourg, 1-2 mots biffure ceux qui desiroient
visiter les Galeries de l'Hermitage et
les collections scientifiques, pour ne
pas m'engager à rappeler à l'Empereur les con=
sidérations que j'avois eu l'honeur
de lui présenter à cet égard dans une lettre du
24e Avril 1802. fin de la ligne biffure
faire cesser ces 1 mot biffure

1 mot biffure J'étois porteur de 2 lettres
pour Weimar, l'une pour Göthe qui
étoit absent, l'autre pour l'illustre
Wieland, que je connoissois d'ancien=
ne
<248> et avec lequel j'eus le grand plaisir
de converser pendant quelques heures
avec une franchise qui aisance bien différen=
te de la gêne qui m'avoit jadis déplu
en
1 mot biffure frappé et déplu en conversant avec le célèbre
Göthe. Tous les Sujets qui, à cette épo=
que occupoient les vrais amis des lumiè=
res furent touchés dans ce long entre=
tien, et ce fut pour moi, une douce
jouïssance d'entendre 1 mot biffure ce que les
gens de bien pensoient et espéroient
de la Philantropie du jeune Marc Au=
rêle de la Russie.

1-2 mots biffure La description des démons=
trations cordiales des habitans de Riga, lors du
passage de l'Empereur par 1-2 mots biffure Riga leur ville,
que je lus en passant à Erfurt
ne me permit pas de garder le silence, dans
l'Itiniéraire de mon voyage que je lui destinois.

 

J'aime
ces bonnes gens, lui disois je, pour les hon=
neurs qu'ils ont voulu vous témoigner,
en même tems que je me représente vôtre
répugnance à voir votre carosse trai=
né par des homes. Vous reconnoitrez
tout cela en travaillant sérieusement
à faire leur bonheur, et je vous connois
assez, pour savoir que le titre d'Empereur
citoyen
, est le seul auquel vous aspirez.
Je ne crains donc pas que l'encens vous
fasse oublier jamais, que vous êtes un
home ayant aussi ses foiblesses et de
grands devoirs à remplir. Vivez dans la
postérité, encore plus que dans le tems pré=
sent.

 

Je trouvai à Gotha 2 connoissances,
Mr Bridel mon compatriote, jadis Pré=
cepteur du Duc, connu come botanïste par un ouvra
des découvertes faites dans l'Empire des
mousses
et come Littérateur par des
poësies estimées, et Mr Ludwig, dont
j'avois entretenu quelque fois à l'Empe=
que ses connoissances théoriques et pra=
tiques en Economie politique, et en 1/2 mot biffure
1 ligne biffure
1-2 mots biffure matière de douanes, m'avoient engagé
à recomander au Comte Nicolas Roumän=
tzof membre du Ministêre, come un home
qui pouvoit être utile à la Russie. Char=
gé de le mettre en rélation avec ce Minis=
tre, je m'acquitai de cette comission avec
tout l'intérêt 2 mots biffure que m'inspiroit cet home de méri=
te. j'ignoreoi toujours les résultats

En par rentrant dans les défilés de la
Thuringe, on le chateau de la Wartbourg
me rappèla les avantures de Luther, le coura=
geux dévouement et les malheurs de son
grand protecteur l'Electeur Jean Frédéric, les suites de la fatale
bataille de Mühlberg, le despotisme de
Charles quint, et la brusque interruption
des réformes réligieuses. La Thuringe
<249> offre prèsque sur les 1 mot biffure toutes les
somités des monts qui la traver=
sent, des débris de ces vieux chateaux qui
servoient d'azyle, à ces nobles voleurs
que Henri l'oiseleur et Rodolphe de
Habsbourg, s'attachèrent à faire dis=
paroitre peu à peu, et dont les avantures
romanesques, ont fourni le sujet de
ces antiques traditions (Sagen), don
que les faiseurs de romans et de pièces
de théatre ont exploitées, et dont Mü=
seus de Gotha a tiré ses inimitables
Volksmärchen der Deutschen.

En approchant de Francfort, on je remarquai qu'on
s'occupoit beaucoup du Décret futur de
la Diète, qui devoit consacrer les
indemnisations, à répartir entre les
puissances qui avoient fait supporté
les dépenses de la dernière coalition,.
et Les Victimes comencoient à trembler
pour leur éxistence imédiate, et les
villes impériales pour pour leur
indépendance. Les dernières démar=
ches du 1er Consul lui avoient aliéné
les partisans que en Allemagne, les
partisans qu'il y conservoit encore
lors avant que son ambition enva=
hissante eut comencé à se dévelop=
per.

 

Si j'avois donc à traiter
avec cet home, concluois-je 1 mot biffure concluois-je
1 mot biffure et si j'étois puissant, je
serois aussi bref, aussi précis, aussi
précis que lui , et tout en me
tenant prêt à agir, je me tiendrois
sur la réserve, à son égard, en lui
faisant cependant entrevoir qu'il pour
=
oit dépendre de lui de la faire cesser.
Demeurer en mesure d'agir à tout
instant, voilà ce qui convient à la
Russie. Elle ne doit faire d'autres
avances que celles qui manifestent
des intentions pacifiques, telles
que le Fort peut les faire sans se
compromettre.

Je ne scais que par les gazettes,
ce qui se passe dans mon pays. Il
paroit qu'on vient d'y faire accep=
ter une Constitution destinée à
y perpétuer les sujets divisions, et
à hâter l'incorporation future de
l'Helvétie.

En attendant, je réclame les
bons offices de V. M. I. pour mon
infortunée patrie, dès que vous ne
risquerez pas d'être compromis en
parlant pour elle.

 

C'est ainsi ainsi que je terminois le
27 Juin, ma lettre de Francfort,
<250> le coeur content d'avoir revu
mon disciple chéri, toujours égale=
ment pénétré de la vérité des prin=
cipes, qu dont il avoi s'etoit montré pro=
fondément convaincu, depuis sa tendre
jeunesse, et bien décidé, à en faire
l'application, en fondant le bonheur
donnant à la Russie, des institutions
qui libérales qui fondées sur les lu=
mières et la Justice, qui pussent as=
surer à son aux peuples qui l'habitent
la prospérité résultante d'une civi=
lisation protectrice des la propriétés
et et des personnes, contre l'arbitraires.

Je lui avois consacré tout mon tems
et je l'avois quité, en lui promettant
de m'occuper de tout ce qui pourroit
contribuer à l'assister du fonds de
ma retraite. Ma tache étoit finie,
mais une nouvelle, plus difficile peut
être, étoit à recomencer,: elle sous
un Gouvernement ombrageux à la tête
duquel étoit placé se trouvoit un home de
génie, ennemi caché des idées libérales,
et 1 mot biffure à élever aspirant au pouvoir
absolu, et entourré de Rénégats décidés
par égoïsme, à tout ôser pour le lui procurer.

La marche que je suivis, sera déve=
loppée dans la VIe Période, et com=
prendra toutes les années écoulées de=
puis Juillet 1802. jusques au mois de
Janvier 1814.

Fevrier 1838 Fin de la Période Ve.
 

Etendue
intégrale
Citer comme
La Harpe, Frédéric-César de, Mémoires. Suite de la cinquième période, 1801-1802 (Cahier K), Lausanne, 1837, cote BCUL, IS 1918, Ba 10. Selon la transcription établie par Lumières.Lausanne (Université de Lausanne), url: https://lumieres.unil.ch/fiches/trans/1126/, version du 01.07.2019.
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