Transcription

Barbeyrac, Jean, Lettre à Jean Alphonse Turrettini, Groningue, 24 avril 1734

A Groningue ce 24 Avril 1734.

C’est, Monsieur, avec une grande joie, que j’apprends par vôtre Lettre du 9 de ce mois, le
mariage de Monsr vôtre Fils. Je vous en félicite de tout mon cœur, aussi bien que
Madame Turrettin, & les Epoux futurs. Je souhaitte que vous jouissiez long tems du plaisir
de voir ce cher Fils goûter les douceurs d’une société, formée à son gré & au vôtre,
& que vous aiyez la consolation de laisser des Descendens, qui perpétuent vôtre nom, après
vous avoir fourni de quoi vous rendre plus supportables les incommoditez, auxquelles
il plaît à Dieu que vous soiyez toûjours sujet. Je prends part aussi au bonheur
de Mr Vernet, & je souhaitte que son Mariage aît toutes les fruits qu’il a lieu de
s’en promettre.

Je suis fâché de voir, par ce que vous me dites des troubles de vôtre Villes, qu’ils
ne sont pas encore entièrement appaisez; mais je comprends aussi, que vous esperez dans
qu’ils finiront bien tôt. Je le souhaitte de tout mon cœur. Pour ce qui est de ma
Lettre à Mr Micheli sur son affaire, j’auroi toûjours un grand chagrin de ce
qu’elle est devenuë publique, contre mon intention. Puis que le mal est fait, je vous conjure
de faire en sorte qu’il paroisse au moins, que c’est sans ma participation & malgré
moi qu’on en a fait un tel usage, dont on auroit bien pû se passer; puis que,
les raisons, que Mrs du Conseil ont à opposer aux Bourgeois Plaignans, étant
1 mot biffure invincibles, selon ce que vous me dites, les espérances que Mr Micheli a
conçuës de cette levée de boucliers, tombent d’elles-mêmes. Encore un coup, je
vous prie qu’on sâche bien, que je n’ai contribué ni directement, ni indirectement,
ni de propos délibéré, ni par connivence, à ce que ma pièce soit sortie des cachettes,
auxquelles elle étoit condamnée.

Mr Barrillot, qui me confirme ce que vous m’apprenez de l’arrivée de l’exemplaire
de mon Pufendorf, ne me dit pas non plus, que vous, si on y avoit joint deux
Estampes à part de mon Portrait. C’étoit au moins mon intention, & on avoit
donné pour cela les ordres nécessaires. Comtant sur l’amitié, dont vous m’honorez,
j’avois cru que vous agréeriez que je prisse la liberté de vous présenter ainsi ma
figure, puis qu’il a plû aux Libraires de la faire courir par le monde.

Je vous rends mille graces de la part que vous prenez au Mariage de
ma fille, qui se consommera demain, s’il plaît à Dieu. La concurrence
de ce Mariage avec celui de Mr vôtre Fils, concourt à m’en faire tirer
un bon augure.

On rimprime la Version du Traité de l’Entendement Humain par Mr Locke.
Mr Coste y joindra un peu plus de remarques critiques, que dans la précédente.
Le Journal Historique, qui étoit une suite déguisé de Journal Littéraire, a discontinué, & il
y a quelque tems que je n’ai rien vû de l’autre suite, qui paroissait sous le véritable nom.
Il doit paroître au prémier jour un nouveau Journal, comme une continuation des Bibliothèques
de Mr Le Clerc, & dont l’Auteur est Mr Durand, Ministre, qui demeure à Londres. Ce
Journal s’imprime à La Haïe. Ce sont toutes les nouvelles litteraires, qui me viennent
dans l’esprit, depuis ma dernière lettre. Je suis toûjours avec mes sentimens ordinaires,
Monsieur, vôtre très-humble & très-obéïssant serviteur

Barbeyrac

J’ai reçu depuis peu, vôtre Abrégé de l’Hist. Eccles. dont
je vous rends mille graces, J’en avois vû assez en Manuscrit, pour savoir ce que je
devois attendre de l’Ouvrage, dans l’état où vous avez pû le mettre depuis.


Enveloppe

A Monsieur

Monsieur Turretin Professeur en
Theologie & en Hist. Ecclésiastique

Genéve


Etendue
intégrale
Citer comme
Barbeyrac, Jean, Lettre à Jean Alphonse Turrettini, Groningue, 24 avril 1734, cote BGE Ms. fr. 484, f. 287. Selon la transcription établie par Lumières.Lausanne (Université de Lausanne), url: http://lumieres.unil.ch/fiches/trans/1023/, version du 10.02.2024.
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