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Lettre à Frédéric de Sacconay, Grasse, 04 juin 1774
de grasse ce 4 juin 1774
Cest à vous monsieur, que je m'adresse aujourduy, vous que j'ay vu la premiere
fois, sous des auspices qui mont inspirés confiance, et estime, vous a qui je doit le
bonheur de n'avoir pas étés traittés constament dans la maison paternelle come
enemie, fournissés moy encore un nouveau sujet de reconoissance en m'aprenant
qu'elle peut être la raison du nouveau mécontentement de mon pere; je luy
écrivit de Montargis, j'écrivis à ma soeur, de Lion, une seconde lettre à mon pere,
d'aix, et une troisième d'icy, je pourois avoir reçu des réponses à ses lettres, et je n'ay
point encore reçu de ses nouvelles; ses lettres ont elles pus luy déplaire, ma conduitte
à paris luy at-elle laissés quelques griefs, cest ce que je crains, ayés la bontés de
me lécrire. Monsieur, cest la plus grande marque d'interest que vous puissiés me
doner; je n'ay point méritter il est vray cet interest mais je l'ay trouvés chez vous
avant que les sentiments que je vous ay voués m'y eussent donés quelques droits,
j'en auray à votre estime, voila mon but, et celuy d'après lesquels je forme tout mes
plans pour l'avenir;
je respecte, et cherie mon pere, je vous l'ay dit monsieur et vous ètes trop bon juge
pour ne en doutter; ma plus grande peine seroit dêtre mal avec luy j'ay eu des
tords involontaires, ils m'en a cru de plus griefs, cette cruelle experience et vos avis
m'aideront à parer l'avenir, cette derniere affaire cy, m'auroit-elle fait encore
quelques tords dans son esprit, je suis cependant inocente de tout, et sil peut me
reprocher quelques choses, cest d'avoir pris l'alarme trop vivement mais nais je pas
fait depuis tout ce qu'il a voulut? cette malheureuse affaire aura des suittes
facheuses on poursuit et nous somes à la veille d'un décret d'ajournement on a
tout abandonés d'aix, tout nous a trahit on a fait tout ce que nos parties ont voulues,
toutes voyes d'acomodement ont étes tentés inutilement, et il faut plaider, cest bien
désagréable, mais nous y avons étés forcés, je tremble des suittes et cet eclat me desespere
<1v> je ne puis disconvenir que je suis malheureuse, cependant je ne serois pas si abattue
si je ne voyois dans cecy que des peines pour moy, mais j'en vois pour Mr de C.
et que son caractère ne poura soutenir; je vois ma fille, mon pere même qui ne
sera point indifferent à cette affaire, pardon monsieur, de vous entretenir de pareils
détails, je conois votre indulgence, et la sensibilités que vous m'avés témoignés menhardie
je nécrit point par ce courier cy à mon pere, je l'inquietterois parce que je suis très
inquiètte, il ne nous reste rien à faire que d'attendre, je vous prie d'avoir la bontés de
ne point comuniquer cette lettre, lorsqu'on ignorera notre corespondance, vous serés
plus à portés de m'instruire de ce qui se passera dans le coeur de mon pere, et moy
même je seray plus libre de vous parler avec toute confiance ce que dans les
circonstances je n'oserois faire vis à vis de mon pere, je ne puis trop vous réitérer
mes excuses pour la peine que je vous done ma position et mon excuse, la plus
vive reconoissance et un sincèr et inviolable attachement seront mes moyens
pour macquitter aupres de vous, j'ay l'honeur dêtre monsieur, votre très humble
et très obéissente servente
Mirabeau-de-Cabris
À Monsieur
Monsieur de Saconel au
Luxembourg cours des fontaines
à Paris