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Lettre à Frédéric de Sacconay, Besançon, 15 octobre 1736
de besançonBesançon ce 15e 8breoctobre 1736
ne parlons plus de mon voyage mon cher frédericFrédéric
des que rien ne m'arrétera vous devés juger et par
mon amitié pour vous et par les agréments que
j'ay trouvés chex vous que je ne me feray pas presser,
il est quelque fois malheureux pour les jeunes gens
de trouver de l'argent mais il le seroit encore plus
pour moy a présent de nenn'en pas trouver, mon pere
ne m'a donné que cent pistoles indépandammant
de ma pension pour passer cinq mois a parisParis en homme
qui demande un régimend, il mam'a fallu de nécecessité
faire des dettes, qui me perdroient si elles venoient a
ses oreilles, il vient un age ou pour se faire connoitre
il faut vivre en homme qui a du bien, quand au
superflu quilqu'il peut y avoir dans mon équipage l'on
peut permettre a un homme un valet de chambre
<1v> un laquais et un coureur le reste ne m'a pas couté
grand chose et ne mange rien, le détail vous aura
peutetrepeut-etre ennuyé mon cher mais je le devois a
votre estime que je veux me conserver, et justifier
dans votre coeur
je ne connois point pridauPrideaux, mais permettés moy
de vous dire mon sentiment sur les auteurs historiens, je trouve
les anciens beaucoup plus profitables, les modernes
a force de vouloir rendre leur diction agreable, ecrivent
l'histoire comm'un roman, voyes mimbourgMaimbourg, vertotVertot
voltaireVoltaire, rollinRollin méme quoyque different des autres
touts ces gens la ne satisfont point un curieux qui
a de la mémoire, il vous fournissent tout au plus
de quoy habler devant des ignorants mais vous vous
trouvés si petit devant des scavants que vous plaignés
le temps que vous avés passé a les lire, je ne
prétends pourtant pas vous faire remonter a hérodoteHérodote
a moÿseMoïse a xénophonXénophon, mais cela n'en seroit que mieux
mais l'etude est trop forte pour un homme du monde
mais voyès grégoriolétiGregorio Leti philippePhilippe de comminesCommynes
<2r> et les auttres de ce temps la, vous trouverès dabordd'abord
leur style sec en comparaison de celuy auquel vous
etes acoutumé mais dans la suite vous les gouterés
d'autant plus que vous avés un penchant naturel
pour l'histoire le solide, ce nestn'est pas qu'il nyn'y ait
des faits bien intéressants et plus utiles souvent a
scavoir que ceux du jeune cyrusCyrus, que ces auteur
ne scauroient avoir écrit puisqu'ils se sont passé
aprés eux cestc'est sur cela qu'il faut consulter les modernes
le regne de louisLouis quatorze nous a innondé de bons
et de mauvais auteurs et voicy apeuprèsa peu près le choix
que j'en fais, l'histoire de franceFrance nous conduit jusques
a louisLouis treize, pour le cardinal de richelieuRichelieu les memoires
de monglasMontglat homme en charge a la cour de ce temps
la, ceux du comte de rochefortRochefort un des braves du cardinal
et quelque chose de l'espion turc me conduisent en
sureté, les troubles de la régence me sont décrits par
le méme espion turc, ou du moins une partie des
actions de mazarinMazarin, par le meme marquis de monglasMontglat
les mémoires de Mele de montpensierMontpensier et ceux du
cardinal de retsRetz, ensuitte vient la vie de louisLouis quatorze
qu' dont il ne faut chercher que les époques dans ses histoires
la plupart des faits de guerre de son regne se trouvent
dans feuquieresFeuquières, les mémoires de la régence vous instruisent
de sa fin et du reste, voila a peu prés mon cher jusqu'à la fin de la ligne dommage[...]
la route que jayj'ay tenue pour me garantir djusqu'à la fin de la ligne dommage[...]
<2v> libelles dont bien des gens, vous font des citations
avec autant d'autorité que de l'evangileEvangile, j'en ay
lu un million d'autres mais voila apeupresa peu pres ceux
ou jayj'ay reconnu ce caractere de veritè que vous aimés
josephJoseph est curieux bien des gens l'accusent de partialité
ce nestn'est que sur le rapport du juif errant que je
crois un imposteur parfait adieu tres cher assure de
mes respects tout ce qui t'apartient
mirabeauMirabeau