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        Essai sur Velleius Paterculus, [Lausanne?], [1756]-[1758]
	
	
		
	C. Velleii Paterculi Q. Supersunt, ex hist. Roman. Voluminib.
	Duobus, C. Integ. Schol: not: var: Lect: et animadv.
	Doct: Curante P. Burmano Lugd. Bat: Apud
	Sam: Luchtmans 1719. 8°. 748. pag.
	Vellejus Paterculus nâquit à Naples l’an 735 de Rome, /suivt la
	conjecture de Dodwell , qui fixant les dattes de ses differens Emplois
	va en remontant, et fini not place ingenieusement sa Naissance ds cette année /
	La famille de Vellejus etoit anciene, et ses Ancêtres avoient tous possedé
	des charges honorables tant militaires que Civiles; son Grand Père avoit
	tenu un rang considérable entre les amis de Pompée le Grand, et de
	Claudius Tiberius Néron Père de l’Emp. Tibère; Jusques là que que pendt. les Guerres Civiles sa
	Vieillesse et ses Incomoditez ne lui permettant pas d’accompagner
	la fuite de ce dernier dans sa fuite en Sicile, il se tua à Naples de
	sa propre main . Notre Auteur passa  par tous les grades militaires, et
	servit sous Tibere, auquel il paroit qu’il fût toujours attaché, en Allema=
	gne et en Hongrie, il se distingua dans ces Guerres, aussi bien que son frere
	Magius Celer Vellejanus , Aussi parûrent-ils tous deux avec éclat au Triomphe
	de Tibère, etant ornez de prix et de récompenses militaires l’an de Rome 765.
	Enfin ils obtinrent tous deux la Préture ayant eté recomandez par Auguste
	et Tibere l’an 768. On ne peut qu’adherer à la Conjecture du savant
	Dodwell qui place sa mort à l’an 784. Il y a effectivement toute
	aparence, vû le profond silence des historiens sur un home qui s’il
	avoit vécu et continué d’etre en faveur auroit dû faire parler de lui
	Qu’il subit le sort comun à tous les amis de Séjan, et finit ainsi ses
	jours dans la 50e Anée de son age.
	Ce fût l’an 782. qu’il comença son Ouvrage pour Marcus Vinicius qui
	etait Consul alors, et auquel il l’adressa, Ce M. Vinicius avoit epousé une fille
	de Germanicus, Ce Vinicius il etoit d’un esprit doux, et éloquent , que et
	Messaline le fit mourir . Come il Vellejus vouloit le lui présenter son ouvrage avant la fin de
	son Consulat, Cela l’obligea de se restraindre dans des bornes etroites, et
	d’abréger beaucoup , il parle en beaucoup d'endroits plusieurs souvent de cette necessité; Mais il
	avoit fourni le plan d’un Ouvrage plus étendu, qu’il apelle Justum Opus 
	et qu’il nous promet dans plusieurs endroits de cet Abregé, il y a bien aparence
	que la mort l’a empeché d’executer cette promesse.  Des 2. Livres d’abregés dhist.
	Univ. de nôtre Auteur, Le 1. Renfermoit l'hist celle des différentes Nations du Monde
	jusqu’à la fondation de Rome, et contenoit et l’hist. Rom. jusqu’a la prise de
	Carthage; Le 2d va depuis cette Évenement jusqu’a la mort de l’Imperatrice
	Livie Mère de Tibère.  S’il ne paroit s’occuper dans le second celui ci que des affaires
	de sa Patrie, cela vient de ce que les Romains etoient maitres du Monde
	alors, et que par la l’hist. Univ. devenoit uniquemt la leur. Il ne nous est
	resté que 2. fragmens du Liv. I.  Et si nous avons le bonheur d’avoir le
	IId presque dans son entier, nous avons aussi le chagrin de le voir alteré
	et corrompu en mille endroits.
	Outre la beauté du stile, Nôtre Auteur a plusieurs choses dignes de
	remarque. 1. Il a marqué avec soin les Epoques des Evenements qui en
	valoient la peine, come aussi les distances qu’il y avoit de ces tems là à celui
	auquel il ecrivoit 2. Il a raporté les divers Changemens arrivez dans les
	Royaumes et Republiques 3. Et deplus observé avec soin les nouveaux
	Etablissements faits à Rome, et les comencemens des bons ou des mauvais
	usages, En 4. lieu il a fait mention de l’Origines des Villes et Colonies Grecques
	et Romaines, morceaux qui sont fort curieux, 5. Enfin il s’est particulieremt
	distingué par les Eloges des grands homes qui se sont signalez, dans les
	Sciences, la Guerre, ou le Gouvernement, Ce qui jette le plus agreable
	Vernis sur son Ouvrage. Il est aussi semé de reflexions Morales et Politiq.
	qui ne sont point a mépriser; qu’elle Justesse et qu’elle beauté par ex. n'y
	<1v> N’y a t’il pas dans celle ci “Audita visis laudamus libentius; et presentia
	invidia, preterita veneratione prosequimur; et his nos obrui, illis instrui
	redimus ; Il est vrai qu’il repete qu’elquefois un peu trop souvent la même
	Pensée.
	Les 2. Plus grandes Digressions de nôtre Auteur, sur les Colonies , et sur les
	Provinces  de l’Empire Romain sont très Curieuses, et ne doivent pas être
	regardeez come des Hors d’oeuvre, et come un deffaut de l’Auteur, Puisque
	comme /c’est une reflexion de Boeclerus / Est hoc Opusculum Velleii ex iis quae
	in minore quidem ambitu, omnem tamen majoris et pragmatici Operis artem
	moremq. retinent.
	Plusieurs Savans ont fort blamé le Stile de Vellejus, l’un d’eux a même
	poussé la chose jusqu’à l’apeller atroce Stilum atrocem , mais on n’en doit
	point être surpris, et ce n’est pas la première fois que ces Messieurs ont
	doné à gauche sur cette matiere; Les termes d’Erudit et dhome de gout ne sont rien moins
	que Sinonimes, bien loin de là on rencontre peu de persones qui reünissent
	Ces deux qualitez; Le nombre de Lectures de toutes sortes /dont la pluspart
	sont toujours peu propres a former le gout/ la manière même dont ils
	les font, les prive ordinairement d’une de ces qualitez; N’oublions pas
	la ridicule metode /dèja si souvent moquée/ de Messrs les Comentateurs
	Qui se piquent d’etre Les Dom Quichottes des Auteurs qu’ils nous donent
	les mettant toujours au dessus de tous les autres, pour augmenter par là
	les prétenduës obligations qu'ils que nous devons leur avoir; manie qui
	sûrement n’a pas peu contribué à tant de jugemens ridicules; /revenons
	à nos montons/ Tous ceux qui voudront prendre la peine de lire par ex.
	l’Invective que fait nôtre Auteur contre Antoine au sujet de la mort
	de Ciceron , seront obligez de convenir que Vellejus etoit veritablement
	éloquent, et de déplorer avec nous que les bornes qu’il s’etoit prescrittes
	ne lui ayent pas permis de doner plus souvent l’essor à son génie.
	J’avouë qu’il se trouve dans cet Ouvrage des Expressions qui ne se trouvt. qu’on ne
	voit pas dans les meilleurs Auteurs, mais elles sont en petit nombre, Et le
	tems ou il ecrivoit, son Genre de vie, la rapidité avec laquelle il
	composa /suivt. les aparences/ son Ouvrage, doivent lui servir dexcuse;
	D’ailleurs Les Manuscrits que nous en avons sont tous dans le plus triste état,
	Les Comentateurs sont arrêtés à chaque page, et nous courrons souvent
	risque d’accuser le Pauvre Home des ravages du tems, dont en qualité
	d’Auteur il seroit sûremt. bien faché, s’il en savoit quelque chose conaissance.
	Adulation j’étois tenté d’excuser Vellejus sur le reproche d’adulation que lui font
	tous ses Lecteurs; j’aurois allegué en sa faveur que la flatterie est le
	deffaut ordinaire et presqu’inevitable de ceux qui écrivent l’histoire de leur
	tems; Que Tibère avoit effectivement merité l’aprobation publique ds
	sa Jeunesse par sa Conduite et son Courage à la Guerre, Que ce ne fût
	que vers la fin de son Empire, et surtout depuis la mort de Séjan qu’il
	dona un libre essor à sa cruauté et à ses infames débauches; j’aurois dit
	encore que Vellejus avoit toujours eté attaché à Tibère, et lui devoit de
	la reconaissance; Mais je viens de relire les chapitres que je cite en
	marge , et toute ma bone Volonté s’est eclipsée; Il est certain quon
	ne peut les lire de sens froid, Non content d’exagerer avec la flatterie
	la plus outrée les actions et les bones de qualites de son Idole, il joint
	ouvertement le mensonge à l’effronterie , rien n’est plus aisé que de l’en convaincre .
	L’histoire raportée dans le chap. 107. me paroit entierement incroyable,
	Cependant je ne puis adhèrer au sentiment de Boecler qui la regarde
	come une Invention de Vellejus; C’eut été certainement bien mal
	faire sa Cour à Tibere que d’imaginer pour lui faire honeur, une
	fait dont le moindre Goujat de son armée auroit pû attester la
	fausseté; S’il etoit question de Claudius ou de Caligula je ne douterois
	pas un moment que ces Empereurs avi eux mêmes avides de gloire cette
	sorte espèce de gloire, n’eussent eux mêmes aposté le Germain dont il est question; Mais je me
	bornerai a regarder cette histoire ridicule, come un tour de la façon
	<2r> De qu’elque Courtisan, Et nôtre Auteur pouvait être du secret et avoir eu part à cette
	comedie et être du secret; Enfin il n’y a aucune suposition que je ne
	fisse crusse avec plaisir, plutôt que d’ajouter foy à une Avanture aussi fabuleuse, aussi
	contraire aux Moeurs des Germains , et à l’histoire de ce tems là.
	Les autres reproches qu’on fait à Vellejus sont moins bien fondez, au
	Contraire il affecte une liberté Phil dez qu’il n’est pas quéstion de Tibere,
	dans l’hist. de la Guerre Civ. entre Pompée et César, on s’aperçoit aisément
	qu’il est du parti du 1er et il ne craint pas de dire “Alterius Divis causa
	melior videbatur, alterius erat firmior ; Il fait aussi un très bel éloge de
	Pompée; Ceux qu’il done à Auguste ne m’ont point paru aussi excessifs
	qu’on les Trouve. Il fait bien voir qu’il n’aprouve point la Proscription
	par ces Paroles Nihil tam indignum illo tempore fuit quam quod aut Caesar
	aliquem proscribere coactus est, aut ab ullo Cicero proscriptus est : Ce qu’il dit
	de la longue resistance que fit Auguste à ses deux Collégues est confirmé par
	le témoignage des autres Auteurs , Ce fût une triste Necessité, mais si nous
	faisons attention à la situation d’Auguste alors, nous conviendrons qu’elle
	etoit très delicate, et qu’il n’y avoit guères moyen qu’il fit autrement.
	Après avoir vû la maniere dont il Vellejus flatte Tibere, on n’est point surpris
	de voir qu’il en fasse autant pour Séjan  quoiqu’il meritat encore moins
	tout ce qu’il en dit, plaignons sa foiblesse, et plaignons son aveuglement
	s’il etoit veritablement son Ami, Puisqu’il y a grande aparence que
	Cette amitié et l’endroit de son Ouvrage ou il en done des preuves,
	l’ont entrainé dans la chûte de ce Ministre Ambitieux. (a)
(a) A propos renvoyez moi S.V.P. mes Lunettes d’aproche.






