Fiche biographique

Constant, Benjamin (1767 - 1830)

Naissance
25.10.1767 à Lausanne
Décès
08.12.1830 à Paris
Confession
Protestant
Lieu d'origine
Lausanne
Nationalité
Suisse
Etat civil

Fils de Louis-Arnold-Juste Constant de Rebecque, officier au service de Hollande, et d'Henriette née de Chandieu, morte en couches. Épouse en 1789 Wilhelmine (Minna) von Cramm, dame d'honneur de la duchesse de Brunswick, puis en secondes noces en 1808 Charlotte de Hardenberg, divorcée, nièce de Karl August, premier ministre du roi de Prusse.

Biographie

"C. reçut une éducation assez décousue au gré des fantaisies de ses précepteurs et des séjours à l'étranger où il suivait son père.

Enfant doué et précoce (il écrivit un roman à 12 ans, Les Chevaliers), il fréquenta tôt les universités européennes (Oxford 1780, Erlangen 1782, Edimbourg 1785), mais son instruction souffrit d'un manque de continuité et de direction. En 1787, à Paris, il rencontra Isabelle de Charrière, qui sut reconnaître ses talents et le guida dans ses premiers travaux. Pour tenter de fixer ce jeune homme fantasque, son père lui trouva une place de chambellan à la cour de Brunswick. Ce séjour allemand (1787-1794), après une vie parisienne excitante et une escapade heureuse en Angleterre, ennuya beaucoup C., d'autant qu'un mauvais mariage se termina par un divorce en 1794. Le jeune démocrate, d'abord enthousiaste de la Révolution puis dégoûté par la Terreur, eut du mal à supporter la vie morose d'une petite cour réactionnaire. Cependant, outre la connaissance de la langue, ces années ne furent pas que négatives: il se lia avec Jacob Mauvillon, l'ami de Mirabeau. Surtout, en défendant son père aux prises avec la justice militaire hollandaise et bernoise, il acquit une formation de juriste et de polémiste qui fut un atout pendant toute sa carrière.

En septembre 1794, à Lausanne, C. rencontra Germaine de Staël. Il devint vite un inconditionnel de la baronne, qu'il accompagna au printemps 1795 à Paris. Grâce au salon et aux relations de son amie, il débuta dans la politique du Directoire, se faisant connaître comme un habile défenseur des républicains modérés. Il publia en 1796 De la force du gouvernement actuel et de la nécessité de s'y rallier; en 1797, Des réactions politiques et Des effets de la Terreur; en 1798, Des suites de la contre-révolution en Angleterre et acheva presque une traduction de l'ouvrage de William Godwin sur la justice politique. A cette activité de propagandiste et de pamphlétaire, il faut ajouter celle d'agent municipal à Luzarches, au nord de Paris, où il avait acquis un bien national, l'ancienne abbaye d'Hérivaux.

Les coups d'Etat du Directoire avaient convaincu C. de la nécessité d'une révision profonde de la Constitution de l'An V. Rallié aux brumairiens, il se rendit compte très vite que le dernier coup d'Etat profitait plus à Bonaparte qu'à la République. Il tenta, comme membre du Tribunat, d'engager le régime dans la voie du parlementarisme à l'anglaise. Mais ni les institutions consulaires, ni la mentalité des Français, fatigués par dix ans de luttes, ne pouvaient accepter l'idée d'une opposition au pouvoir d'un général considéré comme le sauveur de l'Etat. C. et quelques autres "idéologues" furent exclus du Tribunat en 1802. Commença alors pour C. une traversée du désert qui dura jusqu'en 1813. Il suivit Mme de Staël dans son exil. Lassé par cette liaison, il décida d'y mettre fin après de nombreuses tergiversations et se maria en 1808 avec Charlotte de Hardenberg qu'il avait connue en 1793 en Allemagne. Malgré cette union, il demeura auprès de Mme de Staël jusqu'en 1810, date à laquelle il partit pour l'Allemagne. Cette période, agitée sur le plan sentimental et matrimonial, dont le roman Cécile (et dans une certaine mesure aussi Adolphe) rend bien compte, fut aussi très féconde sur le plan littéraire: un récit autobiographique (Ma Vie), des Journaux intimes, une tragédie inspirée de Schiller, Wallstein, des traités politiques (Sur la possibilité d'une constitution républicaine, 1803; Principes de politiques, 1806), sans oublier, en plus d'articles et de comptes rendus, la poursuite d'un travail sur les religions.

Après Leipzig (1813), C. se lance à nouveau dans la bataille politique en publiant De l'esprit de conquête et de l'usurpation, pamphlet qui prépara les esprits à la chute de l'empereur. De retour à Paris en 1814, après avoir milité en faveur de la candidature de Bernadotte au trône de France, C. se rallia à la Charte octroyée par Louis XVIII. Pensant que le régime importait moins que les institutions garantes de la liberté, il estima pouvoir soutenir les Bourbons dans la mesure où la Charte serait respectée. Tout son combat de la Restauration consistera à veiller à ce que les ultras ne violent pas ce dernier rempart du libéralisme politique face à la réaction. C'est dans le même esprit qu'il crut bien faire en se ralliant à Napoléon lors des Cent-Jours; là aussi la promesse d'une constitution encore plus libérale que la Charte le décida à travailler pour un homme qu'il avait jusque là abhorré.

Cette conduite politique, qui fit tant pour le discréditer, trouva grâce devant Louis XVIII, si bien qu'après un éloignement passager en 1815 et 1816, C. put revenir en France et devenir le maître à penser de l'école libérale. Par ses articles dans la presse, par son activité débordante à la Chambre (1819-1822, 1824-1830) enfin par ses publications (Cours de politique constitutionnelle, Mémoire sur les Cent-Jours, Mélanges de politique et de littérature, De la religion), il exerça une influence considérable non seulement en France mais auprès de tous les mouvements d'émancipation européens. Ce succès populaire se manifesta lors de ses funérailles, le 12 décembre 1830, lorsqu'une foule immense accompagna son cercueil au Père Lachaise. Il avait vécu assez longtemps pour voir l'arrivée au pouvoir de Louis-Philippe et l'avènement de la bourgeoisie libérale. Ses dernières interventions à la tribune montrent pourtant qu'il entendait conserver son rôle d'opposant critique à l'endroit d'un régime qu'il avait appelé de ses vœux."
(source : extrait tiré de E. Hofmann, "Constant, Benjamin (de Rebecque)", in Dictionnaire historique de la Suisse, version du 10.08.2005)

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