, Abraham Trembley et autres précepteurs suisses en Hollande. Correspondances (1733-1801), Paris : Ed. Classiques Garnier, coll. Lire le dix-huitième siècle 77, 2022, 462 p.
- Strien, Kees van (Auteur)
Un aspect peu étudié de la francophonie historique est le rôle joué par des Suisses protestants comme éducateurs des fils des élites des Provinces-Unies au dix-huitième siècle. Ils perfectionnaient leur français, dirigeaient leurs études, les accompagnaient dans le beau-monde, leur inculquant ainsi connaissances intellectuelles et compétences sociales. Cette anthologie comprend des lettres inédites écrites par une quarantaine de « gouverneurs », leurs élèves et leurs parents. Elles permettent de retracer son recrutement, ses années passées dans la famille hollandaise et à l’université, le voyage d’éducation et son départ, soit pour un autre élève soit pour retourner en Suisse, où il gardera souvent d’étroits contacts avec ses anciens élèves.
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Mots-clés:
- Lieux géographiques
- Suisse - Neuchâtel
- Suisse - Lausanne
- Suisse - Genève
- Pays-Bas
- Société
- Education - préceptorat
- Voyage/tourisme
- Lieux géographiques
- Personne:
Public
Ce livre, basé sur des correspondances provenant des archives néerlandaises et suisses, concerne le rôle joué par des Suisses comme éducateurs des fils des élites des Provinces-Unies. L’introduction présente leur recrutement, les divers aspects de leur vie en Hollande et leur retour en Suisse et est suivie d’une anthologie de lettres inédites, écrites par une quarantaine de précepteurs ou gouverneurs, leurs élèves et leurs parents. Il y a également un chapitre sur les gouvernantes suisses.
En Hollande, comme dans les autres pays non catholiques, on avait une préférence pour les Suisses protestants. Ils perfectionnaient le français de leurs pupilles, dirigeaient leurs études et les accompagnaient dans la bonne société. Nombre de précepteurs venaient d’être consacrés pasteur et préféraient partir pour la Hollande où ils pouvaient compter sur un salaire plus élevé que celui de suffragant en Suisse. Ils étaient nommés pour un certain nombre d’années et très souvent uniquement grâce aux recommandations d’intermédiaires.
Dès que le précepteur ou ‘gouverneur’ s’était installé au domicile de son élève, il s’accordait avec les parents sur l’emploi du temps et le programme d’études. Pour des matières comme l’écriture, la danse, l’équitation, le dessin et la musique, ils avaient leurs maîtres spécialisés. À 18 ans environ, les jeunes gens partaient pour l’université, assez souvent avec un nouveau gouverneur. Celui-ci, investi de l’autorité parentale, devait trouver un logis commun et s’arranger avec les professeurs, les répétiteurs et les autres maîtres pour leurs cours (essentiellement lettres classiques, histoire et droit). Souvent il enseignait lui-même certaines matières (latin, catéchèse) tout en surveillant son élève dans ses études et sa conduite. De temps en temps, il envoyait des lettres aux parents/tuteurs et tous les mois un relevé détaillé de leurs dépenses. Après trois ou quatre ans à l’académie, il était censé rendre aux parents un docteur en droit au fait des usages des élites.
Ensuite, le même gouverneur ou un autre spécialement recruté dans ce but accompagnait le jeune homme dans son voyage d’éducation. Ils parcouraient les Pays-Bas autrichiens, la France, la Suisse, l’Italie et les États allemands pour découvrir le patrimoine culturel et naturel de l’Europe. Si possible en se faisant présenter aux cours de Versailles, Turin ou Berlin et aux célébrités comme Voltaire et Rousseau. En Suisse, ils s’arrêtaient à Genève ou Lausanne pour y suivre des cours privés, faire de l’équitation et des excursions en haute montagne. Ce voyage coûteux était un événement dont ils allaient conserver le souvenir toute leur vie.
Au terme de leur contrat, la plupart des gouverneurs rentraient en Suisse où beaucoup d’entre eux obtenaient une paroisse. D’autres restaient en Hollande comme pasteur dans l’église wallonne. Souvent ils gardaient des liens amicaux avec les familles qui les avaient employés.