Fiche biographique

Gibbon, Edward (1737 - 1794)

Naissance
08.05.1737 à Putney (auj. dans Londres)
Décès
16.01.1794 à Londres
Confession
Protestant
Lieu d'origine
Nationalité
Anglais
Etat civil

Fils d'Edward et Judith Gibbon. Cinq frères et une soeur, tous morts en bas âge. Son grand-père se prénomme également Edward. Célibataire.

Biographie

Edward Gibbon arrive à Lausanne en juin 1753. Né en 1737 à Putney, au sud de Londres, il est le seul enfant parvenu à l’âge adulte d’Edward et Judith Gibbon. Son grand-père, également prénommé Edward, avait fait fortune à la bourse, laissant à sa famille un patrimoine suffisamment important pour lui permettre de vivre confortablement de ses rentes. À l’âge de 15 ans, Gibbon est envoyé au Magdalen College d’Oxford où, au grand dam de son père, il se convertit à la foi catholique. Cette initiative vaut au jeune Gibbon de se retrouver placé, à l’âge de 17 ans, auprès du pasteur protestant Daniel Pavillard et de sa femme dans leur maison de la rue Cité-Derrière, située non loin de la cathédrale de Lausanne. Gibbon passera les cinq années suivantes sous le toit et la tutelle de Pavillard. S’il se souviendra plus tard de son premier séjour lausannois comme d’une période de privations, symbolisée par la mauvaise humeur de Mme Pavillard et sa nappe toujours sale, ce séjour est aussi et surtout celui de son éveil intellectuel. Cette petite ville que Gibbon avait perçue de prime abord comme un trou perdu était au contraire un lieu dynamique, pleinement intégré dans les réflexions intellectuelles qui avaient alors cours en Europe. Si l’éducation du jeune Anglais à Lausanne ressemble à celle des visiteurs qui l’ont précédé, il se distingue clairement par son zèle intellectuel. En plus de perfectionner son latin et d’apprendre le grec, Gibbon étudie assidûment les travaux des historiens anciens et modernes français, italiens, anglais et suisses. Il compose ses propres tableaux chronologiques et entame des relations épistolaires savantes avec des érudits suisses. C’est à cette époque qu’il s’intéresse à l’histoire civile suisse et étudie les vestiges de l’ancienne province romaine de l’Helvétie. Lors de ce séjour, il noue des liens d’amitié très forts, par exemple avec le Lausannois Georges Deyverdun, et tombe même sous le charme de la fille d’un pasteur vaudois, Susanne Curchod, future épouse du ministre français des finances, Jacques Necker. Gibbon retournera en Angleterre en 1758, certes reconverti au protestantisme comme l’avait exigé son père, mais devenu désormais un jeune érudit humaniste pleinement formé, comme le montre l’Essai sur l’étude de la littérature dont il commence la rédaction à la fin de son premier séjour et qui est publié avec succès en 1761.

Gibbon revient à Lausanne le 25 mai 1763. Ce qui devait n’être qu’une escale de son voyage vers Rome durera finalement jusqu’au 18 avril 1764. Il loge cette fois à la pension Crousaz de Mézery, dans l’élégante rue de Bourg. Ce pied-à-terre lui donne accès à la haute société lausannoise : le jeune lettré devient membre du Cercle de la rue de Bourg, un club masculin réservé à la noblesse, fréquente les salons, au public mixte mais le plus souvent tenus et animés par des femmes. Il participe presque quotidiennement à des assemblées où le plaisir de la conversation cède le pas aux parties de whist, de piquet ou d’autres jeux d’argent. La résidence baillivale du château Saint-Maire, situé derrière la cathédrale, s’ouvre aussi à lui, les représentants successifs du souverain bernois, nommés pour six ans, ayant toujours tenu leur demeure relativement ouverte aux membres des grandes familles lausannoises et aux étrangers de marque. Ce deuxième séjour marque un nouveau développement dans l’évolution intellectuelle de Gibbon et doit avant tout être considéré comme la période où il passe du statut d’homme de lettres et de critique littéraire à celui d’historien, un changement que sa précédente confrontation avec les débats historiographiques des années 1750 avait préparé. Une grande partie des onze mois passés à Lausanne est en effet consacrée à l’acquisition d’une compréhension critique de la géographie et de la topographie de la Rome antique grâce à l’étude attentive de Roma Vetus de Nardini et d’Italia Antiqua de Cluver. Les satires de Juvénal et d’Horace lui permettent de connaître les mœurs romaines, tandis que Spanheim lui fournit des informations sur la numismatique du monde antique. Si l’esprit de Gibbon se focalise sur le passé, il demeure un observateur attentif du présent, notamment de la situation politique et économique du Pays de Vaud et de ses relations avec Berne. Dans sa Lettre sur le gouvernement de Berne, qui sera publiée après sa mort par son ami Lord Sheffield, l’historien compare le traitement paternaliste de Berne envers ses sujets francophones à la façon dont Rome avait traité ses alliés avant le début des guerres sociales. Il tourne en ridicule ceux qui pensent qu’une faible imposition et la non-intervention politique équivalent à la liberté politique, une position qui, après la révolution vaudoise de 1798, lui valut la réputation d’un critique précoce et particulièrement incisif de Berne.

Quelles que soient les réserves que Gibbon ait pu avoir pendant son second séjour, lorsqu’il retourne à Lausanne en 1783, il semble parfaitement satisfait de la situation vaudoise. Après une carrière politique relativement courte en tant que membre du Parlement et face à la perspective de difficultés financières engendrées par son style de vie à Londres, il cède aux instances de son ami de jeunesse Georges Deyverdun qui l’invite à vivre à la Grotte, une grande maison située au sud de Saint-François. Gibbon arrive désormais à Lausanne en tant que personnalité à la réputation internationale, auréolé de l’immense succès rencontré par son grand œuvre The Decline and Fall, dont les trois premiers volumes sont déjà publiés. Une fois installé chez son ami Deyverdun, Gibbon devient rapidement une figure incontournable de la sociabilité lausannoise. Il noue de nouvelles amitiés, en particulier avec Catherine et Salomon de Charrière de Sévery et leur fils Wilhelm, qui accompagnera l’historien lors de son voyage à Londres en 1787. Après la mort de Salomon de Sévery, Gibbon devient le confident de Catherine et il laissera aux Sévery la garde de la Grotte lorsqu’il retourne en Angleterre en 1793. Lors de ce troisième séjour, la maison de la Grotte et son magnifique jardin – l’un des premiers de style anglais de la région – sont le centre de l’activité de Gibbon. Entouré de ses livres et des objets qu’il a apportés d’Angleterre, Gibbon suit une routine quotidienne méticuleuse, séparant strictement le temps consacré à l’étude du reste de la journée qu’il passe à recevoir des amis ou à leur rendre visite. Gibbon répond aux nombreuses invitations en organisant dîners, bals et concerts à la Grotte. C’est là qu’il accueille une série de personnalités, désireuses de converser avec lui. Au début des années 1790, ses problèmes de santé liés à son obésité s’aggravent. À la nouvelle de la mort, en 1793, de l’épouse de Lord Sheffied, Gibbon n’hésite pas à retourner en Angleterre pour réconforter son ami en deuil. Il s’agira de son dernier voyage puisqu’il meurt à Londres, en janvier 1794, des complications dues à une intervention chirurgicale censée le soulager d’une hydrocèle très handicapante. Sa mort consterne son cercle d’amis lausannois. Il n’y a pas jusqu’à l’ancien bailli, Gabriel von Erlach, qui ne souligne l’impact de sa disparition sur le chef-lieu vaudois.

Extrait tiré de l'introduction dans Béla Kapossy et Béatrice Lovis (dir.), Edward Gibbon et Lausanne. Le Pays de Vaud à la rencontre des Lumières européennes, Gollion, Infolio, 2022. Introduction disponible intégralement sur le projet "Edward Gibbon et Lausanne".

Commentaires sur son oeuvre/ses écrits
Fonctions publiques et privées
Sociétés et académies
  • Académie - Lausanne
  • Cercle de la Palud - Lausanne (1766-1843)
  • Cercle de la Rue de Bourg - Lausanne (1761-1803)
Note

  Public

Iconographie:
- Musée historique de Lausanne: divers documents liés à G. (gravures, dessins, objets).
- Musée cantonal des Beaux-Arts de Lausanne: portrait de G. au pastel de Piot.

Fonds d'archives

Archives cantonales vaudoises (ACV), Fonds P Gibbon;

Archives cantonales vaudoises (ACV), Fonds P Charrière de Sévery;

Archives cantonales vaudoises (ACV), Fonds P Guise;

Archives cantonales vaudoises (ACV), Fonds P Dyverdon;

Archives cantonales vaudoises (ACV), Fonds PP 833;

Archives de la ville de Lausanne (AVL), Fonds Grenier, P 224;

Bibliothèque cantonale universitaire, Lausanne (BCUL).

Ecrits non publiés
Publications
Littérature primaire
Littérature secondaire