Héritier de l’esprit qui anime l’Encyclopédie d’Yverdon (1770-1780) et son promoteur Bartolomeo De Felice, le Musée d’Yverdon et région propose au printemps 2022 un nouveau cycle de conférences-discussions consacrées à l’actualité éditoriale et muséographique autour de la Suisse des Lumières.
Jeudi 14 avril, 18h / Vincent Fontana (MYR)
Eclairer le crime. Une histoire de l’enquête pénale sous la Révolution et l’Empire (Genève 1790-1814)
Discussion avec Marco Cicchini (UNIGE)
Comment mener une enquête criminelle en pleine révolution? Ce livre tente de répondre à cette question à partir de l’exemple de la République de Genève, qui illustre bien la modernisation de l’État à l’oeuvre en Europe à la fin du XVIIIe siècle. Alors que la Révolution genevoise de 1792 amorce un processus de codification inspiré des Lumières européennes, l’occupation militaire de 1798 impose brutalement le droit français : avec l’annexion, c’est tout le système de police judiciaire français qui est importé à Genève.
Si le caractère novateur des codes révolutionnaires et impériaux est avéré, la portée de ces évolutions juridiques sur les pratiques de terrain est encore méconnue. Le nouveau système juridique modifie-t-il, en profondeur, les gestes des enquêteurs? En quoi le concept de police judiciaire, qui octroie la majorité des prérogatives d’investigation aux institutions policières, reconfigure-t-il la dynamique de l’enquête pénale ? En écho aux méthodes obscures de Vidocq (1775-1857) et des agents secrets de l’Empire, ce livre examine les innovations introduites par la police napoléonienne dans la répression de la criminalité.
Jeudi 5 mai, 18h / Léonard Burnand (UNIL)
Benjamin Constant
Discussion avec Vincent Fontana (MYR)
A la fin de sa vie, Benjamin Constant déclarait : « Je veux qu’on dise après moi que j’ai contribué à fonder la liberté en France. » La postérité ne lui a pourtant pas rendu suffisamment justice, célébrant plutôt le romancier d’Adolphe, chef d’œuvre pionnier de l’autofiction, que le combattant inlassable de « la liberté en tout », selon son expression. Né en 1767 à Lausanne dans une famille protestante d’origine française, orphelin de mère dès sa naissance, il mena une existence vagabonde à travers l’Europe, où il se fit remarquer aussitôt par la puissance de son esprit et son extraordinaire facilité d’expression, ainsi que par ses amours erratiques et ses dettes de jeu. En 1795, formant avec Germaine de Staël un couple exceptionnel et orageux, il s’engage en politique.
Par la plume et par l’action, sa ligne ne variera jamais : conjurer la tentation totalitaire par un gouvernement représentatif équilibré et garantissant toutes les libertés, celle de la presse comme celle des Noirs. C’est pourquoi il s’opposa vivement à l’Empire autoritaire puis à la Restauration réactionnaire. Parmi ses innombrables écrits et discours, les Principes de politique furent le bréviaire de la jeunesse libérale, et ses obsèques, en décembre 1830, donnèrent lieu à Paris à une énorme manifestation de foule, qui saluait la liberté faite homme. Dans une démocratie en crise, Benjamin Constant est plus actuel que jamais.
Jeudi 2 juin, 18h / Sylvie Moret Petrini (UNIL)
L‘enfance sous la plume. La diffusion de l’écriture éducative en Suisse romande, 1750-1820
Discussion avec François Rosset (UNIL)
Systématiquement recommandée par les traités pédagogiques, l’observation des enfants se développe dès le milieu du XVIIIe siècle, dans le sillage des Lumières et de l’essor des sciences. Pères, mères, précepteurs et gouvernantes sont désormais exhortés à prendre la plume dans le cadre de leur mission éducative. Et ils ne sont pas les seuls. Enfants et jeunes gens se voient aussi fortement encouragés à tenir un journal, auquel on attribue de nombreuses vertus.
Fondé sur l’analyse d’une centaine de journaux personnels conservés dans les archives de Suisse romande, le présent ouvrage retrace l’émergence de ces nouvelles pratiques d’écriture, issues d’une ère de renforcement de la cellule familiale, et remonte aux modèles qui leur ont donné naissance. Il questionne également la perception que les acteurs de l’éducation ont de leurs rôles respectifs.
Actualité publiée le 13.04.2022