Transcription

La Harpe, Frédéric-César de, Lettre à Henri Monod, [s.l.], 19 août 1793

19e Aout 17 19 Août 1793

Mon bon ami! Votre Lettre du 8e Juin m'est parvenue, et j'y
ai pondu le 4e Aout; en sorte que si vous n'avez pas ma
Lettre, vous ne tarderez dumoins pas à la recevoir. Il m'en
a couté et beaucoup de vous 1 mot biffure parler de choses qui ne peuvent
certainement pas vous être agréables. mais Le seul regret que
j'aïe est de ne m'être pas expliqué plutôt; mais aussi pourquoi
demeurer sur la réserve à mon égard ainsi que votre famille l'a fait? Je vous
aurois peutêtre rendu moins faciles à conclure, et cela eut été un Bien dans
les circonstances présentes. Ma Lettre vous convaincra, j'ôse l'espérer, mon
cher Monod, que je n'avois pas tous les torts de provoquer de votre part des ques=
tions.

Il devient de jour en jour plus probâble que nous nous verrons bientôt, quoi=
que il me soit impossible d'en assigner l'Epoque précise. En attendant
je cherche dès à présent à m'assurer d'un Manoir à portée de mes Parens et de Vous.
Suivant les apparences je 1 mot biffure'espêre de pouvoir dispôser bientôt de 45000 ou 50000 £ tour=
nois, et je desire m'en assurer la propriété en les employant à acheter
un Domaine, où je puisse vivre en Philosophe cultivateur: à l'abri
des futurs Contingens. J'ai prié mes Parens de prendre sur cet objet des
Renseignemens sérieux et un peu détaillés et vous m'obligeriés si vous pouviez
faire de même, mais afin d'obtenir un prix tolérable, il faudroit pren=
dre ces Informations sans en faire bruit et surtout sans me nomer; car
on voudroit peut être me vendre plus cher qu'à d'autres et cela n'est pas mon
Compte. On dit me marque que les Genevois ont besoin d'Argent: peutêtre qu'il seroit
possible d'acquerir à bon Marché sur leur Territoire. S'il en étoit
ainsi je vous prierois de ne prendre des informations que rélativement
aux Domaines situés sur la rive gauche droite du Lac ou du Rhône, 1 mot biffure et de ne
pas aller au delà de 50000 £ tournois, puisque je ne veux absolument
contracter aucunes Dettes. Il me faut un Domaine susceptible d'amélio=
rations, dans lequel je puisse habiter 8 ou 9 mois, en home modeste: n'é=
tant pas assez opulent pour songer à 1 mot biffure un Domaine de pur
agrément. Si vous découvrés quelques objets semblables, dans ces
Contrées, tâchés d'obtenir des Détails sur la situation, la Nature et les Produits du Sol ainsi que sur la susceptibilité d'améliorations et faites m'en part dès que vous aurez
réussi: je payerai volontiers tout ce qu'il en coutera pour les avoir.
La modicité de la Some dont ci dessus doit vous faire voir, mon bon ami,
que Simplicité est ma Dévise. Tâchés seulement qu'il y ait place pour dans
mon Manoir pour y loger ceux qui m'aiment et qui ne
regardent qu'à la Cordialité de l'accueil. N.B. Il me faut un
Jardin et un Verger à fruits, avec une fontaine
.  Ce sera un
beau jour pour moi que celui où je mettrai les pieds dans cet
Hermitage et pourrai dire Enfin je suis chez moi: Enfin je suis
indépendant. Enfin j'embrasse mes Parens et mon bon ami. Mes
Obéïssances à Me votre Epouse et chez Mr votre Oncle: Que je m'impatiente
de vous voir, de voir votre famille, d'être avec vous, et de vous montrer
que je suis toujours ce même Del'Harpe que vous aimâtes. adieu.


Enveloppe

A Monsieur
Monsieur Monod Docteur
ès Droits, Assesseur baïllival
à Morges Canton de Berne
En Suisse
 


Etendue
intégrale
Citer comme
La Harpe, Frédéric-César de, Lettre à Henri Monod, [s.l.], 19 août 1793, cote BCUL IS 1918/H33, 140. Selon la transcription établie par Lumières.Lausanne (Université de Lausanne), url: http://lumieres.unil.ch/fiches/trans/1121/, version du 18.05.2019.
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