Transcription

Barbeyrac, Jean, Lettre à Jean Alphonse Turrettini, Groningue, 23 février 1732

A Groningue ce 23 Fevrier 1732.

Il y a quelque tems, Monsieur, que j’aurois pû vous apprendre comment je me suis tiré de
la consultation de Mr Mich. Du Crest. Mais je vous avouë que le grand froid qu’il a fait ici
me rendoit paresseux à écrire. Je viens de recevoir depuis deux ou trois jours, vôtre Lettre du 5 de
ce mois; & le changement de la saison me permet de répondre en même tems à cette Lettre, & à
la précédente, que vous eutes la bonté de dépêcher si promtement. Avant que d’avoir reçû celle-ci,
mon parti étoit déja pris. J’avois examiné à loisir les longs Mémoires du Consultant; & son
exposé seul me suffisoit pour le condamner. De l’humeur, dont vous le connoissez, vous pouvez juger
que mon silence l’intriguoit beaucoup. Je reçûs une autre Lettre de lui par un Marchand d’Ams=
terdam. Comme j’attendois encore vôtre réponse, je lui écrivis un mot, pour lui dire simplement
que j’avois bien reçû son paquet, mais que des occupations & ordinaires, & extraordinaires,
ne m’avoient pas encore permis de lui répondre; & qu’aussi tôt qu’il me seroit possible, je
lui dirois mon avis sur son affaire. Dans cette même Lettre, il me disoit, qu’il m’avoit envoié
par une personne de la suite du Duc de Lorraine, & à l’adresse du Secretaire de l’Empereur à La
Haïe, un exemplaire des Edits de Genéve, qu’il me prioit de mettre dans ma Bibliothéque. Je
lui répondis, comme il étoit vrai, que je n’avois point entendu parler de ce paquet, quoi que, selon
ce qu’il disoit, on dût l’avoir à La Haie depuis quelque tems. Une réponse si sêche ne devoit
pas lui faire concevoir de grandes espérances. Cependand il s’imagina là-dessus, que j’étois tout
disposé à entrer dans ses vuës: & il crut apparemment que mon retardement venoit de ce
que je craignois de n’être pas recompensé, ou de ce que ma Faculté ne vouloit pas approuver mon
avis sans avoir des assûrances de ce qu’il lui en reviendroit. Il s’avisa donc de m’envoier, dans
une autre Lettre, un billet de change, pour les frais, disoit-il, de la Consultation; quoi que du
reste il témoignât que c’étoit mon avis seul qu’il ambitionnoit, & dont il se contenteroit, s'il ne
jugeoit, à propos, pour d’autres raisons, que le tout passât sous le nom de la Faculté. Dans le tems que je
reçûs cette Lettre, j’étois après à dresser mon Avis, bien différent de ce à quoi il s’attendoit.
Aussi tôt qu’il fût prêt, je le remis à la poste. Sans perdre des paroles, & sans rien omettre
néanmoins de tout ce qu’il disoit pour défendre sa cause, je lui fis voir, en emploiant huit
pages de mon écriture, qu’il étoit tout-à-fait dans le tort pour le fond de l’affaire; qu’on
en avoit agi avec lui d’une maniére où il n’y avoit rien à redire, & que ne n’y voiois rien,
ni qui excédât le pouvoir des deux Conseils, Grand & Petit, ni qui marquât aucun dessein de
lui faire des affaires sans un sujet légitime; qu’il avoit en quelque maniére, par son obstination,
forcé ses Supérieurs à en venir contre lui à des extrémitez fâcheuses: mais qu’après tout, quand
même il a auroit eû quelque irrégularité dans les Procedures, (à quoi se réduit presque tout ce qu’il
dit) la voie d’Appel au Conseil General ne pouvoit lui être ouverte, sans renverser la constitution
de vôtre Gouvernement. Pour lui faire voir que je n’agissois par aucun motif d’intérêt, je lui
renvoiai sa Lettre de Change, ajoûtant que je n’en aurois pas été maître si j’avois communiqué
l’affaire à ma Faculté, qui, à ce que je croiois, n’auroit pas été d’autre sentiment que moi. Je voulus
ainsi risquer d’y être & pour mes peines, & pour les frais que j’avois faits. En finissant, je
tâchai de le prendre par la vuë de son propre intérêt, & du peu de ressource qu’il devoit voir
lui-même dans les moiens violens qu’il vouloit mettre en usage. Je lui dis, que si un Ami, si un
Frére, se trouvoient dans le même cas que lui, je leur conseillerois de prendre de tout autres
<1v> mesures: que son expérience devoit lui avoir appris, qu’il ne fait pas bon lutter avec plus
fort que soi: qu’il seroit tems de tenter les voies de la douceur & de la soumission &c. Il fut
bien surpris, comme vous pouvez vous imaginer, d’une telle réponse. Cependant il se piqua d’honneur
pour ce qui étoit de la Lettre de Change; il me la renvoia, me priant de l’accepter comme un
foible dédommagement des précieux momens
&c. Mais du reste il 1 mot biffureparut inébranlable dans ses
idées. “Je puis vous assûrer (me dit-il), que rempli de respect autant qu’on peut l’être pour vos
sentimens, j’ai retourné les miens en tout sens dans la vuë de les y assujettir: mais j’ai éprouvé
dans cette occasion que cela surpasse les forces humaines. Il est vrai que je ne vous en avois tracé
qu’un foible craion &c. Aprés cela, il voulut dire quelque chose contre le contenu de ma
Lettre: mais rien ne touchoit au fait de la question; & j’ai compris par là, que quelque pleine
persuasion de son droit
qu’il témoigne encore avoir, je lui ai donné beaucoup à penser, & que je l’ai
promené dans des païs qui lui étoient inconnus. Aussi en lui répondant, pour lui accuser la
reception & l’acceptation de la Lettre de change, je ne lui ai pas répondu un seul mot sur le reste;
me contentant de lui dire, que je n’avois garde de prétendre qu’il se rangeât absolument à mon
avis; que c’étoit son affaire, & non pas la mienne: que j’aurois souhaitté pouvoir lui donner un
Avis, conforme à ses désirs, mais que j’avois cru au moins lui rendre service, autant qu’il étoit
possible, quoi que d’une autre maniére que celle qu’il auroit souhaitté. Ainsi j’en suis demeuré-là.
J’ai seulement à lui renvoier par la prémiére occasion un exemplaire des Edits de Genéve; car il
faut savoir que, dans l’impatience de recevoir mon Avis, & dans l’espérance mal fondée de le recevoir
tel qu’il le desiroit, il m’avoit envoié un autre exemplaire de ce Livre par un Marchand qu’il
trouva partant en poste pour Amsterdam. En voilà assez sur ce sujet. J’espére, Monsieur, que
vous ne desapprouverez pas ma conduite. Au reste, comme par tout ce que j’ai dit à Mr
Mich. il ne sauroit soupçonner le moins du monde que je fusse informé de son affaire autrement
que par lui-même; je vous réitère aussi la priére que je vous ai faite de ne point parler de
tout ce que je vous ai appris; quoi que l’homme de question ne m’aît rien recommandé là-dessus:
mais je hai tout ce qui pourroit avoir la moindre apparence de trahison. Si je n’ai pas
réussi à le desabuser de sa prévention & à lui faire prendre des résolutions plus modérées, je crois
au moins lui avoir fait perdre l’envie d’aller consulter aucune autre Faculté. Je lui dis expressément,
que, quand même d’autres Jurisconsultes, sur la lecture de ses raisons, y trouveroient quelque vraisemblance,
je doutois fort qu’aucun voulût prononcer sans avoir observé la régle de l’Audi & alteram partem;
sur tout s’agissant d’une Cause qui ne pouvoit que paroître interesser des personnes des plus
distinguées de Genéve, & dont la décision dépendoit d’une exacte connoissance de la constitution de
la République &c.

Je reçûs, Monsieur, un peu tard, la seconde Partie de vôtre Traité de la Relig. Chrét. Cela est
cause que l’Extrait n’en put être prêt pour les mois d’Octobre, Nov., Dec. de la Bibliothéque
Raisonnée
. J’espére qu’il sera dans ce qui s’imprime présentement. l’Extrait au moins est envoié.
J’ai appris qu’à Genéve quelques personnes avoient attribué, je ne sai sur quel fondement, l’Extrait de
la prémiére brochure à Mr de la Chappelle. Cela fait voir, combien les gens se trompent à vouloir
déviner en fait d’ouvrages anonymes. On ne pensera pas de même de l’Extrait de l’Histoire de
Genéve
. J’ai reçû une Lettre de Mr Leger, dont je vous parlerai plus bas, dans lequel il me remercie
pour sa part de cet Extrait, que vous avez, me dit-il, mis dans vôtre Journal. C’est ainsi que parloient
les Libraires en m’envoiant le Livre même; comme si j’étois l’unique Auteur de ce Journal, ou du
moins le Directeur; quoi qu’aucun de ceux qui y mettent quelque chose ne connoisse les autres que
par conjecture.

Je n’ai aucune occasion de faire parvenir l’avis dont vous me parliez au sujet des Collectes
faites pour les Vaudois. J’en écrivis à Mr de la Motte: mais il ne m’a rien répondu là-dessus, &
<2r> je doute qu’il aît plus d’occasion que moi. J’ai ouï dire qu’un Ministre Flamand avoit
prêché avec passion contre la mauvaise administration qu’il prétendoit qu’on avoit faite des
deniers provenus de ces sortes de Collectes, & qu’il avoit été déposé pour cela. Je ne sai si cela est
vrai, ni ne me souviens point dans quelle Ville de Hollande on disoit qu’il étoit Ministre.

Je suis bien aise que mon Extrait de l’Histoire de Genéve ne vous aît pas déplu, & que
les principaux de Messieurs vos Magistrats en paroissent contens. Je me suis fait un plaisir d’embrasser
cette occasion pour vous témoigner combien je m’intéresse au bien & à l’honneur de vôtre Etat.

Je ne savoit pas la mort de l’excellent Magistrat, que vous avez perdu. Quoi qu’il soit
mort rassasié de jours, cette perte ne peut qu’être sensible à tous ceux qui ont eû l’honneur de
le connoître, & en mon cas particulier je le regrette beaucoup. Je suis persuadé que l’Eloge que
Mr Vernet en a fait, est aussi peu flatté, que bien tourné. Je verrai s’il y a moien d’en
dire quelque chose dans les Nouvelles Litteraires de la Bibl. Raisonnée. Il pourroit y être inseré
tout entier, s’il n’étoit déja incorporé dans le Journal qui se publie chez vous. Il est là bien
placé, pour éviter le sort des brochures. Cette Bibliothéque Italique se fait estimer de plus en plus.
Je crois y distinguer les Extraits de Mr Vernet de ceux qui parlent d’une autre main, comme
s’il mettoit son nom à chacun.

Je n’ai pas beaucoup de nouvelles litteraires à vous apprendre de ce païs d’autant moins que
les Canaux commencent seulement à s’ouvrir. Vous aurez peut-être vû les Mémoires de l’Abbé
Montgon, où le Cardinal de Fleuri est fort mal traité. Ils ont été imprimez en Hollande, sous le
faux titre de Liège. Il devoit y en avoir une suite: mais, à la sollicitation du Marquis de Fénelon,
on a défendu aux Libraires de l’imprimer. Le Livre est peu de chose, & très-mal écrit. Il paroît une
nouvelle Edition de l’Histoire des Chevaliers de Malte, par l’Abbé de Vertot, en 5 volumes in
octavo
; augmentée des Statuts de l’Ordre, & d’une longue Liste des noms & armes des Chevaliers.
On a traduit en François un Catéchisme Raisonné d’un Lord, dont Mr Le Clerc avoit donné
l’Extrait au Tome IX de la Bibl. Universelle. La Bibliothéque Belgique continuë. J’ai sû, que
l’Auteur en est un Ministre de la Brille, nommé Fernandez, fils d’un Proselyte Espagnol.
J’attens au prémier jour la Vie de Mahomet, en 2 voll. par Mr Gagnier, dans laquelle le
Livre du Comte de Boulainvilliers sur ce sujet est refuté. Je ne sai si elle est traduite de
l’Anglois, ou du Latin.

Mon grand Pufendorf, après avoir langui sous la presse depuis plus de quatre ans, par la
négligence & l’obstination du Libraire, est en train, ce semble, de tendre à la fin, quoi qu’encore assez
éloignée. La mort du Libraire a donné occasion de hâter cette impression. Le Fils de sa Femme, qui
garde la boutique, acheta fort cher cette Copie, avec celles de Grotius, & du petit Pufendorf, dans
l’auction des effets du Défunt. Il a depuis continué l’impression, de sorte que les 4 prémiers Livres, qui
achèvent le 4 Volume, sont achevez. Mais il est survenu une autre cause de retardement. Les
caractères étoient usez, il a fallu en fondre de nouveaux pour le II. Volume. En attendant qu’ils
soient prêts, on imprime la grande Préface, dont il y a trois feuilles: elle auroit pû être achevée,
sans la mort de l’imprimeur; autre contretems. On promet de faire désormais toute la diligence
possible. Les Libraires de Bâle avoient commencé d’imprimer, il y a long tems, la 2. Edition. On dit
que présentement ils l’ont suspenduë & qu’ils n’en avoient que 30 ou 40 feuilles d’imprimées. Ils
en seroient mauvais Marchand; car mon Edition a plus de cent feuilles d’additions pour les
IV prémiers Livres; sans compter la revision du stiles, les changemens, corrections &c. La proportion
des additions sera pour le moins la même dans le II Volumes; & d’ailleurs les trois derniers
Livres étoient demeurez presque comme dans la I. Edition, parce que je fus alors appellé à Lausanne,
pendant que la presse rouloit pour la Seconde.

<2v> A l’égard du Supplément du Corps Diplomatique, je vous dirai qu’il s’en faut bien que cet ouvrage
soit aussi avancé que les Libraires l’ont publié dans leur Avertissement. Il se donnérent la liberté, selon
leur coûtume, de changer ou ajoûter ce qu’il leur plut dans le Mémoire que je leur avois envoié, pour
donner une idée de mon plan; & je fus sur tout bien fâché des louanges impertinentes qu’ils me
jettérent par la tête. Cependant la partie principale de cet Ouvrage s’avance. J’en suis pour ce Recueil
de Traitez
, vers le milieu du VI Siécle; & je m’arrêterai à Charlemagne, où commence la
vaste Collection du Corps Diplomatique. Mais après être même venu là, il y aura beaucoup à faire
pour la revision, parce que, pour ne pas embrasser trop de choses à la fois, je ne m’attache qu’au
principal; je ne pense ni au stile, ni aux Notes, ni à bien d’autres choses, que je laisse tout
exprès, afin de faire chemin; en un mot, ce n’est encore proprement qu’une espèce de canevas, mais
qu’il me sera en suite aisé de remplir, quelque pénible que soit toûjours la tâche que je me suis
imposé. Je m’y suis engagé insensiblement, sans prévoir combien je me taillois de besogne. Mais
m’étant embarqué, & aiant poussé assez loin, il n’y a plus moien de reculer.

Je ne saurois vous dire ce que c’est c’est que cette Histoire des Papes, qui, selon qu’on l’a annoncé,
s’imprime par souscription. Je n’ai pas vû le Programme qu’il me semble qu’on en a publié; &
personne ne m’a appris qu’on eût bonne opinion d’un projet aussi délicat, que celui-là. Cela
me fait croire, qu’il vient de quelques-uns de ces avanturiers, qui en imposent aux Libraires,
que l’espérance du gain rend fort crédules.

Je reçûs la semaine passée une Lettre de Mr Leger, qui m’en envoioit une autre que l’on
m’écrit au nom du Synode des Vallées. J’ai commencé à agir, pour obtenir ce que l’on demande. En
attendant que je puisse répondre à ces Messieurs, aiyez la bonté, Monsieur, de dire à Mr Leger ce que
j’ai pû savoir jusqu’ici touchant cette affaire. On souhaitte une place pour un Etudiant Vaudois dans
nôtre Université.; & on en parle comme si c’étoit un bénéfice fixe & ordinaire qui eût été accordé aux
Etudians des Vallées, mais dont on a négligé de jouïr depuis le tems de Des Matets. On en a appelle là-dessus
à la matricule. J’ai fait chercher dans les Registres des Curateurs; & on a bien trouvé le nom d’un
Sahier, & un autre encore dont je ne me souviens pas: mais tout ce qu’on en dit, c’est qu’on leur
accordoit la Table franche que la Province donne à un certain nombre d’Etudians, sans que néanmoins
aucun, ni même les Hongrois, qui sont plus privilégiez, aît aucun droit particulier, & dont il puisse
être assûré de jouïr aussi tôt qu’il est arrivé ici. Il faut 1 mot biffure qu’il y aît quelque vacance; & alors
il y a d’ordinaire bon nombre de postulans; car, au delà du nombre fixé, les autres n’ont que la
moitié du bénéfice, c’est-à-dire, qu’ils paient à l’Econome quinze florins tous les trois mois;
& ils doivent en compter l’argent d’avance, ou donner un Répondant. Pour ce demi bénéfice, il est
aisé de l’obtenir, il y a d’ordinaire assez de vacances, & le Recteur même peut le donner sans l’appro=
bation des Curateurs. Du reste, aucun n’est logé; il faut aller manger à la Table Publique, & Dieu
sait quelle Table c’est. Nous avons perpétuellement des plaintes, sans que jamais on aît pû venir
à bout de reprimer entiérement l’avarice sordide de l’Econome. Ainsi je crains bien que Messieurs
des Vallées ne se fassent une idée beaucoup trop haute de l’avantage qu’ils veulent procurer à quelcun
de leurs Etudians. Deux jours après que j’eus reçû leur Lettre, je la communiquai au Sénat Acadé=
mique, & il fut résolu unanimément de faire tout ce qu’on pourroit en leur faveur: On résolut, que
le Recteur Magnifique, & moi, en irions parler aux Curateurs: mais comme la Régence change dans cette
saison, & en même tems les Curateurs, il faut attendre que les nouveaux soient entrez en charge. Cependant
je ne crois pas qu’on puisse compter sur autre chose que sur ce que je vous ai dit; & je doute
que les Etudians des Vallées, qui ont été ici autrefois, aient eû rien de plus, ni de plus fixe. On devroit
<3r> en tout cas nous fournir des indications, qui pussent justifier le privilège. Mais s’il y en avoit eû
quelcun de tel, je m’imagine que les Hongrois, qu’on a toûjours beaucoup favorisez, n’auroient pas manqué
d’en demander un semblable.

Mr Le Clerc est toûjours dans le même état, quoi qu’il se porte assez bien pour le corps.
Il méconnoit quelquefois sa propre Femme.

La paix étoit en quelque maniére rétablie à La Haie entre les Ministres & le reste du Consistoire:
mais un nouvel incident a renouvellé les animositez; c’est l’accusation que Mr Dumont, Ministre à
Rotterdam, intenta il y a quelque tems contre Mr Frescarode, homme des plus vifs, & Chef de la
Cabale Anti-Sauriniste. On prétendoit, qu’étant Secretaire au Synode de La Haïe, il avoit raié quelque
chose dans un Article. Le Consistoire de Rotterdam donna une Déclaration en sa faveur, qui a été
imprimé. Là-dessus l’Eglise de Leide s’est soûlevée, & a fait imprimer une Lettre contre cette Déclara=
tion. Voilà de l’occupation pour le Synode Pochain.

Je ne sai si j’oublie quelque chose: mais je suis obligé de finir, pour ne pas perdre cette
poste. Je le fai en vous remerciant, aussi bien que Madame TurrettinMr vôtre Fils, & Mr
Vernet, des vœux obligeans que vous faites pour moi à l’occasion de la nouvelle année. J’en
fais continuellement, & des plus sincères, pour vôtre conservation, & pour celle de tout ce qui
vous appartient. J’assûre de mes très-humbles respects Madame Turrettin. Et j’apprens avec
plaisir que vous pensez à faire voiager Mr vôtre Fils avec Mr Vernet. J’espére que
cela me procurera l’honneur de les voir, quand la suite de leurs voiages les amenera dans
nos Provinces. Je vous prie de leur bien recommander, qu’ils fassent ici un voiage, qui ne les
détournera pas beaucoup des endroits où il y a quelque chose qui attire la curiosité des
Voiageurs. Je les y recevrai le mieux que je pourrai; & je leur aurai d’autant plus d’obligation
de leur visite, que je la prendrai toute pour moi. Je suis, Monsieur, avec mes sentimens
ordinaires, Tout à vous

Barbeyrac


Enveloppe

A Monsieur

Monsieur Turretin Professeur en
Theologie & en Histoire Ecclésiastique

amsterdam A Genéve


Etendue
intégrale
Citer comme
Barbeyrac, Jean, Lettre à Jean Alphonse Turrettini, Groningue, 23 février 1732, cote BGE Ms. fr. 484, ff. 273-275. Selon la transcription établie par Lumières.Lausanne (Université de Lausanne), url: http://lumieres.unil.ch/fiches/trans/1014/, version du 10.02.2024.
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